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E

JÉRÉMIE, Al THENTICITÉ

récents, K. Marti, Duhm, Cornill, Kent, ce passage ne serait que la réponse d’une tradition tardive à la question de savoir quelle avait été l’attitude de Jérémie à l’égard « .Kla réforme deutéronomique. Ce qui le prouve c’est : l » le style, ’très inférieur à celui du prophète : 2° bon nombre de locutions et d’expressions empruntées au Deutéronome : 3° l’opposition surtout entre l’exhortation pressante à observer la loi écrite et renseignement ordinaire de Jérémie, particulièrement dans viii. 8 et ni. 10 ; le prophète en effet ne pouvait se contenter d’une réforme, qui. négligeant les dispositions morales, insistait seulement sur le côté extérieur de la religion.

Pour maintenir, avec la grande majorité des critiques d’ailleurs, l’authenticité au moins substantielle du passage incriminé, il suffit de remarquer que l’affinité de Jérémie avec le Deutéronome se retrouve en maints autres endroits, que Jer., viii, 8 reste d’une interprétation trop incertaine pour étayer une véritable démonstration et qu’enfin le livre de l’alliance, même réduit aux seuls chapitres qui auraient constitué le rouleau découvert dans le temple, ne méritait pas une telle aversion de la part de Jérémie ; cette loi bien au contraire devait plaire au prophète par « son monothéisme, son horreur pour l’idolâtrie, son humanitarisme ardent, sa haute moralité, sa détestation des abominations païennes, son exhortation à aimer Dieu de tout son cœur et à vivre en conséquence (Peake). » Cf. Condamin, op. cit., p. 105. Loin donc d’être une addition tardive les versets 1-8 du c. xi pourraient bien reproduire le plus ancien de tous les discours conservés dans le livre de Jérémie, se rapportant ainsi à l’époque de la réforme de 621. Gautier, Introduction à l’Ancien Testament, Lausanne, 1906, 1. 1, p. 476.

c) xvii, 19-27. — Exhortation à observer le sabbat. Depuis Kuenen et Stade, la majorité des critiques trouve cette exhortation bien surprenante de la part de Jérémie, qui nulle part ailleurs ne mentionne le sabbat et n’attache aucune importance à l’accomplissement des prescriptions rituelles et cérémonielles. Mais, indépendamment du style, tout à fait dans la manière du prophète, on veut bien le reconnaître, le silence absolu de Jérémie sur le sabbat, institution ancienne et importante en Israël, ne serait-il pas au moins aussi extraordinaire que cette unique mention ? Prétendre de plus que Jérémie condamne ou méprise les rites extérieurs, c’est mal interpréter les passages où le prophète en juge l’observation inutile ou même coupable si elle n’est accompagnée des sentiments d’une piété sincère. Quant à situer l’exhortation à un moment précis des 10 années du ministère de Jérémie, c’est chose assez difficile ; peut-être pourrait-on, avec assez de vraisemblance, la rapporter elle aussi, comme le passage précédent, à la réforme de Josias (voir Ordli).

d) xxv, 12-11. — Il s’agit de l’annonce de la captivité et de sa durée. Confinent admettre que Jérémie ait pu prédire, dès la quatrième année de Joakim, la chute de Babylone dans 70 ans ? Les préjugés dogmatiques qui se refusent à reconnaître la révélation dans l’oeuvre des prophètes ne sauraient évidemment enregistrer une si parfaite correspondance entre l’histoire et la prophétie. De tels préjugés cependant ne sont pas recevables non plus que la conclusion qui en découle. A noter seulement que le nombre de 70 n’es ! pas à entendre nécessairement dans un sens rigoureux, d’abord parce que les indications chronologiques de ce genre dans la Bible n’ont pas en général celle prétention et qu’assez souvent aussi ce nombre de 70 sert.i désigner une quantité assez considérable, ainsi dans JUd., i, 7 ; viii, il. 30 ; I I’eg., vi, l’.i ou il est question d’individus. De 605, date de la prophétie à 533 Bn de la captivité, le total des années est tout proche de

70, un peu moins si l’on compte seulement depuis la première déportation en 598.

L’authenticité de la donnée essentielle de ce passage étant ainsi maintenue, il ne s’ensuit pas que tout 3 soit primitif ; la fin du v. 13, par exemple : « ce que Jérémie a prophétisé sur toutes les nations, » n’est guère en situation dans un oracle du prophète lui-même. Il ne s’ensuit pas non plus qu’il soit à sa vraie place, car il rompt la suite des idées entre les f. Il et 15 et serait mieux à la suite des oracles contre Babylone, Jer., l-li. Les lacunes du texte grec confirment ces conclusions.

e) xxvii-xxix. — De ces chapitres, dont l’authenticité substantielle et la crédibilité n’ont pas à être mises en doute (contre Duhm et Schmidt) et dont certaines particularités orthographiques ont fait supposer l’existence séparée avant leur introduction dans le livre actuel, un passage surtout a été discuté : xxix, 16-20. Beaucoup le tiennent pour une interpolation ; non seulement il ne figure pas dans les Septante, mais encore il est sans lien avec le contexte dont il rompt la suite logique qui s’établit fort bien entre les versets 15 et 21. Pour résoudre ces difficultés qui sont réelles, sans sacrifier l’authenticité, on a recours à une simple transposition du texte ; voici celle que propose le P. Condamin : lire dans cet ordre le c. xxix : 1-9, 16-20, 10-15, 21, etc. ; la suite du sens s’établit ainsi : « Non seulement vous ne reviendrez pas bientôt de l’exil (4-9), mais ceux qui sont restés ici seront dispersés (16-20) ; au bout de soixante-dix ans seulement l’exil finira (10-14) ; quant aux faux prophètes qui vous trompent, voici contre eux… (15, 21-23). » Op. cit., p. 209.

f) xxx-xxxi. — Inutile de souligner l’importance de ces chapitres au point de vue messianique, surtout de xxxi, 31-34. Leur authenticité a été l’objet de nombreuses discussions et de jugements fort divers. Deux questions se posent à leur sujet : Est-ce une œuvre homogène, ou bien à un noyau primitif plus ou moins considérable des interpolations sont-elles venues s’ajouter ? s’il n’y a qu’un seul auteur, cet auteur peut-il être Jérémie ? Pour répondre à la première question, il y a lieu de constater tout d’abord l’unité de sujet, de plan et de composition. Il s’agit dans le passage entier du retour du peuple hébreu de l’exil assyrien et babylonien ; la structure strophique de l’oracle dont le texte massorétique a presque complètement préservé la physionomie (léger déplacement de xxxi, 27-30 et rejet de xxx, 10-11, 23-24 ; xxxi, 35-37), atteste par la symétrie numérique, les répétitions de mots dans les strophes et la série régulière : strophe, antistrophe et strophe intermédiaire, la réalité et l’unité du poème ; on ne saurait par conséquent le disséquer en éléments primitifs et secondaires Cf. Condamin, op. cit., p. 233-237.

De quel auteur ce poème est-il l’œuvre ? A cause des notables ressemblances qu’il offre avec Isaïe, xl sq., ne serait-il pas de la même main qui écrivit la seconde partie du livre d’Isaïe (Movers, de Wette, Hrtzig) ? Pas nécessairement, car si les ressemblances sont indéniables, elles ne sont pas « telles qu’on ne. puisse les expliquer par une imitation voulue, quelques pures coïncidences ou surtout, par de simples réminiscences. . N’aurait-il pas en toul cas été composé longtemps après le commencement de l’exil, xxx. 12 11, et en Palestine, xxi, s, 21, donc pas par Jérémie dont Kséjour en Juda avant son départ pour l’É| lut de très courte durée, et qui de plus annonçait un exil de longue durée alors qu’il est ici question d’une

turation très prochaine, xxx, 21 -22 < Smen h telle interprétation des passages invoqués ne s’impose pas ; la certitude et l’étendue de la raine j sont plutôt affirmées que son accom it déjà loin tin ; de