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2279 JUSTINIEN 1er, ÉCRITS THÉOLOGIQUES ET ÉD1TS DOGMATIQUES 2280

rcurs chrétiens depuis Constantin, et il se préoccupe, autant par amour du Christ que par intérêt politique, de propager la religion chrétienne chez les peuples barbares.. Il emploie les ressources de sa diplomatie à protéger les chrétiens orthodoxes, partout où ils sont. C’est ainsi que le 6 janvier 528, il consent à être le parrain de Grétès roi des Hérules établis sur le Danube, et contracte avec lui une alliance, qui amène bientôt la conversion de toute la nation aux catholicisme. Sous son règne, les Tzannes riverains du Phase, et les Abosges se font également baptiser. Vers 530, l’empereur envoie des missionnaires jusque dans l’oasis d’Audjelah, et la conquête de l’Afrique a les plus heureux résultats pour la conversion des peuplades qui s’y trouvent. Les guerres des Byzantins prennent ainsi le caractère de véritables croisades. En défendant l’empire ou en reculant ses frontières, ils ont conscience de servir par là les intérêts de l’Église. Cf. Pargoire, <p. cit., ]). 16-19.

Un faux principe vicie pourtant dans son fond l’idéal du basileus : ce principe est celui de la confusion des deux pouvoirs civil et religieux, ou si l’on veut, l’omnipotence de l’empereur s’aflirmant aussi bien sur l’Église que sur l’État. Ce legs du paganisme, que Constantin et ses successeurs n’ont pas su rejeter, Justinien l’exploite à fond. Il incarne en sa personne ce qu’on a appelé le césaropapisme. Le césar-pape ne s’arroge pas sans doute, comme le faisait Y imperatorsacerdos païen, les fonctions rituelles proprement dites exigeant le pouvoir d’ordre ; mais il prend pour lui le pouvoir suprême de juridiction. C’est pourquoi il ne croit pas sortir de ses attributions, quand il légifère sur des matières purement ecclésiastiques. Il considère les évêques et le pape lui-même comme ses fonctionnaires dans l’ordre religieux et il n’entend pas qu’on lui résiste. Il va même plus loin, et s’attribue pratiquement, sinon explicitement, une sorte d’infaillibilité doctrinale, faisant la leçon aux évêques, successeurs des Apôtres, accusant le pape Vigile d’hérésie, et promulguant, comme des lois obligatoires pour tous ses sujets, ses propres opinions théologiques. Tel est le mal byzantin par excellence, qui asservit l’Église au pouvoir civil, et va produire les longs schismes qui, du vne au xie siècle, préludent à la séparation religieuse définitive de l’Orient et de l’Occident. Justinien, sans doute, ne veut pas le schisme. Dès l’arrivée au pouvoir de son oncle, Justin I er, il met tout en œuvre pour faire cesser le schisme d’Acace. Cf. Hormisdas, t. vii, col. 162 sq. Il est intimement convaincu que la clef de voûte de l’unité de l’Église est le pontife romain, et que tous les évêques doivent lui être unis et soumis, comme nous le montrerons tout à l’heure par des textes explicites ; mais, comme il place la volonté impériale au-dessus du pape, son système ne peut qu’aboutir à la persécution religieuse ou au schisme, suivant qu’on lui résistera ou qu’on lui obéira. N’est-ce pas à Justinien le menaçant de la déportation que le pape saint Agapet répondit un jour : « Je suis venu à Constantinople, croyant trouver un Constantin, et nie voilà en face d’un Dioclétien. » Liber pontiflcalts, étUt. Duchesne, 1. 1, p. 286. Le basilieus eut alors le bon esprit de céder ; niais il ne cédera pas toujours, et ses successeurs, héritiers de son système, céderont encore moins.

II. ÉCRITS THÉOLOGIQUES ET ÉDITS DOGM ATIQUES.

— Justinien mérite bien le litre d’empereur théologien, qu’on lui a donné. Théologien, il le fut par goût et aussi par devoir d’étal. Pour réaliser son rêve d’unité politique et religieuse, pour faire disparaître, en particulier, le grand schisme monophysite, si menaçant pour l’empire, il chercha, par un examen attentif « les questions controversées-, à trouver un terrain d’entente

entre Catholiques et dissidents. Ce terrain existait, et

la théologie Impériale contribua à le faire apparaître

Si l’entente n’eut pas lieu, il faut en accuser l’entêtement des monophysites. Justinien batailla aussi contre l’origénisme ; maiyce fut une diversion dans sa carrière théologique.

Les écrits doctrinaux qui nous restent de lui sont rédigés sous forme de lettres ou sous forme d’édits. Parmi les lettres, il faut distinguer deux groupes : celui des simples missives de correspondance, qui sont très courtes, et celui des lettres plus développées, qui constituent de véritabls traités théologiques.

Lettres missives.

Le premier groupe comprend

seize numéros, à savoir : 1. dix lettres au pape saint Hormisdas (514-523), écrites de septembre 518 à septembre 520, et relatives, les deux premières au schisme d’Acace, les huit autres à l’affaire des moines scythes et à leur formule : Unus de Trinitate carne passus est, P. L., t. lxiii, col. 430, 450, 475-477, 497-497, 508-510.

— 2. Une lettre au pape Jean II (533-535), du 8 juin 533, qui est une véritable profession de foi, et insiste particulièrement sur la formule Unus de Trinitate, etc., P. L., t. lxvi, col. 14-17. — 3. Deux lettres au pape saint Agapet (535-536), la première écrite en 535 et reproduisant, sauf une courte introduction, le texte de la lettre au pape Jean II, P. L., ibid., col. 35-37 ; la seconde, de 536, qui est une profession de foi, ibid., col. 42-43, et Mansi, ConciL, t. viii, col. 847. — 4. Une lettre à l’archevêque de Justinianopolis, Jean, du 23 mai 550, demandant la convocation d’un synode pour la condamnation des Trois-Chapitres : Mansi, op. cit., t. ix, col. 274-275 ; P. L., t. lxix, col. 119.

— 5. Une lettre à Cosmas.évêque de Mopsueste, du 24 mai 550, traitant du même sujet que la précédente. Mansi. et P. L., ibid. — 6. Une lettre au Ve concile œcuménique, faussement datée du 14 juillet 553, puisqu’elle fut lue à la fin de la septième session du concile (26 mai 553), Justinien demande aux Pèreî de rayer le pape Vigile des diptyques, parce qu’il s’est contredit et qu’il favorise maintenant l’hérésie. Dans cette lettre, apparaît explicitement pour la première fois le fameuse distinction inter Sedem et sedentem, relativement à la primauté romaine. Mansi, op. cit., t. ix, col. 366-367. Nous reparlerons tout à l’heure de cette question. Presque toutes ces lettres ont été écrites en latin.

Lettres en forme de traités.

La plupart des

traités théologiques, au contraire, et aussi plusieurs édits dogmatiques, ont été publiés en grec. Voici la liste des écrits grecs contenus dans P. G., t. lxxxvi a, col. 945-1162.

1. Le Liber adversus Origenem, XiyoçxocTà Qpiyévous toG Suaæooijç xai twv àvoatcov ocÙtoû Soyjxàxtov, col. 945-994, composé vers 543 et adressé au patriarche de Constantinople, Mennas. C’est un exposé et une réfutation par l’Écriture sainte et la tradition patristique de toutes les hérésies désignées, à tort ou à raison, sous le nom d’origénisme. Les principaux Pères cités sont les Alexandrins, Athanase et Cyrille, et les trois Cappadociens, Basile, Grégoire de Nazianze et Grégoire de Nysse. Justinien n’est pas tendre pour Origène ; il nous le présente comme le père de presque toutes les hérésies, col 919. On aurait pu être plus équitable pour le grand homme. La lettre se termine par dix anathématismes, dont on retrouve la substance dans les quinze anathématismes mis sous le nom du Ve concile œcuménique. Mansi, op. cit., t. ix, col. 395 sq.

2. Litleræ ad sanctam si/nodum de Orirjene et seclatoribus efus, yp^^a te ?ô ; tJjv àytav crûvoSov 7Tepl’ïipiyévouç Kal twv ôu, 09pôvcùv aù-roù, col. 989-991. Celte lettre se présente dans l’édition de Mlgne, comme un appendice du irai té précédent, les critiques, cependant, ne s’entendent ni sur son origine, ni sur sa destination. Certains, comme Môller, Prolest. RealencyclopOd /e, t.xi, 2, édlt., p. 113 ; F. l.oofs. Leontius von Bysanz,