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JOSUÉ, LA PERSONNE ET L’ŒUVRE

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Hébal par exemple. Jos., viii, 30-31. D’autre part, le voisinage de sanctuaires cananéens à Galgala ou au mont Hébal pour l’érection du monument qui doit perpétuer le souvenir du passage du Jourdain ou le renouvellement de l’alliance n’allait pas sans de graves inconvénients pour l’avenir ; en même temps que la mémoire des grands événements qui s’y étaient accomplis, les Israélites risquaient d’y trouver le contact avec les cultes cananéens qui continuaient de s’y célébrer et d’en subir la néfaste influence.

Au sanctuaire de Galgala se rattache encore l’épisode de la circoncision faite par Josué sur les enfants d’Israël, après le passage du Jourdain. Jos., v, 2-9. (De ce passage, 2-3 et 8-9 seraient du Jéhoviste ou de l’Elohiste, 4-7 du rédacteur deutéroomiste ou même d’après quelques critiques, une addition tardive.) Dans l’hébreu et la Vulgatc, Jahvé donne à Josué l’ordre de circoncire de nouveau les enfants d’Israël ; dans les Septante (excepté A) il n’est pas question d’une nouvelle circoncision, aussi considère-t-on en général la leçon de l’hébreu comme non authentique. Ainsi Bennett, Dillmann, Steuernagel. Le but de cette circoncision, du moins d’après 8-9, est d’enlever l’opprobre de l’Egypte ; qu’est-ce à dire ? selon l’interprétation la plus probable et la plus généralement acceptée, cet opprobre serait le mépris que les Égyptiens, qui pratiquaient eux-mêmes la circoncision, manifestaient à l’égard de ceux qui ne s’y étaient pas soumis ; d’autres y voient la situation déshonorante des Hébreux, réduits à l’esclavage sur les bords du Nil et désormais, réconciliés avec leur Dieu, assurés de l’héritage de la Terre promise, la circoncision étant ainsi le signe de l’alliance d’Israël avec son Dieu. Cf. de Hummelauer, op. cit., p. 153-166. En raison même des circonstances où s’opère cette circoncision on y a vu aussi la marque de l’aptitude au mariage et à la guerre, ce ne sont pas, en effet, des enfants mais des jeunes gens qui sont circoncis. Steuernagel. Deuteronomium und Josua, Gœttingue, 1900, p. 186. Cf. art. Circoncision dans Vigouroux, Dictionnaire de la Bible, t. ii, col. 774-775, et dans le Dictionnaire de Théologie, t. ii, col. 2519-2527.


IV. La personne et l’oeuvre de Josué

Le nom hébreu de Josué, d’abord Hôsêâ’, Osée « salut » fut changé par.Moïse en Yehôsùà’, Josué « Jahvé est le salut >, Num., xui, 17 ; dans les Septante ce nom est devenu’IyjaoOç, qui est traduit quelquefois par Jésus dans la Vulgate. Eccli., xlvi, 1 ; I Macch., ii, 55. Cette similitude de nom avec Notre-Seigneur Jésus-Christ a suggéré à des Pères de l’Eglise des rapprochements entre leur mission, leur rôle de sauveur du peuple et a fait considérer le conquérant de la Palestine comme une figure de Jésus. Saint Jérôme, Episl., lui, n. 8, P. L., t. xxii, col. 545. De la tribu d’Éphraïm, fils de Noun, selon l’hébreu, de Navé, selon les Septante, Josué apparaît déjà dans l’histoire d’Israël peu de temps après la sortie d’Egypte. Ex., xvii, 8-14.

Une question préliminaire serait à résoudre ici, celle de l’existence d’un personnage historique du nom de Josué, héros du livre qui porte son nom. On a voulu, en effet, reléguer dans le domaine de la légende et des mythes, non seulement les événements racontés au livre de Josué, mais Josué lui-même, pour en faire la personnification du clan éphraïmite (Stade, Ed. Meyer, Wellhausen). La preuve, dit-on, c’est que dans le document le plus ancien, le Jahviste, Josué n’est même pas mentionné et que, plus on s’écarte de l’époque de l’entrée en Canaan, plus son rôle et son importance augmentent, en sorte que de simple héros éphraïmite dans l’Elohiste, il devient dans le Deutéronomiste et le récit sacerdotal le chef de tout Israël, le continuateur de Moïse. La valeur historique du livre étant établie par ailleurs, il suffira de faire remarquer que si le personnage de Josué grandit avec les développements successifs de la tradition, cela exige au moins à l’origine son existence et que même dans Jos., xvii, 14-1K. tenu généralement pour un élément jahviste, Josué apparaît non pas seulement comme le chef d’Éphraïm mais de tout Israël, auquel les tribus en appellent dans leurs contestations au sujet de la répartition des territoires. De plus les autres données de la tradition et la simple vraisemblance historique exigent, au moment de l’entrée des Hébreux en Canaan, leur réunion sous l’autorité d’un seul chef. Smith, art, Joshua, dans Hastings, A Diclionary of the Bible, t. ii, p. 786 ; Kittel, Geschichle des Voilas Israël, t. ii, p. 582-583.

Le premier renseignement que donne la Bible sur Josué, le représente déjà comme un chef valeureux, auquel Dieu donne la victoire. Ex., xvii, .S-14. A maintes reprises il apparaît aux côtés de Moïse, comme son serviteur dès le temps de sa jeunesse, Ex.. xxxiii, 11 ; Num., xi, 28 ; en qualité de représentant de la tribu d’Éphraïm, il est du nombre des douze explorateurs envoyés en Canaan, Num., xui, 9 ; xiv, 6, 30, 38, et son attitude en cette circonstance souligne encore le courage et la-confiance en.lahvé qui annoncent et préparent le vainqueur des Cananéens. Plus rien ensuite à son sujet durant les longues années des pérégrinations d’Israël dans le désert, jusqu’au moment où Moïse, averti de sa fin prochaine, le désigne pour son successeur, Num., xxvii, 15-23 ; Deut., xxxiv, 9 ; xxxi, 14, 23, avec mission d’établir le peuple dans la Terre promise.

Avant de rappeler brièvement le rôle de Josué dans la conquête et le partage de Canaan, il y aurait lieu d’indiquer l’époque à laquelle se déroulent les événements et pour les comprendre la situation du pays au moment de l’entrée des Hébreux. Quelques mots simplement pour fixer les points importants. La détermination de l’époque de la conquête dépend naturellement de celle de l’exode. A s’en tenir aux données bibliques du problème, surtout à III Reg., vi, 1, qui compte 480 ans entre la sortie d’Egypte et la construction du temple, la quatrième année de Salomon, le début de la conquête se placerait aux premières années du xv° siècle, mais les données chronologiques de la Bible n’ont bien souvent qu’une valeur approximative. D’autre part, la comparaison des données de l’histoire biblique et de l’histoire égyptienne, en raison même des ressemblances qu’offrent les luttes soutenues par les rois des xviii c et xixe dynasties, n’aboutit pas à une conclusion certaine permettant de se prononcer pour l’une plutôt que pour l’autre, pour le xui c plutôt que pour le xv c siècle. Si, en faveur de la date la plus reculée, on peut invoquer son adaptation plus complète aux données bibliques, entre autres à la durée qu’exigerait la période des Juges et la concordance qui en résulterait avec l’époque des tablettes de Tell-el-Amama, en revanche i ne manque pas de bonnes raisons non plus en faveu de la date plus récente dont les partisans sont nom breux. « C’est une vérité incontestable, dit l’un d’eux après avoir fait les réserves nécessaires, que l’hypothèse Ménephtah-exode s’harmonise admirablement avec l’histoire archéologique du Delta oriental. » A. Mallon, Les Hébreux en Egypte, Rome, 1921, p. 181. D’une part, en effet, la Bible nous apprend que les pharaons firent exécuter en Egypte de grands travaux dans diverses villes et d’autre pari, le souvenir des pharaons de la xix° dynastie, Seti I’r, Ramsès II, Ménephtah s’attache indubitablement à des localités ou à des monuments de la marche asiatique. « Les Hébreux travaillèrent à la construction des villesmagasins Pithom et Ramsès. Or les recherches ré-