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1339 JÉS1 S-CHRIST ET LA THÉOLOGIE. SACERDOCE Dl CHRIST 1340

Hébreux, et il apporte quatie arguments — Dans l’épître aux Hébreux, le Christ offrant son sacrifice, est conipai é au prêtre de l’Ancien Testament ; de même que ce prêtre offiait son sacrifice en entrant dans le Saint des saints, de même le Christ offre le sien en entrant dans le ciel. — Le Christ a commencé d’être prêtre, lorsqu’il lui a été dit : Tu es mon Fils, cf. Heb., v, 5. Or, cette parole lui a été dite, au témoignage de saint Paul lui-même, Act., xiii, 33, à la résurrection ; c’est donc, à partir de la résurrection seulement que le Christ a commencé d’être prêtre. — L’épître aux Hébreux, viii, 4, enseigne formellement que le Christ c^t prêtre, non sur tene, mais dans le ciel. — Enfin, l’épître affirme de manière explicite le sacrifice purement céleste de Jésus : « Jésus n’est pas entré dans un sanctuaire fait de main d’homme…, mais dans le ciel même, afin d’apparaître maintenant pour nous devant la face de Dieu ; non pour s’offrir lui-même plusieurs fois… » Heb., ix, 24-25. — De tels arguments sont bien fragiles : le contexte de Heb., ix, 24-28 indique clairement que le sacrifice, offert une seule fois par le Christ, est antérieur à son entrée dans le ciel : l’offrande du Christ fut sa propre mort, ꝟ. 27, précédée des souffrances de la passion, v. 26. Le sacerdoce terrestre, que l’auteur de l’épître refuse au Christ, n’est autre que le sacerdoce aaroniqué, le sacerdoce de la loi mosaïque. Voir les commentateurs. Quant ù la filiation divine, promulguée lors de la résurrection, elle existe dès le premier instant de la conception du Christ et cette promulgation plus solennelle ne marque nullement le début du sacerdoce de Jésus. Voir ci-dessus, col. 1337 Enfin, l’entrée de Jésus au ciel, figurée par l’entrée du grand prêtre dans le Saint des saints, suppose déjà faite l’offrande à Dieu, la présentation du sang versé sur la croix. Cf. Franzelin, De Verbo incarnato, th. i.i, S 1 ; Stentrup, Soteriologia, th. lxxx.

De la thèse socinienne se rapproche beaucoup l’opinion d’un grand nombre de protestants orthodoxes, qui tiennent sans doute que la mort du Chi ist sur la croix fut un véritable sacrifice, mais enseignent en même temps qu’elle ne fut qu’une partie, et la inoins importante du sacrifice, et qu’en conséquence la partie principale de ce sacrifice est l’olîrande que Jésus fait au ciel de lui-même. Cf. E. K. A. Riehm, Der l.ehrbegrifj des Hebrucrbriejes, Halle, 1867, p. 527 sq. On ne saurait, au point de vue catholique, admettre que le sacrifice de la croix n’a pas été complet et parfait. Voir Rédemption.

b) Certains auteurs catholiques, tout en professant la vérité et la perfection du sacrifice de la croix, pour expliquer le sacrifice et le sacerdoce célestes, de Jésus crucifié admet lent un nouveau sacrifice du Christ dans le ciel : la présentation faite par Jésus à son Père de ses œuvres et de sa mort. Ce sacrifice ne consisterait essentiellement que dans un acte d’obéissance, continuant devant Dieu, jusqu’au jugement derniei, celui par lequel le Christ a offert sa vie pour les hommes au Calvaire. Cet acte d’obéissance est perpétuellement manifesté, sans doute par les cicatrices de la passion toujours marquées sur le corps glorifié du Sauveur. Thalhofer, Dos Opjer des Allen und Neuen Blindes…, Ratisbonne, 1870, p, 201 sq. et Handbuch der katholischen Liturgik, t. i, Fribourg-en-B., L883, p. 195 sq. (cette théorie du sacrifice céleste étant éliminée de la nouvelle édition publiée par Kisciiholcr. l’.M’J) : dans le même sens, j. T. Franz, Die eucharistische Wandlung und die Epiklese der griechischen und orientalien Liturgien, 2e édit., p. 61-63, Wurzbourg, l880 ; Pell, Nach ein Lôsungsversuch : ur Messopferfrage dans la Theologisch-praklische Monats-Schrift, t. xviii, p. 655-057, et Max Ten Hompel, D<u Opferal » Selbsthingabe und seine idéale Verwircklichung im Opfer Christt, Fribourg< h i !., 1920, p. i 17 i 19, Les théologiens qui tiennent

à la notion classique du sacrifice n’acceptent pas cette explication du sacrifice céleste du Christ, le sacrifice consistant, d’après eux, dans l’offrande d’une victime, immolée en quelque manière, afin d’affirmer par là le domaine absolu de Dieu sur toutes les créatures. Ce symbole ne peut exister dans le ciel par rapport au Christ glorieux : il n’y a plus, à son sujet, aucune Immolation, aucun changement possible, donc, aucun sacrifice possible. D’ailleurs, l’épître aux Hébreux, in. 24, cꝟ. 7, ne fournit aucun fondement solide a cette théorie, bien que quelques auteurs aient fait appel à son autorité en ce sens. Cf. Zill, Der Bric/ mi die Hebrær, Mayence, 1870, p. 430 sq., 150 sq., 48.’! sq. L’auteur de l’épître, en effet, n’enseigne pas, en ce passage, que le Christ a offert au Père, dans le ciel, le sacrifice qu’il avait consommé sur la terre. Voir Pesch, De Verbo incarnato, n. 550. Sur les textes patrisliques sollicités par Thalhofer dans le sens de son opirrion, voir Stentrup, Soteriologia, th. lxxxii.

c) Une théorie très voisine de celle de Thalhofer, avait été mise en avant par certains auteurs mystiques du xvii c siècle : le P. de Condren, Idée du sacerdoce cl du sacrifice de Jésus-Christ. Paris, 1(>77. P » part. §3, n. 5, p. 37-38, n. 8, p. 43, n. 9, p. 45-46 ; cf. H p., n. 26 p. 110 ; IIP part., n. 27 ; p. 231-235 ; M. Olier, Explication des cérémonies de la grand’messe de paroisse, Paris, 1858, p. 11-14 ; cf. Traité des Saints Ordres, IIP part., c.v.Paris, 1856, p. 420-421 ; Vie intérieure de la sainte Vierge, t. ir, p. 118-119, et plus récemment. M. Lepin, L’idée du sacrifice dans la religion chrétienne, Paris. 1897, p. 187, cꝟ. 158-159. Cette théorie s’appuie sur une idée du sacrifice, longuement exposée par Thomassin, De incarnatione Verbi, t. X, c. xr, n. S-13 ; c. xu-xrv : le sacrifice est essentiellement constitué de cinq éléments, la consécration, l’oblation, l’immolation, la consommation et la communion. Voir Sacrifie. La consécration de la victime avait été faite dès le premier instant de l’incarnation ; l’oblation, commencée dès cet instant a été manifestée extérieurement dans l’immolation sanglante du calvaire. Le mystère de la résurrection parlait la consommation du sacrifice, « consommant ce qui, en Jésus-Christ, était de son état infime, lui donnant, dans les entrailles du tombeau, une vie de gloire ù la place de la vie d’infirmité et de souffrance qu’il avait reçue de David ; enfin le faisant passer de l’état d’hostie pour le péché en celui d’hostie de louange par une clarification de la chair et de l’âme de Jésus-Christ, qui fut solide, véritable, réelle et substantielle. » Olier, Vie intérieure, t. ri, p. 119. Ce point de vue est approuvé par Benoît Xl, Dcsacri/icio misses, t. II, c. xr, n. 5. L’ascension est le complément de la résurrection : dans ce mystère s’accomplit la communion éternelle du Christ au Père dans le ciel, pendant que sur la terre le mystère eucharistique achève la communion du Christ-victime aux membres de son corps mystique.

Au fond, cet le théorie, dégagée de l’opinion assez singulière des cinq parties essentielles, constitutives du sacrifice, reproduit la doctrine traditionnelle du sacerdoce du Christ s’exerçanl pour nous et en union avec les êtres du Ciel. Mais il faut en exclure l’idée d’un « sacrifice céleste », d’une « Immolation du ciel », idées si souvent émises par le P. de Condren et M. Olier, au xviie siècle, et reprises de nos jours par M. Sauvé, Jésus uitinie, 2 1’édit., t. iii, p. 203-215 passim, l.a formule plus adoucie de Thoniassin, enseignant que « le Christ, après sa résurrection, demeure prêtre et perpétue en quelque sorte le sacrifice, de la croix dans le ciel ia besoin elle-même de quelques éclaircissements. Car il faut expressément maintenir, avec la tradition catholique, appuyée sur l’épître aux Hébreux, que la mort sur la croix fut, pour Jésus, le sacrifice unique et définitif. L’épître aux Hébreux oppose constam-