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JOACHIM DE FLORE. ŒUVRES


confient l’administration d’un monastère qu’ils viennent de fonder, et juin 1202, date à laquelle l’évêque Richard de Tropea mentionne son successeur Mathieu, Acta Sanctorum, loc. cit., col. 90, probablement le 30 mars, in sabbato quo sitientes cantatur d’après Luc de Cosenza, c’est-à-dire la veille du dimanche de la Passion, qui cette année tombait le 31 mars.

Peu auparavant, en 1200, il avait écrit, sous fprme de lettre aux abbés de son ordre, une espèce de testament dans lequel il énumérait ses œuvres, déclarait n’avoir pu soumettre encore au jugement du Saint-Siège que l’une d’entre elles, la Concordia ; ordonnait, s’il venait à mourir, d’en faire autant pour toutes les autres, et protestait de sa fidélité au pape. Acta Sancl., loc. cit., col. 102. Quelque vives que soient ses attaques contre la corruption du clergé et même contre la cour de Rome — en quoi d’ailleurs il ne va ( pas plus loin que beaucoup de saints personnages de son temps — il n’est donc pas le moins du monde un révolté ; pas plus qu’en dépit de ses graves erreurs théologiques, .51 n’a été un hérétique d’intention.

Sa réputation de sainteté persista après sa mort. Le décret même d’Innocent III, au IVe concile de Latran, qui condamnait un de ses écrits, rappelait son testament, et louait son esprit de soumission. Deux bulles d’Honorius III des 2 décembre 1216 et 27 décembre 1220, Potthast, n. 53776, Acta Sanctorum, col. 101-102, déclarent que cette condamnation ne déroge en rien à l’honneur de l’ordre de Flore, dans lequel regularis est institutio, et obseroantia singularis, ni à la réputation de Joachim, quia cum fuisse virum catholicum repulamus, sanctse fidei orthodoxse sectatorem. Le 25 septembre 1346, les moines de Flore constituaient leur abbé comme procureur pour aller en cour de Rome traiter toutes les affaires de l’ordre, et notamment pour demander la nomination d’une commission chargée d’enquêter sur les miracles de leur fondateur. Acta Sanct., col. 108. C’est peut-être à cette occasion que fut compilé le recueil retouché par Greco. Sur la persistance et la légitimité du culte rendu à Joachim, et du titre de bienheureux qui lui est traditionnellement attribué, cf. Acta Sanct., loc. cit., col. 87-89.

II. Œuvres. — 1° Authentiques. — On est d’accord pour considérer comme authentiques les suivantes :

1. UExposilio in Apocalypsim ou Apocalypsis nova ;

2. La Concordia Novi et Veteris Testamenti : 3. Le Psalterium decem chordarum. Ce sont les trois œuvres capitales et les plus caractéristiques. Il n’y a plus à réfuter le paradoxe de Preger, Das evanqelium sternum und Joachim von Floris, dans Abhandlungen der historischen Klasse der bayerischen Akad. der Wissenschoiften, t. xii, 3e partie, p. 1-41 qui en niait l’authenticité. Toutes les trois sont nommées dans le testament de Joachim. Les deux premières sont seules mentionnées dans la lettre de Clément III de 1188 ; elles sont donc probablement antérieures à la troisième. Mais laquelle a précédé l’autre ? Adam de Perseigne, vers 1195, d’après R. de Coggeshall (p. 67), paraît bien avoir eu connaissance de l’Apocalypse, quoiqu’il ne le résume pas très exactement : quandam expositionem super septem visiones Apocalypsis edidil. Joachim lui-même dans Y Apocalypse, cf. Tocco, L’ercsia…, p. 301, fait allusion à un récit qui lui a été fait « l’année dernière, en 1195 ». D’autre part on a vu qu’il dit qu’en 1200 la Concordia seule avait été soumise au jugement du Saint-Siège. Il faut sans doute conclure que Y Apocalypse fut le premier en date des grands ouvrages, mais qu’amené, peut-être par des critiques, à faire une révision de ses livres, l’abbé de Flore commença par la Concordia. Sauf pour Y Apocalypse et le traité contre Pierre Lombard, il n’y a pas de preuve formelle qu’il ait publié ses écrits de son vivant.

Divers ouvrages se rattachent à quelques-uns des précédents : 4. La summula seu breviloquium super Concordia Novi et Veteris Testamenti ; 5. L’Enchiridinn in Apocalypsim, espèce d’introduction à YExposilio.

D’autres sont tout à fait distincts : 6. Le Super quatuor Evangelia ou Concordia Evangeliorum ; 7. Le Contra Judœos ; 8. Le De arliculis fidei.

De toutes ces œuvres il existe des mss. dont un inventaire a été donné parle P. Denifie, Archiv…, 1. 1, p. 90-97. Trois d’entre elles ont été imprimées : la Concordia à Venise en 1519 ; YExpositio et le Psalterium a Venise en 1527 (éditions très rares).

Une œuvre est perdue : 9. Le Libellus de unilate seu essentia Trinilatis, dirigé contre Pierre Lombard, et qui fut condamné par le 2e canon du quatrième concile de Latran, Denzinger-Bannwart, Enchir.id, n. 431. C’est pour ce motif sans doute que cet ouvrage a disparu. Un exemplaire en existait encore au xiv c siècle dans la bibliothèque des papes d’Avignon. Inventaire de 1309, publié par Ehrle, Hisloria Bibliothcc.se Romanorum Ponliflcum tum Bonifatianæ ium Avenionensis, 1. 1, p. 314.

2° Œuvres douteuses. — A cette liste, faut-il ajouter le Liber de vera philosophia, découvert par M. Fournier dans le ms. 290 de la Bibliothèque de Grenoble, et étudié par lui dans un article : Un adversaire inconnu de saint Bernard et de Pierre Lombard, bibliothèque de l’École des Chartes, 1886, p. 394 ? M. Fournier avait émis cette hypothèse en 1899 : Joachim de Flore et le Liber de vera philosophia, dans Revue d’Histoire et de littérature religieuses, 1899, t. iv, p. 37. Il l’a retirée en réimprimant son article dans ses Éludes sur Joachim de Flore et ses doctrines, cf. p. 98-100, maintenant seulement l’opinion intéressante que Joachim a probablement utilisé le Liber et connu par cet intermédiaire les idées trinitaires de Gilbert de la Porréc, auquel il se rattache. Ce point est admis par le P. de Ghellinck, Le mouvement théologique du XIIe siècle, p. 160-161.

D’autre part M. Huck, Uberlin von Casale, p. 70, a signalé un ms.du xiiie siècle de la Biblioteca Antonina de Padoue, contenant douze ouvrages attribués à Joachim, dont huit ne figurent pas dans la liste ci-dessus, savoir : 1. Dialogi de præscientia Dei et prædestinalione ; 2. Scrmones aliqui ; 3. Intelligentia super Calqthis ad abbatem Gaffridum ; 4. Queslio de distinclione Mariae Magd. dense a Maria Lazari et Marthæ sorore ; 5. Tractatus de vila S. Benedicli et de offii i<> divino secundum ejus doctrinam ; 6. Expositip prophétise anonymi Romse reperlse anno 1184, tempore Lucii papie III ; 7. Tractatus de ultimis tribulationibus ; 8. Collaliones varise circa fidem et mores.

Tant que ces traités n’auront pas été plus complètement étudiés, il sera prématuré de décider s’il faut en effet, comme M. Huck y paraît disposé, les tenir pour authentiques, ou si ce ne sont pas plutôt des pseudépigraphes, dont quelques-uns peut-être doivent se confondre avec l’un ou l’autre de ceux qui sont énumérés ci-dessous. Cela paraît être le cas pour le 7 e. 3° Œuvres apocryphes : — De très bonne heure, on effet, on a commencé à attribuer à Joachim une imposante série de livres pseudépigraphes, dont le nombre même et le succès prouvent son extraordinaire picstige. Plusieurs ont longtemps trompé les meilleurs historiens, et influé sur l’idée que l’on s’est faite de l’abbé de Flore et de son rôle politique. Le mérite d’avoir démontré la fausseté des principaux (les deux premiers de la liste qui suit) revient à Friedericli, Kritische Untersuchung…

Nous prenons comme base la liste donnée par le P. Ehrle, art. Joachim von Floris du Kirchenlexicon, t. vi, 1 175-1476, en y ajoutant quelques remarqués. 1. Commentaire sur Isaïe (daté de 1201, cité par