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LE MASSON


fut expressément condanmé par l’Inquisition d’Espagne.

Un autre écrit spirituel de dom Le Masson l’amena à prendre position dans l’alïaire du quiétisme, Direction pour se former au saint exercice de V Oraison, etc., La Correrie(et Grenoble), 1695. Cette Direction est le développement d’une instruction imprimée depuis 1672 et plusieurs autres fois dans V Introduction et dans les traductions des Statuts des frères. Mais le fameux Moyen court de Mme Guyon ayant pénétré dans deux monastères de religieuses chartreuses, dom Le Masson compléta son ouvrage en exposant la saine doctrine sur les divers états d’oraison. Son traité reçut les approbations du cardinal Le Camus, évêque de Grenoble, et de Mgr d’Aranthon d’Alex, évêque et prince de Genève, qui connaissaient parfaitement Mme Guyon le P. Lacombe et les effets déplorables de leurs doctrines. Un passage de l’approbation du cardinal vise spécialement Mme Guyon et condamne sa prétendue mission. Ce blâme était suivi de l’éloge de l’opuscule du chartreux qui était l’antidote des enseignements de Mme Guyon. a Le petit traité qui a pour titre : Direction. .. est très solide et fort propre pour désabuser les commençants des illusions de ces oraisons d’abandon et d’oisiveté et pour les conduire dans la voie roiale de l’oraison. Il est conforme à l’esprit et à la pratique de l’Église, qui désaprouve toutes ces spiritualitez nouvelles. Telle est la spiritualité de l’Église qui est renfermée dans ce petit traité que nous approuvons, etc. » — L’ouvrage de dom Le Masson, se répandit promptement. L’édition fut épuisée en fort peu de temps, et l’auteur fut obligé de la réimprimer l’année suivante. Cette nouvelle édition était augmentée des Exercices de dom Le Masson sur le Sacré-Cœur de Jésus et d’un commentaire sur les paroles du Psalmiste : Deus cordis meil Ainsi, tandis que le quiétisme de Mme Guyon excluait de l’oraison les considérations sur l’adorable humanité de Notre-Seigneur Jésus-Christ et enseignait un faux amour pur de Dieu, dom Le Masson mettait le doigt sur la plaie, proposait aux bonnes âmes la dévotion, alors naissante, du Sacré-Cœur de Jésus et leur apprenait en quoi consiste et comment se manifeste le véritable amour désintéressé de Dieu. Mme Guyon essaya de justifier ses doctrines par une apologie imprimée, dont aucun de ses historiens ne fait mention. S’ers la même époque la France et l’Église assistaient à la grande polémique entre Bossuet et Fénelon au sujet de Mme Guyon et du quiétisme. Bossuet envoyait à dom Le Masson ses écrits, et le prieur de la chartreuse de Paris lui procurait les répliques de l’archevêque de Cambrai. Ainsi, le général des chartreux suivait avec grand intérêt les diverses phases de ce débat célèbre, et lorsque Fénelon publia son Instruction pastorale du 15 septembre 1697, le prieur général, sans intervenir publiquement dans la contestation, fit Imprimer à La Correrie une Lettre à une prieure île religieuses chartreuses, de 32 liages in-12, où il expose la gaine doef rine 3c l’amour pur de Dieu et réfute les erreurs des quiet Mrs à ce sujet. Cette lettre est très rare, mais elle se trouve, en grande partie, dans les Éclaircissements sur la de de Mrssire Jean d’Aranthon d’Alex.

Dom I.e Masson revint en effet SUT la question du quiétisme dans /" vie’liMrssire Jean d’Aranlhon d’Alex, évêque ri prinrr tir Genève, avec, sa l.rllrr pastorale. .. sur Ir quiétisme, in-8°, Lyon. 1697 ; teeonde édition

rri’iir ri brtiurtiup augmentée, ri partit ulirrrnunt tir

quelque* pièce » originale », uiiirs ri rurirusrs concernant le qatétitme, ln-8°, 2 in 12. Lyon, 1699 tA 1700, Clermont-Ferrand, 1834 ; Édition nouvelle publiée (par M l’abbé Gontbier) à F occasion du deuxième

renlrnaire de la mort de re saint cvrijur. in H". Anneev.

1895. Mgr d’Aranthon <r Vies eut un rare privilège :

Il fut estimé par les fidèles catholiques et par les novateurs de son temps comme un saint et comme un personnage dont l’autorité avait une valeur très importante. Après sa mort, les bons et les mauvais souhaitèrent que l’on écrivit sa vie. Les premiers désiraient que l’on connût mieux les vertus de ce digne successeur de saint François de Sales, et les seconds avaient grand intérêt à s’autoriser de l’exemple d’un prélat si illustre pour garantir leurs doctrines. La voix du peuple désigna de suite Fléchier pour écrire cette histoire, et celui-ci se montra disposé à l’entreprendre. Mais la famille du prélat défunt et les ecclésiastiques, qui avaient vécu dans son intimité, songèrent que dom Le Masson était l’écrivain le plus capable pour retracer les faits et les vertus d’un évêque, dont il avait été le confident et le disciple. D’abord dom Le Masson résista, mais les instances de plusieurs grands personnages le décidèrent à se charger de composer cette vie. Son travail fut soumis avant l’impression, au cardinal Le Camus, évêque de Grenoble, et aux amis intimes du prélat décédé, Bossuet fut informé de cette composition et, à mesure que les feuilles sortaient de l’imprimerie, dom Le Masson les lui envoyait à Paris. Cf. Lettre de Bossuet à son neveu du 10 mars 1698. « L’ouvrage du P. chartreux est remarquable, » écrivait de Borne l’abbé Bossuet le 1 er avril 1698, « il faut nous en procurer deux exemplaires. » Les contemporains du grand évêque de Meaux trouvèrent aussi que « l’ouvrage était remarquable, » et la postérité a confirmé ce premier jugement. En effet, la Vie de Mgr d’Aranthon est importante à deux points de vue. D’abord pour l’édification du clergé et des fidèles, ensuite pour la réfutation du quiétisme et du jansénisme. La publication de cette Vie irrita aussi grandement les quiétistes et les disciples de Port-Boyal. L’une et l’autre secte avait jusqu’alors fait accroire au public, en Savoie et en France, que le pieux prélat était un de leurs partisans, qu’il avait approuvé leurs doctrines et honoré de son estime ceux qui les propageaient. Les quiétistes, très nombreux dans la Haute-Savoie, furent les premiers à crier à la calomnie. Ils prétendaient que le général des chartreux avait diffamé le P. Lacombe et Mme Guyon, « deux saintes personnes, assuraient-ils, qui seraient mises un jour sur les autels après avoir été canon iséesl » Ils firent donc imprimer à Genève un libelle pour venger la mémoire de ceux-ci, et le répandirent de toutes parts, jusqu’en France, malgré les invectives qu’il contenait contre Louis XIV, Bossuet et les autres prélats, qui avaient condamné le quiétisme et flétri le P. Lacombe et Mme Guyon. Dom Le Masson ne fut point surpris de ces récriminations. « Dieu, dit-il, permit que ce libelle eût un effet tout contraire aux prétentions de ses auteurs, car plusieurs personnes de mérite en ont témoigné leur juste indignation, jusqu’au point que quelques-unes, qui m’étaient inconnues, m’ont écrit et m’ont envoyé des pièces originales éeril es de la propre main du P, l.acorabe et de la Dame, afin qu’elles pussent me servir de preuve de la vérité de ce que j’avais écrit. » Aidé de ces nouveaux documents, il donna une deuxième édition de la Vie en 1699, dans laquelle, sans changer la nature (les faits, il rectifia ptU81eUT8 dates. En même temps, il publia les Éclaircissements sur lu Vie… avrr de nouvelles preuves inmnirstuhirs de lu vérité tir son : Hr contre Ir jansénisme et ir qutéthune, in-8 n. Chambérꝟ. 1699, 104 pages. <>s Éclaircissements furent augmentés et réimprimés, la

même année aussi a Chambéry. et complétés en 1700 (ou 1701° par un chapitre, OÙ dom Ie Masson réunit la lettre de dom (erheron et ses remarques, plusieurs documents, sur le jansénisme et des passades dl doctrine sur l’amour désintéresse Cette dernière édition paraît avoir forcé les quiétistes a garder le