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    1. JUSTICE ORIGINELLE##


JUSTICE ORIGINELLE, PROBLÈME imil.MATIOUE

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2. L’intégrité. - —

La concupiscence, au sens propre du met, voir (. iii, col. 805, est corrigée par le don d’intégrité. Cf. Intégrité (État <P), t. vii, col. 2266. En ce sens précis, l’intégrité peut être définie : la rectitude des (if>pétits inférieurs, parfaitement soumis à la raison.

Sans appartenir à la foi, la doctrine de l’intégrité d’Adam avant sa chute, a des fondements si apparents dans l’Ecriture et a reçu du magistère des confirmations si explicites, qu’elle doit être tenue comme au moins théologiquement certaine : à ce titre elle appartient à l’enseignement officiel de l’Église.

a) Les fondements scripturaires de cette doctrine se trouvent dans Gen., ii, 25 et iii, 7. Avant le péché, Adam et Eve sont nus et ne rougissent pas ; après le péché, leurs yeux s’ouvrent et, ayant connu qu’ils étaient nus, ils tressent des feuilles de figuier pour s’en faire des ceintures. Dieu lai-même leur fait remarquer que, s’ils n’avaient pas péché, leur nudité ne leur eût point paru inconvenante. L’unique raison du changement d’attitude en nos premiers parents relativement à la nudité de leurs corps ne peut être que l’éveil soudain de la concupiscence en leur chair. D’ailleurs saint Paul considère la concupiscence comme un résultat du péché. Cette idée remplit les c. vi et vu de l’Épître aux Romains. Voir surtout vi, 12 ; vii, 19-20, 25. Paul parle manifestement de la concupiscence qui prévient la raison et résiste à la raison. Il désigne par métonymie cette concupiscence sous le nom de péché, parce que, comme l’explique le concile de Trente, sess. v, can. 5, « elle vient du péché et incline au péché. »

b) L’Église, par l’organe des Pères a sanctionné cette doctrine. Jusqu’au péché, un « manteau de justice » couvrait la nudité d’Adam. S. Ambroise, Apol. prophétie David, t. II, c. viii, n. 41 ; De N’oe et arca, c. xxx, n. 115 ; P. L., t. xiv, col. 903, 411 : S. Maxime de Turin, Itomilia : de diversis, lxxx, P. L., t. Lvn, col. 426. Ce manteau de justice est le don d’intégrité. Saint Jean Chrysostome tient la même doctrine. In Gen., homil. xiv, n. 4 ; xvi, n. 1, P. G., t. un. col. 123, 126, voir ci-dessus, col. 677. Même doctrine chez saint Jean Damascène, Homil. in ficum are/actam, n. 3, P. G., I. x( vi, col. 560 : ce 1 ère, attribuant à Adam innocent rdwtôBeiK, l’imp ssibilité, entend par là l’exemption de toute concupiscence, de toute passion troublante, de toute inquiétude, de tout souci. Voir ci-dessus, col. 726. C’est surtout saint Augustin qui a traité

  • r professa du don gratuit d’intégrité dans le premier

homme. Sa controverse avec le.s pélagiens est remplie de ce sujet, que l’on retrouve maintes fois abordé dans le De nuptiis ri concupiscentia et dans les écrits contre Julien (l’Éclane. Voir en particulier : Contra Julianum, t. IV, c. xvi, n. 82 ; Contra duas episl. pelug., t. I, c. xvi, n. 32, P. L., t. xliv col. 781, 564. Et ailleurs : De civil. Dei, t. XIV, c. ix-xi, xvii-xviii, t. xi.i, col. 413418, 425 ; De Genesi ad litteram, . XI, c. i, n. l, t.xxxiv, col. 429. L’unanimité des théologiens vient corroborer le sentiment des Pères. Voir S. Thomas, Sum. thcol., [ », q. xr v, a. 2 ; I" ID, q. i.xxxii, a. 3 ; Suarez, De opère sex dicrum, t. III, c. xii, n. 4 sq.

On trouve une confirmation de cette doctrine dans le e< ncile de’I rente, sess. v, can 5. i Dans les baptisés, déclare le concile, la concupiscence ou foyer du péché, demeure, » biem que le Cbrisl nous ronde ce que uns premiers parents avaient perdus. Cela suppose que la concupiscence n’existait pas dans l’état d’innocence. Bien plus, en déclarant dans le même canon, « que la concupiscence vient du péché, le concile enseigne ouvertement qu’elle n’était pas avant le péché ; car si elle avàll existé auparavant, elle ne serait en aucune manière eflei « lu péché, b Suarez, op. cit., n. 6. Le caté chisme du concile de TVeirte commente cette doctrine

Dinars motus animi idi/ac appctiliants (l)eiis) ita in en

(Adamo) temperavlt ut ralionls imperto numptam non

parèrent. Et la Commission biblique parle explicitement de l’intégrité primitive. Réponse du 30 juin 1909, ad.’ « un. Denzinger-Bannwart, n. 2123.

Est-il besoin de le faire remarquer ? Les Pères et l’Église supposent toujours que ce don d’intégrité est préternaturel, c’est-à-dire gratuitement donné par Dieu et non dû à la nature humaine en vertu de ses éléments constitutifs. Voir les textes dans Casini, S. J.. Quid est homo, a. 4, en appendice aux œuvres de IV tau, édit. de Bar-le-Duc, 1868, t. iv, p. 604 sq. Nous avons d’ailleurs, sur ce point précis, une attestation explicite de l’enseignement de l’Eglise dans la condamnation des propositions 21 et 26 de Baïus ; voir ce mot, t. ii, col. G7-68. Et la raison elle-même démontre le caractère préternaturel du don d’intégrité, puisque la concupiscence est un défaut naturel de l’humanité. Voir Concupiscence, t. iii, col. 811-812.

Bellarmin ajoute à la doctrine traditionnelle une précision nouvelle, tout au moins dans sa formule. « On ne saurait nier, .écrit-il, que, depuis la chute, il existe même dans la partie supérieure de l’âme un défaut semblable (à la concupiscence). Car cette partie supérieure de l’âme est aussi inclinée à convoiter les honneurs, la vaine gloire et autres vanités : et qii’irjue nous ne le voulions pas, ces désirs se produisent en nous. Aussi saint Paul, après avoir dit (Gai. v, 17) : La chair convoite contre l’esprit, énumérant aussitôt les œuvres de la chair, ne nomme pas seulement : la fornication, l’ivrognerie, et autres péchés de ce genre, mais aussi Yidolâtrie, les hérésies, les inimitiés, etc. Saint Augustin a soigneusement remarqué cela au 1. XIV de la Cité de Dieu, c. ii, iii, iv, où il démontre que parfois la chair signifie tout l’homme tel qu’il est sans la grâce de Dieu après le péché d’Adam ; et que celui-là est dit charnel qui vit selon lui-même, et non selon Dieu. C’est pourquoi le vice de la concupiscence, bien que résidant principalement dans l’appétit sensitif, a aussi son siège dans la volonté. Et si saint Augustin, dans ses livres contre les pélagiens. parle surtout du vice de la sensualité, ce n’est pas qu’il ignorât que ces tendances déréglées ont Heu aussi dans la volonté, mais c’est parce qu’elles se manifestent davantage dans l’appétit sensitif. <> De amissione graliæ, t. V, c. xv. Les théologiens contemporains, reprenant cette précision doctrinale de Bellarmin, parlent de concupiscence spirituelle. Van Noort, De Deo créante, n. 199.

3. La science. —

L’ignorance, défaut naturel à l’homme, était corrigée en Adam, créé par Dieu à l’état adulte, par le don de science. Le sentiment universel des Pèreset le commun enseignement des theo logiens donne à l’existence du don de science en Adam une valeur doctrinale certaine. Cette doctrine, théologiquement certaine, a son fondement dans l’Ecriture. Le Genèse nous montre Adam appelé par Dieu lui-même à donner des noms aux êtres vivants, n. 18-20 ; ce qui suppose, au dire de saint Augustin, une science excellente en Adam. Opus imperf., t. V, c. i. P. /… t xlv, col. 1432. L’Ecclésiastique Célèbre aussi la science de nos premiers parents. Eccli.. xvii. 5-11. Mais la nature de cette science, son étendue, sou objet sont difficiles à déterminer. Les témoignages srriplui aires sont peu explicites ; les Pères, tout en affirmant l’existence d’une sagesse Communiquée par Dieu au premier homme (voir, en particulier, S. Jean Qhryaostonie. In Gcnesim, boni I. xv, n. 3 ; cf. xtv. n. 5. P. f ;.. I. i iii, col. 122. 116 ; S. Cyrille d’Alexandrie. In Joan., t. I, c. ix, P. G., t. i.xxiu, col. 127), ne précisent pas grand chose sur la nature et l’objet de cette sagesse. C’est par voie de déduction que les théologiens sont arrivés a affirmer la science infuse per accidens en Adam, voir Adam, I. 1. col. 371. et s’il semble qu’on ne puisse rejeter sans témérité l’existence d’une telle science en Adam, il reste encore à en délimiter l’objet