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Ignace, les décrets des Congrégations générales et les lettres ou ordonnances des Pères généraux, qui obligent les professeurs de la Compagnie à.suivre, en théologie, la doctrine de saint Thomas, et, en philosophie, celle d’Aii s tôte interprétée par l’Ange de l’Ecole. Toutes ces prescriptions, Léon XIII déclarait les confirmer de son autorité pontificale et leur donner le caractère de règle fixe, constante et définie. Non pas qu’il voulût, ajoutait-il, diminuer aucunement les grands mérites des écrivains que l’Ordre a produits ; « c’est là une gloire de famille qu’il faut maintenir et respecter ; » mais l’écueil serait que l’estime accordée à ces grands auteurs et rattachement a leurs écrits ne devinssent un obstacle, plutôt qu’une aide, pour l’unité de doctrine, qui doit venir de l’acceptation pratique de saint Thomas, comme docteur commun et propre. Il faut donc, en théologie, s’en tenir à l’enseignement de ce maître, même en matière d’opinions, quand il traite de la question ex professo et que sa pensée est certaine ; de même en philosophie, au moins dans les points principaux et liés avec plusieurs autres comme fondement, in præcipuis et quæ tanquam (undamentum sunt aliorum plurium, car il y a entre la doctrine théologique et philosophique du saint docteur une connexion si étroite, que l’une ne va pas sans l’autre.

Que Léon XI II n’ait nullement songé à trancher par ce bref les controverses relatives à la pensée du docteur angélique sur les sujets discutés entre les théologiens jésuites et les dominicains dans l’affaire De auxiliis et depuis lors, la chose ressort de ce que, rappelant et confirmant les prescriptions contenues dans les Constitutions de la Compagnie de Jésus, dans les décrets des Congrégations et dans les lettres ou ordonnances des Pères généraux, le souverain pontife n’excepte aucunement le décret d’Aquaviva ni ceux des Congrégations qui l’ont maintenu. En outre, parlant à la fin de celle lettre de l’enseignement donné à l’Université grégorienne, Léon XIII s’en déclare satisfait, lœtanwr oplatis jussisque nostris salis admodum esse factura ; or, c’est un fait de notoriété publique que l’enseignement donné à l’Université grégorienne comprend la doctrine officielle « le la Compagnie de Jésus sur la grâce et les matières connexes.

2° Conclusion : lu lettre du T. R. P. Ledôchowski, 1916. - Le bref qui vient d’être rappelé imposait aux professeurs de théologie, et surtout de philosophie, un examen de conscience sur leur fidélité pratique à suivre la doctrine île saint Thomas. Il pouvait avoir pour résultat de développer ou d’accentuer, chez quelques-uns la tendance à une adhésion plus stricte, que nous avons vu se manifester dès le

début de l’ordre par opposition à la tendance plus

large qui avait prévalu chez le plus grand nombre. La XXVI Congrégation générale réunie en 1915, énonça de sages recommandations à l’adresse de ions les professeurs. En traitant de questions controversées, ils doivent éviter soigneusement de censurer l’opinion contraire à la leur. Dans l’intérêt de la charité et de la Vérité et pour le plus grand bien de leurs élèves, ils ne doivent pas eonsacrer à ces sortes de

problèmes plus de temps que l’importance du sujet ne l’exige, mais se contenter plutôt d’exposer lo ment les diverses opinions avec leurs principaux fondements et d’indiquer avec modestie celles qu’ils estiment préférables ; mais il ne faut pas mettre au nombre des questions réputées libres dans les chaires de la Compagnie relies qui ont trait à la nature de la grâce et à la science moyenne, puisque, sur ces points. tou sont obligés, d’après les prescriptions de plusieurs généraux, d’enseigner la doctrine Boutenue au nom de la < ompagnie dans les Congrégations De auxiliis.

Dans le dessein de favoriser parmi les nôtres l’enseignentent et l’étude de la doctrine du docteur angélique, les Pères de la XXVIe Congrégation auraient désiré traiter plus longuement de ce sujet ; mais les événements politiques qui se produisirent alors ne leur en laissèrent pas le loisir.

Le R. P. Wladimir Ledôchowski compléta l’œuvre par sa lettre : De doctrina S. Thomæ magis magisque in Societate jovenda, datée du 8 décembre 1916, (19 mars 1917). Elle débute par un ample éloge de la scolastique, étudiée dans son développement historique, dans sa valeur intrinsèque et sous la lumière de l’expérience et d. s approbations que les souverains pontifes lui ont prodiguées : autant de titres qui s’appliquent plus particulièrement à la théologie et à la philosophie scolastiques telles qu’on les trouve chez celui qui a mérité le nom d’Ange de l’École et de prince des théologiens, et que Léon XIII a déclaré le patron des écoles catholiques du monde entier. Vient ensuite la partie doctrinale. Les prescriptions contenues dans les Constitutions, dans le Radio Sludiorum ancien ou nouveau et, dans les décrets des Congrégations générales, prescriptions confirmées et renouvelées par Léon XIII, concernent d’abord deux points fondamentaux : l’emploi de la méthode scolastique dans l’enseignement de la théologie dogmatique et la fidélité à suivre saint Thomas comme docteur propre. C’est dans le but de promouvoir toujours de plus en plus le second point, que des directions pratiques sont données à la fin de la lettre : lecture et étude approfondie, par les professeurs et par les étudiants, des écrits du saint docteur ; usage en classe de la Somme théologique comme texte, pour la partie scolastique de l’enseignement, avec emploi d’un autre texte pour la partie positive ; recommandation aux supérieurs de préparer des professeurs qui soient à la hauteur de la tâche, dans les circonstances actuelles, et en même temps réellement attachés à la doctrine de saint Thomas.

In troisième point avait besoin d’être précisé : dans quelles limites les professeurs de la Compagnie de Jésus sont-ils tenus d’adhérer à cette doctrine ? Deux affirmations résument la réponse à cette question : il y a obligation de suivre la doctrine de saint Thomas dans les points principaux, in omnibus enunliatis majoribus, ou, suivant la formule de Léon XIII, in ]>r : rcipuis ejus doctrinse capitibus, qute tanquam jundamenta siml muliorum plurium aliorum ; on est libre par rapport aux autres points, mais à la condition de rester dans la disposition de ne s’écarter du grand maître qu’à contre-cœur et très rarement, gravale admodum et rarissime. Mais qu’entendre par les enuntiala majora ? En premier lieu, l’ensemble des vérités rappelées par Pie X dans le Molli proprio : Doctoris A ngeliei, 29 juin 1914, « celles que les plus nobles philosophes et les principaux docteurs de l’Église ont acquises par leurs méditations et leurs i aisonnements touchant le mode propre de la connaissance humaine, la nature de Dieu et des autres êtres, l’ordre moral et la manière de tendre à notre fin dernière. i Vérités directement opposées aux assertions du matérialisme, du monisme, du panthéisme, du socialisme et du modernisme sous ses formes multiples. Pour aller plus loin, il faut tenir compte « le. plusieurs distinctions déjà rencontrées : il y a des doctrines que saint Thomas tient avec fermeté, des

questions qu’il a traitées expressément, <ic<lita opéra,

des affirmations qu’il appuie sur des arguments certains. Mais il v a aussi des points où sa pensée donne lieu a discussion, des questions qu’il n’a traitées qu’en passant, des assertions qui no sont fondées que sur des raisons probables et que d’autres docteurs de grande autorité rejettent ou contestent, ou du moins considèrent comme n’étant que d’une importance secon-