Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 8.2.djvu/177

Cette page n’a pas encore été corrigée

1 763

    1. JUGEMENT##


JUGEMENT, DONNEES DE L’ÉCRITURE : NOUVEAU TESTAMENT

épître n’a guère pour objet que d’annoncer le jugement. Sa maniera rappelle beaucoup la deuxième de

s. tint Pierre. Ici également sont évoquées les punitions décernées autrefois par Dieu aux Israélites incrédules, aux anges coupables, à Sodome et aux villes voisines, 5-7, à Coré et à ses émules, ꝟ. 11. A propos des anges, L’auteur enseigne, lui aussi, qu’ils sont dès maintenant enchaînés dans les ténèbres et réservés ainsi etç xptoiv y.syà.Lt]ç iftiépaç. v. G.

Ce « grand jour » verra également le châtiment des pécheurs. L’auteur emprunte pour l’annoncer la prophétie d’Hénoch, i, 9 : « Voici qu’il est venu le seigneur avec ses saintes myriades, pour exercer son jugement contre tous et convaincre tous les impies de toutes les œuvres d’impiété dont ils se rendirent coupables et de toutes les injures articulées contre lui par les pécheurs impies. » y, lô. Mais ce jour-là, les justes peuvent compter sur la miséricorde du Christ qui leur rendra la vie éternelle, ꝟ. 21.

Apocalypse.

C’est ici le livre eschatologique

par excellence ; mais, à raison même de son objet, il n’en est pas de plus diflicile à interpréter.

1. Principe du jugement.

On y voit que l’auteur écrit dans un temps de trouble et de persécution, où « la bête est déchaînée contre les chrétiens, xiii, 7, et s’enivre de leur sang, xvii, (i. Épreuve qui, en même temps que les cœurs, atteignait parfois les esprits. On devine une inquiétude dans la plainte que les martyrs adressent à Dieu, vi, 10 : « Jusques à quand, Seigneur, toi le saint et le véridique, ne juges-tu pas et ne venges-tu pas notre sang sur les habitants de la terre ? » Pour répondre à ces angoisses qui mettent en cause la Providence, le prophète insiste sur la justice de Dieu et affirme que le moment viendra où le ciel et la terre reconnaîtront que « grandes et admirables sont ses œuvres, justes et saintes ses voies t. xv, 3-4 ; cf. xvi, 7.

2. Jugement général. - — Or, pour Jean, ces voies divines se manifestent par un « jugement à plusieurs phases, » qui « s’étendent sur tous les temps messianiques. » B. Allô, L’Apocalypse, Paris, 1921, Intr., p. cxxiu. « L’Apocalypse décrit avec beaucoup d’ampleur les jugements historiques et continus, où la présence du juge est voilée. » lbid., p. cxci. Cette présence se dévoile, en tout cas, au regard du prophète, qui entend l’ange s’écrier d’une grande voix : « Craignez Dieu et rendez-lui gloire, parce qu’elle est venue l’heure de son jugement. » xiv, 7. Heure de Dieu, mais aussi heure du « Fils de l’homme », qui apparaît un peu plus loin tenant dans la main la faucille aiguisée avec laquelle il s’apprête à moissonner la terre. lbid., 14-16. Pour Jean, Dieu et le Christ ne se séparent jamais dans l’œuvre du jugement : l’ange qui jette à son tour sa faucille sur la vigne terrestre, ibid., 17-19, doit sans doute être considéré comme un exécuteur de leur commune sentence. Dans tous les cas, i il faut entendre le jugement au sens large ; ici, … il s’applique spécialement à Iiabylone et a la Bête, réalités historiques. » Allô, op. cit., p. 217. Les chapitres suivants racontent, en effet, la chute de « la grande prostituée » vaincue par l’Agneau, xvii, 11, et cette ruine est expressément donnée comme le jugement divin sur elle, xviii, 8, 10 : jugement qui réalise tout à la fois la revanche de ses victimes et la gloire de Dieu. X VIII, 20 ; i, 12.

Outre ce jugement, historique et restreint, qui atteint la grande ennemie de Dieu, le prophète annonce « gaiement les assises solennelles où devront comparaltre tous les hommes a la tin îles temps.

Ce ingénient eschatologique est annoncé une première lois lorsque les vingt-quatre vieillards, prosternés devant l’Éternel, saluent par avança son règne glorieux. Elle est venue ta colère et le moment

pour les morts d’être jugés, et de récompenser tes serviteurs les prophètes, les saints, (tous) ceux qui craignent ton nom, petits et grands, et de détruire ceux qui détruisaient la terre. » xi, 18. Ailleurs le prophète avait décrit les convulsions cosmiques dont il sera précédé, vi, 12-17. Il termine son livre par un tableau de la scène elle-même, dont le P. Allô admire à juste titre < la sobriété grandiose ». Op. cit., p. civ. Cf. p. 303. Le mystérieux règne millénaire est fini, Satan et ses suppôts sont dévorés par le feu du ciel. Puis voici que < sur son grand trône blanc » siège « Celui devant la face duquel s’enfuient le ciel et la terre. » Tous les morts ressuscitent, « les grands et les petits », pour comparaître devant le trône et « des livres sont ouverts, » sur le contenu desquels les morts sont jugés. La sentence reçoit aussitôt son exécution : ceux qui sont enregistrés « sur le livre de vie » entrent dans la céleste Jérusalem ; les autres, avec la mort et l’Hadès, sont précipités « dans l’étang de feu ». xx. 7-15 et xxi, 1-5. Ici pas plus que tout à l’heure l’auteur de ce jugement n’est nommé, Allô, p. 304 ; mais le rapprochement avec vi, 16 ; xi, 15 ; xxii, 7 et 12-15, ne laisse pas douter qu’il ne soit l’œuvre du Christ comme agent et fils de Dieu.

Qu’il s’agisse du jugement sous sa forme historique ou sa forme eschatologique, ce sera toujours "un acte de haute justice. Le châtiment des ennemis de Dieu n’est que la juste rétribution de leurs crimes. « Rendezlui comme elle-même a rendu, est-il dit de Babylone, et multipliez-le par deux suivant ses œuvres ». xviii, 6. Discours qui, dans l’original, ne s’adresse d’ailleurs pas aux victimes de la ville impie — comme pourrait le faire croire la leçon erronée de la Vulgate : Reddite Mi sicut et Ma reddidit vobis — mais o aux ministres de la justice divine ». Allô, p. 267. Une semblable menace s’applique à ses complices, xviii, 4 et xvi, 6. Il en est de même au grand jugement, où les défunts seront jugés y.a-x zà. spvx aÙTcôv. xx, 12 et 13. D’une manière générale, le Christ est le Dieu qui récompense ses serviteurs fidèles et qui rend « à chacun selon son œuvre. » xxii. 12 : cf. ir, 23.

3. Jugement particulier.

Mais cette « œuvre » n’est-elle pas terminée avec la vie et dès lors ne doit-elle pas recevoir immédiatement la sanction qu’elle mérite ?

Jean voit les âmes des martyrs « sous l’autel » céleste et Dieu donner « à chacun une robe blanche », qui ne saurait être qu’un insigne de gloire, vi, 9 et 11. Pourquoi ce privilège serait-il réservé aux martyrs ? Un texte semble faire croire que l’auteur en a conçu la généralisation. < Bienheureux les morts qui meurent dans le Seigneur, dès à présent ! Oui, dit l’Esprit, pour qu’ils se reposent de leurs labeurs ; car leurs œuvres suivent avec eux ». xiv, 13. Telle est, rectifiée sur l’original, la traduction du P. Allô, qui s’empresse d’y lire la promesse d’une récompense immédiate après la mort. Op. cit., p. 220 221. Cependant, prise au sens strict, cette parole ne signifie pas autre chose que la relation morale qui unit la vie présente à la vie future, et les morts ne peuvent-ils pas êlre dits « bienheureux », même bienheureux « dès à présent >, par l’assurance certaine de la résurrection qui leur est garantie ? D’autant qu’aux ꝟ. 10 et Il le châtiment des pécheurs semble être remis à l’avenir. Tout ce qu’on peut dire, c’est que ce texte permet et même appelle logiquement la rétribution Immédiate ; mais il ne prouve pas que cette logique se soit Imposée à l’esprit du voyant comme elle s’impose au notre.

Le même, sur xxii, 12 cite plus haut, gloser : « La rétribution qu’annonce le Christ s’opérera et sur terre, et Immédiatement après la mort, et au jugement général, Alto, 17 ». cit., p. 331, c’est tout au moins ajouter beaucoup a un texte Indéterminé. C’est