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    1. JUDAÏSME##


JUDAÏSME, [NSI [TUTIONS

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Le prophétisme par contre, qui avait exercé une si .mande influence avant et même pendant l’exil, disparaît comme institution permanente. Il y a encore des prophètes, surtout dans la période qui suit le retour, des compositions prophétiques s’y rencontrent aussi, mais il n’y a aucune école prophétique ; aucun prophète n’émerge comme guide du peuple. Ce sont les prêtres et les scribes qui ont désormais la direction du judaïsme.

Le sacerdoce.

Son rôle prépondérant se montre

dès le retour. Les prêtres reviennent en beaucoup plus grand nombre que le reste des Juifs : ils forment le dixième des rapatriés. Le premier acte de la restauration est le rétablissement du culte, donc du service sacerdotal. Le grand prêtre se trouve avec un prince royal à la tête des rapatriés et est mis en évidence par Aggée et Zacharie. C’est un prêtre, Esdras, qui s’occupe le plus ardemment avec Néhémie de la situation spirituelle et matérielle du peuple.

D’après les critiques, cette position influente du sacerdoce serait d’autant plus caractéristique de l’époque postexilienne que la base juridique en aurait été créée seulement pendant l’exil par le Code sacerdotal. Dans leurs études sur le judaïsme, ils consacrent pour ce motif de longues pages à cette grande nouveauté postexilienne. Ils relèvent surtout comme tout à fait récente la dignité de grand prêtre, la distinction entre prêtres et lévites et même entre prêtres et laïques.

Ce problème est lié pour une bonne part à celui de l’origine du Code sacerdotal, voir plus bas, col. 1638. Cependant il y a des raisons spéciales qui obligent à reculer dans un passé fort éloigné les origines-du sacerdoce.

En effet la ligueur avec laquelle on exigeait après l’exil la légitimation généalogique de chaque membre du sacerdoce, Esdr., ii, Gl sq. ; Neh., vii, C3-64, ne permet pas de voir dans la descendance aaronique des prêtres ou dans la filiation lévitique des ministres des prêtres une fiction généalogique, inventée pendant l’exil dans le but d’établir différents grades dans la hiérarchie.

Cette prétendue fiction est en outre contredite par bien des témoignages qui attestent dès le temps préexilien l’existence de la dignité de grand prêtre, IV Reg., xii, 10 ; xxii, 1, 8 ; xxiii, 4 ; xxv, 18, le droit privilégié des membres de la tribu de Lévi au sacerdoce, Jud., xvii, 7 sq. ; xviii, 30 ; III Reg., ii, 27 ; III Reg., xii, 31, et la différence entre prêtres et lévites, I Par., xxiii sq. Bien que, abstraction faite des passages attribués au Code sacerdotal, il n’y ait pas de textes préexiliens qui distinguent nettement les deux o’rdres du sacerdoce, il n’en résulte pas qu’ils fussent primitivement confondus ; car la communauté d’origine et le caractère sacerdotal, commun aux prêtres et aux lévites, ont permis de nommer lévites au sens large du mot les prêtres et inversement de qualifier les lévites du titre de prêtres.

C’est à tort qu’on impute à Ézéchiel d’avoir introduit la classe des lévites en dégradant les prêtres qui avaient sacrifié sur les hauts lieux, et en les condamnant à devenir les ministres des prêtres qui étaient restés fidèles à Jahvé, car. d’après xliv, 10 sq. ; xl, 15 ; xun, 19, Ézéchiel ne décrète pas, mais il suppose déjà existante la distinction entre prêtres et lévites et la dégradation prévue par le prophète au chapitre xi.v pour les temps messianiques ne vise pas des prêtres, mais des lévites infidèles. Voir Kugler, op. cit., p. 110 sq.

Ces arguments, auxquels s’en pourraient joindre bien d’autres, permettent de maintenir l’origine antique de la triple hiérarchie du corps lévitique. Ce ne sont pas de nouvelles lois, mais de nouvelles

circonstances qui ont transformé la situation du sacerdoce à l’époque du judaïsme, comme nous allons l’indiquer à grands liait s.

1. Le (jrand prêtre. — Le grand prêtre réunissait dans ses mains la plénitude du pouvoir sacerdotal ; il était le chef des prêtres et des lévites, le représentant du peuple devant Dieu. Ces droits et cette autorité qui étaient à vie le prédestinaient à devenir, après la disparition de la royauté, le chef politique de la nation. Au commencement de l’époque perse, il y avait à Jérusalem des gouverneurs, institués par les rois perses..Mais ce poste semble avoir été bientôt supprimé et le grand prêlre devint l’administrateur suprême des affaires temporelles de l’État juif, d’ailleurs fort minuscule. Comme tel il était le président du sanhédrin et représentait le peuple à l’extérieur. Pour le temps de la domination égyptienne nous savons par.losèphe, AnL, XII, iv, 1 sq., que toute l’administration des finances lui fut confiée et que c’était lui qui était responsable de la livraison régulière des impôts.

La royauté sacerdotale des Asmonéens valut au pouvoir du grand prêtre un accroissement tout à fait exceptionnel. Cette dignité fut^ d’autant plus amoindrie à l’époque romaine. Le caractère perpétuel cl héréditaire n’en fut plus reconnu. Les procurateurs ainsi qu’Hérode et ses descendants instituèrent à leur gré les souverains pontifes. Ilérode extermina même la dynastie asmonéenne. Entre le dernier asmonéen, Aristobule († 37 avant J.-C), et la destruction de Jérusalem, on ne compte pas moins de vingt-huit grands prêtres.

Malgré ces nombreux changements, le pouvoir degrand prêtre resta le privilège de quelques familles nobles auxquelles il conférait des droits considérables.

Les fonctions religieuses du grand prêtre étaient restées les mêmes qu’avant l’exil ; il offrait surtout le sacrifice au jour de l’Expiation et portait le sang des victimes dans le Saint des Saints. D’après une coutume tardive, Mischna, Jonui, i. 2, il devait également officier pendant la semaine avant le jour de l’Expiation. D’après Josèphe, le grand prêtre sacrifiait ordinairement tous les samedis, les jours de néoménie et de grandes solennités nationales. Bell. Jud., v, 57.

2. Les prêtres.

En additionnant les chifïres fournis par Esdras, ii, 36-39. on trouve le total considérable de 4 289 prêtres revenus au premier voyage de Babylonie à Jérusalem : ils appartenaient à quatre classes et étaient groupés autour de vingt-deux chefs rie famille. Ces quatre classes représentent sans doute quatre des vingt-quatre sections en lesquelles David, selon I Par., xxiv, 3 sq., aurait partagé les prêtres et qui devaient alternativement faire le service hebdomadaire au temple ; car trois des quatre classes d’Esdr., il, 36-39, correspondent par leurs noms à trois de celles que signalent les Paralipomènes. Selon la tradition rabbinique (Talmud Jerus.. Taanith, iv, ꝟ. 68 « , d’après Schiïrer, op. cit., t. ii, p. 233) on aurait subdivisé par le sort chacune de ces quatre classes en six, pour obtenir de nouveau le nombre de vingt -quatre. Du temps de Jésus-Christ, ces vingt-quatre classes existaient encore : Josèphe, Ant., VII, xiv, 7, l’atteste expressément et saint Luc, i, 5, mentionne la classe d’Abia (la huitième selon I Par., xxiv, 10) comme celle à laquelle appartenait Zacharie.

Le nombre des prêtres devint encore plus considérable dans la suite. Josèphe indique même pour son époque vingt mille prêtres. Ce chiffre n’est pas surprenant, si on pense aux nombreux et multiples emplois qui étaient déjà prévus par les lois du l’cntateuque cl qui abondaient surtout dans le temple d’Hérode : les uns s’occupaient du culte proprement