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LAMENNAIS, ŒUVRES


principes leur prescrivaient de se renfermer, » p. 73. Bien que les éditions postérieures indiquent que « les Réflexions sur l’état de l’Église, publiées en 1808, furent aussitôt saisies par la police de Bonaparte, » M. Maréchal, p. 250, pense qu’elles furent plutôt « retirées du commerce et mises en lieu sûr, en attendant l’occasion favorable. » Voir dans Feugère, p. 90-102, la comparaison entre le texte de l’édition dite de 1808, et celui de l’édition de 1814, en ce qui concerne l’éloge de Napoléon.

2. Tradition de l’Église sur l’institution des évêques, 3 vol. in-8°, 181 1. (’/est le second des ouvrages dus à la collaboration des deux frères. M. Maréchal a longuement étudié la genèse de la « Tradition », dans les c. v, vi et vin de la deuxième partie de La jeunesse de Lamennais. Dès 1806. la question— de l’institution des évêques par le pape ou sans le pape préoccupe Jean-Marie et sa solution est catégorique en faveur du droit exclusif du pape. lit il entreprend de « remonter aux sources, de lire et relire les ouvrages fondamentaux. » Il amasse donc les matériaux qu’il confiera à Féll, pour que celui-ci en lire un livre. Il y eut deux rédactions, ou plutôt deux stades dans la rédaction, marqués par l’apparition du livre de « M. Tabaraud, prêtre de la ci-devant congrégation de l’Oratoire, » l’Essai historique et critique sur l’institution canonique des éuêques. A rencontre de la thèse gallicane que M. Boyer, dans son Traité de l’Église, formulait en ces termes : « En reconnaissant que le droit d’instituer les évêques n’est pas une prérogative essentielle du pape, mais une concession que lui a faite l’Église depuis le xiii c siècle, nous reconnaissons par cela même que l’Église universelle pourrait le lui retirer et en revêtir de nouveau les métropolitains, » cf. Maréchal, p. 310-314, nos néophytes ultramontains, vont démontrer, la théologie et l’histoire en mains, que primitivement tous les évêques, l’évêque de Rome excepté, étaient égaux, p. xxiii, que la supériorité de certains évêques sur d’autres évêques ne peut venir que du pape, p. xxv, que toute juridiction dans l’Église n’est qu’une participation, une dérivation, une délégation de la juridiction universelle du pape, L’ouvrage est divisé en trois parties : « La première partie commence par une histoire abrégée de l’établissement dés patriarches. On fait voir qu’ils ont été tous institués par l’autorité de saint Pierre, et que leurs privilèges, parmi lesquels il faut compter le pouvoir de confirmer les évêques, n’étaient qu’une émanation de la primauté du Siège apostolique. On montre ensuite que les patriarches eux-mêmes ont toujours été confirmés par les pontifes romains… La seconde et la troisième parties sont consacrées à prouver que la doctrine de l’Église d’Occident n’était pas différente sur ce point de celle de l’Église orientale… Après avoir répondu aux objections qu’on tire du sixième canon de Nicée et fixé le vrai sens de ce canon, on démontre que les métropolitains n’avaient d’autre autorité que celle qu’ils tenaient du Saint-Siège qui les avait établis, et dont ils étaient à proprement parler les vicaires… Si on nie cette origine du pouvoir des métropolitains, on est accablé sous une multitude presque infinie de témoignages… ; si on l’avoue, il faut reconnaître que les papes possédaient essentiellement les droits qu’ils communiquaient à d’autres évêques… » p. cxviicxviii. Pour situer la place et la position des frères Lamennais dans l’histoire de cette controverse, voir Turmel, Histoire de la théologie positive du concile de Trente au concile du Vatican, Paris, 1906, p. 340-359. L’influence de Bonald sur la manière d’interpréter l’histoire au moyen du « fil directeur » de la « théorie », et d’une théorie en grande partie a priori, tirée de la considération de « la nature même des choses », a été relevée par M. Maréchal, p. 393-399. Les auteurs se sont bien rendu compte des lacunes de la tradition,

mais il les ont comblées facilement par le recours aux « . principes généraux du gouvernement de l’Église ». Cf. t. ii, p. 93-94. C’est la même méthode historique qui sera appliquée dans l’Essai pour démontrer que tous les peuples ont toujours cru ce que croient les chrétiens. Les historiens d’aujourd’hui ne s’en contentent plus.

3. Essai sur l’indifférence en matière de religion, in-8 », Paris, t. i, 1817 ; t. ii, 1820 ; t. iii, 1823 ; t. iv, 1823 ; à quoi il faut joindre : 4. Défense de l’Essai sur l’indifférence en matière de religion, in-8°, Paris, 1821 Cf. Duine, Bibliographie, n. 24-26. — Toute la matière des quatre volumes parus est répartie en 37 chapitres dans les premières éditions : t. i, c. i à xii ; t. ii, c. xin à xx ; t. iii, c. xxi à xxviii ; t. iv, c. xxix à xxxvii. Nous adopterons cette répartition plutôt que celle de l’édition Garnier.

L’objet de l’ouvrage est de démontrer « que l’indifférence en matière de religion, qu’on préconise comme le dernier effort de la raison et le plus précieux bienfait de la philosophie, est aussi absurde dans ses principes que funeste dans ses effets, » t. i, p. 26. L’indifférence dont il s’agit est l’indifférence systématique, c’est-à-dire la doctrine selon laquelle la religion est chose indifférente, p. 43. On peut diviser « en trois classes les indifférents dogmatiques. La première comprend ceux qui, ne voyant dans la religion qu’une institution politique, ne la croient nécessaire que pour le peuple. La seconde renferme ceux qui admettent la nécessité d’une religion pour tous les hommes, mais qui rejettent la révélation. La troisième enfin se compose des indifférents mitigés qui reconnaissent la nécessité d’une religion révélée, mais permettent de nier les vérités qu’elle enseigne, à l’exception de certains articles fondamentaux, » p. 4 1. Le tome i de l’Essai est consacré à la réfutation de ces trois systèmes d’indifférence religieuse. La division de cette réfutation générale de l’indifférence systématique est tirée d’une page de Bonald, où cet autejr fait observer que les indifférents supposent « qu’il n’y a dans la religion, considérée en général et dans toutes ses différences, ni vrai ni faux ; ou que, s’il y a vrai et faux dans la religion comme en toute autre chose, l’homme n’a aucun moyen de les distinguer ; ou qu’enfin la religion, vraie ou fausse, est également indifférente pour l’homme, » p. 215-216. Lamennais reprend chacune de ces suppositions, mais dans un ordre un peu différent, et démontre successivement : (A) « que la religion, s’il en existe une véritable, est d’une importance infinie pour l’homme, pour la société, pour Dieu lui-même (c’est tout l’objet de la IIe partie du t. i)… ; (B) qu’il existe en eiîet une vraie religion, qu’il n’en existe qu’une, qu’elle est pour tous les hommes l’unique moyen de salut (c’est l’objet du c. xvi, de l’Essai, au tome n)… ; (C) que tous les hommes peuvent aisément la discerner des religions fausses, » t. i, p. 407. Ce troisième point va donner naissance à des développements que l’auteur n’avait pas prévus, si bien que l’Essai croîtra en cours de route, qu’un troisième volume paraîtra d’abord nécessaire, t. ii, p. 81, puis un quatrième, et enfin un cinquième, qui ne verra jamais le jour. — Après trois chapitres préliminaires, c. xm-xv, consacrés à « rechercher comment, dans notre condition présente, nous parvenons à une connaissance certaine de la vérité, » t. i, p. 407, où Lamennais exposera sa théorie du critérium de la certitude placé dans la raison générale ou le sens commun, théorie qui sera ensuite défendue dans un volume à part, la Défense de l’Essai, Lamennais entreprend de prouver, dans les c. xvii-xx, qu’il existe pour tous les hommes un moyen sûr et facile de discerner la vraie religion, et que ce moyen est l’autorité ; en sorte que la vraie religion est incontestablement celle qui repose I sur la plus grande autorité visible. » 8e édit., Paris,