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LA MOTHE LE VAYER — LAMOURETTE

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expose cette sceptique chrétienne sont : Discours pour montrer que les données de la philosophie sceptique sont d’un grand usage dans les sciences, Paris, 1668 ; Du peu de certitude qu’il y a dans l’histoire, Paris, 1668 ; Hexaméron rustique ou les six journées passées à la campagne, Paris, 1671, et principalement Cinq dialogues faits à l’imitation des anciens par Orasius Tubero, Francfort, Sarius, 1506 (indications fausses évidemment ; la date véritable est incertaine). Ces dialogues ne sont guère qu’un commentaire de Sextus Empiricus, soit que le Vayer fasse siens les dix motifs de doute empruntés par Sextus à Énésidème, soit qu’il donne pour idéal à la vie humaine l’idéal même que fixe Sextus : la tranquillité de l’âme dans l’indifférence. Il conclut par deux vers espagnols qui signifient : Des choses les plus certaines, la plus certaine est le doute. Le cinquième dialogue porte sur l’origine de la nature et la différence des religions. Mettant à part « la religion fondée sur l’Ancienne et sur la Nouvelle Alliance », il traite la question avec le scepticisme le plus radical et il va jusqu’à faire l’éloge de l’athéisme qui ne trouble jamais les États et rend l’homme plus attentif sur lui-même, puisqu’il n’a pas à porter plus loin ses regards.

A propos de ce livre on a posé la question de la sincérité religieuse, de le Vayer. Est-il sceptique par érudition et de surface ? « Ses plus grands écarts, a-t-on dit, ne sont que des réminiscences des sceptiques anciens. » Cité par Perrens, op. cit., p. 130. Est-il au contraire un sceptique convaincu, comme l’indique Hanotaux ? Histoire du cardinal de Richelieu, t. i, p. 97. Alors, est-il, comme son maître Montaigne, à la fois d’esprit sceptique et indépendant et d’habitudes chrétiennes ? Ou ses protestations religieuses seraient-elles feintes, comme celles de Voltaire, qui met sous le nom de le Vayer ses propres idées sur la religion ? Idées de La Molhe le Vayer ; œuvres de Voltaire, t. v. La question ne peut se résoudre. Quoi qu’il en soit, le Vayer prépara le rejet de la doctrine et de la morale chrétiennes que devait accomplir le siècle suivant et « la considération dont il jouissait dans les classes élevées augmenta l’effet produit par ses ouvrages ». Lange, op. cit.

Abrégé de la vie de M. de la Molhe le Vayer par M. la Ch… C… D. N., dans les Œuvres complètes, édit. de Dresde, t. I ; Bayle, Dictionnaire critique ; Montlinot, Esprit de La Molhe le Vayer, in-12, Paris, 1763 ; Alletz, Philosophie de La Molhe le Vayer, in-8°, 1849 ; J. Denis, Sceptiques ou libertins de la première moitié du XVIIe siècle, dans Mémoires de l’Académie de Cæn, 1884 ; R. Kerviler, François de La Molhe

le Vayer, in-8°, Paris, 1879. „

C. Constantin.

LA MOTTE (Louis-François-Gabriel d’Orléans de) (1683-1774), naquit à Carpentras le 13 janvier 1683, étudia la théologie à Avignon et au séminaire de Viviers ; il fut chanoine de Carpentras et séjourna à Rome en 1707, puis il devint théologal de Carpentras, grand vicaire d’Arles (1725) ; c’est en cette qualité qu’il assista au concile d’Embrun où l’évêque de Senez, Soancn, fut condamné. Soanen ayant été exilé, La Motte fut administrateur du diocèse d’Embrun, avec Yse de Saléon (octobre 1729). Il fut nommé évêque d’Amiens, le 25 août 1733, à la mort de Sabathier. Dans son diocèse, La Motte s’occupa tout particulièrement de l’éducation de la jeunesse et de la formation des prêtreb, afin d’écarter le jansénisme. Par sa douceur et par sa modération, il ramena beaucoup de jansénistes et cela lui a valu les attaques des Nouvelles ecclésiastiques qui, très souvent, critiquent son administration du diocèse d’Amiens (voir les labks, t. ii, p. 55-64). Il s’intéressa à la célèbre affaire du chevalier de La Barre en faveur duquel il intervint. Il mourut le 10 juin 1774, avec la réputation d’un saint

On a de lui : Avis à ses curés au sujet des refus de

sacrements, in-4°, s. 1., 1746. Cet écrit fut condamné par arrêt du Conseil le 7 janvier 1747. — En 1747, La Motte fit éditer un Missel et un Bréviaire ; en tête du Missel se trouve une Instruction très pieuse sur la célébration de la Messe. — Mandement par lequel il adhère à l’instruction pastorale de l’archevêque de Paris du 19 septembre 1756. Ce mandement, daté du 14 novembre 1756, fut condamné avec l’instruction pastorale de l’archevêque de Paris et celui-ci fut exilé. — Lettres spirituelles, in-12, Paris, 1777. C’est une œuvre posthume.

Michaud, Biographie universelle, art. Dorléans, t. xi, p. 210 ; Abbé d’Argnies, Mémoires en forme de lettres sur Louis François Gabriel d’Orléans de La Motte, évêque d’Amiens, 2 vol. in-12, Malines, 1785, et nouv. édit., 3 vol. in-12, Paris, 1843 ; Proyart, Vie de Mgr d’Orléans de La Moite, évêque d’Amiens, dédiée à Mgr l’archevêque de Sens, premier ministre, in-12, Paris, Lyon, Amiens et Lille, 1788 ; Guillon, Éloge de M. Dorléans de La Motte, in-8°, Paris, 1809 ; cet ouvrage a été couronné par l’Académie d’Amiens en 1809 ; Roze, L’Église d’Amiens de 1734 à 1856 ou simples noies pour servir à la continuation du Gallia christiana, in-8°, Amiens, 1871 ; Delgove, Histoire de M. de La Motte, évêque d’Amiens, in-8°, Paris, 1872.

J. Carreyre.

LAMOURETTE Adrien (1742-1794), naquit à Frévent, dans le Boulonnais, en 1742 ; il entra chez les lazaristes et fat professeur, puis supérieur au séminaire de Toul, enfin directeur de la maison de Saint-Lazare et vicaire général d’Arras. Ce fut lui qui, en qualité de théologien de Mirabeau, prépara le discours que prononça le célèbre orateur à l’Assemblée nationale sur les affaires ecclésiastiques. Il rédigea aussi pour Mirabeau le projet d’adresse aux Français sur la Constitution civile du clergé. Il prêta serment à cette constitution et fut nommé évêque constitutionnel du département de Rhône-et-Loire ; il fut sacré le 27 mars 1791 par Gobel, évêque constitutionnel de Paris. Son département l’envoya comme député en septembre 1791 à l’Assemblée législative où il s’appliqua à prêcher l’union de tous les partis qui se donnèrent le « baiser Lamourette ». Sa conduite resta indécise ; cependant il flétrit les massacres de septembre. Puis il se retira à Lyon où il demeura durant le siège de 1793. Il fut arrêté le 29 septembre 1793 et envoyé à Paris devant le tribunal révolutionnaire. Jugé le 22 nivôse an II . Il janvier 1791), il fut condamné à mort et exécuté le même jour. A la Conciergerie, sur les conseils de l’abbé Émery, il avait signé le 7 janvier, une rétractation qui fut publiée dix-huit mois plus tard.

On a de lui : Pensées sur la philosophie de l’incrédulité ou Réflexions sur l’esprit et le dessein des philosophes irréligieux de ce siècle, in-8°, Paris, 1786. Cet ouvrage, dédié à Monsieur, frère du roi, comprend dix discours dont le but est de détourner « des dangereux principes de l’incrédulité, issue de la philosophie antichrétienne ». Dans le viiie discours, Lamourette souligne la luxure effrénée répandue dans les écrits des philosophes où il trouve la source du désordre des mœurs publiques et l’indécence des calomnies dont l’incrédulité s’efforce de déshonorer la religion (9 discours). — Les délices de la religion ou le pouvoir de l’Évangile pour nous rendre heureux, in-12, Paris, 1788 ; traduit en espagnol, in-8°, Madrid, 1791. Cet écrit, dédié à la marquise de Sillery, montre la fausseté du bonheur du monde et la solidité du bonheur que procurent la vertu et l’accomplissement des devoirs de la vie chrétienne ; Lamou rette y trace les devoirs de l’homme religieux. — Pensées sur la philosophie de la foi ou te système du christianisme entrevu dans son analogie avec les idées naturelles de l’entendement humain, in-8°, Paris, 1789, dédié au cardinal Louis-Joseph de Montmorency-Laval, évêque de Metz ; vues générales sur la vie chrétienne, sur la théodicée et la cosmologie.