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JUSTIN, DOCTRINES : SOURCES


nombre de fragments attribués à Justin, sans autre indication. On trouvera ces fragments recueillis dans le volume de K. Holl, Fragmente vornicânischer Kirchenvater, x>. 32-55 : et moins complètement dans P. G., t. vi, col. 1593-1600.

Ouvrages inauthentiques.

Nous avons déjà vu

que le nom de Justin avait servi, avant même le début du ive siècle, à couvrir un certain nombre d’apocryphes. Après Eusèbe, on continua à employer ce nom, et nous devons maintenant signaler quelques écrits postérieurs à l’historien, qui sont attribués au grand apologiste.

1. Expositio rectæ fidei, exôeaiç tyjç ôpOrjç ma-sc>>ç, ou peut-être plus exactement, Expositio fidei seu de Trinilale, zy&zoïc, niaizatc, r ( —rot, rcspl TpiàSoç, P. G., t. vi, col. 1207-1240. L’ouvrage est un exposé de la doctrine chrétienne sur la Trinité, c. i-ix et sur l’Incarnation, c. x-xvin. Le texte grec en est conservé en deux recensions, une longue et une courte. On possède en outre des fragments d’une traduction syriaque et d’une paléoslave. J. Drâseke, dans différents articles, et en dernier lieu dans son ouvrage Apollinarios von Laodicea, dans Texte und Untersuchungen, t. vii, fasc. 3-4, Leipzig, 1892, p. 158-182 ; 353-363, a cru pouvoir affirmer la priorité de la recension brève et la composition de l’ouvrage par Apollinaire de Laodicée. A cette démonstration paradoxale, F. X. Funk a opposé une réfutation très solide, Die pseudoiustinisehe Expositio rectæ fidei, dans la Theologische Quarlalschrift, t. lxxviii, 1896, p. 116-147 ; 224250, réimprimé avec quelques changements dans les Kirchengeschichtliche Abhandlungen, t. ii, 1899, j). 253-291. A. Harnack, cherche en Diodore de Tarse l’auteur de ce traité, Diodor von Tarsus. Vier pseudojustinische Sehriften, als Eigentum Diodors nachgewiesen, dans Texte und Unlersuch., t. xxi, fasc. 4, Leipzig, 1901, p. 242-248. Cette dernière hypothèse est peu vraisemblable. L’ouvrage doit appartenir au iv c siècle, et même à la seconde moitié du Ve siècle, et paraît dirigé contre l’eutychianisme.

2. L’Epislola ad Zenam et Serenum, P. G., t. vi, col. 1183-1204, est un traité de vie ascétique. P. Batiffol l’a attribuée à Sisinnius, l’évêque novatien de Constantinople au temps de saint Jean Chrysostome, c’est-à-dire vers 400. Revue biblique, 1896, p. 114122.

3. Une Confulatio dogmalum quorumdam aristolelicorum, àvoc-rpoTTY] Soy^âxtoV tivcov àptaTOTeXt.xcov, P. G., t. vi, col. 1491-1564, dédiée à un prêtre Paul, est signalée par Photius, Bibliolh., cod. cxxv, comme une œuvre de Justin. A. Harnack a vu dans cet ouvrage, de même que dans les trois écrits qui nous restent à signaler les produits de l’activité littéraire de Diodore de Tarse. Diodor von Tarsus, p. 52-54 ; 225-230.

4. les Responsiones ad orthodoxos de quibusdam necessariis quæslionibus, àTcoxpta£t.ç Tzpbç, xoùç ôp6086£ouç rapt tivwv àvayxaiow Çt)tï][ji.ixtiov, plus souvent connues sous le titre de Quæstiones et responsiones ad orthodoxos, P. G., t. vi, col. 1249-1400, forment un intéressant recueil de questions et de réponses sur divers problèmes de théologie, de cosmologie et de psychologie. Le codex Parisinus 450 donne 146 questions et réponses qu’il attribue à saint Justin. Un ms. de Constantinople, édité en 1895 par A. Papadopoulos-Kerameus, renferme 161 questions et réponses, dans un texte souvent différent et meilleur, et les met sous le nom de Théodoret de Cyr. Cette attribution à Théndoret n’est pas incontestable ; elle soulève même d’assez nombreuses difficultés. Le nom de Diodore de Tarse, proposé par A. Harnack, op. cit., n’est pas beaucoup plus satisfaisant. Cf. F. X. Funk, Kirchengeschichtliche Abhandlungen, t. iii, 1907, p. 323-350. L’auteur des

Quæstiones semble devoir être cherché en Syrie et sans doute au commencement du ve siècle.

5. Quæstiones christianorum ad gentiles, èptù-uy)as<.ç /picmavixal rcpoç tejç "EXX7)Vaç, P. G., t. vi, col. 14011464. — Ce sont cinq questions posées aux païens par les chrétiens avec les réponses des païens et les réfutations de ces réponses. Il s’agit de Dieu et de ses relations avec le monde.

6. Quæstiones gentilium ad christianos, èpwxrjast. ? sXXï)vtxal TCpôç toùç ypiGTi%voûç, deincorporeoetdeDeo et de resurrectione mortuorum, P. G., t. vi, col. 14631490. — Nous avons là quinze questions posées par les païens avec les réponses des chrétiens, qui témoignent d’une extraordinaire virtuosité dialectique. Ces deux derniers opuscules proviennent sans doute du même auteur que les Quæstiones et responsiones ad orthodoxos. Si toute cette série est l’œuvre de Diodore, il n’est par impossible qu’on l’ait placée sous le patronage de Justin lorsque le nom de Diodore devint compromettant. Il est plus vraisemblable encore que le nom de l’apologiste aura pu être suggéré parle passage de la seconde Apologie dans lequel sont mentionnées ses questions et les réponses du cynique Crescens, ai èpcoTrj^siç jio’j xal ai êxeivou àrcoxpiætç, // Apol., ni, 6, P. G., t. vi, col. 449 B. Un écrivain inconnu aura jugé bon d’attribuer à Justin des questions et des réponses qui pouvaient à peu près répondre à ce signalement.

Toute cette littérature apocryphe témoigne à sa manière du grand souvenir laissé après lui par Justin. Sans doute, les œuvres authentiques de l’apologiste cessèrent vite d’être lues. Après la paix de l’Église, , on s’intéressait à autre chose qu’aux controverses avec les Juifs ou avec les païens. Mais on gardait la mémoire de Justin comme d’un des plus savants hommes de son temps, et à défaut de ses ouvrages authentiques, on aimait à couvrir de son autorité des écrits anonymes. Nous ne retiendrons, il n’est guère besoin de le dire, dans l’étude de la pensée de Justin que le témoignage des Apologies et du Dialogue, mais il était utile de signaler l’immense production littéraire qui avait été attribuée au philosophe martyr.

III. Les doctrines de Justin.

I. LES SOURCES DE LA. pensée de JUSTIN. — 1° La philosophie. — Ce qui frappe surtout lorsqu’on aborde l’étude des œuvres de saint Justin, c’est l’amour de l’apologiste pour la philosophie. Même devenu chrétien, il regarda toujours le christianisme comme une philosophie, la seule sûre et la seule utile, Taûrrçv [i.6vy)v y ; upiaxov cpiXoacxpiav àaçaXvj ts xal aû[i.<popov, Dial., viii, 1, col. 492 D, portant lui-même le manteau court du philosophe, enseignant dans l’école à ses disciples groupés autour de lui, acceptant à l’occasion la discussion publique avec d’autres philosophes. Ayant sa conversion, il avait traversé les diverses écoles philosophiques ; il s’était particulièrement attaché à celle de Platon : jamais il ne renia le maître qui, avant le Christ, avait séduit son intelligence. Sans doute, il n’avait de la sagesse antique qu’une connaissance superficielle. J. Gefîcken, Zweigriechische Apologeten, Leipzig, 1907, p. 103, va jusqu’à dire que Justin n’avait jamais lu un dialogue de Platon, et empruntait à un florilège les quelques formules qu’il en cite, / Apol., iii, 3 = Rep., V, 473 DE ; IApol, viii, 4 = Gorg., 523E-524A ; Rep. X, 615 A ; Phedr., 249 A ; Apol., lx. 1 = Tim., 36 BC ; / Apol., lx, 7 = Pseudo-Platon, Epist. ii, 312 E ; // Apol., x, 6 = Tim., 28 C ; Dial., iv, 1 = Phédon, 65 E-66 A ; Rep., 509 B ; Dial., iv, 2 = Phileb., 30 D ; Dial., v, 4 = Tim., 41 AB. C’est là une exagération, et il est très peu vraisemblable qu’un homme aussi avide de connaître ait dédaigné d’ouvrir la Bépublique ou le Timée. A. Puech, Les apologistes grecs, p. 93. Il reste que Justin ignorait les subtilités de la philosophie. Mais il tenait à ce qu’il savait avec