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1903
1904
JUIFS (CONTROVERSES AVEC LES), DE 1500 A 1789


sur l’histoire universelle, Ratisbonne, 1715. A citer encore, avec plusieurs sermons de Bossuet, sa IIe instruction sur Ui version du Nouveau Testament imprimée à Trévoux. Dissertation préliminaire sur la doctrine et la critique de Grotius, et Défense de la tradition et des saints Pères, I re partie, I. III, C. xxi-xxx, t. iii, p. 478510 ; t. iv, p. 111-125, à l’occasion de Richard Simon louant Grotius pour ses commentaires sur la Bible, en particulier sur les prophéties messianiques : Bossuet reproche à Grotius d’en arriver à « anéantir la preuve de la religion par les prophéties » qu’il avait établie dans son De veritate religionis christianæ. — Le protestant Jacques Abbadie, Traité de la vérité de la religion chrétienne, Rotterdam, 1684, 2 vol. ; Traité de la divinité de Notre-Seigneur Jésus-Christ, Rotterdam, 1689. Voir 1. 1, col. 7-8. — Baltus, jésuite, La religion chrétienne prouvée par l’accomplissement des prophéties, Paris, 1728 ; Défense des prophéties de la religion chrétienne, Paris, 1737, 3 vol., contre Grotius et Bichard Simon. — L’abbé Houtteville, La vérité de la religion chrétienne prouvée par les faits, Paris, 1722. Cet ouvrage fut critiqué, notamment par l’orientaliste Etienne Fourmont, Lettre de Rabbi Ismaël ben Abraham juif converti à l’abbé Houtteville, Paris, 1722 ; Houtteville donna une édition corrigée, Paris, 1741,

3 vol., qui fut suivie d’une édition posthume, 1749,

4 vol. — Bergier, Traité historique et dogmatique de la vraie religion, Paris, 1787, 12 vol., surtout IIe partie, c. vii-ix, t. vii, p. 107-587.

On pourrait citer encore la plupart des théologiens de cette période, surtout ceux qui ont le traité De vera religione, mais aussi nombre d’autres, par exemple, Petau, Dogm. theol. Suarez, In /i/am, disp. I, Contra Judœos, Messiam iam venisse, édit. Vives, Paris, 1860 t. xvii, p. 5-25 ; De incarnatione Verbi t. XVI, in quo adversus samosalenos recenliores sive socinianos neenon Judseos Christi incarnali Vprbi ac Dei hominisque dogma defenditur, édit. Fournials, Paris, 1867, t. vii, c. vi-x, p. 310-331 (contre les Juifs) ; beaucoup de commentateurs de l’Écriture, d’historiens, etc., sans parler des canonistes qui s’occupent de la situation légale des Juifs, et de tous ceux qui, de Luther à Voltaire, en passant par Simon Majoli, Pierre de Lancre, François de Torrejoncillo, l’auteur du Livre de l’Alboraïque (Bibl. nat. de Paris, fonds espagnol, ms. 356, etc.), désertent la controverse doctrinale pour se placer sur le terrain social ou préluder aux attaques de l’antisémitisme du xix c siècle.

2° Le caractère des écrits. — La littérature antijuive ressemble, d’abord, à celle du passé. Le titre même des écrits est souvent calqué sur les ouvrages antérieurs. Ils ont pour auteurs des catholiques de naissance, des Juifs baptisés et presque tous, sinon tous, devenus catholiques, des protestants. En Orient, les controversistes se raréfient ; il y en a moins en Espagne, autant sinon plus en France, davantage en Italie et en Allemagne. L’imprimerie les stimule et favorise la diffusion de leurs œuvres, en même temps qu’elle jette dans la circulation les œuvres anciennes.

La connaissance de la langue et des livres des Juifs s’est développée. La controverse antijuive l’utilise et parfois l’étalé volontiers. Elle se pare de textes hébreux et, afin de les reproduire d’après les règles, elle imprime le latin dans lequel ils sont introduits de droite à gauche en remontant de la fin du volume au commencement ; ainsi font, entre autres, Bartolocci et Imbonati. Quelques-uns des Juifs convertis oui la bonne pensée d’écrire en hébreu pour aborder plus facilement les Juifs et les amener au christianisme ; ou bien ils traduisent en hébreu le Nouveau’lest ainent, de préférence les Évangiles, ou des livres catholiques. P. N. LebrecM publie, en hébreu et en allemand, Eckstein des wahren ehristlichen Glaubens,

Dresde, 1719. Jean André donne, en hébreu, une Lettre parénélique à la synagogue des Juifs, Paris, 1552. Jean Baptiste Jouas traduit, avec le Petit catéchisme de Bellarmin, les évangiles, qui sont publiés à Rome, 1668, et le reste du Nouveau Testament qui n’est pas publié ; il revise la traduction hébraïque des trois premiers livres de la Summa contra Génies de saint Thomas. Dominique de Jérusalem, converti vers 1600, professeur d’hébreu au collège romain des néophytes, traduit en hébreu l’Évangile. Un protestant, au nom d’allure juive, Élie Schadœus, écrit, en hébreu et en allemand, une Admonilio ad Judœos in mijsterio S. Pauli de conversione Judœorum ad Rom., XI, Strasbourg, 1592, et, dit Fabricius, Delectus argumentorum, p. 582, germanice litleris hebraicis vulgavit Luc, Jean, les Actes des apôtres, les lettres aux Romains et aux Hébreux et quelques prophéties, d’après la traduction de Luther. Le pasteur M. Christian Mollerus publie tout le Nouveau Testament en lettres hébraïques poulies Juifs, Francfort, 1700. Le protestant J. G. Meuschen publie Novum Testamentum ex Talmude et anliquitatibus Hebrœorum illustralum, Leipzig, 1736, où il donne divers travaux de lui-même et de trois savants protestants, dont le plus important est celui de B. Scheid, Prwlerila pneterilorum. Loca talmudica (se rapportant au Nouveau Testament), p. 1-232.

Une forme, non pas nouvelle mais plus commune, de la controverse antijuive est celle du sermon. A Borne, les Juifs furent obligés (1577) d’assister à des prédications chrétiennes, et Grégoire XIII fonda, pour avoir des prédicateurs compétents, une école dont les élèves, au nombre de 30 environ, recrutés pour les deux tiers parmi les Juifs convertis, apprendraient, en plus des sciences théologiques, l’hébreu, l’arabe et le chaldéen. Chaque samedi, au sortir de la synagogue, le tiers au moins de la population du ghetto, à partir de 12 ans, devait ouïr une prédication, calme et impartiale, sur le texte biblique dont le rabbin avait donné lecture. Partout où il y avait des Juifs, les évêques, autant que possible, adopteraient la même mesure. La prescription fut peu exécutée en dehors de Rome. A Rome, l’ordonnance de Grégoire XIII est restée en vigueur, non sans intermittences, jusqu’à Pie IX, qui l’annula en 1848. Parmi ces prédicateurs. Imbonati, Bibliotheca lalino-hebraica, p. 62-63, signaleles dominicains Grégoire Buoncompagni († 1688) et son successeur Grégoire Compagni, le reviseur de la Bibliotheca latino-hebraica ; il mentionne des sermons manuscrits aux Juifs de l’un et de l’autre. Un des plus curieux recueils de sermons fut celui de J. M. Vincenti, // Messia venulo, Venise, 1659 (à l’index, décret du 18 juin 1680). Cf. Imbonati, p. 112-119.

A mesure que nous avançons dans les temps modernes, les écrits dirigés exclusivement contre les Juifs sont de moins en moins nombreux. Les Juifs sont combattus plutôt dans des ouvrages qui ont pour but général l’apologie du christianisme, et cela souvent non pas tant afin de convertir les ennemis de la foi chrétienne que pour affermir dans cette loi ceux qui l’ont reçue au baptême. C’est que les Juifs ne sont plus les ennemis principaux du christianisme. Le déisme est venu, et le rationalisme chaque jour plus osé. et l’athéisme, à son tour, et le protestantisme aussi, qui souvent entre dans la lutte contre les Juifs mais qui ne larde pas non plus, sous une certaine forme, à favoriser le rationalisme. L’apologétique catholique tourne principalement de ces côtés son effort ; les Juifs ne sont pas oubliés, ils absorbent moins la pensée chrétienne. De la polémique contre les païens et les Juifs d’abord, puis contre les Juifs presque exclusivement et les hérétiques, plus tard contre les Juifs et les musulmans, on a dû passer à la preuve de la vérité de la religion chrétienne « contre les alliées, épicuriens.