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chrétiens. Le protectorat franc avait on effet plus immédiat encore ; il amenait la fondation au mont des Oliviers d’un monastère latin, qui reprenait, à longue distance, la tradition inaugurée au même endroit, dès le iv siècle par Ru fin et Mélanic l’Ancienne. On pourra voir à l’art. Fiuoque, t. v, col. 2315, comment ce furent les usages liturgiques des moines francs qui amenèrent la fameuse controverse au sujet de l’introduction dans le symbole de Nicée-Constantinople de l’incise relative a la double procession de Saint-Esprit.

3° L'Église de Jérusalem et le schisme byzantin. — Dès le milieu du ixe siècle, l’empire carolingien n’est plus qu’un nom. Si les quêteurs de Jérusalem connaissent encore le chemin de l’Occident, c’est bien plutôt vers Byzance, dont la puissance se raffermit, que se tournent les regards des patriarches. Après le sanglant cauchemar que fut le règne du calife Hakem (10051020) c’est de Constantinople que l'Église hiérosolymitaine décimée par la persécution et les apostasies forcées, appauvrie par le pillage et la destruction de ses plus fameux sanctuaires, reçoit enfin un peu de réconfort. Les conventions conclues entre les califes fatimites et les empereurs Constantin VIII (1025-1028) et Michel IV (1034-1041) autorisent la réédification du Saint-Sépulcre, et permettent à tous les chrétiens convertis de force à l’Islam de retourner au christianisme. Dans ces conditions c’est sous les auspices de Constantin IX Monomaque (1042-1054) que se termine la restauration, hélas combien imparfaite ! des grands monuments de Jérusalem. Mais s’il ramena dans la Ville sainte un peu de sécurité et de prospérité, le protectorat byzantin devait avoir pour les destinées ultérieures de celle-ci les plus funestes conséquences. Depuis la conquête arabe, nous l’avons dit, les patriarches hiérosolymitains, soustraits de fait à l’emprise byzantine, avaient pu garder à 1 endroit de la vieille Rome, la déférence conforme à toutes les traditions de l’antiquité chrétienne. Si leur attitude dans l’affaire de Photius avait pu être indécise, elle ne faisait que refléter en somme les indécisions mêmes de la curie pontificale. Voir Jean VIII, col. 604. Les bons rapports entre Rome et les patriarcats orientaux melkites n’en avaient pas souffert. Maintenant qu’ils étaient retombés plus ou moins sous la coupe de Byzance, ces patriarcats allaient être amenés à épouser la querelle de la ville impériale avec Rome. En fait, bien que nous soyons assez mal renseignés sur la manière dont les choses se passèrent à Jérusalem il n’est que trop certain qu'à partir de 1054 la rupture fut consommée entre l'Église de saint Jacques et la Chaire de saint Pierre. L’union entre les deux sièges ne sera jamais rétablie que d’une façon tout instable et très passagère.

4° L'Église de Jérusalem et les croisades. Le patriarcat latin. — Toutefois la fondation du royaume latin de Jérusalem allait avoir pour conséquence la création d’un patriarcat organisé suivant le rite latin et beaucoup plus directement soumis à Rome que ne l’avait jamais été le patiiarcat melkite. Nous n’avons pas à étudier ici les causes qui ont amené le formidable mouvement des croisades, la façon dont furent conduites ces expéditions, l’organisation des états chrétiens qui, pendant près de deux siècles, se substituèrent plus ou moins complètement aux diverses dominations musulmanes. Qu’il suffise de rappeler, car le fait est d’importance pour la suite de l’histoire de Jérusalem, que la première croisade fut déclenchée par le fait que, dans la seconde moitié du xie siècle, les Turcs Seldjoucides substituent leur domination à celle des Arabes Fatimites. C’est entre les mains des Seldjoucides que tombe la ville sainte en 1078. Beaucoup plusVanatiques que les Arabes, les Turcs ne tardent

pus à rendre presque impossibles les pèlerinages en Terre sainte ; l’existence des établissements latins a Jérusalem, l’existence même du Saint-Sépulcre paraissent remises en question comme aux pires moments du règne de Hakerrl. C’est alors que l’idée de délivrer des mains infidèles le tombeau du Sauveur s’impose à l’Occident avec une force incroyable. La première croisade après des difficultés inouïes réussit à conquérir Jérusalem (15 juillet 1099) et fonde le royaume franc de Palestine. C’est le signal de la disparition temporaire du patriarcat grec. Le titulaire, Simon, vient de mourir dans l'île de Chypre où il s’est réfugié ; on lui élit immédiatement un successeur en la personne d’Arnoul de Rohez, chapelain de Robert Courte Heuse ; c’est le premier patriarche latin de Jérusalem. Des titulaires latins montent bientôt sur les sièges métropolilains (d’ailleurs autrement répartis qu'à l'époque grecque) de Tyr (antérieurement à Antioche), Césarée, Nazareth, Pétra ; et la latinisation gagne de proche en proche, jusqu’aux moindres bourgades. L’organisation du patriarcal latin, qui comprend la Palestine et Chypre, est sommairement décrite dans Lequien, op. cit., t. iii, p. 1269-1340 Chapitres de chanoines, couvents de religieux latins, ordres militaires, se fondent, richement dotés, pourvus sur place de revenus considérables, administrant à distance, dans la vieille Europe des propriétés plus considérables encore. Les rites et les usages latins remplacent partout ceux de Byzance. Il n’est pas jusqu'à l’architecture qui ne se transforme, et les maîtres maçons imbus des plus pures traditions romanes donnent aux édifices religieux de Jérusalem le cachet occidental que plusieurs, à commencer par le Saint-Sépulcre et le Cénacle, gardent encore aujourd’hui. On s’installait en Terre sainte d’une manière que l’on jugeait définitive, on faisait de la Palestine un prolongement de la féodalité occidentale. Toutes ces démarches pour latiniser les nouveaux États chrétiens eurent pour conséquence de créer dans l’esprit des grecs une haine pour les latins que rien n’effacera plus. Les grecs n’attendront plus que la chute, si facile à prévoir dès le début, des établissements francs pour reprendre à Jérusalem et dans la Palestine les places d’où ils avaient été évincés.

III. L'Église de Jérusalem depuis la fin des croisades. — 1° Rétablissement du patriarcat grec. — Depuis la mort de Siméon (1099) on n’avait pas songé à nommer de patriarche grec jusqu’en 1142. A cette date, en vertu d’un traité passé entre Manuel Comnène et le roi de Jérusalem, on prit l’habitude à Byzance de nommer un patriarche de Jérusalem, qui pendant quelque temps encore résidera dans la ville impériale ; c’est de là que vint le droit de nomination ou tout au moins de confirmation que s’attribue dorénavant le basileus relativement au patriarcat de Jérusalem. Cette innovation fut grosse de conséquences ; l'Église de saint Jacques, tendra bientôt à n'être plus qu’une province de l'Église byzantine dont elle suivra désormais toutes les évolutions religieuses.

Dès que les musulmans eurent, en 1187, repris possession de la Ville sainte, les titulaires grecs s’y transportèrent à nouveau. Par contre le patriarche latin, Héraclius, un assez triste personnage semble-t-il, cédait honteusement la place, accompagnant à Antioche les dernières forces de la puissance franque. En 1131 le patriarcat s’installait à Saint-Jean d’Acre que Richard Cœur de Lion et Philippe-Auguste venaient de reprendre aux Sarrasins. Jusqu’en 1291 où elle retombe aux mains des musulmans, cette place demeurera la résidence habituelle des patriarches latins, comme elle était celle des rois de Jérusalem. Quand en 1262 le patriarche Jacques Pantahon deviendra pape sous le nom d’Urbain IV, il réunira l’administration de Saint-. lean d’Acre au titre patriar-