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    1. JÉSUS-CHRIST l##


JÉSUS-CHRIST l.T LA CRITIQUE. LES RÉCITS DE L’ENFÀISCE

-’édit., ]). 53 ; A. Neumann, op. cit., p. 61-62 ; Giran, Jésus de Nazareth, Paris, 1904, p. 37 : A. RéviUe, Jésm de Nazareth, t. i, p. 103 ; A. Bruce, art. Jésus dans VEncytlopedia biblica de Cheyne, t. ii, p. 1436 ; Crooker. Supremacy o christ. Boston, 1904, p. <><i-70 ; (’.arpenter. The first three (i(spcls. 3e édit., Londres, 1904, p. 1 15 1 16 ; Loisy, Les Évangiles synoptiques, 1. 1, p. 168-169 ; Dibelius, op. cit., p. 69-75.

Au fond, toutes ces objections procèdent de la négation du sui naturel : A epui admet la possibilité d’interventions surnaturelles, il n’est pas difficile de croire que ces interventions se soient produites autour de la venue de Jésus en ce monde. Des arguments positifs nous montrent d’ailleurs que les récits de Fenfance sont, non le produit de l’imagination de l’Eglise naissante, mais l’expression même de la vérité historique. — Le premier se déduit des sources auxquelles l’évangéiiste a puisé ses renseignements. Ces sources ne sont constituées ni par un recueil très ancien, comme le prétend M. A. Resch, Das Kindheilsevangelium, Leipzig, 1897 ni, à plus forte raison, par l’apocryphe connu sous le nom du Protévangile de Jacques, comme l’assure cependant, avec une truculence qui dispense de preuves, M. L. Conrady, Die Quelle der kanonischen Kindheitsgeschiehle Jesu. ein wissenscha/tliclies Versuch, Gccttingue, 1900. Ce n’est pas non plus de la seule renommée que saint Matthieu et saint Luc tenaient ces récits. Ces événements n’avaient eu qu’un nombre très restreint de témoins. Il semble bien que le principal, sinon l’unique témoin que purent interroger soit directement soit indirectement saint Luc et saint Matthieu, fui la vierge Marie. Cf. Plummer, Crilical and czegelical Commentary on (lie Gospel according lo S. LuUc, Edimbourg, 1910, p. xxiii ; Lambei t..1 Dictionary oj Christ…, art. John the Baplisl p. 862 ; I. agi ange. Évangile selon saint Luc, Paris, 1921, p. lxxxix. L’autorité d’un tel témoignage est d’un giand poids et nous rassure pleinement. — Le second argument est tiré « des faits qui ne s’inventent pas, pane qu’ils sont du domaine public et qu’ils sont garantis par le contrôle éventuel de tous les lecteurs. Tels étaient, à coup sûr, le mutisme de Zacharie <l sa guérison instantanée, la conception tardive de Jean-Baptiste et sa retraite prématurée, les faits avaient eu des témoins… ils avaient dû se conserver religieusement dans < les montagnes de Judée ». Loisque saint Luc les insérail à la première page de son évangile, ils pouvaient encore être attestés par leurs témoins diiects… Pouvant s’enquérir, l’évangéiiste a dû le faire. S’il eût naïvement ajouté foi à des légendes, il eût sur le champ contrevenu à la profession de probité historique qu’il affichait dans son prologue t l se fût exposé à quelque démenti de la pari des lémoins survivants. On conçoit malaisément un Uteur, écrit le P. Durand, L’enfance de Jésus-Christ, Paris. 1908, p. 164-105, affichant la prétention de raconter plus exactement que ses devanciers les origines chrétiennes, et qui -m début même de son récit, se pei met de pareilles libertés avec l’histoire. » D. Buzy, Saint Jean-Baptiste, Paris, 1922, p. 114-115. Rien ne sert d’alléguer contre ces faits le parallélisme étroit qui règne entre l’histoire du Précurseur et celle du Messie, comme si les deux histoires avaient été ima>inécs par la crédulité populaire ; rien ne sert de rechercher dans les mythes orientaux les traits plus ou moins lointains de ressemblance entre les légendes qui entourent Je berceau des dieux et l’histoire de ance de Jésus-Christ. Toutes les hypothèses que

la critique rationaliste peut échafauder, s’écroulenl

ml les assertions des évangélistes et notamment

int Lue : « est-on en droit d’objecter a l’hislorien

l’harmonie naturelle des événements ou l’art avec

lequel il nous’es présente 7 })u/, loc. ni. D’ailleurs

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le parallélisme entre Jean-Baptiste et Jésus n’est pas si étroit que tout se corresponde dans le merveilleux tableau que saint Luc a tracé de la naissance du Précurseur et de celle du Sauveur. On trouve sans doute des deux côtés une annonclation angélique, un lécil de la naissance, une circoncision et une imposition de nom, les élans prophétiques d’un personnage éminent (Zacharie et Siméon) à l’aurore de ces destinées mcrvei]leuses ; enfîn, les mêmes raccourcis d’histoire et les mêmes prescriptions » Mais d’autre part, « la naissance de Jésus est racontée avec détails, celle de Jean est à peine indiquée d’un mot… Si l’évangéiiste insiste sur le tressaillement du Précurseur, il est surprenant qu’il ne prête pas au Messie un h anspoil analogue, ne fût-ce que pour répondie à la salutation du fils d’Elisabeth et préluder aux divins abaissements du Jourdain. Si la présentation au temple est imaginée à plaisir, pourquoi n’y pas amener aussi le fils du prêtre Zacharie ?… Pourquoi ne pas esquisser en faveur de Jean un doublet de la manifestation de Jésus adolescent au milieu des docteius, en nous représentant quelque part, dans les solitudes judéennes, l’éclosion de la conscience du Piécurseur’?… Si l’évangéiiste a su s’abstenir de telles amplifications, même au détriment de l’harmonie de ses récits, n’est-ce pas qu’au-dessus de l’art, il plaçait encore la vérité de l’histoire ? » Buzy, op. cit., p. 114110, passim. — Le surnaturel qui éclate dans les récils de l’enfance, loin d’être une marque d’inauthenticité. doit nous faire conclure, au contraire, à cause de sa sobriété même, en faveur de l’historicité de ces récits. Dieu conduit suinaturellement tous ces événements, mais il ne s’y manifeste que d’une manièie discrète et suave », ce qui différe.rcie grandement les premiers chapitres de Matthieu et de Luc des apocrphes si piodigues de surnaturel puéril et extravagant. Et puis, si le merveilleux arbitraire devait faiie le fond des récits de l’enfance, comment expliquer que l’imagination populaire se soit contentée pour le Verbe, soiti du sein de Dieu et s’incarnant sur terre, d’une étable pour demeure, d’une crèche pour berceau, d’un atelier de travail comme séjour habituel ? Cf. M. Lepin Jésus, Messie et Fils de Dieu, p. 53. — Enfin une dernière preuve d’historicité se tire du caractère avec lequel se présente le messianisme de ces premières pages, et dont les cantiques Benedictus et Magnificat sont des spécimens précieux : k L’espérance messianique qui a inspiré Zacharie et Marie n’est pas celle des temps apostoliques. L’idylle galiléenne que leurs cantiques icllètent ne s’est réalisée qu’une fois dans le cadic historique et dans le temps que s ; int Luc nous indique La nièie du Messie, qui chante sa gloire avec sérénité et bonheur, n’a pas encore ressenti la pointe du glaive qui, plus tard, dès le début du ministère de son fils, devait meurtrir son cceur… Le Précurseur n’a pas encore succombé dans la prison de Machérous ; le père qui tient dans ses bras le petit enfant n’entrevoil pas une destinée sanglante. Ceux qui ont chanté l’avenir de Jean-Baptiste et du Sauveur ont lu les prophètes et les psaumes : ils n’ont pas lu les évangiles, ils sont étrangers à la révélation que Jésus a faite du royaume de Dieu. Ils n’ont pas été informés des jours sommes de la Judée. Leur âme n’a pas été tourmentée liai les espérances que nous surprenons chez les premiers chrétiens au lendemain de l’Ascension. C’est d’ailleurs qu’est parti le souffle qui les anime, et le milieu dans lequel il s’est formé, dès l’an 30, était évanoui. » V. Rose, Évangile selon saint Luc, 7e édit., p. 18-19.

d) On attaque encore l’historicité des récits de l’enfance en insistant sur les divergences et plus encore sur les « contradictions » que présentent entre eux les deux évangiles de Matthieu et Je Luc. Strauss