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judaïsme, rapports avec le milieu païen

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a l’époque précxilienne. Jamais surtout il n’est un être coordonné a Dieu et indépendant de lui comme c’est le cas dans le dualisme mazdéen, où Ahriman est le principe mauvais, opposé de toute l’éternité au principe bon, Ahura-Mazda (Ormuzd). Dans le judaïsme. Satan est toujours un être subordonné ; c’est Dieu qui crée aussi le malheur >. Is., xlv, 7. Voir Schet’telowitz, op. cit., p. 15-18.

En particulier le démon Asmodée de Tobie, ni, 8-17, ouvent identifié avec Aeshma dâeva, l’un des sept démons archimauvais d’Ahriman. Sellin lui-même, Neue kirchliche Zeitschiift, 1919, p. 231, veut voir dans ce nom le signe d’une légère influence perse sur la religion juive. Le P. Lagrange écrit à cet sujet. Revue biblique, 1901, p. 210 : » Nous sommes tout disposé à concéder que le nom du démon Asmodée ressemble assez à celui de Aeslima-dàeva, qui d’ailleurs ne se trouve pas dans les textes. Par ailleurs, le démon persan est un démon de la colère, un batailleur, Asmodée est plutôt le démon de la luxure. La ressemblance ne va pas loin. » Voir également Mangenot, art. Démon, t. iv, col. 325, et Whitchouse, art. Salon. dans Hastings, Dictionary oj the Bible t. iv, p. 408, qui prouvent par des arguments, tirés de la littérature iranienne que le démon Asmodée ne peut pas être un emprunt perse.

Cependant le grand rôle qui, dans la littérature apocryphe et rabbinique, est attribué aux démons est probablement dû au contact de la pensée juive avec la religion perse. Lagrange, Henné biblique, 1004, p. 210 ; Sclieltelowitz, op. cit., p. 55-01.

Du reste ces idées sur les hypostases et les anges se trouvent à la périphérie du judaïsme, et même si une influence étrangère plus sérieuse était ici prouvée, elle n’aurait pas une grande importance. L’eschatologie est autrement centrale. Or elle offre de notables ressemblances avec celle du mazdéisme. Ici et là un jugement particulier désigne à chaque homme son sort après la mort, puis une résurrection générale a lieu à la fin du monde et un jugement universel confirme les sentences antérieures pour attribuer définitivement aux uns les joies du ciel, aux autres les peines de l’enfer.

Cependant les différences ne sont pas moins remarquables. Elles sont déjà relevées par Sôderblom, op. cit., p. 280-322, et Sclieltelowitz, op. cit., p. 151216, qui concluent à la complète indépendance des idées juives, excepté tout au plus quelques conceptions du ïalmud.

Dans l’eschatologie individuelle des Perses, l’idée principale est celle du pont Cinvat, c’est-à-dire pont du juge, qui devient pour l’âme juste le passage qui la conduit au ciel, pour l’âme coupable le piège qui la livre à l’enfer. Sur l’arrivée de l’âme à ce pont et sur le rôle qu’y jouent les anges et les démons, l’Avesta raconte tout un roman mythologique. Le judaïsme n’a jamais admis aucun de ces éléments Imaginatifs : ce qui prouve combien son inspiration est irréductible à celle du parsisme.

De même en est-il pour l’eschatologie universelle. D’après le parsisme, le jugement final après la résurrection Comporte la fusion de tous les métaux, causée par une chaleur extraordinaire. Tous les hommes doivent raverser cel le lave brûlante. Pour les justes, elle scia aussi agréable que du lait tiède, I andis qu’aux pécheurs elle causera les plus grandes douleurs. Voir Schelle lowitz, p. 200. C’esl un tout autre monde d’idées que celui de la Bible,

c) Il faut enfin relever que l’Ancien Testament a

pu arriver par une évolution autonome aux idées sur les fins dernières qui caractérisent le judaïsme. Le principe de l’individualisme a surgi pendant l’exil cl conduit a l’abandon de la crovance au Scbéol. lui

raison de la haute idée que se firent toujours les Juifs de la justice divine, l’insuffisance de plus en plus avérée des sanctions terrestres devait les conduire peu à peu à la conviction de la rétribution après la mort. Pour les détails voir art. Jugement, col. 1744 sq.

D’autre part le messianisme, pour être complet et répondre à l’ampleur des promesses divines, devait s’appliquer aux morts non moins qu’aux vivants, et la doctrine de la résurrection se trouve ici en germe. En s’unissant à l’universalisme, prêché par les prophètes, ces espérances transcendantes appelaient, comme terme de. l’économie présente, la croyance au jugement général.

Rien n’oblige par conséquent à recourir au mazdéisme pour expliquer le développement pris par l’eschatologie dans le judaïsme postexilien. Cette doctrine pouvait et devait normalement sortir, sans influence étrangère, des prémisses que fournissait à la conscience religieuse d’Israël sa foi si profonde et si vivace en ce Dieu juste et bon, au sujet duquel le premier livre de Samuel disait déjà : « Il fait descendre au Scbéol et en ramène. » I Sam., ii, G.

2. L’hellénisme.

Alexandre envahit l’Orient dans le but de créer un grand royaume mondial sous un seul chef qui régnerait des Indes jusqu’en Macédoine, avec une seule langue, la langue grecque, et une seule et même civilisation. Une mort prématurée arrêta le conquérant en pleine course triomphale et empêcha la réalisation de ce plan gigantesque. Ses expéditions eurent cependant un résultat durable, savoir l’hcllénisation de l’Orient. Celui-ci avait été jusque-là fermé à toute influence de l’Occident. Alexandre y répandit partout la langue et la civilisation grecques. Son armée fut suivie de troupes de colons helléniques qui s’établirent dans les différents pays conquis, principalement dans les nombreuses villes — leur chiffre est évalué à soixante-dix — fondées par Alexandre et organisées à la façon grecque. L’œuvre d’Alexandre fut continuée par ses successeurs. Malgré la haute antiquité et la remarquable perfection de sa culture, l’Orient fut profondément transformé. Plus encore que par le glaive grec, il fut conquis par son esprit.

Le flot de l’hellénisme atteignit aussi les Juifs, ceux de la Palestine comme ceux de la Diaspora.

a) L’influence hellénique en Palestine. — Immédiatement après la conquête d’Alexandre, la Terre sainte fut incorporée au royaume grec et forma avec la Phénicie et l’Idumée la province de Cœlé-Syrie. Autour de la Judée, qui était alors le seul district occupé uniquement par des Juifs, s’élevèrent peu à peu des villes grecques qui entouraient comme un cordon la population indigène. Par suite de ce contact étroit avec l’hellénisme, les Israélites ne pouvaient manquer d’en ressentir l’influence. Les livres des Macchabées attestent dans quelle large mesure, au commencement du IIe siècle avant notre ère, la civilisation hellénique était répandue même dans la ville sainte et principalement parmi l’aristocratie sacerdotale : le grand prêtre Jason non seulement prit un nom grec, mais il introduisit les jeux olympiques à Jérusalem et il lit même offrir à Tyr un sacrifice en l’honneur d’Hercule. Le soulèvement macchabéen préserva le judaïsme de l’absorption par l’hellénisme. Ce danger écarté, les Asmonéens eux-mêmes devinrent des hellénophiles : Aristobule fut appelé quXlXXr ; v. Ant.. XIII, xi. : i, et Jean Hyrcan reçut à Athènes de grands honneurs à cause de la bienveillance qu’il avait témoignée aux (liées qui visitèrent la Palestine. Ant., Y mu..">. Eiérode le Grand favorisa davantage encore l’hellénisme. 11 s’entoura d" littérateurs grecs, il construisit à Jérusalem un théâtre, un amphithéâtre, un hippodrome, Ant., XV, viii, 1, et c’est en partie d’après le style