Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 8.2.djvu/268

Cette page n’a pas encore été corrigée

1945 JULIEN L’APOSTAT, DISPOSITIONS A L’EGARD DU CHRISTIANISME 1946

ocÙTOxpdcTOpoç TtpâÇscov t) 71epi paaiXeîocç ; c’est le portrait du parfait empereur, tel que Julien se le représente, tel qu’il sera lui-même un jour, et tel qu’il le retrouve, par flatterie, dans Constance. Le troisième, Eùtreêtaç xîjç pacuXîSoç èyxwfjuov, contient l’éloge proprement dit de l’impératrice Eusébie, bienfaitrice de Julien. Ces deux derniers doivent être de 357. — 2° Traités de théologie païenne (en 362). Un traité Sur le Roi-Soleil, adressé à son ami Salluste, Eîç tôv paci-Xéoc "HXiov, Ttpoç DocXXoûtmov. Un traité Sur la Mère des Dieux, Elç t/)v u.7)TÉpa twv @ewv. — 3° Écrits polémiques (en 362). L’un est dirigé contre les philosophes de l’Ecole cynique.Etç toùç àîrauSsÛTOOç xûvaç ; l’autre contre le philosophe cynique Héraclius, IIpoç’HpàxXeiov xuvtxdv, uepl toù Utôç xuviaréov xal El 7TpÉ7rei tô> xuvl [xùôouç uXaTTeiv. Dans celui-ci, Julien parle du genre littéraire de la fable, et de la manière de s’en servir. Il veut alors donner une leçon de choses à Héraclius, et il compose lui-même une fable. Or, cette fable est une allégorie où Julien nous retrace l’histoire de sa propre vie ; en particulier, celle de son éducation, de ses sentiments et de son passage au paganisme. La lecture de cette œuvre est rebutante ; mais son étude est capitale pour l’histoire religieuse de Julien. — 4° Œuvres satiriques (en 362-363). D’abord un libelle, le Banquet ou les Césars, Sufzirdaïov ^ Kpovia ou Kaîoapeç ; Julien s’y montre très méchant contre l’empereur Constantin, son oncle. Puis, le Misopogon, ou l’Ennemi de la barbe, satire virulente contre les Antiochiens, qui raillaient la longue barbe de philosophe de l’empereur. — 5° Les Lettres, dont beaucoup sont très importantes et dont le nombre dépasse actuellement quatre-vingt. Quelques-unes peuvent être de la jeunesse de Julien ; presque toutes sont de son règne comme César ou Auguste. Plusieurs paraissent être des essais, des compositions littéraires, Hertlein, 19, 24, 35, 41, 46, 59 ; et Cumont, 194, 180, 198, 186, 4, 82 ; Consolation pour lui-même sur le départ de Salluste, ou Ilapcqjm0t, xô< ; elç iauTÔv ; Lettre à Thémistius. D’autres sont d’ordre politique ou administratif : Lettre circulaire au sénat et au peuple athéniens ; A un Pontife païen sur ses devoirs ; Aux Alexandrins ; Aux Juifs ; Aux villes de l’empire pour interdire l’enseignement aux professeurs chrétiens. Les autres sont personnelles et adressées à des amis. — 6° Les Poésies ; petits jeux d’esprit ; la pièce sur l’orgue est curieuse. — 7° Des Fragments de quelques lignes d’écrits perdus, surtout de lettres. — 8° Les Écrits perdus ; le Traité contre les chrétiens en trois ou sept livres, réfuté par Cyrille d’Alexandrie, qui en a cité de longs fragments dans le Contra Julianum ; des Mémoires, assez courts, au moins deux sur les expéditions contre les Germains ; enfin, de nombreuses Lettres, qui existaient encore dans les recueils aux ive et ve siècles. M. Paul Allard range parmi les œuvres perdues les Saturnales ou Kcôvia, qu’il croit différer du Banquet ; cette opinion est très douteuse. Tous ces écrits sont en grec, langue maternelle et classique de Julien. Mais Julien savait aussi le latin, dont il se servait en Gaule avec les habitants et les soldats, dans des allocutions, des harangues, des jugements, des lettres, et aussi pour les Constitutions ou Lois, conservées, en partie seulement, dans le Codex Justinianus et le Codex Theodosianus.

Julien est un écrivain très inégal. Ses Traités, Panégyriques, Discours polémiques, sont des œuvres verbeuses et mal composées. Le style progresse péniblement, surchargé de longues citations, faites le plus souvent de mémoire ; la pensée, filandreuse et obscure, se dégage difficilement. Julien n’est lui-même et ne donne sa mesure que lorsqu’il écrit de verve, dans les Césars, le Misopogon, la Lettre aux Athéniens, ou dans les lettres personnelles.

III. Dispositions de Julien a l’égard du christianisme. — Pour comprendre ces dispositions, il est nécessaire de connaître, au moins sommairement, le caractère de Julien, son éducation et son instruction profanes, son éducation et son instruction religieuses, qui ont été autant d’acheminements à son apostasie.

Caractère de Julien.

 Les événements qui ont

entouré l’enfance et la jeunesse de Julien n’ont pu qu’exercer une influence fâcheuse sur son tempérament moral. A sept ans, l’enfant se trouve seul au monde ; sa famille, victime d’une tragédie de palais, a disparu dans le sang ; il a été sauvé lui-même à grand’peine par la pitié de l’Église, et obligé de quitter la résidence paternelle. Son frère est parti à Éphèse. Il est livré aux soins d’étrangers, chez l’évêque Eusèbe, trop dévoré par l’ambition et les intrigues pour s’occuper de lui. Sevré de toute vie de famille et de toute affection, l’enfant souffrit vivement, semble-t-il, de cette atmosphère d’indifférence ; son âme se ferma, et subit comme une atrophie morale. — - Cette situation dura jusqu’à douze ans. Alors Julien fut réuni à son frère Gallus, et tous deux furent envoyés à Macellum ; c’étaient bien deux frères et deux compagnons, mais toujours sans famille et sans amitiés, réduits à eux-mêmes dans leur solitude, avec leurs maîtres, leurs précepteurs, leurs domestiques, et cela pendant sept ou huit ans. Constance visita une fois ses deux jeunes cousins, en passant, dans un voyage en Orient. Constance était hautain, défiant, soupçonneux, peu accessible ; ce n’était pas un parent, c’était l’empereur, qui faisait élever en princes les deux derniers rejetons de la famille impériale. L’empereur commandait ; les princes se taisaient et obéissaient.

Un aspect frappant du caractère de Julien est l’insensibilité morale, celle du cœur. Non que Julien fut dénué de toute sensibilité ; on trouvera des exemples du contraire dans Ammien Marcellin, xvii, 7 ; xxii, 9 ; xxv, 3. Mais, dans ses écrits comme dans sa vie, Julien apparaît comme incapable de véritables mouvements du cœur et d’une affection sentie. Julien parle une fois de sa grand’mère, qui l’avait élevé, dans la Lettre à Evagrius (n° 46, Hertlein ; et n° 4, Cumont), pour dire qu’elle lui a donné une petite propriété. Il parle une fois de sa mère, dans le Misopogon, 9 : « Après que ma mère, qui n’eut que moi pour enfant, fut morte quelques mois après ma naissance, et cela après avoir échappé à bien des malheurs pendant sa jeunesse grâce à la protection de la Vierge sans mère (= la déesse Athèna), je fus confié à mon précepteur quand j’avais déjà sept ans. » Il parle une fois de son père, dans la Lettre aux Corinthiens (n° 20, Cumont) : « Mon amitié pour vous vient de mon père ; car mon père a habité chez vous…, c’est là que mon père a trouvé le repos. » On ne saisit chez Julien aucun sentiment tendre pour ses parents, aucun regret de ne les avoir pas connus, de n’avoir pas reçu leurs soins et goûté leur amour. Comme parent à aimer, Julien avait son frère. Gallus aimait sincèrement Julien. Julien avait de l’attachement pour lui. Mais cet attachement était plutôt une habitude provenant de leur séjour en commun à Macellum. Dans sa Lettre aux Athéniens, Hertlein, p. 349, Julien parle de son frère, que Constance avait fait exécuter six années auparavant ; il en parle avec dignité et éloquence. Seulement, il ne le fait que pour pouvoir accuser Constance, et se justifier d’avoir usurpé la pourpre à Paris ; dans ce plaidoyer, on ne rencontre aucune parole de regret ou d’affection pour un frère disparu aussi lamentablement. Julien a été marié. En le nommant César, Constance lui avait donné sa sœur Hélène pour épouse, en 355. Les années de mariage se passèrent toutes en Gaule, et Hélène mourut à Vienne dans l’hiver de 360-361. C’était l’impératrice qui avait obtenu la main d’Hélène pour Julien ;