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JÉRÉMIE. L’AVENIR MKSSIA NN loi I


phètes a’attendaieot pas, pour les temps messianiques, une brusque et complète disparition de l’économie ancienne, mais plutôt son perfectionnement. » Condamin, op. cil., p. 248. Cf. supra l’authenticité de xxxiii. 14-26. col.

Les nations associées au saint.

Si les nations

ne figurent pas au premier plan dans cette vision de la restauration messianique, si elles sont simplement invitées à connaître et à propager la nouvelle du salut d’Israël, xxxi, 10, dont le bonheur et la prospérité les effraieront, xxxiii, 9, celui qui, dès le début de son ministère, a été établi prophète des nations, i, 5 sait le sort qui leur est réservé. C’est le châtiment d’abord : i Prends de ma main cette coupe du vin de ma colère, dit lahvé, et fais-la boire à toutes les nations vers lesquelles je t’enverrai. Elles en boiront, elles chancelleront, elles seront prises de folie devant l’épée que j’enverrai au milieu d’elles, xxv, 15-16. »

Déjà commence à s’esquisser cette théorie qui tiendra une si grande place dans les documents postérieurs à l’exil et surtout dans la littérature apocalyptique et d’après laquelle l’humiliation des nations, considérées comme formant un bloc hostile à Dieu et à son peuple, constituera le premier acte dans le grand drame du salut d’Israël. » Touzard, loc. cit, . p. 25. Ceux-là surtout seront châtiés qui ont contribué au malheur d’Israël, xxx, 11, 16, 20, et la série des oracles contre les nations se complaît dans la description des maux qui les frapperont, xlvi-li. Mais là aussi surviendra le temps de la miséricorde : « A la fin des jours, je ramènerai les captifs de Moab, d’Ammon, d’Elam, xlviii, 47 ; xux, 6, 39. » Avec « les méchants voisins d’Israël », arrachés comme eux de leur sol par lahvé, ils reviendront chacun dans son héritage, xii, 14-15. Ils sont invités à apprendre les voies du peuple de Dieu, à jurer par le nom de lahvé et à prendre rang au milieu de ce peuple même, xii, 16. Avec toutes les nations, ils reconnaîtront la vanité de leurs idoles, des extrémités de la terre, tous viendront rendre hommage à la puissance de lahvé, xvi, 19-21 ; s’assembleront à Jérusalem, après avoir renoncé à l’obstination de leur cœur, iii, 17, et seront bénis en lahvé. iv, 2.

Le roi messianique.

A ces peuples revenus de

leurs égarements et réunis à Juda et à Éphraïm il faut un chef. Si lahvé reste le pasteur qui rassemble et garde son troupeau, xxxi, 10, fidèlement assujetti, xxx, ’.'. il partagera aussi ce soin avec des pasteurs selon son cœur, dont les qualités d’intelligence et de sagesse, iii, 15 assureront la garde vigilante du troupeau, désormais sans crainte et sans terreur, xxiii, 4. Au-dessus d’eux, à la fois chef, dominateur et roi de l’antique race de David, xxx, 21 ; xxiii, 5, étroitement uni à lahvé, un germe juste fera régner le droit et l’équité dans le pays, xxiii, 5, 15. Avant Jérémie, le prophète Isaïe, iv, 2, et après lui le prophète Zacharie, iii, 8 ; vi, 12, employaient ce même mot de germe pour désigner le Messie. Il méritera d’être appelé Yahweh-sidqênû, Iahvé-notre-justice, xxiii, 6. Les anciens voyaient dans cette dénomination une preuve de la divinité du Messie, puisqu’il y recevait le nom incommunicable de Dieu ; mais, selon l’interprétation généralement admise aujourd’hui, c’est le nom composé tout entier « Iahvé-notre-justice » qui est donné au Messie et non pas lahvé seul. Ce qui veut dire que par le Messie lahvé manifestera sa justice et fera triompher notre droit. I.a ville de Jérusalem elle-même n’est-elle pas d’ailleurs qualifiée elle aussi du même titre, xwm. 16 ? Cf. le nom d’Emmanuel dans Isaïe. mi. M. Knabenbauer, Commentarius in Jeremiam, p. 289-291. On a noté le rapprochement, sans doute intentionnel, du titre attribué au Messie et du nom du roi Sédécias : lahvé-ma-justice.

Pour compléter ces quelques rares indications relatives au Messie, il faut y joindre ce que dit le prophète de l’avenir glorieux de la capitale du futur royaume. Jérusalem, relevée de ses ruines, apparaîtra comme le trône de Jahvé. Plus n’est besoin désormais, pour manifester la présence divine, de l’arche d’alliance ; qu’elle vienne à disparaître et elle ne sera ni regrettée ni rétablie, ut, 16. Pour participer aux bénédictions dont Jérusalem est la source, on viendra à elle de toutes parts, non seulement les Israélites, mais toutes les nations, qui, connaissant la gloire de son nom, xxxiii. ! >, s’assembleront auprès du trône de lahvé, ni, 17 ; iv, 2.

Il convient d’ajouter que la personne même de Jérémie, dont la mémoire fut entourée d’une vénération de plus en plus grande par les Juifs, cf. II Macc, xv, 12-16 et Matth., xvi, 11, a été regardée dès l’antiquité chrétienne comme la figure de Jésus-Christ. Saint Jérôme, dans son commentaire sur le livre du prophète, faisait remarquer à propos du c. xxiii, 9 : Certe niillum puto sanctiorem esse Jeremia, qui virgo, prophela, sanctificatusque in utero, ipso nomine præ figurât Dominum salualorem. Jcremias enim interprctatur Domini excelsus. P. L., t. xxiv, col. 822. Dans l’interprétation messianique qu’il donne de xi, 18-20, Jérôme se fait l’écho de la tradition lorsqu’il dit : Omnium Ecclesiarum isle est consensus, ut sub persona Jeremiæ, a Christo hiec dici intelligant, quod ci Pater monstraverit, quomodo eum oporleat loqui, et ostenderit illi studio Judseorum, et ipse quasi agnus ductus ad viclimam, non aperuerit os suum… P. L., t. xxiv, col. 756. Bossuet dans ses Méditations sur V Évangile a relevé les nombreuses et frappantes ressemblances entre la passion du Sauveur et les souffrances de Jérémie. Cf. Meignan, Les Prophètes d’Israël et le Messie depuis Salomon jusqu’ex David, Paris, 1893, p. 490-502.

4° Discussion du texte XXXI, 22. — N’ayant point fait état du célèbre texte : Pemina circumdabil virum dans la description de l’avenir messianique, nous devons en établir le sens. Et d’abord les différents

textes. Hébreu : nao amon nzp : xisa ntr-jn n-irr s-o o « Car lahvé a créé une (chose) nouvelle sur la terre : une femme entourera un homme, » ce que saint Jérôme a traduit littéralement : Quia creavit Dominus novum super terram : Femina circumdabit virum. Le grec a une leçon très différente : Ôti Ix-nasv Kôpioç ocoT^pîav elç xaTaçûxeuaiv y.aivrjv, èv crcoTr ( pîa TrepieXeôaovTO’.i avôptoTTOt, au lieu de èv <T<oTv ; pîa du Vaticanus, le Sinuiticus porte si ; aa>T7jpixv et V Alexandrinus èv ?) acoT/jpîa, « Car le Seigneur a fait naître le salut en une plantation nouvelle, les hommes entoureront dans ou pour (leur) salut. » Ce sens est totalement différent de celui de l’hébreu et de la Vulgate, des mots sont traduits qui ne figurent pas dans le texte massorétique, toutefois ces particularités des Septante semblent provenir néanmoins de l’hébreu légèrement modifié. Cf. Condamin, Le texte de Jérémie, xxxi, 22, est-il messianique ? dans Revue biblique, 1897, p. 396397. Le syriaque, pour l’ensemble conforme à l’hébreu, dit : I. a f en : nie aimera tendrement (caressera) l’homme. » Le Targum enfin offre une glose intéressante : « Car voici : le Seigneur crée une (chose) nouvelle sur la terre et le peuple de la maison d’Israël s’attachera à la Loi. » 1.’hébreu aurait donc chance de reproduire la leçon primitive s’il n’y avait pas la difficulté, mais sérieuse, de l’interprétation des t rois derniers mots de son texte, traduits par saint Jérôme : Femina circumdabit virum. ux-ci, en effet, de par leur obscurité même, ont donné lieu aux explications les plus variées, surtout chez les commentateui s non catholiques. Cf. Condamin, loc. cit.. p. 398. Chez les catholiqu nombreux