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    1. JUSTIFICATION##


JUSTIFICATION, LA DOCTRINE DANS SAINT JACQUES

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l’homme avec Dieu, dont la foi avait commencé la restauration, (’et achèvement est L’œuvre du Saint-Esprit reçu au baptême et de la charité qu’il répand en nos cœurs, Rom., v, 5 : Carilas Dei diffusa est in cordibus nos ! ri s per Spiritum Sanction qui dalus est nobis. Or la valeur morale, particulière et générale, de la charité est sans cesse mise en lumière par saint Paul, I Cor., xiv ; Rom., xiii, 10 : Plénitudeergo legis est dileclio. La foi avec la charité constituent dorénavant un principe d’œuvres bonnes. Gal., v, 6 : Sed /ides qua’per charitatem operaiur.

Telle est, dans ses éléments essentiels, cette doctrine paulinienne de la justice et de la justification, source principale de l’enseignement de l’Église, et que la théologie catholique s’est appliquée à approfondir et à synthétiser.


V. Saint Jacques. —

Il ne nous reste plus à étudier que L’Épitre de saint Jacques, ii, 14-26 : Quid proderit, fratres mei, si fidem quis dicat se habere, opéra auteni non liabeat ? Numquid poleril fides (sine operibus) salvare eum ? « Que sert-il, mes frères, à un homme de dire qu’il a la foi, s’il n’a pas les œuvres ? Est-ce que cette foi pourra le sauver ? » Et après avoir allégué le cas analogue d’une charité qui.se bornant à des paroles non suivies d’effet, ne soulage en rien le malheureux, l’auteur conclut : « Ainsi la foi sans les œuvres est morte. » N’agissant point, l’on doit penser qu’elle est morte. Ni les destinataires de la lettre, ni le contexte immédiat, ni la comparaison avec la charité ne laissent place au moindre doute. Saint Jacques a en vue des chrétiens, déjà justifiés au sens de saint Paul, c’est-à-dire passés de l’état du péché à l’état de grâce. Il ne s’agit pas de la « justification première », à laquelle i, 18 a fait une brève allusion : « Par un acte de sa volonté (PouXr^etç), il nous a engendrés par une parole de vérité (l’idée de foi est toute proche), pour que nous soyons comme les prémices de ses créatures. » Il s’agit de la « justification seconde », c’est-à-dire de la vie du chrétien dans la loi et la justice, et où la foi, d’abord justifiante, devient, au dire de saint Paul, la foi « qui opère par la charité ». Gal., v, 6. Pour saint Paul, comme pour saint Jacques, cette foi-là, si elle n’a point d’œuvres, ne saurait « sauver ».

Les ꝟ. 18-19 représentent une sorte de parenthèse sans intérêt spécial. Saint Jacques y introduit un chrétien interpellant celui qui, au 1. 14, prétendait avoir la foi et qui n’avait pas d’œuvres. Ton affirmation est invérifiable, objecte au premier le second chrétien. Et puis ta foi sans œuvres ressemble singulièrement à celle des démons, chez qui elle n’a d’autre effet que la crainte. Il est évident que saint Jacques n’a pas l’intention de définir, en rigueur, la foi chrétienne prise dans sa réalité, fût-ce à part « les œuvres. Il est évident surtout que la foi des démons n’a rien de commun avec la foi justifiante de saint Paul. Nous n’avons d’ailleurs, en réalité, aucune raison décisive de croire que saint Jacques, fût-ce pour combattre certaines fausses interprétations qu’on en aurait données, ait en vue la doctrine exposée dans les Êpitres aux Galates et aux Romains. Les connaissait-il seulement ? Saint Augusl iii, qui le suppose, De diversis quæstionibus LXXXIII liber unm, q. lxxvi, P. L., t. xl, col. 87 sq. nisemble pas avoir d’autres motifs que l’apparente similitude des sujets traités.

La suite de notre texte est, à première vue, plus réellement embarrassante « : Mais veux-tu te convaincre, ô homme vain, que la foi sans les œuvres est sans vertu ! Abraham notre père, n’est-ce point par les œuvres qu’il a clé justifié, lorsqu’il Offrit Isa. le son bis sur l’autel ? Tu vois que la foi coopérait à ses œuvres et que par les œuvres (èx. -rôiv ëpywv) sa foi fut rendue parfaite, et la parole de l’Ecriture fut accomplie, qui dit : Abraham crut à Dieu et cela lui fut imputé à

justice et il fut appelé ami de Dieu. Vous voyez que l’homme, est justifié par les œuvres (è^ ëpycov) et non pas seulement par la foi. » Saint Jacques veut-il dire que la justification d’Abraham, dont parle Gen., xv, 6 dans un contexte tout différent, ne devint une réalité qu’après le sacrifice d’fsaac rapporté Gen., xxii ? C’est tout à fait invraisemblable. Il a en vue, sans aucun doute, un progrès nouveau et décisif dans la justice à raison de cette œuvre de la foi que représente pour lui le sacrifice. Œcuménius, développant une pensée de saint Jean Chrysostome et d’accord pour le fond de"la doctrine avec saint Augustin, l’explique fort bien : « Parmi les Pères, certains ont ainsi compris la chose. Le même Abraham, à des moments divers, a donné l’exemple de l’une et l’autre foi ; de celle d’abord qui doit exister avant le baptême, qui ne requiert point les œuvres, mais seulement la croyance au Christ et l’adhésion qui justifie les croyants, d’autre part de la foi qui suit le baptême et qui est unie aux œuvres. Ainsi l’Esprit qui a parlé dans les deux apôtres n’apparaît pas di lièrent. » Comment, in epist. cath. Jacobi, P. G., t. exix, col. 479 sq. C’est la justification seconde après la première justification.

L’on expliquera de même le ꝟ. 25 : « De même Rahab, la courtisane ne fut-elle pas justifiée par les œuvres, quand elle reçut les espions (de Josué) et les fit partir par un autre chemin ? » L’auteur de l’Épitre aux Hébreux, quand il écrit : « C’est par la foi que Rahab la courtisane ne périt pas avec les incrédules, pour avoir donné aux espions une sûre hospitalité. » Hebr., xi, 31, a en vue le moment psychologique qui précède celui où elle accomplit l’œuvre de foi ou de miséricorde à laquelle se réfère saint Jacques. A ce second moment nous sommes déjà sur le terrain de la justification seconde. Cf. Relser, Die Epistel des hciligen Jacobus, 1909, p. 130 sq. Leꝟ. 26 : « De même que le corps sans âme est mort, ainsi la foi sans les œuvres est morte, » fait précisément allusion à cette foi de Rahab que présuppose sa conduite à l’égard des espions. En résumé saint Paul traite de l’acquisition de la justice ou justification première, saint Jacques du progrès dans la justice ou justification seconde. La doctrine de saint Jacques est identique à la doctrine paulinienne de la fuies quæ per caritatem operaiur. La seule différence consiste en ce que saint Paul a fait du mot justifier un terme technique désignant, proprement et habituellement, la première acquisition de la justice.

Mentionnons, en terminant, Apoc, xxii, 11. Ce texte assez improprement rendu par la Vulgate : Qui juslus est justificetur adliuc, signifie, dans l’original : « Que le juste pratique encore la justice : ô Bixxioc, SixociotiWjV TcoiT^aaTO) 8n. Il énonce clairement les deux moments successifs, celui de la Justification première et celui de la justification seconde. La formule faire la justice rappelle 1 fini., vi, 11 ; II Tim., ii, 22 âîwxs 8s SixaioaùvTjV.

I. Études d’ensemble. — 1° Catholiques : H. Lesêtre, Juste, Justice, Justification, dans Dict. de la Bible, de Vigouroux, t. iii, l’ju ; i. — 2° Non catholiques. — A. EUtschl, Die christticlie Lettre von der Recht/crtigung, n. Diebiblische Sto/f, Bonn, 4 « édlt. 1900 ; W. E. Addis, Right, Rlghteousness, dans Encyclopœdia biblica, do Cheyne-Black, t. v, 1903 ; Ihmcls Reclit/crtigung, dans Realencgcloputtie fur protestanttsche Théologie uiul Ktrche, t. xvi, 1905 ; A. Bisset, Justice et II. S. Franks, Justification, dans Dictionarg o/ Christ and the Gospels de I lastlngs, 1. 1, 1906.

II. Ancien Testament.

Catholiques.

M. l lit sa

nauer, Theologta biblica, t. i, Velus Testamentum, 1908 ;

.1. TouznnJ, I. « lieliginn d’Israël. Paris. 1915. —2" Non

catholiques : H. Stade et A. Bertholet, Btbltsche Théologie des Allen Testaments, Tublngue, 1. 1, 1905, t. a, 191 1 ; Ed. KOnig Geschichte der attlestamentlichen Religion. GUtersloh, 1912 ; <. Dalmon, Die rtchterltche Gereehttgketi in A. T., 1897 ; .1. Skinner, Rtghteousnesê in OUI Testament, dans DIcMon, o/ the Bible « le HastlngB, t. IV, 1905 ; A. H. Gordon, Rigliteous-