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JUSTIN, DOCTRINES : ANGES ET DÉMONS


rendre cette lumière perdue. Toutefois, Justin ne s’en tient pas là. « Le Verbe de Dieu, écrit-il, s’est fait homme pour nous, afin de participer à nos misères et parla de les guérir. » II Apol., xiii, 4, col. 468 A. Jésus-Christ, notre Sauveur, a pris chair et sang pour notre salut. I Apol., lxvi, 2, col. 428 G. Il a souffert pour purifier dans son sang ceux qui croient en lui. I Apol., xxxii, 7, col. 380 B. Nous offrons l’eucharistie en souvenir de la souffrance qu’il a soufferte pour les homm ?s qui purifient leur âme de toute malice. DiaL, xli, 1, col. 564 B.

La rédemption, telle que la conçoit Justin, est d’abord la libération de l’homme qui était retenu dans l’esclavage du démon : Dieu a détruit d’une ruine définitive les principautés et les puissances, par celui qui est devenu souffrant selon sa volonté. DiaL, xli, 1, col. 564 B. Le Verbe a consenti à se faire chair et à naître de la Vierge de la race de David afin que par cette économie, le serpent qui a fait le mal à l’origine et les anges qui l’ont imité soient vaincus et que la mort soit humiliée, et que, dans la seconde venue du Christ, elle cesse entièrement pour ceux qui croient en lui ; qu’elle ne soit plus désormais quand les uns auront été envoyés au jugement, au supplice du feu qui les châtiera sans fin ; quand les autres survivront impassibles à l’abri de la corruption et de la douleur, immortels. DiaL, xlv, 4, col. 573 A. « La signification de la mort du Christ et particulièrement du supplice de la croix n’a pas laissé Justin indifférent. Il s’en est expliqué dans les c. xciv-xcv du Dialogue où il réplique à Tryphon et à ses]am’; s qui ont objecté la malédiction portée par la loi contre les crucifiés : « Il y a une malédiction contre les crucifiés ; mais cette malédiction n’est pas prononcée contre le Christ de Dieu, par lequel Dieu sauve tous ceux qui ont commis des actes dignes de malédiction. » En eff ; t, ainsi raisonne Justin, tous les hommes sont soum’s à la malédiction de la loi mosaïque, qui maudit quiconque n’observe pas toutes ses prescriptions ; c’est-à-dire tous les hommes, nul n’étant capable de remplir intégralement les obligations de la loi, parmi ceux qui la connaissent, et ceux qui ne vivent pas sous la loi étant, par définition, en état de péché. Et Dieu a voulu que « son Christ, au profit de tous les homn ; s de toute race, se chargeât des malédictions de tous. » Ces idées proviennent surtout chez Justin du fam : ux morceau d’Isaïe sur riiomms de douleur, dont le trait le plus caractéristique est cité aussitôt après. » A. Puech, Les Apologistes grecs, p. 136 ; cf. J. Rivière, Le dogme de la Rédemption. Essai d’étude historique, Paris, 1905, p. 114-115.

Il ne faut pas oublier, lorsqu’on analyse les idées de Justin sur la rédemption, que nous ne possédons qu’une partie de ses ouvrages ; et que précisèrent ceux qui nous ont été conservés ne traitent en quelque sorte du christianisme que par le dehors. Il s’agit de justifier la doctrine chrétienne dans son opposition au judaïsme ou au paganisme, et nullement de l’exposer pour elle-même dans tous ses détails. Justin ne cache rien volontairement ; il n’a aucune idée d’un secret à garder, et la discipline de Varcane lui est tout à fait étrangère ; nuis il ne dit pas tout : si volontiers qu’il se laisse aller à des digressions, il sait pourtant s’arrêter quand il veut, et nous n’avons pas le droit de lui demander plus qu’il ne se propose de nous donner.

IV. LES ANŒS, LES DÉMONS, LES Ail ES ET LA

destinée humaine. —. Les puissances invisibles tiennent une grande place dans l’œuvre de Justin.

Les bons anges.

Pour répondre à l’accusation

d’athéisme faite contre les chrétiens, l’apologiste déclare que ceux-ci reconnaissent le Dieu très vrai et père de la justice et avec lui le Fils venu de lui, et l’année des autres bons anges qui l’escorteut et qui

lui ressemblent, et l’Esprit prophétique. I Apol., vi, 1-2, col. 336 C. La place que l’apologiste donne aux anges entre le Fils et le Saint-Esprit est curieuse et mérite d’être remarquée. Toute étrange que soit cette façon de faire, il ne faudrait pas en conclure que Justin assimile le Verbe à un ange. D lui donne souvent le nom d’ange, surtout lorsqu’il interprète l’Ancien Testament ; ce nom n’implique nullement que le Verbe ne soit pas d’une autre nature que les anges. Ici, il s’agit de montrer que les chrétiens ne sont pas des athées. Justin signale, sans se préoccuper de la hiérarchie, tous les êtres invisibles qui, chez eux, sont l’objet d’un culte.

Dieu a confié le soin de veiller sur les hommes et sur les créatures qui sont sous le ciel aux anges qu’il a mis à leur tête. II Apol., v, 2, col. 452 B. Les anges avaient^été créés libres, et ce caractère leur est commun avec les hommes. Justin revient là-dessus à satiété. « Dieu a fait au commencement les hommes et les anges maîtres d’eux-mêmes… Toute créature est capable de bien et de mal ; l’on n’aurait aucun mérite si on ne pouvait choisir entre deux voies. » 77 Apol., vn, 5-6, col. 456 BC. Cf. DiaL, lxxxviii, 5 ; en, 5 ; cxl, 4 ; cxli, 1 etc.

Les démons.

Tous les anges ne sont pas restés

fidèles. Un grand nombre ont fait défection. Le chef des anges déchus est appelé Serpent, Satan et Diable, d’après les noms qu’il porte dans les livres saints. / Apol., xxviii, 1 ; DiaL, ciii, 4 ; cxxiv, 3. Il ne semble pas que la faute des mauvais anges ait été antérieure à la création de l’homme. Au contraire, un passage du Dialogue, cxxiv, 3, col. 765 A, semble affirmer que le chef des démons, celui qui est appelé serpent est tombé d’une chute ^énorme pour avoir égaré È/e. C’est un peu plus tard que d’autres anges ont aussi comtni le mal. Justin identifie leur faute avec l’incident qui nous est rapporté par la Genèse, des fils de Dieu l’unissant avec les filles des hommes. I Apjl., v, 2 ; HApiL, v, 3. Les enfants nés de cette union criminelle sont proprement appelés les démons. 77 Apol., v, 3, col. 452 B.

Les démons, dès lors, n’ont cessé d’exercer leur empire sur le genre humain. « Dans la suite, écrit Justin, ils se sont asservi le genre humain, soit par la magie, soit par la crainte et les tourments qu’ils faisaient subir.soit en se faisant offrir dessacri fices.de l’encens et des libations, toutes choses dont ils sont avides depuis qu’ils sont devenus esclaves des passions. » // Apol., v, 4, col. 452 BC. Ce sont eux que les hommes, dans leur ignorance et leur crainte superstitieuse, se sont mis à adorer et ont regardé comms des dieux. I Apol., v, 2 ; DiaL, lv, 2. En vain des sages comme Socrate ont-ils essayé de dénoncer leurs crimes : les démons sont parvenus à les faire condamner. / Apol., v, 3, col. 336 B. Ce sont encore les démons qui ont imaginé toutes les légendes par lesquelles les amas se laissent séduire, et qui imitent plus ou moins grossièrement les mystères chrétiens. / Apol., liv, lxii, lxiv, lxvi ; DiaL, lxix-lxx. Ils ne se sont pas contentés d’inventer ces fables grossières de la mythologie. Même depuis la venue du Christ, ce sont eux qui ont suscité toutes sortes d’imposteurs et de magiciens Simon, Ménandre, Marcion. / Apol., xxvi, lvi. Ce sont eux aussi qui sont la cause de toutes les persécutions contre les chrétiens : ils font tout pour faire des horam ; s leurs esclaves et leurs serviteurs ; et tantôt par les visions des songes, tantôt par les prestiges de la magie, ils cherchent à asservir ceux qui n’ont aucun soin de leur salut. / ApiL, xiv, 1. Ils ont répandu les calomnies dont les chrétiens sont victimes ; ils ont aveuglé les magistrats qui détiennent le pouvoir dans l’empire romain et les ont remplis de rage, si bien que ces magistrats sont aujourd’hui