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ques événements, plus ou moins récents, pour adresser à l’empereur une seconde apologie beaucoup plus courte que la première, et destinée seulement à la compléter sur des points de détail ; destinée aussi à montrer que la philosophie préférée de Marc-Auréle, le stoïcisme, rejoignait souvent les dogmes chrétiens. Cf. A Puech, op. cit., appendice i : La grande et la petite apoloqic de Justin, leurs relations mutuelles, p. 308-312.’La seconde apologie est le dernier écrit de Justin. Nous savons par Tatien que Crescens dénonça le didascale chrétien : e Crescens, qui avait fait son nid dans la grande ville, surpassait tout le monde par ses vices contre nature et était très adonné à l’avarice. Lui donc, qui conseillait le mépris de la mort, craignait lui-même tellement la mort, qu’il intrigua pour le conduire à la mort, sans doute comme au plus grand mal qu’il pût lui faire. » Tatien, Oral., 19, d’après le texte cité par Eusèbe, H. E., IV, xvi, 8, P. G., t. xx. col. 368 A. Les expressions de Tatien ne sont pas claires, et les manuscrits du Discours donnent un texte différent de celui que connaît Eusèbe. On peut croire toutefois que le cynique, dont Justin avait si vigoureusement dénoncé l’ignorance ne fut pas étranger à son arrestation. A Puech, op. cit.. p. 312 ; J. M. Lagrange, op. cit., p. 196.

Nous possédons encore les Actes du martyre de saint Justin, qui sont l’un des plus précieux documents de notre littérature hagiographique. H. Dclchaye, Les passions des martyrs et les genres littéraires, Bruxelles, 1921, p. 119-121. Ce fut pendant que Junius Rusticus était préfet de Rome (163-167) que Justin fut arrêté et traduit devant le tribunal. Avec lui furent pris et interrogés quelques-uns de ses disciples. Tous avouèrent qu’ils étaient chrétiens et refusèrent de sacrifier. Le préfet, après un tel aveu, n’avait plus qu’à rendre la sentence : « Que ceux qui n’ont pas voulu sacrifier aux dieux et obéir aux ordres de l’empereur soient fouettés et emmenés pour subir la peine capitale, conformément aux lois. » Et le rédacteur ajoute : « En conséquence, les saints martyrs, glorifiant Dieu, furent conduits au lieu ordinaire des exécutions, et après la flagellation, ils furent décapités, consommant ainsi le martyre dans la confession du Christ. » Acta S. Just., 5, P.’G., t. vi, col. 1572 B.

L’Église latine célèbre la fête de saint Justin le 14 avril, et Léon NUI a étendu cette fête à l’Église universelle par un décret de 1882. L’Église grecque honore le souvenir du grand apologiste le 1° juin.

< Ce qui vaut à Justin notre sympathie immédiate, c’est ce ((lie j’appellerais volontiers la transparence de son âme, sincère, loyale, ardente entre toutes : cet le âme se révèle à nous dès les premières lignes de l’apologie ; dans l’adresse même, peu de mots sont plus touchants dans la littérature chic ! ienne primit ive que ces simples mots : l’un d’entre eux. elç « ùtwv <iv. Ce qui attire et retient sur lui l’attention de l’historic ii, c’est que nous le voyons soucieux pour la première foi., quoique d’une manière assez confuse, du grand problème que l’École d’Alexandrie définira beaucoup plus exactement, examinera avec plus d’ampleur et de méthode, résoudra par conséquent avec plus de succès : celui des rapports entre la philosophie et la foi. La vie morale et intellectuelle de Justin a sa source dans l’une comme dans l’autre, et on peut dire que déjà Justin a su les concilier toutes deux,

puisqu’il a vécu de l’une comme de l’autre, puisqu’il n’aurait pas pu vivre en sacriflanl entièrement lune

i l’autre. » A. Puech, op. cit., p. 52-53.

11. Les œuvres de Justin. — Eusèbe, dans son

Histoire ecclésiastique, dresse ainsi le catalogue des œuvres de saint Justin : — Justin nous a laisse un très

grand nombre d’ouvrages qui sont le témoignagt « l’un

esprit cultivé et zélé pour les choses divines, et qui sont remplis de toute sorte d’utilité : nous y renverrons les amis de la science, après avoir cité, pour rendre service, ceux qui sont venus à notre connaissance. D’abord, il y a de lui un discours adressé à Antonin surnommé le Pieux, à ses enfants et au Sénat de Houu, en faveur de nos dogmes, puis celui qui renferme une seconde apologie pour notre foi, que Justin adressa au successeur et homonyme de l’empereur précédent, à Antoninus Verus… Un autre est le discours aux Grecs, dans lequel, après avoir examiné longuement beaucoup de questions discutées par nous et par les philosophes grecs, il disserte sur la nature des démons… Un autre écrit de lui, adressé aux tirées, est encore venu jusqu’à nous, qu’il a intitulé Réfutation, ëXeyxoÇ ; en outre, un ouvrage sur la Monarchie de Dieu, îtspi Qeoû (i.ovatp/_îaç, qu’il établit non seulement d’après nos Écritures, mais d’après les livres des Grecs. En outre, un ouvrage intitulé le Psalmiste, ^ilTr^, un autre, formé de scholies, sur l’âme, respi ij/oxîjç. dans lequel, développant diverses questions relatives à ce sujet, il donne les opinions des philosophes grecs. qu’il promet de contredire, pour exposer sa propre opinion dans un autre écrit. Il composa encore le Dialogue contre les Juifs, §<.<xkQyoç, Tipoç’Io^Soctouç. récit de la discussion qu’il eut àÉphèse avecTryphon le plus célèbre des Hébreux de ce temps : il y moulu. de quelle manière la grâce divine l’a poussé vers la doctrine de la foi, avec quel zèle il s’était auparavant livré aux disciplines philosophiques, et quelle ardente recherche il avait faite de la vérité. » H. E., IV, xviu 1-6, P. G., t. xx, col. 373 B-376 A.

L’énumération d’Eusèbe n’est d’ailleurs pas complète. Justin lui-même nous fait connaître un Précis contre toutes les hérésies, oûvTaynx x.otTà ttdcocôv twv yeyev/) [iivwv atpéaecov, / Apol., xxvi, 8, P. G., t. vi, col. 369 A ; et saint Irénée cite de lui un ouvrage contre Marcion qu’il paraît avoir tenu en haute estime. Cont. hieres., IV, vi, 2 ; V, xxvi, 2, P. G., t. vii, col. 987 B et 1194 C.

Ces ouvrages sont perdus, à l’exception des deux Apologies et du Dialogue avec Tryphon. Quelques fragments des autres écrits nous ont été transmis par divers Pères. Enfin, on a attribué dans l’antiquité à saint Justin un certain nombre de livres qui ne sont certainement pas de lui, mais que nous devrons pourtant signaler.

1° Ouvrages conservés. — 1. Texte et éditions. — Les Apologies et le Dialogue nous sont actuellement connus par un seul ms. de la Bibliothèque nationale de Paris, fonds grec, n. 450 et qui a été achevé le 11 septembre 1363. Un second ms. qui renferme aussi les mêmes ouvrages, et qui fait partie de la Bibliothèque de M. T. Fitzroy Ferrwick, à Cheltenham (autrefois Codex Claromontanus 82), n’est qu’une copie faite par un certain Georges et achevée le 2 avril 1541, du manuscrit de Paris. Il n’a donc aucune importance pour la tradition textuelle. Cf. G. Archambaull, Justin, Dialogue avec Tnjphon, t.i, Paris, 1909,

p. XII-XXXVIII.

Un certain nombre de fragments des Apologies ont en outre été cités par Eusèbe. dont le texte fournit plusieurs variantes intéressantes. Les Sacra Parallèle connus sous le nom de saint Jean Damascène renferment huit citations certaines des Apologies ; mais l’ouvrage paraît bien dépendre de recueils antérieurs. Cf. K. IIoll, Fragmente vornicànischer Kirchenvûtei ans den sacra Parallela, dans Texte und Unlersuchungen, t. xx, fasc. 2, Leipzig, 1899.

Le Dialogue semble avoir été peu connu dans l’antiquité, et c’est à peine si quelques fragments cités par les Lires peuvent intéresser l’établissement du t< xte.

PhotiUS, dont la notice sur Justin n’est qu’un décalque