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JUDE (ÉPITRE DE), . CANONICITE


nom de « Jude serviteur de Jésus-Christ et frère de Jacques », 1, appartient au groupe des i épîtres catholiques ». Dans la liste des livres saints du concile de Trente et dans l’édition sixto-clémentine de la Vulgate, elle est placée la dernière des épîtres, immédiatement avant l’Apocalypse. Sa place a varie dans les témoins du texte et les anciens canons. C’est pourquoi les éditions du Nouveau Testament n’ont pas toutes adopté l’ordre du Concile de Trente. Celles de Nestlé, Bodin, Vogels, ont conservé cet ordre, qui était celui du concile d’Hippone et des conciles de Carthage ; celles de Westcott-Hort, Tischendorf-Gebhart, B.Weiss, von Soden placent l’épître de Jude à la fin des épîtres catholiques, immédiatement avant celles de saint Paul.

Titre.

La plupart des mss onciaux et plusieurs

cursifs portent le titre IouSa, ou IouSa eirierroXY) : d’autres cursifs, zr.. IouSa tou cxtcocttoXou, ou tou ayiou a7ToaxoXou IouSa stuo-toXt) : d’autres ajoutent le mot xaOoXiH-/]. Les témoins de la Vulgate offrent également des titres variés : Incipit ep. Judw, inc. epist. Judæ apostoli, incipit liber J udæ.Ci.Tischenûorf, Novum Testamentum greece, editio octava critica major, Leipzig, 1872, t. ii, p. 353.

Texte et versions.

Les plus anciens mss onciaux

donnant le texte de l’épître sont s, B, du ive siècle,

A, C, du V. Les principaux cursifs sont 13, 40, 44, 137. Pour l’étude des mss cf. Gregory, Texlkritik des Neuen Testaments, Leipzig, 1900, t. i, p. 96 sq. et 2(53 sq. ;

B. Weiss, Die Katholisehen Brieje, dans Texte und Untersuchungen, t. viii, fasc. 3, 1892.

L’épître a été de bonne heure traduite en latin. Terlullien s’y réfère implicitement. De eult. jem., i, 3. Enoch apud Judam apostolum tesiimonium possidet, P. L., t. i, col. 1308. Il faut en conclure que l’épître était connue de ses lecteurs et qu’elle était, sans doute, traduite en latin. Lucifer de Cagliari, De non conveniendo cum hæreticis, P. L., t. xiii, col. 792-793, en donne d’importantes citations, ꝟ. 1-3 ; 5-8 ; 11-13 ; 17-19. Priscillien en cite plusieurs passages : Tract, i, édition Schepps, Corpus de Vienne, t. xviii, p. 29, cf. Jud., 23 ; p. 32, cf. Jud. 14-15 ; Tract, iii, p. 44, cf. Jud. 14-15 ; Tract, v, p. 64, cf. Jud. 12-13. Il en est de même dans le Spéculum de Scriptura sacra de saint Augustin, P.L., t. xxxiv, col. 1039-1040 ; cf. Jud. 6, 7, 12. On peut regarder tous ces fragments comme des restes d’une version latine antérieure à saint Jérôme. Si la revision de saint Jérôme a porté sur toutes les épîtres catholiques, ce qui n’est pas démontré, le travail du grand exégète ne semble pas avoir été très profond pour l’épître de Jude, pas plus que pour la deuxième épître de Pierre. Cf. Jacquier, Le Nouveau Testament dans l’Église chrétienne, Paris, 1913, t. ii, p. 177 sq.

L’épître n’est point donnée dans les plus anciennes versions syriaques, elle n’est contenue que dans la Philoxénienne et l’Harcléenne, du vie et du vii c siècles. Il est très difficile d’établir le rapport qui existe entre ces deux versions et de déterminer les manuscrits qui appartiennent à chacune d’elle. Cf. Gregory, op. cit., t. ii, p. 504 et 525 sq. ; Gwin, The Older Syriac Versions of the four Minor Catholic Epistles, dans Hermathena, Londres, 1890, t. xv, p. 281 ; du même, Remuants of the later Syriac Versions of the Bible, i, The four minor catholic Epistles in the original Philoxenian Version, Londres, 1909 ; Lebon, La version Philoxénienne de la Bible, dans la Revue d’histoire ecclésiasligue, Louvain, 1911, t. xii, p. 435 ; Jacquier, op. cit., t. ii, p. 238 : q. Le texte en a été publié par J. White, dans Acluui.i apostolorum et epistolarum tam catholicarum quam Paulinarum, versio Syriaca Philoxeniana, Oxford, 17991803.

L’épître se trouve dans les versions coptes. Le texte de la bohaïrique est donné dans l’édition critique de

C. Horner, The coptic version of the New Testament in the northern dialect, Oxford, 1905, t. iv, p. 134 sq. Le texte de la sahidique est donné dans l’édition C. G. Woide, Appendix ml editionem Novi Testament ! græci, in qua continentur fnigmenta Novi Testamenti thebaica et sahidica, cum dissertatione de versione bibliorum segyptiaca, Oxford, 1799. Cette édition ne donne que les t. l-20u, on trouvera la fin de l’épître dans la collection Rainer (Vienne), dans Wesselv, Studien zurPaMo graphie uni Papyrus Kunde, t.xii. K ! >146 bis, n. in : > Leipzig, 1912. Cf. A. Vaschalde, Ce qui a été publié des versions coptes de la Bible, dans Revue biblique. 1922, p. 256.

II. Canonicité.

L’épître de Jude fait partie des livres deutérocanoniques. Sa canonicité s’affirme dans l’usage qu’en ont fait les écrivains ecclésiastiques des deux premiers siècles, ri dans l’attitude prise à son égard par ceux du IIIe ci du tve siècle.

L’Épître de Jude aux deux premiers siècles.

Il

y a certainement une dépendance littéraire entre l’épître de Jude et la deuxième épître de saint Pierre ; mais on ne peut dire avec certitude à laquelle des deux il faut donner la priorité. Les raisons que l’on fait valoir pour placer celle de Jude la première sont les plus satisfaisantes et elles ont rallié un grand nombre de critiques. On trouvera les raisons en faveur de la priorité de l’épître de Jude dans J.-B. Mayor, The Epistle of St. Jude and the second Epistle of St. Peler, Introduction, p. 1 sq. ; la thèse contraire est exposée dans Bigg, Epistles of St. Peter and St. Jude, p. 216 sq.

On peut donc dire avec beaucoup de probabilité, que la deuxième épître de saint Pierre, par l’usage qu’elle fait de l’épître de Jude, est un témoignage implicite de sa canonicité. Ce témoignage, pour tous ceux qui admettent l’authenticité de la II" Pétri, est antérieur à l’an 67 ; pour ceux qui la rejettent, il devrait se reculer jusque dans la deuxième moitié dvn e siècle.

L T n passage de VÉpître de Barnabe, ii, 10, semble dépendre de Jude, 3, 4. On y trouve des termes communs, 7T> : p£Î’jSjaiç, rcapeiaSûvM, qui n’appartiennent pas au vocabulaire des autres livres du Nouveau Testament. — Les doxologies que nous lisons dans saint Clément de Rome, / Cor., xx, 12 ; lxv, 2, et dans le Martyrium Polycarpi, xxi, ont pu être suggérées par Jud., 25. — Hermas, Sim., V, vii, 2, offre une expression qui rappelle Jud., 8. — - La deuxième lettre aux Corinthiens attribuée à saint Clément, xvi, 2, se rapproche de Jud., 8. — On peut voir également dans saint Polycarpe plusieurs passages qui semblent dépendre de l’épître de Jude : cf. Phil., adresse, et Jud., 2 ; Phil., iii, 2, et Jud., 3, 20 ; Phil., xi, 4, et Jud., 20, 23. — Athénagore paraît s’inspirer de la doctrine de Jude sur la chute des anges, Supplicatio pro rhristianis, xxiv, édit. Otto, Iéna, 1857, t. vii, p. 129, 130, 136 ; P. G., t. vi, col. 945-948.

La première référence implicite claire à l’épître de Jude se rencontre dans Théophile d’Antioche, vers 181-182. Ad Autolycum, ii, 15, P. G., t. vi, col. 1077. Dans ce passage, les planètes qui « errent » perpétuellement, cpeûyoVTeç T07rov zv. tôttou, sont le type des hommes déchus qui se sont éloignés de Dieu. C’est un commentaire du iaTzpzc, TrXavîJTai de Jud., 13. — Le canon de Muratori atteste que l’épître était reçue dans l’Église de Rome vers la fin du second siècle : Epislula sune Judve et superscripti Johannis dux in calholica habentur, 1. (38-69.

D’après le passage de Tertullien, De cuit, fem., i, 3, nous pouvons conclure que l’épître était regardée comme une autorité dans l’Église d’Afrique à la fin du iie siècle. Cassiodore, De inst. div. litt., xiv, P. L., t. lxx, col. 1120, mentionne une traduction faite par