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judaïsme, littérature juive


vent, un livre chrétien mais une œuvre juive avec des interpolations chrétiennes. Il date comme le Livre des Jubilés, dont il partage les idées messianiques, de l’époque de Jean Hyrcan. Dans le tableau du Messie, les additions chrétiennes sont assez nombreuses, comme le P. Lagrange le prouve contre Charles et Bousset. Le Messianisme chez les Juifs, Paris, 1903, p. 68 sq.

d) IVe livre d’Esdras. — Apocalypse très remarquable par son contenu comme par sa beauté littéraire, composée peu après la destruction de Jérusalem par Titus. Elle révèle le pessimisme des Juifs après ce désastre, mais encore davantage leur espérance imperturbable en l’avènement prochain du Messie et en la rétribution juste et complète de tous les hommes dans l’autre monde. Son influence dans les milieux chrétiens, même dans la liturgie, a été encore plus grande que celle d’Hénoch.

e) Apocalypse de Baruch. — Elle est écrite à la même époque et dans le même esprit, mais avec moins d’art que le IVe livre d’Esdras. Leprophète Baruch est censé relater ce qu’il a vu après la destruction de Jérusalem par les Babyloniens en 586 ; en réalité l’auteur parle de la chute de Jérusalem en 70 après Jésus-Christ.

/) Livres sibyllins. — Si païen que paraisse leur nom, les quatorze livres sibyllins sont juifs ou chrétiens par leur origine aussi bien que par leur contenu. — Les oracles des sibylles païennes furent parfois fixés par écrit. Les Juifs mirent ces prédictions à profit comme véhicules de leurs pensées dans le monde païen : ils répandirent leurs idées sous forme d’oracles sibyllins et furent plus tard imités par les chrétiens dans ce genre de propagande.

Les oracles sybillins nous sont conservés dans une forme chaotique qui rend souvent très difficile le discernement des prédictions juives et chrétiennes.

Parmi les quatorze livres, ce sont surtout les livres III-V qui contiennent les éléments juifs.

Le IIIe livre (vers 97-807) est le reflet des grandes espérances que les Juifs nourrissaient après les succès des Macchabées. Il appartient au temps asmonéen et fut écrit vers 140 avant Jésus-Christ. Il célèbre le rôle providentiel du peuple juif dans le monde et du Messie dans le sein de son peuple.

Le IVe livre donne un aperçu de l’histoire du monde jusqu’à l’éruption du Vésuve (79 après J.-C.) et décrit le jugement que Dieu doit exercer un jour.

3. Livres didactiques.

On a aussi imité les cantiques et les livres sapientiaux.

a) Les Psaumes de Salomon, au nombre de dix-huit, sont le produit le plus remarquable de ce genre au point de vue religieux et poétique. Ils ont été composés en hébreu très peu après la prise de Jérusalem par Pompée ; ils expriment d’une façon admirable les sentiments amers et indignés des pieux pharisiens contre la nouvelle domination étrangère et leur confiance en Jahvé qui réparera tout par le Messie.

b) Les Odes de Salomon, au nombre de quarante-deux, sont beaucoup moins importantes. Elles ont été composées en grec au i er siècle de l’ère chrétienne, probablement par un prosélyte. Il y a bien des retouches chrétiennes dans un sens gnostique.

c) La prière de Manassé a été composée à l’époque macchabéenne et contient les paroles que le roi Manassé, d’après II Par., xxxiii, 11-13, a dû proférer devant Dieu, après avoir été transporté en exil.

d) Le IVe livre des Macchabées est un discours paranétique « sur l’empire de la raison ». L’auteur est un Juif stoïcien. Il prend comme point de départ les martyrs macchabéens et veut prouver que la foi et la piété surmontent toutes les passions et toutes les douleurs. L’écrit appartient au même milieu hellénique

que la Sagesse. La date en est très incertaine ; probablement il fut composé au premier siècle chrétien avant 70.

Littérature rabbinique.

Tandis que les auteurs

d’apocryphes avaient la prétention de fournir de nouveaux écrits bibliques, d’autres maîtres en Israël de la même époque s’adonnaient avec un zèle admirable à la conservation et à l’explication des anciens textes sacrés, surtout de la Thora. Ce travail exégétique, fourni en partie déjà pendant les siècles précédents, fut entrepris d’une façon systématique à partir du dernier siècle avant Jésus-Christ. Comme ses entrepreneurs portèrent au moins plus tard le titre honorifique de rabbi, on nomme l’ensemble de cette production la littérature rabbinique. Longtemps les gloses des rabbins ne furent pas fixées par écrit, mais transmises d’une génération de savants à l’autre par l’enseignement oral. C’est seulement à partir du iie siècle de l’ère chrétienne qu’elles furent rédigées, de sorte que la forme définitive ne tombe qu’en partie dans l’époque judaïque qui nous intéresse. Mais en tant que les témoignages cités lui appartiennent et représentent la tradition de ce temps, ces œuvres rabbiniques entrent pour une large mesure dans le cadre de nos recherches.

Le travail exégétiquc des rabbis fut double. En premier lieu il portait sur la Loi dont on maintenait scrupuleusement la lettre en même temps qu’on l’adaptait aux besoins des temps nouveaux. Il en résulta le droit traditionnel, nommé Halacha (= chemin). En second lieu on s’occupait du contenu historique et dogmatique du Pentateuque comme de tous les autres livres, en le développant par des spéculations. Il en résultait la Haggada ( = doctrine).

1. La Halacha d’abord était exposée ou bien en connexion étroite avec le texte, en forme de commentaires suivis, ou bien d’une façon systématique, groupée d’après les différentes sortes de lois. Le second genre prévalut et fut seul employé dans la littérature talmudique. Cette dernière comprend :

a) La Mischna ( = répétion) qui est la plus ancienne codification du droit juif. Sa rédaction définitive fut faite par Babbi (= Babbi Juda ha-Nasi) à la fin du iie siècle chrétien ; quelques parties en furent déjà écrites plus tôt par Babbi Meïr et Babbi Akiba. Elle se divise en soixante traités ; ceux-ci se subdivisent en chapitres et en paragraphes. Elle renferme les avis et les décisions d’une trentaine de rabbins, nommés Tannaïtes et appartenant à quatre générations (70100, 100-130, 130-160, 160-200 après J.-C).

b) La Tosephta (= addition) qui contient les paroles des Tannaïtes omises dans la Mischna. La Tosephta est d’origine palestinienne comme la Mischna ; composée sur le modèle de celle-ci, elle a plus d’intérêt pour la connaissance du judaïsme à l’époque de Jésus-Christ, car elle contient fréquemment la tradition sous une forme plus ancienne et plus pure.

c)Les Talmuds (= enseignement) palestinien et babylonien, qui sont le commentaire de la Mischna et de la Tosephta. Ils n’ont été composés qu’à partir du me siècle après Jésus-Christ. A cause de leur origine récente et surtout parce que les autorités qui y sont citées ne font plus partie des Tannaïtes, mais des Amoréens, c’est-à-dire des savants qui les suivirent, ils ne nous regardent plus, à l’exception des quelques passages dont il est expressément dit qu’ils appartiennent à la tradition tannaïque et qui portent le nom de Baraïtha,

2. La Haggada, qui se trouve aussi dispersée dans les livres talmudiques, est surtout conservée dans deux autres sortes de compositions rabbiniques, les Midraschim (= recherche) et les Taryums (interprétation).

a) Midraschim. — On nomme ainsi les commentaires