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LANGUES (DON ])RS.


I Esdr., iv, 7 ; Joa., i, 39, 43 ; ix, 7 ; Heb., vii, 2 ; 81sp-Hvjveûeiv : II Macch., T, 36 ; Act., ix, 36 ; ne6ep[Xï)V£Ûciv : Matth., i, 23 ; Marc, v, 41 ; xv, 22, 34 ; Joa., i, 39, 42 ; Act., iii, 36 ; xiii, 8. De plus, l’explication du langage en idiomes étrangers est la seule qui réponde exactement au sens de la prophétie d’Isaïe, xxviii, 11-13 ; cf. 7, 10 ; et elle semble aussi répondre à la pensée de l’apôtre. I Cor., xiii, 1.

2° Le don des langues chez les autres écrivains inspirés.

— Il est question du don des langues en saint Marc, xvi, 17, comme de l’un des « signes » qui accompagneront ceux qui croiront. Le concept paulinien peut très bien s’appliquer à ce texte. Il est également question du don des langues au livre des Actes, ii, 4-13 ; x, 454’o ; xix, 6. Le concept paulinien s’applique également sans difficultés aux textes des chapitres x et xix. On y retrouve d’ailleurs les expressions mêmes de I Cor., xu-xiv. Seul, Act., ii, 4-13 présente quelque difficulté.

II y est question, en effet, des apôtres qui, « remplis de l’Esprit Saint, commencèrent à parler diverses langues selon que l’Esprit Saint leur donnait déparier, » t. 4. Et les Juifs étrangers, qui, appartenant à quinze nations différentes, habitaient alors Jérusalem, les entendaient avec étonnement parler dans leur langue maternelle, ^.5-10 : « Nous les avons entendus parler en nos langues les grandes œuvres de Dieu. » ꝟ. 11. On se demande s’il ne s’agirait pas ici d’un don spécial, accordé aux seuls apôtres, en vue de la prédication de l’évangile : « Telle est, écrit Corluy, l’opinion communément reçue chez les saints Pères et chez les docteurs catholiques. Elle a jeté chez les fidèles de si profondes racines que plusieurs ne conçoivent pas autrement le don des langues, qu’en vue de la prédication de l’Évangile aux nations étrangères. » Parmi les Pères ayant interprété en ce sens Act., ii, on cite Origène, In Epist. ad Romanos, 1. 1, n. 13, P. G., t. xiv, col. 860 ; saint Jérôme, Epist., xi.i (al. liv), ad Mar(cllam ; cxx (al. cl) ad Hedibiam, P. L., t. xx, col. 474, 093 ; saint Jean Chrysostome, Quod Christus sit Deus, n. 7, P. G., t. xlviii, col. 822 ; saint Augustin, In Joannis evangelium, tract, xxxix, n. 5 ; In Joannis cpislolas, tract, vi, n. 3, 10, P. L., t. xxxv, col. 1683, 1991, 2025 ; saint Léon le Grand, Serm., lxxv, P. L., t. liv, col. 401 ; saint Ma’xime de Turin, Serm., xlix, l, De Penlccoste, P. L., t. lvii, col. 634, 636 ; saint Grégoire le Grand, In Evanyel., homil. xx, n. 4, P. L., t. lxxvi, col. 1222. Parmi les théologiens, on cite Saint Thomas d’Aquin, In I Cor., c. xiv, lect. 1 ; et surtout Sum. theol, II » IVe, q. clxxvi ; cf. I" IVe, q. xci, a. 4 ; Suarez, De gralia, prolegom. ii, c. 5 n. 48 sq. ; De fide, disp. VIII, sect. ii, n. 8 ; Desanctissima eucharistia, disp. LXXXIII, sect. i, n. 21 ; Benoît XIV, De servorum Dei beatificatione, t. III, v. XLvm, n. 8. A cette interprétation se sont également rangés, parmi les exégètes, Salmeron, Corneille de la Pierre, et, plus récemment, Loch, Reischl, Allioli et substantiellement du moins, J. Belser, Theologisehe Quarlalschri/t, 1895, p. 85 sq. ; et Beitràge zur Erklârung der Apostelgeschichte, Fribourg-en-B., 1897, p. 17. Elle a été accueillie avec empressement par la plupart des auteurs ascétiques ou catéchétiques et défendue, au siècle dernier, par Engelmann, Charismen, Batisbonne, 1848, et par Corluy, art. Langues, dans le Dictionnaire apologétique de Jaugey (article reproduit tout récemment dans le Dictionnaire apologétique de M. d’Alès).

En soi, cette interprétation ne renferme pas de contradiction et peut être défendue. Mais, au point de vue exégétique, on ne saurait l’appuyer sur le sens de l’Écriture. Le c. n des Actes ne nous donne pas, en effet, du don des langues, une notion différente de celle qu’expose la I Cor. de saint Paul. Il est certain que l’expression loqui variis linguis, Act., ii, 4, marque

un don de l’Esprit Saint, en vertu duquel les apôtre ? et ceux qui étaient avec eux dans le Cénacle parlèrent vraiment les langues des différentes nations, alors représentées à Jérusalem, ꝟ. 6, 8, 11. Mais, qu’on le remarque, l’objet de ce langage était, non la prédication de l’évangile, mais la louange de Dieu, loquenles magnolia Dei, ꝟ. 11, célébrée sous l’impulsion de l’Esprit Saint, prout Spirilus sanctus dabal cloqui illis, f. 4. L’effet de ce langage fut de provoquer la stupeur, l’admiration d’un grand nombre, ꝟ. 12, et les moqueries de quelques-uns, ï. 12. En tout cela, rien qui différencie le don des langues des Actes, du don des langues de la I" aux Corinthiens.

L’identité des deux notions n’est pas compromise du fait que d’après les Actes, les auditeurs comprirent, en leurs langues maternelles, les paroles prononcées par les glossolales. Mus par l’Esprit Saint, les apôtres et les disciples parlèrent diverses langues, et il est rigoureusement exact de dire que, parmi les Juifs étrangers habitant alors Jérusalem, les Arabes comprirent la langue arabe, les Romains, la langue latine, les Grecs la langue grecque. Mais le texte sacré ne dit nullement que les Grecs comprirent l’arabe, les Arabes, le latin, etc.

L’admiration et la stupeur provoquées par l’usage du don des langues lit que, ce bruit s’étant répandu, la multitude s’assembla autour des apôtres, ꝟ. 6. La prédication de l’Évangile ne put donc avoir lieu qu’ensuite, et c’est Pierre qui, au nom de tous, prit la parole. En ce qui concerne le discours de Pierre, rien dans le texte sacré ne nous autorise à penser que l’apôtre parla en une langue autre que sa langue natale, l’araméen, laquelle d’ailleurs était comprise des Juifs même étrangers qui habitaient Jérusalem au moment des fêtes.

11 semble donc qu’au point de vue exégétique on doive s’écarter de l’opinion proposée en premier lieu et retenir qu’il n’y a qu’une espèce de don des langues, celle dont saint Paul a tracé la psychologie. Telle est la solution jadis donnée par Cajétan, In Act., n et In 7 am ad Cor., xu-xiv et par Estius, In I* m adCor., xii xiv et aujourd’hui presque unanimement défendue par les exégètes catholiques. Cf. Fonck, De charismatis, § 3, dans Hagen, Lexicon biblicon, Paris, 1905, t. i, col. 833-860 ; Seissenberger, Kirchenlexicon, art. Charismen ; Mgr Le Camus, L’œuvre des apôtres, Paris, 1891, p. 15 ; Knabenbaucr, dans les Stimmen aus Maria Laach, t. xli (1891), p. 582 ; Cornely, Introductio, t ! i, p. 295 ; t. iii, p. 445 ; In 7° m ad Cor., xiv, p. 410 ; le P. Prat, Théologie de saint Paul, 7e édit., Paris, 1920, 1. 1, p. 152-154 ; M. Camerlynck, Commentarius in Actus apostolorum, 7e édit., Bruges, 1923, p. 118-119 ; Lesêtre, art. Langues (Don des), dans le Dictionnaire de la Bible de M. Vigouroux ; Brassac, Manuel biblique, 14e édit., t. IV, p. 290-294, etc.

La tradition catholique et les opinions adverses.


Nonobstant les divergences quant à l’interprétation d’Act., ii, 4-13, la tradition catholique est unanime à concevoir le don des langues comme la faculté surnaturelle de prier ou de louer [ou de prêcher] Dieu en une langue étrangère sous l’influence de l’Esprit Saint. Voici les principales références, relevées par le P. Fonck, op. cit. : S. Irénée, Cont. hæres., III, xii, 1 ; xvii, 2 ; V, vi, 1, P. G., t. vii, col. 892, 929, 1137 ; Tertullien, Adv. Marcionem, V, uuP.L., t.n, col. 490 ; Origène, In Epist. ad Romanos, t. I, n. 13 ; cf. In Exod., homil. xiii, n.2, P. G., t. xiv, col. 860 ; t. xii, col. 388 ; S. Cyrille de Jérusalem, Catech., xiv, 7 ; xvii, 16 sq, P. G., t. xxxiii, col. 832, 987 ; S. Filastrius, Hieres., civ, P. L., t. xii, col. 1217 ; S. Grégoire de Nazianze, Oral., xliv, 1, P. G., t. xxxvi, col. 608 ; S. Grégoire de Nysse, Oral, de Spiritu Sanclo, t. xlvi, col. 698 ; Ambrosiaster. In 7° m ad Cor., xiv, P. L., t. xvii,