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1913 JUIFS (CONTROVERSES AVEC LES), DE 1789 A NOS JOURS — JULES I 1914

par l’argument prophétique basé sur l’inspiration divine des Écritures. L’apologétique valable pour lui sera celle qui est valable pour les autres rationalistes. Mais, parce que le fait juif entre comme un élément dans cette apologétique, d’une part il est à craindre que le préjugé juif ne s’interpose entre cet israélite et la lumière chrétienne, d’autre part il y a des chances pour que le caractère exceptionnel de l’histoire du peuple juif, si manifestement différente de celle du reste des peuples, sollicite spécialement son attention et que l’accès au christianisme en soit rendu plus facile. S’agit-il de l’israélite qui est un homme de foi et de bonne foi ? L’apologétique antijuive, appuyée sur les prophéties de l’Ancien Testament et sur la réalisation dans le Testament Nouveau des antiques promesses, corroborée par le grand fait de l’Église, ne peut pas ne pas l’impressionner, pourvu qu’il l’étudié avec diligence. Comment ne serait-il pas frappé des textes qui annoncent le Messie, ses douleurs, sa mort, sa gloire, rien qu’à les juxtaposer sans visée scientifique, tels qu’ils s’offrent, par exemple, dans Lopez, La lumière d’Israël, p. 143-152, ou plus com. plètement dans A. Lémann, Histoire complète de l’idée messianique, p. 15-75 ? Quand il passera de l’Ancien au Nouveau Testament, s’il le lit avec une âme droite, pourra-t-il contempler sans émotion la figure du Christ ? Et combien de détails qui, à eux seuls, lui donneront à réfléchir et peut-être le retourneront ! Dans ses Conférences ou discours contre… les athées, les déistes, les tolérants, les Juifs…, réimprimés à Paris, 1801, p. 162-163, Beurier, après avoir prouvé la divinité du Christ par les prophéties qui le concernent, l’établissait par la réalisation de celles que le Christ a faites. Il s’arrêtait, à juste titre, aux paroles relatives à la pécheresse qui avait oint sa tête avec un parfum précieux : Sinile eam. Amen dico vobis : ubicumque prsedicatum fuerit Evangelium istud in universo mundo, et quod fecit hsec narrabitur in memoriam ejus, Marc, xiv, 6, 9. Sur quoi il demandait : « Si Jésus-Christ n’avait pas été prophète, aurait-il pu prévoir qu’une action d’une simple femme, une action qui se passait en un repas de famille, au fond d’une bourgade, dût être un jour annoncée, publiée, préconisée dans toutes les parties de l’univers ? Voilà cependant ce qui s’exécute toutes les années depuis dix-sept siècles, et dont il peut y avoir autant de témoins qu’il y a de chrétiens dans le monde. » L’argument est magnifique, et l’on comprend qu’un Lopez, La lumière d’Israël, p. 55, 65, 83, 100, 102, en ait été saisi et y ait rencontré le point de départ de sa conversion. Mais, alors même que les autres considérations ne l’atteindraient pas, il en est une qui ne saurait laisser indifférent l’israélite qui a la foi, et c’est que le judaïsme ne contient que des ruines : le temple détruit, les sacrifices abolis, le grand prêtre, le grand sanhédrin disparus ainsi que les lévites, la Loi de Moïse inexécutable. Cf. de fortes pages de Beurier, p. 195-203. Et, la grâce aidant, il pourra conclure que l’Église catholique seule possède l’héritage du peuple élu de Dieu : « le temple, le sacerdoce, l’autel, le sacrifice perpétuel.. ; dans ses multiples offices on retrouve le chant des psaumes, la lecture de la Loi et des prophètes. Aussi l’israélite qui vient à elle complète et couronne simplement sa religion, il n’en change pas, il y revient, » Lopez, La lumière d’Israël, p. 217-218 ; cf. Lœwengard, La splendeur catholique, p. 241-245 ; Les magnificences de l’Église, p. 211-214. « Ainsi n’est pas fondé, a dit Drach, De l’harmonie, t.i, p. 64, le reproche, que les philosophes juifs adressent à nos frères convertis, d’avoir déserté la religion de nos pères. Bien loin d’abjurer la religion de ses pères, l’israélite qui se fait catholique est un enfant égaré, un fils prodigue, que la réflexion et le repentir ramè nent dans la maison paternelle. » Par là s’affaiblit et, toujours la grâce aidant, se surmonte la difficulté, la plus insurmontable qu’il y a pour un israélite, à devenir catholique : « un homme d’honneur ne doit jamais changer de religion. » Sans compter qu’il n’y a nul déshonneur, mais au contraire tout honneur à délaisser l’erreur pour la vérité, « l’israélite devenu catholique ne change pas de religion mais achève sa religion, la complète, la couronne. » Lémann, La cause, p. 78. Sic perficienles coronantesque religionem mosaicam, non mutantes, dit de son côté le Postulatum présenté, sur l’initiative des frères Lémann, au concile du Vatican pour qu’il adressât un appel à la nation juive, p. 92.

Elles sont à lire les pages où les deux Lémann ont retracé l’histoire de ce Poslulatum pro Hebrœis, pour les Israélites restés très chers à Dieu à caus° de leurs pères, carissimi propler pedres, dit saint Paul, Rom., xi, 28, pour le peuple qui nous a donné Jésus et Marie, p. 81, 92, 107-108, 120, etc. Cinq cent dix signatures épiscopales furent recueillies, et tous les Pères du concile auraient signé si les deux frères, obéissant à un sentiment délicat de déférence, n’avaient voulu céder la gloire du plus grand nombre de signatures au Poslulatum pro in/allibilitale. Aisément on composerait, à l’aide de la littérature ecclésiastique, un beau florilège de textes qui rappellent que nous devons au peuple juif et Marie et Jésus. Cette pensée est l’inspiratrice de tous les ouvrages de controverse antijuive. A l’évoquer, les polémistes les plus impétueux, tel un Pierre le Vénérable, Tractatus adversus Judeeorum inveteralam duriliem, præf., P. L., t. clxxxix, col. 509, s’attendrissent. Pas un qui ne voulût souscrire à ce que saint Ildephonse exprime avec l’insistance monotone, mais ici affectueuse et touchante, qui lui est habituelle, De virginilale perpétua S. Mariée aduersus très infidèles, c. iii, iv, vii, P. L., t. xci, col. 67, 69, 76. Le Christ, dit-il au juif, est ex traduce tua, ex stirpe tua, ex propagine generis tui ; eh bien ! poursuit-il, ipso (le Christ) ducente sequar eum (le juif), ipso præeunte curram post illum…, et, in quantum ipse permiserit, asseverem tibi…, convincam, probem… Marie est juive : sit rogo, jam sit, rogo, judsee, gratissimum tibi tanlæ Virginis decus in tua cognalione reperlum… ; unde jam veni mecum ad hanc Virginem.

Travaux. — Sur l’antisémitisme religieux voir B. Lazare, L’antisémitisme. Son histoire et ses causes, Paris, 1894, p. 222-245 ; A. Leroy-Beaulieu, Israël chez les nations, Paris, 1893, p. 5-49 ; Les doctrines de haine. L’antisémitisme V antiprotestantisme, l’anticléricalisme, Paris, 1902.

F. Vernet.

    1. JUIVE (Religion)##


JUIVE (Religion). — Pour éviter des redites, l’histoire de la religion juive, pour autant qu’elle doit préoccuper le théologien, sera traitée aux divers articles suivants. — L La religion des Patriarches ; voir art. Patriarches. — IL La religion mosaïque ; voir art. Moïse. — III. La religion juive après l’installation dans la Terre promise ; voir art. JosuÉ, ci-dessus col, 1564, et Juges, col. 1851. — IV. La religion juive à l’époque des Rois ; voir art. Rois (Livres des), et art. Prophètes. — V. La religion juive après le retourde l’exil ; voir art. Judaïsme, col. 1581.

Pour ce qui est du judaïme postérieurement à l’ère chrétienne, il intéresse moins la théologie que l’histoire des religions ; les idées générales qui ie dominent seront étudiées à l’art. Talmud.

    1. JULES l’r (Saint)##


JULES l’r (Saint), pape du 6 février 337 au 12 avril 352. — Les dates de son pontificat sont fournies par le Catalogue libérien, lequel est contemporain et mérite donc créance. La première édition du Liber pontificalis sait que Jules était romain d’origine, et signale de lui un constitutum interdisant aux clercs de