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1577
1578
JOURDAIN FRANÇOIS — JOVINIEN

in-8°, Genève, 1578. C’est à cet opuscule que Jourdain donne la réplique.

Voir : Du Pin, Table des auteurs ecclésiastiques, Le seizième siècle, col. 1331, in-8°, Paris s. d. ; Moréri, Dictionnaire historique, in-fol., 1759, t. vi, p. 391 ; J. Port, Dictionnaire historique de Maine-et-Loire, Angers, 1876, t. ii, p. 416.

J. Baudot.

JOVET, chanoine de Laon et prieur de Plainchatel, est l’auteur d’un ouvrage apologétique auquel il donna tous ses soins : Histoire des religions de tous les royaumes du monde, revue, corrigée, augmentée et mise dans un meilleur ordre, Paris, 1710, 4 vol. in-12. Son but est d’établir que la religion catholique, apostolique et romaine est la seule dans les cinq parties du monde, qui sauve les hommes et qui soit digne de Dieu. Il expose donc ses dogmes, mais il s’attache surtout à une étude comparée des autres religions dont il montre l’origine superstitieuse et les erreurs.

Journal des Savants, année 1711, page 570 de la 1re édition, et 492 de la seconde ; Giraud et Richard, Dictionnaire universel des sciences ecclésiastiques ; Hurter, Nomenclator litterarius, 3e édit., t. iv, col. 922.

A. Thouvenin.

JOVINIEN. hérétique de la fin du ive siècle. — Sur les origines de Jovinien, sur sa patrie, sa famille, la date et le lieu de sa naissance, sa jeunesse et son éducation, nous ne possédons aucun renseignement. Nous ne savons de sa vie que ce que nous apprend l’histoire des controverses qu’il suscita. Ses écrits même, d’ailleurs peu étendus, ne nous sont point parvenus. Nous ne les connaissons, non plus que ses doctrines, que par le témoignage de ses adversaires et par les extraits que ceux-ci nous en ont conservés. Pour le combattre, saint Jérôme, saint Augustin, saint Ambroise, le pape saint Sirice, saint Vincent de Lérins, Pelage et Julien d’Eclane n’ont pas pu ne pas le citer souvent. Ils nous ont ainsi transmis quelques détails sur sa personne et sa conduite.

D’après toutes ces sources, Jovinien avait embrassé l’état monastique, et il avait, comme moine, pratiqué d’abord un ascétisme austère. Mais sous le pontificat de Sirice (384-398), vers 385, on le trouve à Rome menant joyeuse et bruyante vie en compagnie d’autres dévoyés. Jérôme nous a tracé de ses déportements un tableau dont les vives couleurs doivent peut-être s’adoucir un peu, mais qui, même en supposant quelque exagération de la part du fougueux polémiste, présente au lecteur un personnage dont les mœurs n’ont plus rien de monacal. Il poussait la licence d’autant plus loin qu il avait imaginé des principes dont il pouvait se prévaloir. Il allait prêchant : 1° que la virginité et le mariage sont en soi choses également bonnes, également méritoires : virgines, viduas et maritatas, quæ semel in Christo lolse sunt, si non discrepent cœleris operibus, ejusdem esse meriti ; 2° que la régénération par le baptême reçue avec une foi entière confère l’impeccabilité : eos qui plena jide in baptismale renedi sunt a diabolo non posse subnerli ; 3° qu’user des aliments en en remerciant Dieu vaut autant que jeûner : inter abstinentiam ciborum et cum graliarum actione perceptionem eorum nullam esse distantiam ; 1° qu’il y aura dans le ciel, pour tous ceux qui auront été fidèles à la grâce de leur baptême, égalité de récompense, ce qui suppose égalité de mérites ici-bas : esse omnium qui suum baptisma servaverinl unam in reqno cselorum remuneralionem. C’est parmi les diverses classes de la société romaine que le moine en rupture de ban commença à répandre ses théories et à étaler son libertinage : et, pour que rien ne manquât au scandale, il s’avisa bientôt de joindre la propagande par la plume à la propagande par la parole. Le pape, à qui son éluubration lut dénoncée, jugea qu’il était temps d’agir.

En présence de tout son clergé, convoqué à cet effet. il condamna solennellement la conscriplio lemrraria qu’il appelle aussi scriplura horrifica, de Jovinien. De plus, il excommunia nommément l’auteur, ainsi que huit de ses principaux satellites : Auxentius, Genialis, Germinator, Félix, Plotinus, Martianus, Januarius et Ingeniosus. Tous étaient déclarés coupables d’hérésie et de blasphème. Le texte dans les œuvres de saint Ambroise, P. L„ t. xvi, col. 1121, et dans Mansi, Concil., t. iii, col. 6(53.

Le novateur essaya alors de se justifier par la publication de plusieurs tracts. Ces Commentarii ou Commentarioli — tels sont les noms qui leur furent donnés dans la suite des débats — accumulaient en faveur des thèses condamnées force textes et exemples empruntés partie à l’Écriture et partie aux monuments de la littérature profane, et l’on n’y reculait pas, au besoin, devant de pitoyables sophismes. C’est ainsi qu’à l’objection tirée des faits quotidiens contre l’impeccabilité des baptisés, l’auteur répondait en niant simplement dans tous ces cas la validité du baptême reçu. Son style était d’ailleurs tourmenté, ampoulé jusqu’au ridicule et obscur au point de paraître souven’inintelligible. Cependant les chefs du mouvement s’étaient transportés à Milan, dans l’espoir apparemment soit d’y faire plus facilement des dupes, soit d’agir auprès de l’empereur Théodose pour échapper au bannissement, conséquence imminente de l’excommunication. Sirice y dépêcha à leur suite trois prêtres porteurs d’une copie de la sentence romaine, qu’ils devaient remettre à l’évêque Ambroise. Sans tarder, celui-ci assembla à son tour un synode provincial auquel il donna lecture du document, et, tous les considérants et toutes les clauses de la condamnation ayant été unanimement accueillis avec joie, Ambroise en informa le pape dans une lettre qui est plus qu’un acte d’adhésion, qui est une adresse d’actions de grâces et de chaudes félicitations. S. Ambroise, Episl., vm, P. L., t. xvi, col. 1123. Cette réponse des Milanais, nous apprend que Jovinien, outre les quatre articles mentionnés ci-dessus, se posait en adversaire de la virginité perpétuelle de Marie, mère de Jésus ; il ne niait pas qu’elle eût conçu miraculeusement par la seule opération du Saint-Esprit ; mais, selon lui. elle aurait cessé d’être vierge au moment et par le fait de son enfantement. Ce dernier point, dont il n’est question ni dans le décret du synode romain ni dans la lettre d’envoi de Sirice, n’appartenait pas, suivant toute vraisemblance, au fonds primitif des erreurs joviniennes. Saint Jérôme n’en eut pas non plus connaissance, car il n’y en a trace dans ses deux livres Adversus Jovinianum, qui parurent peu de temps après. Cf. ci-dessus, col. 915.

En revanche, le solitaire de Bethléem s en prenait vigoureusement et avec sa fougue ordinaire aux quatre autres propositions, qu’il réfutait successivement et dans 1 ordre même, semble-t-il, suivi par les Commentarii. A des assertions fondées uniquement sur une dialectique captieuse et de parade, il opposait la force d’une logique droite et rigoureuse, servie par une profonde connaissance de la Bible et par une vaste érudition en matière traditionnelle. Quant à la rédaction des Commentarii, qui prêtait à la critique et à la raillerie, il ne se fit point faute de la railler et de la critiquer. Si l’hérétique n’est pas ménagé, le malencontreux écrivain est malmené avec une verve impitoyable ; et la satire est d’autant plus virulente qu’elle est appuyée d’exemples démonstratifs. Toutefois Jérôme eut sans doute tort, dans son entrain à défendre la doctrine catholique, dans son amour enthousiaste pour la virginité, d’exalter celle-ci au point de paraître, aux yeux des adversaires et même de quelques autres, faire peu de cas du mariage, sinon le