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JUDAÏSME, partis religieux et politiques

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aussi les plus croyants : Us professaient toutes les doctrines nouvelles du judaïsme tardif.

I--ii matière de politique, ils étaient en principe tout à fait indifférents. En leur qualité de piétistes, ils

jugeaient la situation extérieure uniquement au point de vue religieux et regardaient comme la meilleure celle qui garantissait la plus grande liberté pour observer Ja Loi. Lorsque Antiochus Épiphane détendit la pratique de la religion juive, ils furent les premiers à prendre les armes ; mais ils ne participèrent aux combats qu’aussi longtemps qu’il s’agit de recouvrer la liberté religieuse ; dès que les Asmonéens, en désharmonie avec la Loi. montrèrent des tendances mondaines, ils devinrent leurs pires ennemis. En lace de la domination romaine, les uns conseillaient la soumission, en disant que la Providence avait permis cette oppression comme un châtiment ; les autres, les zélotes surtout, poussaient à la révolte, parce que le joug étranger leur semblait incompatible avec l’idée de théocratie.

2. Les sadducéens avaient sous tous ces rapports des tendances absolument contraires. Tandis que les pharisiens étaient des idéalistes pieux, eux étaient des aristocrates réalistes.

Malgré leur caractère sacerdotal, ils étaient presque uniquement préoccupés du pouvoir et des autres avantages matériels de leur position. Ils tonnaient un vrai parti politique. Ils s’occupaient des affairés publiques dans le but de maintenir la tranquillité de l’État et de sauvegarder ainsi leurs postes lucratifs. C’est pourquoi ils évitaient tout conllit avec les puissances étrangères et s’assimilaient autant que possible les idées et les mœurs païennes. Ils ne pensaient pas, certes, à renier la religion de leurs pères. Cependant ils rejetaient les lois de la tradition et reconnaissaient uniquement laThora : Les sadducéens disent que cela seul qui est écrit est légal. Ce qui provient de la tradition n’est pas à observer. > Ant.. XIII. x. 6. De même ils n’acceptaient pas les nouvelles doctrines dogmatiques. Par Josèphe et le Nouveau Testament, nous savons qu’ils ont surtout nié la résurrection des morts et l’immortalité de l’âme, l’existence d’esprits purs et la providence de Dieu. Act., xiii, X : Ant.. XVIII, i, 4 ; Bell, jud., Il, viii. 1 I.

En réprouvant ces doctrines et en n’observant pas la Loi orale, les sadducéens s’écartaient de la foi et de la pratique religieuse de leurs contemporains et représentaient au milieu du judaïsme tardif une véritable secte : d’autant que leur conservatisme n’était pas inspiré par le désir religieux de respecter le patrimoine sacré de leurs ancêtres, mais par un esprit libéral et séculier qui ne voulait rien savoir ni d’une sévérité excessive ni d’une doctrine trop transcendante.

Le pharisaïsme est la réaction du judaïsme contre ces tendances sadducéennes. Aussi les pharisiens étaient-ils, comme les scribes, très populaires, tandis que les aristocrates libéraux du sacerdoce étaient souvent détestés. Lien que les sadducéens lussent les plus nombreux dans le sanhédrin et eussent en leur main le pouvoir. « quand ils exerçaient quelque magistra turc, ils se dirigeaient quand même d’après les exigences des pharisiens, parce que dans le cas opposé la foule ne les aurait pas supportés. AnL. XVIII,

I. I.

Cependant il serait faux d’en conclure que les plia risiens représentaient un parti démocratique, ils se

séparaient systématiquement de la masse du peuple et le dédaignaient a cause de son impureté rituelle et de sa négligence dans l’observation de la Loi. Ils évitaient toul contæl avec lui, défendaient les mariages avec ses membres. C’esl pourquoi ils lurent stigmatisés du nom de » séparai isles » (perisim).

Si le peuple les vénérait malgré toul, c’esl parce

qu’il admirait leur zèle pour la Thora et leur sainteté extérieure.

2° Les esséniens. Du judaïsme palestinien est issue encore la secte fort curieuse des esséniens. Son nom comme son origine sont obscurs. Essénien signifie probablement pieux et le groupement de ces pieux sectaires semble dater du iie siècle avant J.-C. Les renseignements sur eux sont dus surtout à Josèphe, Bell, jud., IL vin. 2-13 ; Ant., XIII, v, 9 ; XV, x, 4-5 ; XVIII, i..">, à Philon, Quod omnis probus liber, § 1213, Opéra, édit. Mangey, t. n. p. 457-459 et à l’line, Ilixt. mit., v, 17.

D’après ces auteurs, les esséniens formaient un véritable ordre religieux. Les membres s’adonnaient à une vie ascétique d’après des principes qui dépassaient encore notablement le rigorisme des pharisiens. Ils vivaient surtout dans le désert, mais aussi dans les villes ; ils habitaient communément dans des sortes de couvents, sous la direction de supérieurs. Pour être reçu dans l’ordre, il fallait passer par un noviciat de deux ans. Les membres étaient étroitement liés entre eux par la communauté absolue des biens. Leur occupation principale était l’agriculture ; ils apprenaient aussi des métiers ; le commerce par contre leur était défendu. Ils avaient une extrême estime de la Loi qu’ils montraient surtout par l’observation la plus sévère du repos sabbatique et par les soins scrupuleux pour la pureté rituelle. Ils commençaient la journée par la prière, se réunissaient pour les repas qui étaient préparés par des prêtres et avaient ainsi un caractère de sacrifice. Avant chaque repas, ils prenaient un bain.

Toutes ces pratiques des esséniens ne dépassaient pas le cadre de la piété pharisaïque. Elles ne représentaient qu’un renchérissement sur l’idéal de perfection, prêché et réalisé par les pharisiens..Mais nous trouvons chez eux d’autres principes et coutumes qui n’ont rien de commun avec le judaïsme. Ils repoussaient complètement le mariage à l’exception d’une branche qui l’approuvait sous certaines conditions. Ils s’abstenaient de tous les sacrifices d’animaux et pour cette raison ne prenaient point part au culte du temple. Ils réprouvaient aussi le serment.

Pendant leurs prières, ils se tournaient vers le soleil parce qu’ils voyaient en lui le symbole de la lumière divine. Dans leurs pratiques religieuses, ils recherchaient des états mystiques, des extases et des ravissements ; ils aimaient à prédire l’avenir : outre ces pratiques, certaines croyances les éloignaient aussi de la religion mosaïque. Ils avaient des idées spéciales sur les anges, supposaient la préexistence des âmes qui auraient été attirées dans les corps par un amour sensuel. Après la mort, les corps se dissoudraient définitivement, les âmes seraient d’après leurs mérites éternellement heureuses ou malheureuses.

A cause de ces particularités, les esséniens ne peuvent pas être regardés comme une secte purement juive. Il y a chez eux sans doute des influences étrangères. Parmi les cinq hypothèses, formulées à ce sujet, la plus probable est celle qui suppose que c’est le pythagoréisme qui a contribué à la formation de cet esprit. Les esséniens auraient donc voulu réaliser simultanément l’idéal pharisien et pythagoricien.

.’! " Les thérapeutes. - Les thérapeutes sont également une secte juive qui était florissante au premier siècle chrétien, surtout en Egypte. Philon les décrit dans son livre : De vita contemplaliva, édit. Mangey, t. ii, p. 171-81). Ils se distinguaient comme les esséniens par un grand ascétisme. Leur association comprenait des hommes et des femmes. Chaque membre logeai ! à part dans une maisonnette et s’occupait toute la journée à l’étude de l’Écriture Sainte d’après son sens allégorique. Après le coucher du soleil seulement, les thérapeutes quittaient leur sanctuaire »