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LE MAISTRE (ANTOINE) — LE MAISTRE (ISAAC)


Antoine fut-il élevé par sa mère. Il fut vite avocat réputé et ses plaidoiries, remplies de citations empruntées aux orateurs anciens, aux historiens, aux Pères de l’Église, lui valurent la célébrité. La mort de sa tante, Mme d’Andilly, orienta sa vie vers Port-Koyal ; les derniers moments de sa tante dont il fut témoin et les pieuses exhortations de l’abbé de Saint-Cyran firent sur lui une impression profonde et le détachèrent du monde. Sur les conseils de Saint-Cyran, Antoine Le Maistre attendit la fin de l’année judiciaire, et, âgé de vingt-neuf ans, il se retira à Port-Royal en 1637. Sur cette conversion, voir Lefèvre de Saint-Marc, Supplément au nécrologe de l’abbaye de Notre-Dame de Port-Royal des Champs, p. 35-38. Antoine Le Maistre fut un des premiers solitaires de Port-Royal : là, il se livra au travail, à la prière, à la méditation et à l’étude, sous la direction de M. Singlin. Le P. Rapin, dans ses Mémoires, t. iii, p. 25-26, fait un très bel éloge d’Antoine Le Maistre : « La vie qu’il mena dans cette solitude, l’amour de la piété, du silence, de l’austérité de vie, de la pauvreté et des autres vertus qu’il pratiqua, dans la seule vue de faire son salut, sans se mêler de ces intrigues qui occupaient alors la plupart des esprits du parti, fait encore plus d’honneur à la morale de Port-Royal qu’on ne pouvait regarder sans admiration, en voyant la conduite d’un homme si détaché de la terre et qui ne pensait qu’au ciel. » Antoine Le Maistre mourut le 4 novembre 1658 et fut enterré à Port— Royal ; après la destruction du monastère, les restes de Le Maistre, furent ensevelis avec ceux de son frère, à Saint-Étienne-du-Mont, à côté de ceux de Pascal et de Racine.

On a d’Antoine Le Maistre un Recueil de plaidoyers. Deux éditions furent successivement publiées en 1651 et 1653, à l’insu de Le Maistre qui les désavoua ; la seule édition authentique est celle qui fut faite, en 1657, sous le titre : Les plaidoyers et harangues de M. Lemaistre, par Jean Issali (1620-1707), avocat au Parlement et conseiller du roi, disciple de Port-Royal. Tout en cessant d’être avocat, Le Maistre ne cessa pas de plaider. Il prit la défense de son directeur, l’abbé de Saint-Cyran, détenu au château de Vincennes, et, à cette occasion, il écrivit, le 27 décembre 1638, au cardinal de Richelieu une lettre qui lui fait honneur ; cette lettre est donnée aux pièces justificatives par Resoigne, dans son Histoire de l’abbaye de Port-Royal, t. vi, p. 224-249. — Le Maistre a encore écrit une Apologie pour feu M. l’abbé de Saint-Cyran, contre l’extrait d’une information prétendue que l’on fit courir contre lui l’an 1638, in-4°, 1642, et une Apologie pour Jean Duvergier de Hauranne, divisée en quatre parties contenant la réponse à l’extrait d’une information… que les jésuites ont fait imprimer en 1644 à la tête d’un libelle intitulé : Sommaire de la théologie de Saint-Cyran et du sieur Arnauld et une réponse générale et particulière à un mémoire de M. l’évêque de Langres, in-8°, 1645. — Le Maistre défendit aussi les religieuses de Port-Royal et il écrivit pour elles un Factum pour servir de réponse à une lettre imprimée de Madame la marquise de Crèoecœur, in-4°, 1663. — Au point de vue théologique proprement dit, Le Maistre collabora à la composition d’une Vie des saints, dont les fragments considérables parurent sous le nom de son oncle d’Andilly, il collabora également à la Traduction du Nouveau Testament qui a rendu son frère célèbre. — Il a composé une Traduction du traité du sacerdoce de saint Jean Chrysostome, in-12, 1650 et 1699. — Une Vie de saint Bernard, in-4° et in-8°, publiée sous le nom de Lamy, avec la Traduction de trois traités de saint Bernard : De la conversion des mœurs, De la vie solitaire, Des commandements et dispenses, in-12, Paris, 1656. — L’aumône chrétienne ou la tradition de l’Église touchant la charité envers les pauvres, recueillie de

l’Écriture sainte et des Pères, 2 vol. in-12, Paris, 1658 Traduction du traité de la mortalité de saint Cyprien. — On a attribué, tantôt à lui, tantôt à son frère, de Sacy une Vie de Barthélémy des martyrs ; mais il est plus vraisemblable que c’est l’œuvre de Thomas du Fossé.

— On lui a attribué aussi la Réponse à un livre de M. l’évêque de Lavaur, intitulé : Examen et jugement de la fréquente communion, in-4°, 1644. — G. I fermant, dans ses Mémoires, édit. Gazier, t. iii, p. 190, le déclare auteur d’une Réponse à un écrit publié sur le sujet des miracles qu’il a plu à Dieu de faire ù Port— Royal depuis quelque temps, par une Sainte Épine de la couronne de Notre-Seigneur, in-4°, 1656. — Il aurait aussi composé la Lettre d’un avocat du Parlement de Paris à un de ses amis, louchant V Inquisition qu’on veut établir en France, à l’occasion de la nouvelle bulle d’Alexandre VII, du 1° juin 1657. — Enfin Le Maistre aurait composé la Lettre de L.de Saint-Aubin à une personne de condition, par laquelle il justifie la traduction des hymnes en vers français dans les Nouvelles Heures, contre les reproches du P. Labbe et d’autres, in-4°, 1651 ; d’autre part, Guillaume Le Roy, abbé de Haute-Fontaine, dans sa Lettre au P. Adam, jésuite, sur la traduction qu’il a faite en vers de quelques hymnes de l’Église, publie la traduction faite à Port-Royal par Antoine Le Maistre. Ce fut ce qu’on appela les Heures à la janséniste qui furent condamnées à Rome ; un Advis touchant cette condamnation, paru en 1651, est probablement l’œuvre de Le Maistre.

La bibliothèque de l’AtsenalTpossède une Lettre d’Antoine Le Maistre au Cardinal de Richelieu en faveur de Saint-Cyran, ms. 3384, 1° 17-28, et Quatre plaidoyers, ms. 3738, i° 127-171. — Michaud, Biographie universelle, t. xxiv, p. 66 ; Hœfer, Nouvelle biographie générale, t. xxx, col. 567-568 ; Chaudon et Delandine, Dictionnaire historique critique et bibliographique, t. x, p. 545546 ; Moréri, Le grand dictionnaire historique, art. Maistre, t. viii, p. 111-112 ; Antoine Rivet de La Grange, Nécrologe de l’abbaye de Notre-Dame de Port-Royal, 1723, p. 412-420 ; Besoigne, Histoire de l’abbaye de Port-Royal, 6 vol., in-12, Cologne, t. iii, p. 504-550, et t. vi, p. 224-249 ; Cerveau, Nécrologe des plus célèbres défenseurs et confesseurs de la vérité, t. i, p. 60-62, et t. iv, p. 258 ; G. Hermant, Mémoires sur l’histoire ecclésiastique au XVIIe siècle (1630-1663), édit. Gazier, 6 vol. in-8°, Paris, 1905-1910, t. i, p. 73-78, 85 ; t. iii, p. 481-483, 568-569 ; t. iv, p. 163-164 ; Sainte-Beuve, Port-Royal, 4e édit., 1878, 7 vol. in-8°, 1. 1, t. II, c. ii, p. 368-398 ; Du Fossé, Mémoires pour servir à l’histoire de Port-Royal, in-12, 1739, t. I, c. xviii, p. 155-163 ; Fontaine, Mémoires pour servir à l’histoire de Port-Royal, 4 vol. in-12, 1753, t. I, p. 219-238, 242-276, 288-296, 306-309, 326-337, 382-386 ; t. ii, 165-188, 193-197, 223-227, 355-369 ; t. iii, 13-15, 162-184, 199-201, 227-247.

J. Carreyre.

LE MAISTRE Isaac, plus connu sous le nom de LE MAISTRE DE SACI, anagramme d’Isaac, (1613-1684), est le frère du précédent, et naquit à Paris le 29 mars 1613 ; il fit ses études au Collège de Reauvais avec son oncle maternel, Arnauld, qui était né en 1612. Jeune encore, il entra à Port-Royal où il se trouvait au moment de la dispersion de 1638 ; il resta fidèle à l’abbé de Saint-Cyran emprisonné à Vincennes et il essaya de calmer les disciples du maître. Par humilité, il hésita longtemps à recevoir les ordres, mais il finit par accepter, sur les. conseils ou plutôt le commandement de Singlin : il fut ordonné prêtre en décembre 1649 et célébra sa première messe le 25 janvier 1650. « Il fut, écrit Gazier, Histoire générale du mouvement janséniste, t. i, p. 88-89, admirable pour gouverner les âmes une à une. » Il dut quitter Port-Royal en 1661, il fut même arrêté le 13 mai 1666 et enfermé à la Rastille, d’où il ne sortit que le 31 octobre 1668. Chassé de nouveau de Port-Royal le 12 juin 1679, il se retira à Pomponne, où il mourut le 4 janvier 1684. Resoigne, Histoire de l’abbaye de Port-Royal, t. m.