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J321 JÉSUS-CHRIST ET LA THÉOLOGIE. PI [SSANCE Dl CHRIST L322

III », q. xlviii. a.d. ad 2<>ni ; q. lxi, a. 1, ad 3um. Cette doctrine n’est, en somme que la traduction en formule BCOlastique de la doctrine de saint Jean, sur le Christ, vie des chrétiens, ou de saint Paul, sur le Christ, chef du corps mystique de l’Église.

3. Une deuxième opinion, dont on retrouve trace dans Cajétan et Silvestre de Ferrare, pour le premier dans son Commentaire in III"". q. xiii. a. 4 ; q. lxii. a. 1 : Ia-IIæ. q. cxii, a. 1. pour le second, dans le Commentaire in Sum. c. Genfea, t. III, c. lvi, a été pioposée par le cardinal Billot. Elle comporte deux assertions principales. — La première assertion est relative à la nature de l’action instrumentale, la seconde concerne l’instrument lui-même. S’appuyant sur un texte de saint Thomas, De potentia, q. vi. a. 4. ces auteurs disent que Dieu opérant les miracles par le seul commandement, l’action instrumentale de l’humanité de Jésus doit uniquement consister dans la présentation de ce commandement aux créatures. Qu’est, au juste, cette présentation" ? Le commandement divin réalise immédiatement les effets voulus par D*ïeu ; mais comment le concevoir physiquement passant par un instrument pour atteindre physiquement l’effet voulu’? Cette présentation du commandement divin consiste donc simplement dans la désignation des créatures sur lesquelles doit opérer le divin commandement. Dans cette désignation se trouve une marque efficace qui entraîne nécessairement, infailliblement le miracle. Mais l’homme, par lui-même, n’a pas ce pouvoir ; il faut donc qu’il désigne les créatures par l’autorité et comme instrument de Dieu. Ainsi le prêtre opère instrumentalement pour obtenir la transsubstantiation, en prononçant les paroles de la consécration, commandement divin, en vertu duquel le pain devient le corps, le vin devient le sang du Christ. Cette action instrumentale, conclut le cardinal Billot « ne provient pas d’une vertu physique, mais elle appartient bien plutôt à l’ordre intentionel de l’esprit qui dirige, avec le secours de la volonté. Et quoique dans des directions de cette sorte les forces naturelles de l’âme agissent (l’instrument doit toujours mettre dans son action quelque chose de lui-même), cependant ces forces n’auraient aucune efficacité par elle-même, si elles n’agissaient pas en vertu du souverain domaine que Dieu possède sur tout l’univers. Par là nous pouvons résumer en deux points l’analogie qui existe entre les instruments de Dieu dans l’accomplissement des miracles et les instruments physiques dont nous nous servons dans les arts humains. Premièrement, à l’opération propre de l’instrument physique correspond, chez l’instrument d’ordre rationel, la conversion vers la chose naturelle marquée ainsi par lui pour le miracle (cette conversion se manifeste par des paroles, des gestes, des contacts, ou même par un simple acte de volonté). Deuxièmement, au mouvement physique que l’agent principal communique à l’instrument physiquement, répond l’efficacité de la désignation, efficacité qui découle de la volonté de Dieu qui choisit lui-même les hommes et les anges qu’il veut pour devenir les instruments des merveilles à accomplir. » — Le second point de la présente opinion se rattache plus exclusivement à la question de la puissance instrumentale de l’humanité du Christ. L’instrument physique n’est pas instrument simplement lorsqu’il est mis en action par l’agent principal ; il possède auparavant déjà la forme qui le rend apte à agir comme instrument. Sans doute la hache ne coupe que lorsqu’elle est actionnée par la main de l’artisan : mais auparavant déjà, elle possède la forme qui la rend apte à recevoir cette impulsion : l’instrument acquiert sa vertu instrumentale, dit. saint Thomas, doublement, tout d’abord quand il reçoit la forme qui le fait instrument ; ensuite quand il

reçoit, de l’agent principal, l’impulsion qui lui fait produire un effet. » Sum. theol., [II », q. î.xxii. a. 3, ad 2, lm. Il faut eu dire autant, toute proportion gardée, des Instiuments d’ordre rationnel, que Dieu choisit pour accomplir des œuvres surnaturelles. Chez le prêtre qui consacre, la i foi me instrumentale n’est autre que le caractère sacramentel, dont le prêtre use comme il l’entend, en vue d’accomplir ce miracle déterminé qu’est la transubstantiation. Sur la nature du caractère sacramentel, voit Caractère, t. ii, col. 1702 sq. Dans le Christ la > l’orme » instrumentale n’a pas été une qualité, puissance possédée par mode d’habilus permanent : mais c’est par l’union hypostalique elle-même, par la grâce d’union, que, d’une façon habituelle, l’humanité du Sauveur a été constituée l’instrument de la divinité pour les opérations dépassant les forces de la nature. Billot, th. xxii, a. 1.

Remarquons immédiatement combien les deux points délimités si nettement par le cardinal Billot précisent le problème si embrouillé chez les auteurs et surtout chez Suarez, disp. XXXI, sect. v-vi, de la nature de la puissance instrumentale en Jésus-Christ. L’instrument, pour être, c’est-à-dire pour avoir sa forme d’instrument, n’a besoin, en Jésus-Christ, d’aucune addition intrinsèque ; par le fait de son union avec le Verbe, l’humanité est l’instrument de la divinité. Mais, pour agir, l’instrument doit recevoir de l’agent principal, en Jésus-Christ comme dans les causes physiques ordinaires, une impulsion, un mouvement de l’agent principal, et devient par là capable de produire instrumentalement l’effet auquel naturellement il ne peut atteindre. Ainsi, en Jésus-Christ, ♦ l’humanité doit recevoir de la divinité une impulsion, un mouvement, une « vertu instrumentale ». Qu’est-ce que cette vertu ? Le cardinal Billot répond à cette question précise dans le premier point exposé ci-dessus. C’est une intention, une direction de l’esprit, manifestée, dans les miracles de Jésus, par la désignation des créatures sujets des miracles, au moyen de signes extérieurs sensibles ou d’actes intérieurs de la volonté. On sait toutes les critiques auxquelles cette causalité intentionnelle, qui ne veut être ni physique ni morale, a donné lieu. Voir Sacrements. Il semble bien, en tenant compte de tous les éléments de la controverse que pour échapper à la contradiction, il faille la ramener à l’une ou l’autre causalité : nous l’avons maintenue parmi les opinions se réclamant de la causalité physique, parce que c’est par la causalité physique qu’il faut expliquer le texte du De potentia sur laquelle elle s’appuie.

y) Suarez admet pleinement la causalité physique instrumentale ; mais ne pouvant rejeter les principes posés par lui au sujet du concours simultané, il est contraint, pour expliquer l’action instrumentale de l’humanité de Jésus-Christ, d’abandonner les explications proprement thomistes et de s’engager dans une voie singulière. I.a vertu instrumentale communiquée au Christ par la divinité pour l’accomplissement des miracles, n’est ni une qualité surajoutée, ni un mouvement inspiré à l’humanité hypostatiquement unie a ce Verbe, mais c’es ! une vertu active obédienlielle existant en cette humanité, vertu par laquelle l’humanité sainte du Christ peut produire les œuvres surnaturelles, comme instiument de Dieu, Dieu concourant avec l’humanité par un secours ou un concours proportionné a l’effet voulu, secours ou concours excédant celui qui cùl été dû à l’activité naturelle île ht créature. I >isp, XXXI, sect. V, n. 7. Dans la partie négative de sa thèse, loc. cit., sect. vi, n. l-l". Suarez combat efficacement la thèse trop radicale, soutenue par quelques auteurs, dont Contenson, et d’après laquelle, même pour l’action Instrumentale, rien, absolument rien ne serait requis en l’humanité du Christ, en plus de l’union