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    1. JUSTICE (VERTU DE)##


JUSTICE (VERTU DE), VERTU CARDINALE

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a contribue à ébranler la sécurité. Aussi la loi mosaïque prescrit-elle à juste titre : « Si un homme dérobe un bœuf ou une brebis… il restituera cinq bœufs pour le bœuf, et quatre brebis pour la brebis. » Ex., xx, 1.

Enfin dans nombre d’échanges volontaires, la passion ne serait pas toujours égale, si quelqu’un donnait sa ebose à lui en échange de celle d’un autre, parce qu’il pourrait arriver que celle-ci fût plus précieuse que la sienne propre. Le troc est en définitive une forme d’échangi s souvent injuste. Et voilà pourquoi il faut, suivant une mesure justement proportionnée, égaler la passion à l’action dans les échanges. C’est précisément à cette tin qu’ont été inventées les monnaies, qu’on substitue aux choses elles-mêmes dont elles payent le prix. A. 4.

Enfin quand il s’agit non plus de justice conunutative, mais de justice distributive, cette doctrine du contrapassum ne trouve même plus à s’appliquer. Ici, en effet, l’égalité ne se fait pas de chose à chose, mais de chose à personne. A la différence de ce qui se passe en justice d’échange, ce sont les personnes et non les choses qui interviennent à litre direct dans la justice de répartition. Ila-II », q. i.xi.

IV. La justice vertu cardinale.

Vertus théologales, morales, cardinales.

- Dans la justification, avec la rémission des péchés et la collation de la grâce sanctifiante, des principes d’action surnaturelle, des énergies d’ordre divin nous sont donnés ; ce sont les vertus infuses. Les unes sont dites théologales, non seulement parce qu’elles ont Dieu pour cause et que c’est à Dieu que nous en devons la connaissance, mais surtout parce que, nous ordonnant vers Dieu, elles ont Dieu lui-même pour objet et pour motif. Ce sont : la foi, l’espérance et la charité.

Les autres vertus sont dites morales, parce qu’elles ont pour objet les devoirs moraux de l’homme et que, par elles, l’homme devient moralement bon. A la différence des vertus théologales qui disposent l’homme, comme il convient, vis-à-vis de la fin dernière de la vie humaine, les vertus morales le disposent à prendre les moyens d’atteindre cette fin.

Les vertus morales sont naturelles ou acquises, surnaturelles ou infuses. Les premières disposent l’homme au bien simplement honnête : les secondes le disposent au bien surnaturel et divin. La fin de l’homme étant surnaturelle, les moyens pour l’atteindre doivent être de même nature, et les vertus qui y disposent auront le même caractère. Elles ne sauraient donc être acquises par les efforts de l’homme ; elles viennent de Dieu seul et sont infusées par lui, dans la justification, en même temps que la grâce sanctifiante et les vertus théologales.

Quatre de ces vertus portent le nom de cardinales, parce qu’elles forment l’axe de toute la vie morale. Cardinalis a cardine dicitur, in quo ostium vertitur dit saint Thomas. Kl ideo proprie virtuies cardinales dicuntur in quibus quodammodo vertitur et fiindutur vita moralis, sicut in quibusdam principiis lidis vitse ; proplrr quod et hujusmodi virtuies principales dicuntur. — Qusestiones dispulaiæ, de virtutibus cardinalibus. Q. unie, a. 1.

Ce sont :
la prudence, qui éclaire et dirige la conduite par le discernement ce ce qui est à faire ou à éviter ;
la justice, qui porte à rendre à chacun ce qui lui est dû ;
la force, qui écarte les obstacles et triomphe des difficultés dans l’accomplissement du devoir ;
la tempérance, qui modère la concupiscence et la maintient dans de justes limites.

Ces quatre vertus cardinales servent de centre autour duquel se groupent beaucoup d’autres vertus secondaires et subordonnées. Parmi toutes ces vertus, les unes se rapportent à l’intelligence et sont d’ordre intellectuel ; les autres se rapportent à la volonté. C’est dans cette dernière faculté que réside la vertu de justice.

La justice vertu cardinale.

C’est avec, raison que la justice est comptée au nombre des vertus cardinales. Cette vertu règle les rapports d’un individu à un autre, des membres de la société comme parties d’un tout, et enfin de l’homme à Dieu, en tant que certaines obligations le lient à Dieu, bien qu’il n’y ait pas de place ici pour une justice rigoureuse, à cause du défaut d’égalité. Elle se définit : une vertu infuse qui nous porte à rendre et à garder à chacun le bien qui lui est dû : définition qui s’applique également à la justice conunutative, à la justice légale et à la justice distributive. Virlus cardinalis justitiæ generice sumptu, dit Pesch, deflniri potest : habitus infusus ad reddendum et servandum unicuique bonum ipsi debitum. Justifia commutativa est virtus infusa ad reddendum et servandum omni individuo (plujsico vel morali, semper tamen rationali, ut patel) secundum perfeetam œqualitatem quidquid ipsi ex stricto jure debetur. Juslitia legalis est virtus infusa ad reddendum et servandum rcipubliciv, quidquid ipsi a partibus suis (capile et membris) debetur. Justifia distributiva est virtus, qua illi, qui habent auctoritalem publicam, bona et onera communia singulis subditis distribuunt pro eorum conditionibus, facultatibus, meritis. C. Pesch, Prælecliones dogmaticæ, Fribourg-en-B., 1911, t. ix, p. 107.

1. La sainte Écriture, en maints passages, enseigne que la justice est une vertu, et la place avec les autres vertus cardinales. Témoin ce texte du Livre de la Sagesse : « La divine Sagesse enseigne la tempérance et la prudence, la justice et la force, qui sont, ajoute l’écrivain sacré, les choses les plus utiles à l’homme dans cette vie. » Sap., viii, 7.

Nombreux sont les textes où elle recommande et prescrit les devoirs imposés par la justice conunutative, la justice légale tant à l’égard du pouvoir civil que vis-à-vis des pouvoirs spirituels, et la justice distributive. Qu’on nous permette d’en citer quelques-uns.

a) Le décalogue énonce en termes brefs l’interdiction du vol : Non furtum faciès. Ex., xx, 15 ; les divers libres bibliques, qu’il s’agisse du Deutéronoine, des prophètes, des hagiographes insistent sur les modalités diverses par lesquelles on peut violer ce précepte fondamental : SU lera dolosa abominatio est apud Dominum, et pondus œquum voluntas ejus, disent les Proverbes xx, 1, et ce texte pourrait être commenté par une multitude d’autres.

b) Pour ce qui est de la justice légale, le Sauveur en a posé le principe avec une netteté qui exclut toute discussion : « Rendez à César ce qui appartient à César. » Matth., xxii, 21. Les apôtres, avec, une insistance, qui a bien son prix au moment où ils écrivent, font la théorie de cette justice légale : qu’il sullise de rappeler deux textes classiques de saint Paul : « Que toute personne soit soumise aux autorités supérieures : car il n’y a pas d’autorité qui ne vienne de Dieu, el celles qui existent ont été instituées par Dieu… Rendez donc à tous ce qui leur est dû : le tribut à qui vous devez le tribut, l’impôt à qui vous devez. l’impôt, la crainte à qui vous « levez, la crainte, l’honneur à qui vous devez l’honneur. » Rom., xiii, 1, 7. « Nous avons tous été baptisés dans un seul Esprit, pour former un seul corps, soit juifs, soit païens, soit esclaves, soit libres Mais maintenant il y a beau coup de membres, et un seul corps. L’œil ne peut pas dire à la main : je n’ai pas besoin de ton aide : ni la tête dire aux pieds : vous ne m’êtes pas nécessaires.

Mais, au contraire, les membres du corps qui paraissent h 6 plus faibli s sont les plus nécessaires. Et si unmei ibre soutire, i « mis les membres souffrent avec lui ; ou si un membre est honoré, tous les autres s’en réjouissent avec lui. » 1 Cor., xii, 13, 20, 23, 20.