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JUSTIFICATION, LA DOCTRINE DANS L'ÉVANGILE


custodibit qui in periculo inciderint, lii sunt qui habenl opéra et fidem ad Fortissimum. — Baruch syriaque uv, 5 : « Tu illumines les choses obscures et tu révèles les choses cachées pour ceux qui sont sans tache, qui se sont soumis dans la foi à Toi et à ta Loi ; » 16 : e Car, en vérité, celui qui croit en reçoit la récompense ; » 21 : < Tu glorifieras ceux qui croient selon leur foi. »

Le rôle de la Loi.

Cependant dans le judaïsme

contemporain de.I.-C. se développe, avec une rigueur sans cesse croissante, une doctrine de la justification par la Loi et par ses œuvres. On peut en trouver le point de départ dans Eccli., xv, 11-10 : « Il a fait luimême l’homme dès l’origine et il l’a remis à son propre conseil. Si tu veux tu garderas les commandements. » — Eccli., xxi, 11 : « Celui qui observe la Loi maîtrise son penchant mauvais. » Nous voyons poindre la doctrine, jusqu'à un certain point nouvelle, de la justice propre, de la justice acquise par l’homme luimême et par la voie des œuvres. Le IVe livre d’Esdras précise le caractère de. ce penchant et célèbre la grandeur de la Loi destinée à le vaincre, iii, 17-22 : El factum est cum educeres semen ejus ex JEgqplo, adduxisti super montem Sina. El inclinasti cœlos et staiuisti terram et commovisli orbem et tremere fecisti abyssos et conturbasli sœculum et transiit gloria tua portas quatuor, ignjs et lerrœmotus et spirilus et gelu ut dares semini Jacob legem… El non abslulisti ab eis cor malignum ut faceret in eis lex tua fructum. Cor enim malignum bajulans primus Adam Irangressus et victus est, sed et omnes qui de eo nali sunt. El facta est permanens infirmilas et lex cum corde populi, cum malignilale radicis… Nous voyons ici la pensée juive frôler, mais sans l’atteindre, la notion de péché originel. Le cor malignum est antérieur à la chute ; la permanens infirmilas n’apparaît pas comme péché. Mais on voit dans quelles conditions se présente le problème de la justification et le rôle unique assigné à la Loi. Cf. IV Esdras, v, 27 ; vii, 21, 79 ; îx, 31-37. Cette doctrine, accueillie par les maîtres palestiniens, ira s’imprégnant de plus en plus d’un esprit strictement juridique et contractuel. Dieu tient au jour le jour la comptabilité des œuvres de chacun. Lors du jugement final, il n’y aura plus qu'à faire la balance, et à proclamer le résultat. Ps. de Salomon, ix, 7 sq. : « Nos actes sont au libre choix et au pouvoir de notre âme, comme de faire la justice ou l’injustice par les œuvres de nos mains. Quant (à Dieu) il observe en sa justice les fils des hommes. Celui qui fait la justice se thésaurise la vie près du Seigneur. Celui qui fait l’injustice est lui-même cause de perdition pour son âme. »

La doctrine, un peu indéterminée, de l’Ancien Testament sur la justification était incontestablement plus large et plus souple. Nous la voyons, dans le judaïsme postérieur et surtout palestinien, systématisée et faussée. C’est bien, cette fois, la notion de justice propre, fruit des œuvres propres, sans autre participation de Dieu que le don de la Loi, que saint Paul combattra et dont il assurera qu’elle n’a jamais été valable. Cf. W. Bousset, Die Religion des Judentuna im neuleslamentlichrn Zeilalter, Berlin, 2e édit., 1906, ]>. 445. Le caractère forensique et eschalologique de la justification s’affirme de façon exclusive. Ce n’est rien de plus qu’une sentence de Dieu

constatant et déclarant ce qui est. Elle s’effectue au dernier joui-, lors du jugement final.


III. Les Évangiles. Pas plus que L’Ancien Testament, ils ne nous dirent une doctrine explicite île la justification. La notion spéciale de justice et de justification n’y joue même qu’un rôle de second plan et minime. Les Synoptiques s’attachent plutôt à ridée <'e salut et le quatrième Évangile à celle de vie.

Cependant l'épithète de juste continue d'être appli quée aux bénéficiaires du salut : Matth., x, 41 ; xiii, 43, 49 ; xxv, 37, 46 ; Luc, xiv, 14 ; xv, 7. Le terme : justification se rencontre sept fois seulement, une foi au sens forensique qugement dernier), Matth., xii, 37 ; une fois au sens de rendu juste, Luc, xviii, 14 ; les autres fois en des sens divers et moins techniques. Le mot justice n’est employé que dix fois.

Comme déclarations particulières, l’on ne voit guère à signaler que les suivantes. Matth., v, 19 : « Celui donc qui aura enfreint un de ces moindres commandements et aura enseigné aux hommes à faire ainsi, celui-là sera appelé le plus petit dans le royaume des cieux ; celui, au contraire qui aura pratiqué et enseigné, celui-là sera appelé grand dans le royaume des cieux. » Les pharisiens auront goûté cette parole, tout en la jugeant un peu faible peut-être. Il n’en va pas de même pour ce qui suit, v, 20 : « Je vous dis que si votre justice ne l’emporte sur celle des scribes et des pharisiens, vous n’entrerez pas dans le royaume des cieux. » Suivent un approfondissement et une extension d’un certain nombre de prescriptions anciennes. Mais voici qui porte plus loin et rend décidément un son nouveau : Non enim veni vocare justos sed peccatores. Matth., ix, 13 ; Marc, ii, 17. Nous ne sommes pas au bout. La parabole du pharisien et du publicain, Luc, xviii, 9-14, nous suggère touchant la justification des idées entièrement conformes à celles que saint Paul développera plus tard. Justificatus au t. 14 signifie : devenu juste ou même rendu juste. La seconde partie de la prière du Seigneur : Et dimilte nobis débita nôstra sicut et nos dimiltimus debitoribus nostris, Matth., vi, 12 ; Luc, xi, 4, est dans le même esprit.

Mais la grande nouveauté des Évangiles, c’est la doctrine même de la Rédemption, l’idée du Messie conçu comme Rédempteur. Matth., i, 22 : Et vocabis nomen ejus Jesum ; ipse enim salvum faciel populum suum a peccalis eorum ; Matth., xx, 28 : Sicut Filius hominis non venit minislrari sed ministrare, et dare animant suam redemptionem pro mullis, XÛTpov àvrl rcoXAûv ; cf. Marc, x, 45. Les récits de l’institution de l’eucharistie' mettent cette idée dans un relief saisissant. Matth., xxvi, 27, a, sur la coupe : Hic est enim sanguis meus novi testamenti, (SiaOrjxiQç), qui (tô) pro mullis efjundetur in remissionem peccalorum ; cf. Marc, xiv, 24 et Luc, xxii, 20. Sur le pain, saint Luc, xxii, 19, porte : Hoc est corpus meum quod pro vobis datur, tô ÛTtèp ûu, wv 8186u.svov ; cf. I Cor., xi, 24. Cette idée du Messie-Rédempteur, quoique latente dans les poèmes du Serviteur de Jahvé, Is., xi.u, 1 sq. ; xlix, 1-6 ; L, 4-9 ; lii, 13-Lin, 12, était pratiquement étrangère aux Juifs.

D’autre part, c’est par la foi que l’homme devient bénéficiaire de la Rédemption opérée par le Christ et se dispose au salut. Marc, xvi, 16, est aussi explicite qu’on le peut souhaiter : Qui crediderit et baptizatus fuerit, salmis erit ; qui vero non crediderit condemnabitur. L'Évangile selon saint Jean abonde en déclarations sur la foi en Jésus et sur son pouvoir, Joa., i, 12 sq. : Quotquot autem receperunt cum, dédit eis potestatem filins Dei fleri, liis qui credunt in nomine ejus. Texte auquel on trouverait de multiples parallèles.

C’est ( « Ile doctrine évangélique de la Rédemption et de l’universel état de péché qu’elle suppose, puis de

la foi (et du baptême) comme moyen fondamental et

initial de s’en assurer le bénéfice dans l’union a Jésus Chris ! que saini Paul a développée en théologie inspirée de la justification. Des mots comme celui de Gal., ii, 21 :.le ne liens pas pour nulle la grâce de Dieu ; car si la justice (venait 1) par la Loi c’est donc que le Christ serait mort pour rien. » nous le montrent raisonnant à partir de la mort de Jésus-Christ. Dès le temps de sa première mission, d’après Act., xiii, 38,