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JUDE (ÉPITRE DE — JUDÉO-CHRÉTIENS


excellente introduction historique ; Calmes, Épitres catholiques et Apocalypse, Paris, 1907 : Épître de Jude, p. 101111, ne donne pas d’introduction, mais seulement une traduction avec notes, est porté a faire de l’auteur et de Judas Jacobi deux personnages distincts ; Camerlynck, Commentarins in Epistolas Catholicas, Bruges, 1909 ; Fillion, Les Epitres Catholiques, dans Sainte Bible commentée, Paris, 1915, t. viii, p. 769 ; V. Vrede, Judas, Pe’trus, und Johannesbrie /e, dans, Die heiliqe Scliri/t des S. T., Bonn, 1921, bon commentaire doctrinal.

2° Xon catholiques : H. Kùhl, Die Briefe Pétri und Judæ, dans Kommentar iiber das N. T. de Meyer, 6e édit., Gœttingue, 1897, 7e édit., revue par Knopꝟ. 1912 ; Ch. Bigg, Epistles of St. Peter and St. Jude, dans International Critical Conunentarii, Edimbourg, 1902 ; J.-B. Mayor, The Epistle o/ St. Jude and the second Epistle of St. Peler, Londres, 1907, étude critique très approfondie de toutes les questions relatives aux deux épîtres et à leur dépendance mutuelle ; H. Windisch, Die Katholischen Briefe erkldrt, dans Lietzmann, Ilandbuch zum S. T., Tubingue, 1911 ; G. Wohlenberg, Der erste und -weite Petrusbric/ und der Judasbrief, dans Kommentar zum Neuen Testament, Leipzig, 1915 ; les commentaires de Bigg, Windisch et Wohlenberg sont très documentés, le dernier donne une abondante bibliographie relative aux épîtres de saint Pierre et à celle de saint Jude.

J.-B. Colon.


JUDÉO-CHRÉTIENS Chrétiens d’origine juive, qui associent les observances de la religion mosaïque aux croyances et aux pratiques chrétiennes.

Les premières recrues du christianisme étaient des juifs, qui crurent au Messie déjà venu, rédempteur et sauveur de son peuple, qui virent en lui l’accomplissement des oracles prophétiques. Or ces oracles s’adressaient spécialement à la race élue. Si le règne du Messie devait être universel, c’était, pensait-on, par la soumission, par l’incorporation des nations à Israël. Jésus avait donné l’ordre d’annoncer la bonne nouvelle à tous les peuples, Matth., xxviii, 19 ; mais il n’avait pas spécifié comment s’opérerait la conversion des gentils, quelles seraient leurs obligations vis-à-vis des prescriptions mosaïques. Il avait d’ailleurs proclamé qu’il était venu non pour abolir la Loi, mais pour l’accomplir, TrXyjpwaou, Matth., v, 17 ; il avait été envoyé aux brebis perdues de la maison d’Israël, Matth., xv, 24. « Car, je vous le dis en vérité, jusqu’à ce que passent le ciel et la terre, un seul iota ou un seul trait de la Loi ne passera pas, que tout ne soit accompli. » Matth., v, 18,

Étroitement interprétées, ces paroles pouvaient laisser supposer que la Loi subsistait toujours, et que les espérances chrétiennes s’ajoutaient aux promesses de l’ancienne alliance, que les deux lois formaient un tout inséparable. Les gentils qui croiraient au Christ ne devraient-ils pas avant tout adhérer au judaïsme et se soumettre aux observances légales ? Comment d’ailleurs les juifs convertis, que la Loi avait strictement séparés des païens, consentiraient-ils à communiquer avec des àfz.apTcoXo£ ?

Ainsi deux questions se posaient dès l’abord ; il fallait premièrement déterminer dans quelles conditions les gentils entreraient dans l’Église, préciser ensuite l’attitude des juifs eux-mêmes à l’égard de la Loi : problème de la plus haute importance, dont la solution intéressait l’existence et l’unité de l’Église : son existence, car contraindre les gentils à « judaïser », c’était faire du christianisme une secte juive, entraver sa diffusion ; son unité, car si l’on accordait la liberté aux gentils, en maintenant l’obligation de la Loi pour les juifs, il y aurait deux catégories de chrétiens, les uns pratiquant un christianisme intégral, les autres un christianisme diminué.

Les chefs de l’Église n’hésiteront pas longtemps sur le parti à prendre, persuadés qu’ils sont que le sacrifice du Calvaire a substitué un nouvel ordre de choses à l’ancien. Sans doute, ils devront aller progressivement pour ne pas heurter les préjugés de leurs frères

DICT. DE THÉOL. CATHOL.

en Israël. Jésus avait eu de ces ménagements, lorsqu’il enseignait les foules. Les apôtres ne proscriront pas tout d’un coup des pratiques devenues inutiles, mais qui avaient été imposées par Dieu, qui avaient été observées par leurs ancêtres, que Jésus lui-même avait respectées. Sous l’inspiration du Saint-Esprit, suivant les circonstances, ils s’efforceront de faire prévaloir l’idée de l’inefficacité de la Loi, de son inutilité, ils feront le nécessaire pour amener leurs compatriotes à l’abandonner, en se confiant uniquement dans le salut apporté par le Christ.

Mais à côté d’eux, des juifs turbulents, ne tenant aucun compte ni de l’enseignement ni des décisions apostoliques, travailleront à maintenir dans son intégrité l’observation complète de la Loi, à l’imposer non seulement aux juifs, mais aux païens convertis. Ce sont les manifestations de cet état d’esprit que nous étudierons :
1° à l’âge apostolique :
2° dans la période suivante (col. K194).

I. Les manifestations judéo-chrétiennes a l’âge apostolique. —
1° Les convertis d’Antiochc et le concile de Jérusalem.
2° Le conflit d’Antioche entre saint Pierre et saint Paul.
3° Les judaïsants de Galatie.
4° Autres manifestations judaïsantes.
5° Conclusion.

1° Les convertis d’Antioche et le concile de Jérusalem. (Act., xv, 1-34 ; Cal., ii, 1-10.)

1. Le conflit et sa nature.

Le premier voyage missionnaire de Paul et de Barnabe avait été marqué par de nombreuses conversions de gentils. De retour à Antioche les deux apôtres, rendant compte devant les disciples assemblés de l’œuvre accomplie, étaient heureux de montrer quel accueil les païens avaient fait à l’évangile, et comment Dieu avait ouvert aux nations la porte de la foi. Act., xiv, 27.

Ce succès provoqua l’intervention de certains juifs : >< Quelques gens venus de Judée enseignaient aux frères cette doctrine : si vous n’êtes circoncis selon la loi de Moïse, vous ne pouvez être sauvés. » Act., xv, 1. Les Actes ne désignent pas autrement ces perturbateurs : « tivèç xoctîXOôvteç àrcô ttjç’IouSaîocç ». Ce sont ces zélateurs de la Loi que nous rencontrerons plus loin, Act., xxi, 20. Us venaient de l’Église mère de Jérusalem ; ils prétendaient avoir mandat des apôtres, ce qui leur donnait une autorité particulière. Leur doctrine était nette : nécessité absolue de la loi mosaïque. L’Évangile se surajoutait ainsi à la Loi, le christianisme devenait une secte juive. Tout autre était la pensée de Paul : il avait largement admis les païens dans l’Église, sans se préoccuper des observances. La religion de Jésus était différente du judaïsme : elle s’y rattachait comme à son point de départ, mais en était indépendante ; elle suffisait à procurer le salut ; par elle seule, sans passer par la Synagogue, on pouvait se sauver.

On mettait ainsi Paul en opposition avec les autres apôtres et avec la pratique de Jérusalem. Et cependant ce n’était pas Paul qui avait pris l’initiative d’admettre des gentils dans la communauté chrétienne sans les astreindre à la circoncision. Pierre l’avait fait à Césarée. Mais il avait dû justifier son acte par une intervention spéciale de Dieu, Act., x, 15 ; xi, 2 sq. ; la conversion de Corneille pouvait passer pour un fait isolé qui ne constituait pas un précédent. Les chrétiens de Jérusalem, qui avaient reproché à Pierre d’être entré en relations avec des incirconcis à Césarée, Act., xi, 3, continuaient de se soumettre religieusement aux pratiques traditionnelles. Apôtres et fidèles fréquentaient le temple aux heures fixées pour la prière, Act., ii, 46 ; iii, 1 ; v, 42 ; x, 9 ; s’abstenaient des mets interdits par la Loi, Act., x, 14, faisaient des vœux qu’ils accomplissaient dans le temple, Act.. xxi, 23, célébraient le sabbat et les fêtes" religieuses.

VIII.

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