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JOACHIM DE FLORE. VIE

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JOB (LIVRE DE). INTERPRÉTATION

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Saint Thomas trouve l’intention du livie dans une démonstration de la providence divine régissant les affaires humaines. Expositio in Job, Opéra, édit.

Vives. INT."). t. wiit. p. 1. Mais, remarque Nicolas de Lyre, les interlocuteurs ne peuvent disputer d’une doctrine dont tous conviennent. In lib. Job. Præfatio. Nicolas de Lyre lui-même (foc. cit.), G. Warburton, évêque de Glocester, The divine Légation of Moses demonslraled, t. v, l.VI, sect. H, Londres, 1765, et quelques modernes tels que De YVette, Umbreit, Hirzel-Olshauser, mettent l’idée principale du livre dans une atténuation ou une relu talion de la croyance, courante parmi les Juifs.de la rétribution en ce monde des fautes et des mérites par l’adversité ou la prospérité. Mais la question est déjà résolue dès le début, quand le sâtân obtient la permission de frapper le juste Job. De plus, ayant réfuté ses amis sur ce sujet, Job parle longtemps encore, sans réplique de leur part, de tout autre chose — ce dont il est blâmé par Elihu et par Dieu même. Là n’est donc point le but unique du livre.

Peut-être a-t-il été institué seulement une probation du juste, et la gageure entre Dieu et « l’accusateur o a-t-elle eu uniquement pour objet la question :

« L’égoïsme est-il, oui ou non, la racine de la piété ?

Y a-t-il, en un mot, une piété désintéressée ? » Ainsi pensent Schàrer, Schlottmann, Râbiger, Szold, Preiss, Hontlieim, Meinhold. Mais cette question est résolue dès l’abord tout comme la précédente : les deux épreuves suggérées et amenées par le sâtân se trouvant sullisantes en elles-mêmes à établir l’affirmative dans le cas de Job, le seul envisagé ; et le reste du livre, la partie de beaucoup la plus considérable, se déroulant tout à fait en dehors de cette question.

Nul doute que le fond du récit ne pose et ne résolve le problème : « Pourquoi Job souffre-t-il ? » Et d’une manière générale : « Le juste peut-il souffrir, et si oui, pourquoi doit-il souffrir ? » Le résultat de la gageure n’a pas donné de solution. Les discours des amis concluent contre l’évidence, pour Job et le lecteur :

« Il n’y a pas de souffrance du juste. » Ceux de Job

lui-même et de Dieu ne concluent pas dans le sens proposé. Restent ceux d’Elihu ; mais ils seraient inauthentiques et ne solutionnant qu’après coup ; quelle réponse donnait donc le livre avant l’interpolation de ces discours ? J. D. Michælis, Evvald, Dillmann, Franz Delitzsch la trouvent en ceci que l’espoir d’une vie après la mort énoncé par Job au c. xix, 25-27, d’une vie où se rétablit l’équilibre entre les actes de l’homme et sa destinée, oit s’efface la disproportion entre ses mérites et leur rétribution, forme l’idée essentielle du livre. Mais le passage dût-il être compris de la vie future au sens littéral, « il est clair que toute lointaine compensation de l’au-delà pour la souffrance d’ici-bas ne peut constituer le motif et le but de celle souffrance. Du reste, le c. xx et les suivants (ou la question se pose à nouveau) montrent qu’elle n’a pas été du tout résolue au c. xix ; elle devient, au contraire, toujours plus brûlante jusqu’à la fin des discours de Job au c. xxxi, 35-37. » Budde, Das Buch Hiob iïbersetzt underklûrt, Gœttingue, 1913, p. xxxv.

Beaucoup, néanmoins, ont pensé que Dieu parlant

en dernier lieu doit conclure et apporter la solution

cherchée, dût-elle être purement négative, comme

celle-ci : En affirmant sa sagesse et sa puissance

Jahvé entend amener Job à cette idée que si donc

tOUl dan-, le monde a été disposé aulour de lui aveclaid de sagesse et même de sollicitude, son sort (malheureux) découle lui aussi d’un sage décret (providentiel )… Dieu doit pourvoir à d’autres êtres sans nombre et en cela léseï I al le particulier. »

En généralisant : l’h< ne ne doit pas inutilement

se traçasse] touchant l’énigme du divin gouvernement

du monde, mais se soumettre sans réserve aux sages et insondables desseins de Dieu. Ainsi Dulim pour le cas de Job, et, pour la généralisation de l’idée, la plupart des plus récents exégètes : liertholet. Eichhorn, Knobel, Vatke, Arnheim, Stendel, Renan, Kuenen, Merx. llilzig, Sluder, Reuss, Cheyne, Smend, Bæthgen, Klostermann, Kôberle, Pealce, Ed. Kônig, Barton, Bruch, E. Meier, Bleek… « C’est, au fond, la suppression de la question même de la souffrance du juste ; ainsi ne serait-il pas permis de la soulever. » Encore une fois, cette doctrine de la soumission parfaite aux décrets divins est déjà réalisée par Job et inculquée au lecteur aux c. i et n. Mais le héros du livre la dément visiblement dans la suite en reprochant à Dieu de vouloir la lui imposer comme de force, injustement et tyranniquement, et en lui contestant donc toute valeur : cf. les passages ix, 2-3 ; 14-16 ; 20, 29 31 ; x, G-7, 13-15 ; xni, 20-21 ; xvi, 17 ; Job à Bildad :

« Vraiment, je sais qu’il en est ainsi,

Et comment l’homme aurait-il droit devant Dieu ?

A-t-on envie de discuter avec Lui,

Il (Dieu) ne répond une fois sur mille… ix, 2-3.

« Dieu ne revient pas sur sa colère…

Bien moins donc puis-je Lui repartir,

Assembler des mots contre Lui,

Innocent, je n’aurais point de réponse.

Quand je devrais revendiquer mon droit.

Même si j’appelais et qu’il survint,

Je ne croirais qu’il eût ouï ma voix… » ix, 14-16…, etc.

Il serait tout à fait surprenant que l’auteur, « s’il avait entendu faire de la résignation à l’impénétrable volonté de Dieu l’enseignement principal de son livre, l’eût ainsi oblitérée » comme à plaisir dans les discours de Job et ne s’en fût pas tenu aux premiers épisodes de son récit. S’il a prolongé dans de telles proportions la discussion de la raison des souffrances du juste, à laquelle les discours de Jahvé ne fournissent aucun élément de solution, c’est que pour lui cette solution devait être donnée ailleurs et auparavant. Budde, loc. cit., p. xxxvm-xxxix.

Sinon les discours de Dieu, du moins son apparition comme telle constitue peut-être un élément, cette fois positif, de la réponse assurément donnée : La vue de Dieu suffit en elle-même à élever l’homme au-dessus de toute énigme ; sa société console de toute souffrance éprouvée ; Job marquerait à- la fin, xlii, 5, la satisfaction accordée par là à ses aspirations vers plus de justice :

« Je n’avais appris de toi que par ouï-dire,

.Maintenant je t’ai vu de mes yeux. »

V. Hofmann, Volck, Hoffmann, Bickell, Duhm, Peake, Barton… On oublie que l’apparition de Dieu s’est faite

« dans la tempête » terrifiante, non pour la satisfaction

de Job, mais bien pour un blâme ironique de ses discours, et que Job ne trouve pas une jouissance dans la vision de Dieu, mais une raison de s’humilier et de se repentir :

« Maintenant (que) je t’ai vu de mes yeux,

Je rétracte….

Et me repens sur la poussière et la cendre, i

« Ici la vue de Dieu n’est pas société avec lui, ,

niais renseignement sur son Etre qui gardera (Job à l’avenir, des discours inconsidérés et téméraires. » Budde, ibid., p. xxxix-xl.

Que Job ait figuré intentionnellement dans tout le livre le peuple d’Israël opprimé durant l’exil, comme le « Serviteur de Jahvé » dans Isaïe. xli, S, etc. (von der Hardt, Warburton, J. 1). Michælis, Bernsteln, Bruno Bauer, Seinecke, Hœkstra…) on n’en peut trouver trace dans le livre même conçu dans le plus