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JUSTIFICATION, LA DOCTRINE AU CONCILE DE TRENTE


nommé le Greccheto, se mit à l’accuser à haute voix d’ignorance ou d’insolence. Sur quoi Sanfelice lui porta vivement les deux mains au visage et lui secoua si rudement la barbe qu’il lui en arracha plusieurs poils, t. v, p. 357-359. Le scandale étant public, une sanction était inévitable. Il y eut enquête d’urgence, t. v, p. 354-359, et le bouillant Sanfelice dut subir par ordre des légats quelques jours de prison préventive au couvent de Saint-Bernardin, t. x, p. 565. Mais, le 28, sur les instances de Zannetino, qui avait bien conscience d’avoir un peu provoqué l’incident, l’assemblée décréta sa délivrance, sous la double condition qu’il quitterait le concile et irait se faire absoudre par le pape, t. v, p. 359, 396-397, et t. x, p. 576. L’incident est également relaté dans le journal de Massarelli, 1. 1, p. 561 et 563.

En dehors de cette « rixe », les consultations théologiques suivirent paisiblement leur cours. Un prélat désireux d’avancement, l’évêque Staphileus de Sebenico, prenait même le soin d’envoyer les siennes au pape, afin de se recommander par là en vue d’un poste plus avantageux, t. x, p. 561-563. Les séances se terminèrent le 23 juillet par une longue exposition de Séripando, t. v, p. 371-375, et du général des Carmes, p. 375-378. Il ne restait plus qu’à résumer l’ensemble, p. 378-384, pour aborder ensuite la rédaction même du décret.

Dans l’intervalle, les avis des théologiens romains, si souvent sollicités, étaient expédiés de Rome le 17, t. -x, p. 566-567, et arrivaient à Trente le 22, p. 569570. Mais à ce moment-là le travail des commissaires du concile était déjà prêt.

Élaboration du décret.

Avant d’arriver à sa

forme actuelle, le décret sur la justification est passé par trois rédactions successives, et plus ou moins différentes, qui furent tour à tour abandonnées.

1. Premier projet.

Sans perdre de temps, la commission désignée le 15 juillet s’était mise à la tâche, avec le concours des théologiens choisis par elle « parmi les meilleurs », t. x, p. 565 et 569. Le plus important fut le franciscain André Véga, qui, d’après des sources encore inédites, serait le primus et principulis auctor de ce premier projet. Elises, t. v, p. 384, et Hefner, p. 103.

Le texte en fut distribué aux membres du concile le 24 juillet, t. v, p. 384-391. Il comprenait vingt et un petits chapitres, dont les trois premiers seuls avaient une forme affirmative, tandis que les autres commençaient par une formule d’anathème contre l’erreur visée. Chacun était suivi d’arguments théologiques et scripturaires propres à l’établir. On a n mai que avec raison, Hefner, p. 107, que ce projet primitif suit de très près la liste des vingt-deux propositions dressée par les légats en date du 30 juin.

En raison des difficultés intérieures qui entravaient alors la marche du concile, la discussion de ce texte fut retardée jusqu’au mois d’août. De Rome on suggérait d’ « expédier l’article de la justification », t. x, p. 612, afin de procéder ensuite à la translation de 1’asseiublée. Cette suggestion ne fut pas suivie et la discussion occupa les congrégations des 13, 17 et 28 août, t. v, p. 402-419.

Le piojct des commissaires fut assez maltraité. Quelques théologiens avaient déjà fait à son endroit des remarques de détail, p. 392-394, Presque tous les J’en s en critiquèrent la forme, qu’ils trouvaient longue et obscure. D’autres y signalaient des superlluités ; beaucoup se plaignaient de n’avoir pas sous les yeux

les notes des théologiens. 1.’architecture même en

déplaisait à plusieurs, parce qu’ils y voyaient trop de raisonnements et pas assez de décisions. Ainsi l’évêque de Sinigaglia souhaite que les canons soient rédigés

in tnodum dedivuiis non persuasionis, p. 403. Non

placent tôt rationes, appuie l’évêque de Bertinoro, p. 404, quia Spiritus Sanctus déterminât dogmata, non rationes. Moins mystique, l’évêque d’Agde en appelle à la suprême autorité du concile : Non reddantur rationes in canonibus, cum conciliorum suprema sit auctoritas, p. 409.

Profitant de ces hésitations, les prélats du parti impérial cherchaient à faire durer les débats par des chicanes de procédure. Ainsi l’évêque de Saint-Marc désirait revenir sur la liste des erreurs proposée le 30 juin, p. 408, et le cardinal de Jaën voulait connaître au préalable les raisons des commissaires, p. 410. Pour des scrupules théologiques, motivés par l’importance et la gravité de la question, le cardinal Pôle demandait de son côté qu’on prît du temps. Lettre du 28 juillet, t. x, p. 630-632.

Sur quoi le cardinal del Monte conclut le débat en promettant un nouveau texte, amendé juxla censuras Patrum, p. 410, auquel on trouverait bien moyen d’ajouter, sur la certitude de la grâce, p. 419, une formule propre à donner satisfaction aux desiderata de l’assemblée.

2. Deuxième projet.

Pour aboutir d’une manière

plus rapide et plus sûre, le cardinal de Sainte-Croix, Marcel Cervino, résolut de renoncer aux services de la commission et de prendre l’affaire en mains propres. Il recourut à cette fin aux lumières de Jérôme Séripando, dont le rôle déjà considérable allait ainsi devenir prépondérant.

Le général des augustins a lui-même raconté les vicissitudes de cette collaboration, t. ii, p. 428-432. Dès le 24 juillet, il était mandé par Cervino, qui le priait de rédiger un decrelum de justifteatione et lui faisait part de ses vues à cet effet. Ce texte fut prêt le Il août et le cardinal sembla fort le goûter : il est publié au t. v, p. 821-828. Quelques jours après, le 19, Séripando lui en présentait, sur ses désirs sans doute, une seconde rédaction, légèrement remaniée sur certains points. Ibid., p. 828-833.

Car, entre temps, Cervino consultait aussi d’autres théologiens. A l’aide de ces divers éléments, il rédigea un travail personnel, que Massarelli commençait à transcrire dès le 20 et qu’il reprenait les jours suivants, après des conférences privées avec l’auteur qui durèrent souvent de longues heures, t. i, p. 568-570. On voit que le cardinal, comme il s’en rend témoignage, ne recula pas devant la fatigue, t. x, p. 623 et 629. Ce texte fut soumis, dans les premiers jours de septembre, à divers évêques ou théologiens importants. Massarelli, t. i, p. 571. Le 10, les légats pouvaient rendre compte à Rome qu’ils y avaient travaillé sans interruption et qu’il n’était pas un seul mot qui n’eût été pesé en particulier avec tous les membres du concile che son qui di qualche repulatione, t. x, p. 642 ; cf. p. 647 et les notes de Massarelli, t. i, p. 573-575.

Le projet si soigneusement élaboré fut envoyé à Rome le 22, t. x, p. 660, et soumis au concile le 23, t. v, p. 420-430. Il paraît que « personne n’ouvrit la bouche si ce n’est pour le louer, » t. x, p. 06 1 Seul Séripando n’y reconnut pas son œuvre sous les multiples remaniements qui l’avaient modifiée et en présenta ses observations au cardinal, t. ii, p. 430. Les langues allaient d’ailleurs se délier au cours de la discussion.

A la différence du premier, ce nouveau projet séparait nettement l’exposition positive, en onze petits chapitres, et la condamnation des erreurs en vingt et un canons qui suivaient. Il fut d’abord discuté en congrégation par les théologiens, les 27, 28 et 29 septembre, t. v, p. 431-1 12, puis en assemblées générales par les Pères du concile, les 1. 2,.">, 6. 7, 8, 9, Il et 12 octobre, p. 442-197. Les diverses observations qui furent faites sont résumées p. 498 509, tilles portaient sur maints détails de fond ou de forme et faisaient,