Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 8.1.djvu/483

Cette page n’a pas encore été corrigée

947

    1. JÉRÔME (SAINT)##


JÉRÔME (SAINT). L’INERRANCE BIBLIQUE

au lecteur le soin de se prononcer. Prol. in Jerem.. P. L., t. xxiv, col. G80, 681. Voir ci-dessous Interprétation. Tel est le cas In Mich., v, 2, P. L., t. xxv, col. 1197 : Sunt autem qui asserunt, in omnibus pêne testimoniis quæ de Yeteri Testamento sumuntur istiusmodi esse errorem, ut aut ordo mutetur, aut verba, et interdum sensus quoque ipse diversus sit, vel apostolis vel evangelistis non ex libro curpentibus testimonia, sed mémorise credentibus, quæ nonnunquam jallitur. Ces lignes sont loin d’exprimer la pensée de Jérôme ; car il les oppose assez clairement, par les premiers mots : Sunt autem qui asserunt, à celles qui précèdent immédiatement, et dans celles-ci parlant à la première personne et énonçant son propre sentiment, il suppose que, si saint Matthieu, ii, 6, citant Michée, le fait inexactement, c’est qu’il a voulu nous présenter telle quelle la réponse des scribes, afin de montrer et de stigmatiser leur négligence en chose si importante : Arbitror Matthwum, rolentem arguere scribarum et sacerdotum erga divinæ Scripturæ lectionem negligentium, sic vlium posuisse. ut ab iis diclum est. Il ne pouvait d’ailleurs faire siennes les paroles rapportées ci-dessus sans se contredire ouvertement. En effet, In Mallh., xxviii, 9. 10, t. xxvi, col. 205, parlant encore en son nom propre, il écrit : Les évangélistes et les apôtres ont l’habitude de reproduire seulement les pensées de l’Ancien Testament, sans se soucier de la suite des mots ; evangelistarum et apostolorum more vulgalo, qui verborum or.dine prætermisso, sensus luntum de Veleri Testamento projerunt in excmplum.

Dans d’autres passages d’apparence plus ou moins énigmatique, v. g. In Jerem., xxviii, 10, 11, t. xxiv, col. 855, et In Gal., iii, 1, t. xxvi, col. 347, il s’agit uniquement de façons de parler particulières, c’est-à-dire de noms et d’expressions employés dans un sens détourné ou conventionnel, mais clair cependant, parce que l’usage vulgaire de tous les jours, verbum quotidianæ sermocinationis, le fait suffisamment connaître. Les exemples de cette catégorie sont assez nombreux ; nous aurons l’occasion d’y revenir bientôt.

Si on lit, In Ephes., iv, 21, t. xxvi. col. 507, qu’il n’y a eu vérité ni dans aucun des patriarches, ni dans aucun des prophètes, ni dans aucun des apôtres, mais seulement en Jésus, la véritable signification de cette phrase ressort du contexte immédiat ; l’opposition n’est point entre la vérité, d’une part, et l’erreur ou le mensonge, d’autre part, mais entre la science nécessairement bornée des organes ou interprètes de la révélation et la science sans limites de Celui qui, comme personne divine, est la vérité substantielle et absolue.

Pour nier ou révoquer en doute la ferme et invariable conviction de Jérôme concernant l’inerrance de laIJil le, on a cru pouvoir faire état de sa lettre a Pammachius, De eplimo t/cnere inlerpretandi, Epist., j.vn. t. x.mi, col. 568-579. Assez étrange, en effet, est l’impression que produit tout d’abord la lecture de celle petite dissertation. L’auteur y énumère, on pourrait dire J étale, une assez longue série de difficultés exégétiques, de contradictions apparentes, et il le fait sans prendre le temps ou la peine de développer ou de justifier pour aucune une solution satisfaisante. Lu Matth., u. 6, la prédiction de la naissance du Messie a Bethléem, n’est d’accord ni avec le texte original de Mie lice ni avec les Septante ; Matth.. xxvj, 31, les paroles de Zacharie ; percute pastorem sont

devenues : pcttutiiuii pastorem, t placées a tort dans la bouche de Dieu ; ibid., xwii. 9, le nom de Jérémic ligure a la place de celui deXacharic : Mare., i, 2.’l, a attribué a l iaïe un oracle dont la partie principale est lalachie, el il a aussi, ii, 26, rapporté au temps du grand prêtre Abiathar l’épisode des pains de propos ! tion, qui appartient au temps d’Abimélech ; suivant

la relation de Act., vu. le diacre Etienne aurait contredit

la Genèse notamment quant au lieu de sépulture d’Abraham, quant à celui des douze patriarche^ el quant aux noms du vendeur et de l’acheteur d’une grotte funéraire. Et Jérôme allonge encore cette énumération. Toutefois, en la poursuivant, il se défend expressément et a plusieurs reprises de vouloir accuser l’Kcriture d’erreur : i ce serait, dit-il, une impiété digne de Celse, de Porphyre et de Julien : hoc quippe impiurum est Celsi, Porphtjrii, Juliani, » loc. y cit., col. 575. Ensuite, parmi ces difficultés, il en est beaucoup qu’il examine ailleurs en détail, pour les résoudre de son mieux. Pourquoi donc ici semble-t-il les accumuler comme à plaisir, sans s’arrêter, contrairement à son habitude, à en proposer une explication un peu complète ? Sa façon de procéder est conditionnée par le but qu’il poursuit. U répond à Rufin, qui lui reprochait d’avoir traduit des textes trop librement ; et, à rencontre de son accusateur, il soutient qu’une bonne traduction ne doit être ni servile ni trop littérale. Pour le prouver, il entend tirer parti de l’exemple des apôtres et des évangélistes, qui citent et traduisent l’Ancien Testament en s’attachant uniquement au sens et en faisant bon marché des mots. Or, l’argument sera d’autant plus fort que les divergences se présenteront plus considérables. Voilà pourquoi il est instinctivement entraîné à y insister, au risque de paraître, cette fois, peu soucieux de la véracité des Écritures, qui lui est pourtant si chère, qu’il a affirmée et qu’il affirmera si péremptoirement, qu’en cent autres endroits il défend avec tant de vaillance et d’habileté. En opposant d’emblée à chaque objection la réplique qu’elle comporte, il nuirait à sa démonstration présente.

7° Saint Jérôme et la théorie dite des apparences historiques. — Les exégètes catholiques sont unanimes à reconnaître que saint Jérôme a toujours exclu de l’Écriture toute erreur formelle. Mais quelques-uns, parmi les plus actifs et les plus en vue, ont cru récemment trouver en lui un représentant de ce qu’on a appelé la théorie des apparences historiques.

L’origine et le sens de cette expression sont connus. La Bible parle parfois des phénomènes de la nature dans un langage métaphorique ou suivant les apparences sensibles, sans plus approfondir. C’est là une vérité universellement admise, en même temps qu’une règle d’exégèse appliquée dans l’Église depuis les origines. Léon XIII à la suite de saint Augustin et de saint Thomas, la solennellement affirmée dans l’encyclique l’roridentissimus Deus. « Dieu, dit-il, parlant aux hommes, a adapté son langage à leur intelligence et s’est exprimé à la manière humaine, i

On devine déjà comment, transportant cette doctrine du domaine des sciences naturelles à celui des sciences historiques, ce qu’une phrase de l’Encyclique semblait partiellement autoriser, un groupe Important d’exégètes contemporains en soit venu à imaginer que, sur ce terrain aussi, les écrivains inspires n’auraient considéré et raconté que les apparences ; et les apparences ici seraient les opinions et les appréciations populaires, mêmes fausses, soit consignées dans des monuments trompeurs, soit conservées et transmises oralement, s’il en était ainsi, un hagiographe resterall véridique en accueillant sans choix, en enregistrant simplement et sans plus les opinions et croyances erronées du vulgaire ; je dis : simplement et sans plus, c’est à dire sans les approuver explicitement, sans attester son adhésion personnelle, parce qu’alors il y aurait erreur formelle ; mais aussi [sans j contredire, sans en signaler la fausseté, parce que, dans ce cas. il ne s’en tiendrai ! plus aux appan il pénétrerait jusqu’à la réalité, pour la dévoiler.

Nous n’avons pas a discuter le fond de cette th<