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LAUNOY (JEAN DE) — LAUNOY (MATHIEU DE)

dans le De mente concilii Tridentini circa contritionem et attritionem in sacramento pænitentiæ liber, quo scilicet duplici theologorum de contritione et attritione opinioni præjudicium nullum fecisse sed utrumque scholæ liberam reliquisse demonstratur, in-8°, Paris, 1653. Ce traité, adressé à Vialard, évêque de Châlons-sur-Marne, fut provoqué par une dispute survenue dans ce diocèse ; la conclusion est que le concile n’a rien décidé sur cette question qui reste libre ; cependant, après avoir donné huit raisons de cette thèse, Launoy semble dire que l’opinion qui exige la contrition est la plus ancienne et la plus universelle. Dans une autre dissertation, Launoy prêche ouvertement la fréquentation des sacrements : De frequenti confessionis et eucharisticæ communionis usu atque utilitate liber, in-8°, Paris, 1653.

Launoy s’occupa de la juridiction épiscopale pour l’administration du sacrement de l’ordre dans le De recta Nicæni canonis 6, et prout a Rufino explicatur, intelligentia, dissertatio, in-8°, Paris, 1640 et 1662 ; il s’agit du droit que Mélèce, évêque de Lycopolis, prétendait avoir de faire des ordinations dans toute l’Égypte, tandis que ce droit appartenait certainement au patriarche d’Alexandrie, qui, sur ce point, pouvait être comparé à l’évêque de Rome. Cette thèse fut attaquée par Henri de Valois et défendue par Launoy dans un nouveau travail : De recta Nicæni canonis 6 intelligentia dissertationis propugnatio, in-8°, Paris, 1671.

C’est surtout la question du mariage que Launoy a étudiée. Pour lui, le mariage est un contrat civil ; donc l’autorité séculière a le droit d’établir des empêchements dirimants, même depuis que l’Église a élevé ce contrat à la dignité de sacrement, et l’Église n’a aucun pouvoir sur ce point : Regia in matrimonium potestas vel tractatus de jure sæcularium principum christianorum in sanciendis impedimentis matrimonium dirimentibus, in-4°, Paris, 1674. Launoy soutint cette opinion au sujet du mariage de Gaston d’Orléans. Cette thèse singulière fut attaquée par Dominique Galésius, évêque de Ruvo (royaume de Naples), dans un écrit intitulé : Ecclesiastica in matrimonium potestas Dominici Galesii contra Joannis Launoii doctrinam, in-4°, Rome, 1676, mais Launoy maintint ses thèses dans un nouvel écrit : Contentorum in libro sic inscripto : Dominici Galesii… ecclesiastica in matrimonium potestas, erratorum index locupletissimus, in-4°, Paris, 1677. Un livre anonyme qu’on a attribué à Leuillier, docteur de Sorbonne, contesta aussi la doctrine de Launoy dans des Observationes, in-8°, Louvain, 1678. Il faut ajouter d’ailleurs que l’ouvrage de Launoy fut condamné à Rome le 10 décembre 1688. Le volume des Œuvres complètes de Launoy contient encore quelques autres écrits posthumes dans lesquels sont reprises les mêmes opinions. T. iv b.

Enfin Launoy a parlé de l’extrême-onction dont il a indiqué les rites dans l’Église grecque et l’Église latine, en même temps que les usages qui ont accompagné l’administration de ce sacrement aux diverses époques : De sacramento unetionis infirmorum liber, ubi græci et latini ritus primæ, mediæ et postremæ ætatis referuntur et explicantur ; deinde notatur quamdiu unctionem subsecutum est viaticum ; tum refertur status morientium in cinere et cilicio, in-8°, Paris, 1673.

Launoy fut-il janséniste ? La chose est fort douteuse, bien que son nom soit inscrit dans le Nécrologe des plus célèbres défenseurs et confesseurs de la vérité, t. i, p. 171-172, et dans le Supplément au nécrologe de l’abbaye de Notre-Dame de Port-Royal des Champs, p. 454-455. Launoy ne semble pas avoir embrassé les théories jansénistes, au moins dans leur ensemble. Sans doute, il critiqua la conduite de la Sorbonne à l’égard d’Arnauld, en 1656, dans les Notationes in censuram Antonii Arnaldi propositionum quorum una facti, altera juris appellatur, et dans une Lettre contre la censure des deux propositions de M. Arnauld, mais il se place uniquement au point de vue de l’illégalité et de l’injustice commises par la Sorbonne. On lui a attribué la Véritable tradition de l’Église sur la prédestination et la grâce, écrite sous le pseudonyme de Louis Marais, in-12, Liège, 1702. Richard Simon, dans sa XXXIe lettre choisie, donne à Launoy la paternité de cet écrit, mais un docteur en théologie, par une lettre adressée au Journal des savants du 14 novembre 1701, p. 441-444, conteste l’affirmation de Simon, car, dit-il, cette dissertation « expose des idées absolument contraires à celles de Launoy, lequel avait déclaré au P. Sirmond mourant qu’il ne pouvait, sur ce point, accepter son opinion. » Plusieurs fois, Launoy avait déclaré qu’on n’était pas obligé de suivre la doctrine de saint Augustin sur la grâce et qu’on pouvait suivre les Pères grecs. Le P. Daniel publia une Défense de saint Augustin contre un livre paru depuis peu sous le nom de M. Launoy, où l’on fait passer ce Père pour un novateur sur la prédestination et la grâce, in-12, Paris, 1704. Le P. Daniel, en défendant saint Augustin, rappelle qu’on ne doit pas toujours prendre d’une manière absolue les expressions des Pères, mais qu’il faut leur tenir compte des hérésies qu’ils combattent. Mémoires de Trévoux, de janvier 1704, p. 3-17, et Journal des savants du 11 février 1704, p. 76-83. Le P. Serri, dominicain, réfuta le même libelle attribué à Launoy, Journal des savants du 11 mai 1705, p. 249-254. De son côté, G. Hermant, dans ses Mémoires, édit. Gazier, t. iii, p. 453-454, à propos des Remarques sur le Formulaire du serment de foi qui se trouve dans le procès-verbal du clergé, écrit :

« Il n’y a personne de ceux qui le connaissent qui ne

sût qu’il faisait profession d’être tout à fait éloigné de suivre la doctrine de saint Augustin sur la matière de la grâce, parce qu’il était attaché à celle des Pères grecs, de sorte qu’il n’y avait rien de plus ridicule que de vouloir le faire passer pour janséniste… »

Michaud, Biographie universelle, t. xxiii, p. 353-357 ; Hœfer, Nouvelle biographie générale, t. xxix, col. 911-915 ; Moréri, Le grand dictionnaire historique, t. vi b, p. 197-198 ; Quérard, La France littéraire, t. iv, p. 617 ; Chaudon et Delandine, Dictionnaire historique, t. ix, p. 555-557 ; Bayle, Dictionnaire historique et critique, t. iii, p. 62-68 ; Chauffepié, Nouveau dictionnaire historique et critique, t. iii, p. 43-44 ; Jean Leclerc, Bibliothèque universelle et historique de l’année 1690, t. xvi, p. 237-287 ; Nicéron, Mémoires pour servir à l’histoire des hommes illustres, t. xxxii, p. 84-139 ; Ellies du Pin, Bibliothèque des auteurs ecclésiastiques du XVIIe siècle, IIIe partie, des auteurs qui ont fleuri depuis 1650 jusqu’en 1675, p. 98-184 ; Journal des savants, années 1664, 1665, 1667, 1668, 1698, 1701, 1704, 1705, 1706, 1726, 1731 ; A. Arnauld, Elogium J. Launoii Constantiensis, Parisiensis theologi, in-12, Londres, 1685 ; Reiser, J. Launoius… vindicatus, in-4°, Amsterdam, 1685 ; Féret, La Faculté de théologie de Paris et ses docteurs les plus célèbres ; époque moderne, t. iv, 1907, p. 1-35.

On trouve le catalogue manuscrit des ouvrages écrits par Launoy à la Bibliothèque Mazarine, 10 988 A ; Nicéron, op. cit., donne les titres de 86 ouvrages composés par Launoy, dont Guy Patin, dans sa lettre cli, Lettres choisies, 3 vol. in-12, Cologne, 1691, raconte qu’on « disait autrefois de lui qu’il ôtait tous les jours un saint du paradis et qu’il fallait que Dieu se gardât qu’enfin il ne l’ôtat lui-même. »

J. Carreyere.

2. LAUNOY (Mathieu de), controversiste du xvie siècle. — Né a La Ferté-Alais (Seine-et-Oise), il embrassa la Réforme à Genève en 1560, et fut admis au ministère évangélique, après s’être marié. De Thou et Maimbourg semblent dite qu’il avait été auparavant prêtre catholique ; Bayle en doute. Pasteur en divers endroits, à Heidelherg en 1573, puis à Sedan, il dut s’enfuir de cette dernière ville à cause d’une accusa-