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JOURDAIN D’EBERSTEIN — JOURDAIN FRANÇOIS
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JOVINIEN — JUBE


condamner. Dans plusieurs de ses lettres subséquentes à Domnion et à Pamniacliius, qui l’avaient renseigné sur l’état de l’opinion en Italie, il s’attache à préciser sa pensée ; il explique qu’il est loin de mépriser ou de blâmer l’état conjugal, qu’il le considère seulement comme moins partait que le célibat, qu’il reste donc fidèle à la doctrine de l’Apôtre et de l’Église, en assignant au mariage sa place en dessous de la virginité : Ecclesia matrimonia non damnai, sed subjicit. Saint Jérôme, Epist., xlviii et xlix, ad Pammachium ; i., ad Domnionem. P. L., t. xxii, col. 493, 511, 512.

Quoi qu’il en soit, ni l’intervention de. Sirice, ni celle d’Ambroise, ni celle de Jérôme n’eurent immédiatement tout le succès désirable. A Rome, la secte conserva des adeptes après le départ du fondateur. A Milan, deux moines, Sarmation et Barbatien, se laissèrent séduire par les nouvelles théories et quittèrent leur couvent. Ils vinrent bientôt à repentance et sollicitèrent leur pardon et leur réadmission ; mais, repoussés comme indignes désormais de la profession monacale, ils se réfugièrent à Verceil, où ils firent école. Ils y recrutèrent des adhérents en assez grand nombre pour faire craindre qu’ils ne réussissent à hisser une de leurs créatures sur le siège épiscopal, alors vacant, de cette ville. Saint Ambroise du moins eut cette crainte. Il nous reste de lui une longue et pressante lettre adressée à la communauté verceilloise pour la prémunir contre cette éventualité. Epist., i xxxiii, ad Verceller’scs, l J. L., t. xvi, col. 1188. La lettre, qui est de l’année 3%, atteste que les deux moines apostats avaient adopté et disséminaient toutes les erreurs de Jovinien. Mais celui-ci n’est pas nommé. A partir de cette époque, sa personne disparaît de la scène de l’histoire. La date exacte de sa mort n’est pas connue. Il ne semble pas avoir survécu aux dernières années du ive siècle. Saint Jérôme écrivant contre Vigilantius, en 406, et saint Augustin, dans toutes ses œuvres du commencement du v siècle, parlent de Jovinien comme d’un mort.

Jovinien n’a produit, à notre connaissance, que les deux écrits mentionnés ci-dessus : le premier, la conscriplio temeraria, qui motiva sa condamnation par le synode romain ; le second, désigné comme Commentarii ou Commentarioli, qui fut composé en guise de justification, à la suite de cette sentence. Nous avons dit le peu qui nous reste de l’un et de l’autre et indiqué ce que les bribes conservées nous en apprennent.

Comme sources sur la vie et les doctrines de Jovinien, on n’a que les œuvres des anciens Pères ou écrivains ecclésiastiques qui l’ont combattu, celles notamment de S. Jérôme et de S. Augustin, De heeres., i.xxxii, P. J.., t. xi.n, col. 45. — Parmi les auteurs modernes, on pourra consulter : Lindner, De Joviniano et Vigilantio, Leipzig, 1839 ; ZeecUler, Hierongmas, 18fiô ; II. Belling, Ueber Jovinian, dans Zeitschrift fur Kirehen.gesch.kMe, t. ix, iss.S ; Sel m H zen, Die Benutzung der Schriften Tertullians De monogamia und De jejunio bei Hierongmus adv. Jovinianum dans les Neue Jahrbùcher fur deutsche Théologie, 1891, t. ni ; K. (label, Jovinianus und seine Ansicht vum Verhàltnis des Wiedergeborenen zur Sùnde, Posea, 1901 ; Wagenmann, Mit. Jovinian, dans la Proiestantische Healencgclopadie ; surtout W. llaller, Jovinianus, die Fragmente seiner Schriften, die Quellen tu seiner Geschiehte, sein l.eben mut seine Lettre, Leipzig, 1897, dans les Texte und Untersuchltngen, Neue Folge, t. ii, fasc. 2 ; pour la documentation, ce dernier volume est précieux et peut tenir lieu de beaucoup d’autres ; la première partie ollre en un recueil complet les fragments extraits et témoignages épars dans une foule d’auteurs ; la seconde partie, historique et critique, ne m. i il. pas, tant s’en faut, ce1 éloge absolu : on la. dirait composée pour justifier en d< la il le mot (le 1 farnack qu’elle cite en i onclusion : Jovinii n a été un protestant a ant la lettre. i. i [aller est peut-ël re assez peu quali Hé ] our reprocher a S..lia orne sa passion, ses exagérations, la rudesse

de ses expressions : lui-même traite Jérôme sans nulle

aménité, nous présentant à chaque page le Contra Jovi nianuin comme les expectorations (le mot se lit tel quel dans le texte allemand) « d’un polémiste haineux » et d’un ascète fanatique.

J. FORGET.

    1. JUBÉ Jacques##


JUBÉ Jacques. — Jacques Jubé, dit DE LA COUR (1674-1745), janséniste fanatique. Il naquit à Yanves, près de Paris, le 27 mai 1674. de parents obscurs. Un prêtre habitué de la paroisse, qui aimait à recueillir des enfants pauvres et à les instruire, lui lit commencer des études de latin. Puis il l’adressa au P. Jouvency qui professait la rhétorique au collège des jésuites. Aucune fatigue ni aucune privation ne rebutaient le studieux élève. Tous les jours il venait en classe de son village à Paris ; là il n’avait où s’abriter et faire ses devoirs entre les deux cours de la journée, que les dessous de porte et les allées des maisons. Il mena cette vie pénible jusqu’après sa philosophie. Reçu maître ès-arts, il obtint par la protection de Mme de Lamoignon, supérieure de la Visitation du faubourg Saint-Jacques, une bourse au séminaire Saint-Magloire. Il étudia la théologie à la Sorbonne, suivant en même temps des cours d’hébreu, d’arabe et de syriaque au collège royal. Ordonné prêtre, il fut curé d’abord de Vaugrigneuse, puis d’Asnières.

L’Église de France profondément troublée subissait alors la crise du jansénisme. Jubé prit parti contre le Eornuilaire et publia : Pour et contre Jansénius louchant les matières de la grâce, par M 1’J.. Paris, in-12, ouvrage qui fut bientôt saisi et supprimé. Le presbytère d’Asnières donna asile plus d’une fois à des jansénistes de la capitale et de la province ; le diacre Paris lui-même y fit un séjour. Sous prétexte de faire revivre la discipline anciennes, Jubé prohibait de son église les images et les figures des saints et toute espèce d’ornement, même sur l’autel. Et comme les paroissiens tenaient beaucoup aux images et statues dont l’église d’Asnières lui paraissait encombrée, il se chargea de leur construire une église neuve. Il avait imaginé un rite nouveau de la célébration de la messe. De peur que les entreprises du pape Jules II ne fussent par là remises en mémoire, il défendait qu’on chantât le motet O salularis hoslia. L’austérité de sa vie, sa piété sincère et ses abondantes aumônes empêchaient qu’on lui tînt rigueur de ces bizarreries. Tel était même l’ascendant du curé sur ses paroissiens qu’ils se seraient fait tuer pour lui. Il s’était à ce point imposé qu’il avait pu rétablir dans sa paroisse certaines pratiques de l’ancienne discipline pénitentielle. Il obligeait, par exemple, toute fille qui avait manqué à l’honneur à demeurer trois mois sous le porche de son église. LJn jour il refusa de célébrer la messe en présence de la marquise de Parabeyre, qui avait à Asnières sa maison de campagne et dont les relations mondaines avec le Régent de France étaient bien connues. Ce prince qui estimait l’abbé Jubé ne lui tint pas rigueur. « Elle connaissait le personnage, pourquoi s’est-elle exposée à l’affront, t> se contenta-t-il de répondre aux plaintes de la marquise.

L’apparition de la bulle Unigenitus ralluma le fanatisme de Jubé. Noncontent d’en appeler lui-même au concile, il parcourut tout le diocèse de Paris pour gagner les curés a la cause de l’appel. Ce zèle brouillon l’obligea à quitter sa cure en 1724. Il dut même comparaître devant le lieutenant de police et lui avouer qu’un ballot d’imprimés saisi à Rouen à l’adresse d l’abbé Amben était réellement pour lui. Ambon n’étant que l’équivalent grec de Jubé. Il convint encore d’avoir fait imprimer beaucoup d’écrits, mais jamais contre la religion de l’État. Pendant quelque temps il se tint prudemment caché aux environs de Paris, mais de sa retraite il ne laissait pas d’é rire à bien des personnes. Le Conseil de conscience présidé