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1917
1918
JULES I — JULES II


les mains du pape Jules, une pleine soumission. P. L., t. viii, col. 311.

Le pontificat de saint Jules marque donc parmi ceux du ive siècle. L’importance de ses interventions en matière dogmatique explique peut-être, comment, au début du ve siècle, les apollinaristes eurent l’idée d’abriter sous ce nom vénéré un certain nombre de productions douteuses, sinon franchement hétérodoxes. Gennade avait déjà remarqué qu’une lettre du pape Jules, adressée à un certain Denys, et relative à l’incarnation, si elle avait pu avoir sa raison d’être alors qu’on pouvait craindre l’hérésie des deux personnes dans le Christ, s’était montrée pernicieuse par la suite : fomentum enim est Eutychianæ et Timothianæ impietatis. De vir. ill., n. 2. D’autres occidentaux, comme Facundus d’Hermiane, avaient aussi soupçonné la supercherie. Elle fut définitivement démasquée par Léonce de Byzance. Adv. fraudes ApotL, procem., P. G., t. lxxxvi" b, col. 1948. Les chercheurs modernes ont fini par retrouver tout un dossier de pièces, qui sont de fabrique apollinariste, étant d’Apollinaire lui-même ou de ses disciples, et qui ont été mises en circulation sous le nom de Jules, évêque de Rome. Elles sont connues soit en grec, soit en syriaque, quelques-unes en arabe (ces dernières attribuées d’ailleurs à saint Hippolyte). M. H. Lietzmann est arrivé aux conclusions suivantes que l’on peut considérer comme démontrées. Sont d’Apollinaire, lui-même : un traité TCpî tyjç èv XptaTw êvottjtoç toG cw[i.aToç 7tp6ç ty ; v QzQTqiO !.{P. L., t. viii, col. 873) ; un traité conservé au complet en syriaque et dont le texte grec rcpôç toùç xocxà xvjç 6eîaç toG Xoyou aapxwæwç àYcoviÇouivouç (ibid., col. 876), n’est qu’un extrait ; enfin la lettre ad Dionysium (ibid., col. 929). La lettre ad Prosdocium (ibid., col. 954) est de Timothée évêque de Béryte, chef du parti qui était disposé à faire la paix avec l’Église. Enfin l’origine apollinariste de l’encyclique adressée à tous les évêques de l’Église (Incip. Kèmicyux’., ibid., col. 876) est également hors de conteste sans que l’on en puisse préciser l’auteur.

Le nom du pape Jules figure avec aussi peu de raison, en tête de deux décrétales de la collection pseudo-isidorienne, Jafîé, n. 195, 196, et d’un certain nombre de canons qui sont passés des recueils du haut moven âge dans les décrets d’Yves de Chartres et de Gràtien. Jafîé, n. 197-206.

Jaffé, Regesta pont, rom., t. i, p. 30-32 ; L. Duchesne, Le Liber pontificalis, t. i, p. 9 (catalogue libérien), p. 82-83 (1e édit. du Liber), p. 205-206 (2 8 édit. du Liber) ; le texte des deux seules lettres conservées est reproduit dans P. L., t. viii, col. 879 (lettre aux Antiochiens) et col. 908 (lettre à l’Église d’Alexandrie), le texte latin n’est qu’une traduction du grec conservé par saint Athanase, Apolog. contra arianos, n. 20-37 et n. 52-53. On trouvera également dans P. L., quelque lettres adressées au pape Jules II.

Tous les travaux relatifs à l’arianisme font une place plus ou moins considérable à Jules 1°. Parmi les plus récents voir P. Batifîol, La paix conslantinienne et le catholicisme, Paris, 1914, p. 403-405. Sur la question de Photin, d’Ursace et de Valens, voir J. Zeiller, Les origines chrétiennes dans les provinces danubiennes, Paris, 1918, p. 228 sq., et table alphabétique.

La question des faux apollinaristes, déjà touchée par Muratori (cf. P. L., t. viii, col. 938), a été définitivement élucidée par H. Lietzmann, Apollinaris von Laodicea und seine Schule, Tubingue, 1004 ; des faux mis sous le nom du pape Jules on trouvera l’édition critique, en grec dans ce volume, en syriaque et en grec dans J. Flemming et H. Lietzmann, Apollinaristiche Schriften syrisch mit dem grtechischen Tcxl, publiés dans les Abhandlungen de l’Académie de Gœttingue, PhiloL-kist. Klasse, N’eue Folge, t. vii, fasc. 4. Une première orientation dans O. Bardenhewer, Geschiclite der allkirchlichen Lileratur, t. iii, p. 583-585.

E. Amann.

JULES 11, pape du 1 er novembre 1503 au 21 février 1513. — Après le décès de Pie III, l’opinion publique à Rome donnait la tiare à Julien de la Rovère. Celui-ci, né près de Savone en 1111, n’était pas destiné d’abord à l’état ecclésiastique. L’accession au trône pontifical de son oncle François de la Rovère, devenu pape en 1471 sous le nom de Sixte IV, avait déterminé sa vocation. Julien dès octobre 1471 était pourvu de l’évêché de Carpentras ; en décembre de la même année il était cardinal-prêtre du titre de Saint-Pierre-ès-liens. Tombé, sous Alexandre VI, dans la plus complète défaveur, il s’était réfugié à la cour de France, d’où il n’avait cessé d’intriguer contre Alexandre, avec qui il se réconcilia pourtant en 1498. Rentré en Italie il ne s’y sentait guère en sûreté et se tint caché jusqu’à la fin du règne. Il reparaît à l’occasion du conclave qui nomma l’éphémère Pie III. Celui-ci mort, le cardinal de la Rovère avait toutes chances de lui succéder, et comme il désirait ardemment la tiare, il employa, pour se l’assurer, des moyens peu honorables, mais qui, à l’époque de la Renaissance, ne scandalisèrent pas les contemporains. Le 29 octobre 1503, il acquit les voix des cardinaux espagnols, en acceptant les termes d’une capitulation qui leur était favorable. A Georges d’Amboise il garantit les légations de France, de Bretagne, de Savoie et d’Avignon. L. H. Labande, Avignon au XVe siècle. Légation de Charles de Bourbon et du cardinal Julien de la Rovère, Paris, 1921, p. 640. Quant aux autres membres du Sacré Collège, il les soudoya soit par des promesses, soit par la corruption. L. Pastor, Histoire des papes depuis la fin du Moyen Age, trad. française, Paris, 1911, t. vi, p. 192-193.

Dans ces conditions l’élection ne devait présenter aucune difficulté. De fait, le conclave, ouvert le 31 octobre 1503, prenait fin le lendemain matin, 1 er novembre. Julien de la Rovère en sortit pape, sous le nom de Jules IL

Afin de donner satisfaction à ses électeurs, le nouveau pontife s’empressa de valider la capitulation qu’il avait souscrite. Il s’engagea à continuer la guerre contre les Turcs, à convoquer un concile général dans les deux ans, à ne déclarer la guerre qu’après avoir obtenu le consentement des deux tiers des cardinaux, à prendre l’avis des membres du Sacré Collège pour les créations cardinalices et dans toutes les affaires d’importance majeure. Le lieu du prochain concile ne pourrait être désigné sans le consentement des deux tiers des cardinaux. Cette même condition était exigée dans le cas où le pape reculerait la date d’ouverture de la haute assemblée. Mais, dans la suite, lorsqu’il se sentit ou se crut maître de la situation, Jules II tint peu de compte de ces engagements solennels. Un caractère, aussi autoritaire que le sien, ne s’accommodait pas de telles entraves, attentatoires au pouvoir suprême du pontife romain. Raynaldi, Annales ecclesiustici, an. 1503, n. 3-9.

Quoi qu’on pense de la façon dont Jules II ceignit la tiare, il est incontestable que son règne demeure un des plus brillants de l’époque de la Renaissance. La restauration du pouvoir temporel de la papauté, qui assurait à celle-ci l’indépendance, a immortalisé sa mémoire. Nous n’avons pas ici à raconter à la suite de quelles péripéties Jules II accomplit cette grande œuvre. Nous nous contenterons d’étudier le rôle religieux qu’il joua, rôle certes bien mince en regard de celui qu’il remplit dans le domaine de la politique.

Jules II s’était juré de libérer l’Italie des étrangers, des « barbares » qui l’occupaient. Après s’être servi de la France contre Venise et avoir réussi à recouvrer, grâce à son concours, les terres qui lui avaient été ravies, le pape se retourna contre elle et, dès 1510, annonça bruyamment le dessein de la combattre.