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JÉSUS-CHRIST ET LA THEOLOGIE


tivement aux précédentes, d’importance moindre. On les a, d’ailleurs, déjà indiquées à l’article Hypostatique (Union), et elles visent des erreurs récentes renouvelées des siècles passés. Ainsi, l’anathème du IIe concile de Nicée contre ceux qui ne reconnaissent pas a l’humanité du Christ une forme déterminée, Denzinger-Bannwart, n. 307, Cavallera, n. 750, est rappelé opportunément à l’occasion de l’ubiquisme des luthériens ; cf. Hypostatique (Union), col. 542543 sq. Ainsi les condamnations du nestorianisme peuvent heureusement s’appliquer aux théories modernes d’union dynamique ou volontaire, conçues comme explication, de l’union hypostatique par Gûnther et Rosmini, id., col. 551-558, a fortiori aux théories, destructives de toute unité substantielle dans le Christ, imaginées par ies protestants libéraux, id., col. 559-564. Sur les critiques radicaux, voir plus loin : Jésus-Christ et la critique.


IV. JÉSUS-CHRIST ET LA THÉOLOGIE.

Ce titre, par lui-même trop vague, a besoin d’être précisé. Nous entendons ici la théologie dans son sens strict : il s’agit de la science des conclusions plus ou moins éloignées que la raison peut déduire du dogme. Le dogme est contenu formellement, soit explicitement soit implicitement dans la révélation ; la théologie n’est que virtuellement renfermée dans la révélation. Pour l’en faire sortir, il faut faire appel au secours d’un raisonnement. La théologie de Jésus-Christ s’efforce donc de mettre en relief les traits de la figure du Sauveur laissés dans l’ombre par les écrits inspirés, mais contenus cependant dans d’autres traits plus expressifs qu ont retenus nos auteurs sacrés. Nous considérerons surtout les vérités théologiques les plus étroitement connexes au dogme sous les trois rubriques suivantes :


I. Conclusions relatives à l’être même de Jésus-Christ. —
II. Conclusions concernant les relations du Christ et du Père(col. 1332). —
III. Le Christ considéré dans ses relations avec les hommes (col. 1345).

I. Conclusions théologiques relatives a l’être même de Jésus-Christ. —

Ces conclusions se rapportent :
1° ù la personne divine qui s’est incarnée en Jésus-Christ et, sur ce point, elles oui été suffisamment exposées soit à Hypostatique (Union), t. vii, col. 518-519, soit surtout à Incarnation, col. 15111523 ;
2° à la nature humaine, considérée dans son union au Verbe, voir Hypostatique (Union), col. 519521, ou par rapport aux perfectionnements qui doivent, en suite de l’union, rejaillir sur elle-même ; c’est le point de vue qu’il nous faudra aborder ici ;
3° à l’union même des deux natures : on n’a rien à ajouter, de ce chef, au long exposé déjà Fait, Hyposi mne (Union >, col. 190-541 ;
4° aux formules à employer pour attriquer à Jésus-Christ, Dieu et Homme, les propriétés humaines et divines : c’est la communication des idiomes voir ce mot, t. vii, col. 595-602.

La sainte Écriture, surtout par la voix de saint Paul et de saint Jean, nous a laissé entrevoir les merveilles de la constitution et de la vie intime de l’Homme-Dieu, l’ius dune fois, les Pères onl rappelé ces enseignements et formulé leur propre doctrine. Mais c’est à la théologie catholique qu’il était réservé de préciser d’une façon définitive d’une part quelles perfections d’ordre naturel et surnaturel l’union hypostatique devait apporter soit au corps soit à l’âme du Sauveur, et, en conséquence, d’autre part, quels défauts, quelles faiblesses de la nature humaine encore, en Jésus-Christ, compatibles avec une perfection (col. 1327).

I. PERFECTIONS v VTVRBLLBS i ; r 8VRJ/ATORBLLB8 DU CORPS ET DB V i mi : VI Jl 3UB-CBRI8T, — 1° Le corps du Christ. Le Christ, avant sa résurrection, était à la fois voyageur et i compréhenseur. Par

son corps, il demeurait encore dans la voie ; par l’âme, il était déjà au terme. Il ne faut donc pas songer à attribuer au corps du Christ, avant la résurrection, les qualités glorieuses que le rejaillissement naturel de la gloire de l’âme aurait dû y produire. Mais toutes les qualités nécessaires à l’intégrité et à la perfection substantielle de ce corps, Jésus les a très certainement possédées : on ne comprendrait pas que celui qui fut le chef-d’œuvre de l’Esprit Saint ait été privé d’une seule perfection physique possible au corps humain. Tous les théologiens le supposent implicitement, en parlant des défauts naturels compatibles avec la perfection de l’union hypostatique. S. Thomas. Sum. theol., III*, q. xiv, a. 4 ; les sententiaires, t. III, dist. xv, et nommément S. Bonaventure, a. 1, q. i, u ; Richard de Middletown, q. n. m ; Durand de Saint-Pourçain, q. i, cités par Suarez, De incarnatione, disp. XXX II, sert, il, n. 2. De ce principe général, les théologiens déduisent deux conclusions. — 1. Il est certain, et Suarez, toc. cit., n. 7, note l’opinion contraire comme téméraire, que le Christ n’a pu connaître, dans son corps, la maladie ou l’indisposition sous quelque forme que ce soit. On ne saurait, en effet, dans le corps de II tomme-Dieu leur assigner une cause quelconque : malformation congénitale, intempérance, influences nocives de l’atmosphère ou des saisons. Suarez, loc. cit., Slentrup, De Ycrbo incarnalo, thèse lix. — b) Il est plus probable que le corps du Christ et particulièrement son visage ont eu la beauté physique en partage. S’appuyant sur Is., lui, 2, Clément d’Alexandrie, Pœdag., t. III, c. i ; Stromat., t. III, c. xvii, P. G., t. viii, col. 558 sq., 1208 ; Tertullien, De carne Christi, c. ix, P. L., t. ii, col. 779, ont affirmé la laideur du Christ, thèse reprise par Michel Médina, S. J., De recta in Deum ftde, 1. II. c. vu et surtout François Vavasseur, S. J., De forma Christi, Paris, 1649. Petau, De incarnatione, t. X, c. v, n. 22, fait iemarquer l’extrême faiblesse de cette base scripturaire : lsaïe, en effet, ne parle que du Christ souffrant au moment de sa passion et de sa mort. La thèse contraire a pour elle la plupart des Pères et des théologiens : on cite surtout saint Augustin, saint Jérôme, saint Chrysostomc, saint Bernard. Voir la réfutation de Vavasseur dans Stenlrup. op. cit., thèses i.x-i.xi. Cf. Janssens, Summa theologica, t. iv, Fribourg-cn-Brisgau, 1901, De speciosa forma corporis Christi, appendice, p. 505-520. L’opinion de saint Thomas est nettement formulée dans son commentaire In ps. vL/i, n. 2, Opéra, Parme, t. xiv, [). 32(i. Cf. s. Bonaventure, In IV Sent., 1. III. dist. XV a. 2 ; Suarez, De incarnatione, disp. XXXII, sert. n. n. 2-4 ; Salmanliccnscs, De incarnatione, disp. XXIV, n. Il ; Legrand, De incarnatione Verbi dii>ir)i, t. IX, c. ii, a. 5. concl 3. dans Migne, Cursus tlwologicus, t. i. Cf. Pesch, De Vcrbo incarnalo, n. 233 ; voir ci-dessus, col. 1 153.

Au sujet de la formation du corps du Christ, les anciens scolasliques. abandonnant leur théorie de l’animation médiate, voir ANIMATION, t. i, col. 1305 sq. affirment que le corps du Christ a été formé et animé dans le premier instant de sa conception. S. Thomas, Sum. theol., IIP, q. xxxiii, a. 1, 2. H est difficile, en effet, de ne pas en arriver à cette conclusion, si l’on accepte le dogme : Qui conceptus est de Spiritu sancto. Si Jésus n’avait pas été complet, parfait, comme homme, des le premier instant de sa conception, on ne pourrait, en toute vérité, le dire conçu du Saint-Esprit. Noir les Sententiaircs, I. III, dist. IIP Mais cette dérogation aux lois de la nature s’explique avec beaucoup de difficultés (dans l’hypol liése de l’animation normalement médiate). Cf. Suarez. De mi/steriis vitw Christi, disp. XI. sert, i. u. Dans l’hypothèse de l’animation Immédiate, il n’a aucune difficulté. Voir

AlNIM TlnN, col. 1319.