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JOSEPH DE PARIS


cette lutte et elle ne tardera pas à devenir la première conquête du Fx. Joseph. Il prit ce nom en recevant l’habit religieux, le 2 février 1599 ; le 3 février de l’année suivante, il prononçait ses vœux au couvent de Saint-Honoré à Paris. A peine sa formation religieuse terminée, il est ordonné prêtre et chargé d’enseigner la philosophie. La débilité de ses yeux lui rendant cette tâche difficile, au bout d’un an, on le place à la tête du noviciat de Meudon. Là encore il ne fait que passer, c’est à la vie apostolique que Dieu le destine et c’est à elle que vont toutes ses aspirations. Nous ne pouvons le suivre dans ses prédications, ni dans ses charges ; arrivons à l’année 1610. Devenue trop importante, la province des capucins de Paris est divisée en deux, Paris et Touraine. Par son origine le P. Joseph appartenait de droit à la première ; cependant il est fixé dans la seconde, afin de continuer à travailler à la réforme de Fontevrault, dont il a commencé de s’occuper, à la demande de l’abbesse Mme Éléonore de Bourbon, tante d’Henri IV, et ensuite de sa nièce et coadjutrice, Mme Antoinette d’Orléans. Fontevrault ne se réforme pas, mais de ces relations du religieux avec les fontevristes sortira en 1617 la nouvelle congrégation des bénédictines du Calvaire. De 1613 à 1616 le P. Joseph avait été provincial de Touraine ; c’est alors qu’il commença la mission du Poitou, pour la conversion des protestants. Une autre pensée le travaillait depuis longtemps : c’était la délivrance des Lieux saints par une nouvelle croisade. Quand en 1616 il se rend à Rome, il expose son projet à Paul V, qui l’approuve et l’encourage ; il profite de son voyage de retour pour y intéresser les princes dont il traverse les États. En 1618 il part pour l’Espagne dans ce but, sur l’ordre du pape, et vers les mêmes temps il seconde le duc de Nevers qui venait de fonder un nouvel ordre de chevalerie, la Milice chrétienne. Les événements politiques font échouer tous ces projets ; en attendant l’heure de la Providence, il continue ses négociations, et, ne pouvant conquérir la Terre sainte par les armes, il organise des expéditions de missionnaires dans tout le Levant et le Maroc, tout en développant celles de France contre les hérétiques. A la suite d’un autre voyage à Rome, en 1625, pendant lequel il a présenté à Urbain VIII son poème de la Turciade, destiné à chanter la croisade, il est, conjointement avec le P. Léonard de Paris, établi par la récente Congrégation de la Propagande préfet des Missions d’Orient. Il les veut confiées aux seuls capucins français, car le P. Joseph est patriote en tout. La haute situation qu’il occupe à la cour, où Richelieu l’a voulu près de lui, facilite ses desseins ; aussi ne manque-t-il pas d’en user pour le succès de ses entreprises apostoliques. Les affaires d’État ne l’absorbent pas tout entier, et jamais elles ne lui font perdre de vue sa vocation. C’est surtout aux religieuses du Calvaire, dont les maisons se multiplient, qu’il consacre les loisirs que lui laisse la politique. A Paris, où il a fondé deux monastères, l’un auprès du Luxembourg, en 1620, l’autre au Marais, en 1634, il aimait à aller se délasser pus d’elles en leur adressant des conférences sur les obligations de la vie religieuse et l’esprit de lenr congrégation. Ses Exhortations ne duraient jamais moins d’une heure, et il leur en adressa plus de quatre cents pendant les six dernières années de sa vie. Le 13 décembre 1638 il entretenait ses filles du recouvrement des s ; iints J.icux, où il leur promettait un établisse nient prochain. Deux jours après, il était frappé d’apoplexie et le IN il mourait à Rueil.

Nous n’avons pas ; i eux isagex ici le P. Joseph comme homme d’État, ni à défendre sa politique. « Elle fut catholique toujours, la politique du P. Joseph, » proclame l’abbé Dedouvres, qui plus qu’aucun autre a étudié et pénétré ce personnage, mais qui malheureuse ment laisse inachevée une œuvre qu’il voulait parfaite († 28 sept. 1922). On lui a fait un crime d’avoir contracté ou renouvelé des alliances politiques avec les princes protestants contre la maison d’Autriche. Ce n’a été qu’une nécessité qu’il lui fallait subir, et il ne faisait qu’user du droit naturel de légitime défense contre des pays catholiques, qui, comme l’Espagne, attaquaient sournoisement la France, catholique elle aussi, en se servant des huguenots. Il la voulait victorieuse de ses ennemis avant de la lancer dans la croisade, à laquelle il n’avait jamais renoncé.

L’œuvre littéraire du P. Joseph est phénoménale. Toute sa vie il a écrit ou dicté des traités et des mémoires, spirituels durant les premiers temps de sa vie religieuse, politiques et polémiques quand il entra dans les affaires d’État. Son esprit était toujours en travail ; dans ses fréquents voyages il trompait les longueurs de la route en composant des vers français ou latins, en méditant de hautes pensées, que le soir il confiait au papier. Ne nous occupons que de ses œuvres spirituelles, dont une partie seulement est imprimée. Exercice des bienheureux praliquable en terre par les âmes dévotes et despouillées des affections de la terre. Les sept dons du S. Esprit et les douze fruicts du S. Esprit, Troyes, 1610, Paris, 1633, Nimes. 1895 ; Introduction à la vie spirituelle par une tacile méthode d’oraison, Poitiers, 1616, Paris, 1620, 1626 ; rééditée sous le titre de Méthode d’oraison du P. Joseph du Tremblay, par le P. Apollinaire de Valence, Le Mans, 1897 ; Practique intérieure des principaux exercices de la vie chrétienne, Paris, 1621, 1626, 1638, recueil de petits traités composés à diverses époques ; De la perfection séraphique, ou du bonheur admirable des serviteurs de Jésus-Christ, exprimé sous la forme d’une couronne mystique, laquelle il donne à tous les observateurs de ses divins conseils et spécialement aux religieux de S. François, Paris, 1624 ; La perfection séraphique, fragmens d’une explication mystique sur la règle du séraphique Père S. François ; Traité des trois vœux de religion, œuvre posthume, Niort, 1646, publiée par son secrétaire, le P. Ange de Mortagne, qui mourut cette même année et ne put donner suite à ce premier volume. Plusieurs de ces ouvrages avaient été composés « pour les novitiaux et séminaires des capucins, » comme on le lit sur le titre de l’un d’eux. Pour les calvairiennes il composa les Considérations sur la règle de S. Benoisl, sur lesquelles sont fondées les constitutions, Paris, 1634 ; Cérémonial des religieuses de la congrégation de N.-D. de Calvaire, Paris, 1634, 1661 ; La vocation des religieuses de la première reigle de S. Benoist, fondées par la R. M. Anthoinelle d’Orléans, sous le titre de la congrégation de N.-D. de Calvaire, Paris, 1621, 1637, Nantes, 1670, Nîmes, 1895 ; Les exercices spirituels des religieuses bénédictines de N.-D. de Calvaire, Paris, 1641, 1671, recueil d’exercices composés par le P. Joseph, pour le public ou spécialement pour les religieuses ; Êpistres écrites à plume volante aux religieuses de N.-D. de Calvaire, Paris, 1677 : triple recueil de lettres auxquelles il en faut joindre six autres, imprimées du vivant de l’auteur, 1631-1637, et que les calvairiennes appellent hs Grandes c/iistres.— Auxouvrages spirituelsdu P. Joseph il faut ajouter le poème latin dont nous avons parlé : Turciados libri quinque Urbano VIII Pont. Max. àicati, Paris, 1625. Outre la Méthode d’oraison, le P. Apollinaire a publié Quatre opuscules du P. Joseph du Tremblay ; 1. La fondai ion de l’ordre des bénédictines du Calvaire. II. La vocation des bénédictines du Calvaire. III. Mémoires du P. Joseph sur son enfance et son adolescence. IV. L’exercice des bienheureux, Nîmes, 1895 : dont le premier et le troisième étaient inédits. Nous omettons d’autres publications pour mentionner on recueil de vingt-huit exhortations con-