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JEAN DE SAINT THOMAS — JEAN DE SALISBIKY


même que, dans l’ordre des sciences philosophiques, la critique se rattache à la métaphysique, (.urs. Theol., t. i, (j. i. th-p II, a. 12, n. 4 ; t. v, disp. XVI, a. 3, q. i et n ; la nature de la liberté divine, ibid., t. ii, disp IV, a. 3 sq. ; de l’essence de l’action immanente Curs. Phil., l’hil. Nat., I, q. xiv, a. 3 ; la connaissance réfléchie, Log., ii, q. xxiii, a. 3-4 ; la puissance obédientielle, Curs. Theol., t. viii, disp. XXIV, a. 1, dub.8, concl. 2 et sol. arg. ; la sanctification initiale de la sainte Vierge, où, après Ser. Capponi de Porrecta, il montre que saint Thomas est favorable à la doctrine de l’Immaculée Conception, Isag. ad Theol. D. Thomse, disp. II, a. 2. En morale, Jean de Saint-Thomas. défend le probabilisme, Curs. Theol., t. iv, disp. XII, a. 3, n. 4, avec modération d’ailleurs et sans verser dans les excès des casuistes. Enfin, avec une profondeur remarquable.et une pieuse suavité, il traite des dons du Saint-Esprit, en particulier du don de sagesse et d’intelligence : en cette matière, on peut dire qu’il est le théologien classique. Voici sur ce sujet ses principales conclusions : 1. Ceux qui s’exercent dans les vertus ordinaires ressemblent à des gens qui par leurs propres moyens et selon leurs propres efforts règlent leur marche ; mais ceux que meuvent les dons du Saint-Esprit, semblables à l’oiseau que soulève le souille du vent, sont portés pour ainsi dire dans la voie du Seigneur. Curs. Theol., t. v, disp. XVIII, a. 1, § 1, n. 8. — 2. Grâce aux dons du Saint-Esprit l’homme est passif sous la motion divine, mû plutôt qu’il ne se meut, ibid., § 2, n. 1 ; ces dons sont des dispositions, des habilus grâce auxquels l’intelligence et la volonté sont dociles a l’instinct de l’Esprit qui non seulement les meut, mais devient leur règle et la mesure de leur activité. Ibid., a. 2, n. 14. — 3. Celui-là seul connaît la douce inspiration et le murmure intérieur de l’Esprit, qui les a expérimentés au fond de son àme. Ibid., a. 1. § 1, n. 3. — 4. Le don d’intelligence nous procure une claire pénétration de l’harmonie et de la crédibilité de l’objet de la foi, en même temps qu’il nous permet d’en écarter les erreurs et les illusions des sens. Ibid., §2, n. 3. Cf. n. I, a. 2, sol. obj., n. 3, n. 25 ; a. 3, n. 11. La connaissance expérimentale tendant de soi à l’évidence, le don d’intelligence selon son constitutif formel est évident, ibid., § 2, n. 9 ; il tend à l’évidence

mystique et expérimentale. Ibid., n. 10. Cf. § 3, n. 2, 7.

— 5. La raison tonnelle de la connaissance des causes suprêmes par le don de sagesse est une certaine expérience de Dieu et des choses divines, dans une délectable et savoureuse appréhension, comme en un contact intime des choses spirituelles par l’âme ; par cette union, l’âme devient comme connaturclle aux choses divines, et les discerne îles créatures par un certain goût intérieur. Ibid.. a. I. § I, 11.5.- 6. La contemplation est un acte éminent et spirituel de l’intelligence par lequel nous sommes unis à Dieu ; elle est donc proprement l’acte du don de sagesse, par lequel l’esprit de l’homme, éclairé par l’expérience savoureuse des choses divines, devient docile à la lumière de l’Esprit, pour jouer divinement des choses divines. Comp. tôt. duel., part. II. c. xii. de oratione, § 1. —

7. Par la contemplation, l’âme est établie et fixée en Dieu, se délectant en tout ce qu’elle perçoit, toute transformée spirituellement. Ibid. 8. La contemplation se fait de deux manières : soit par une connaissance Infuse, soit par noire propre effort. Par une lumière infuse, quand l’intelligence se sent illuminée par une clarté inaccoutumée et inconnue jusqu’aloi sons une nolion bois de son pouvoir, en même temps que la volonté se dilate en une affection profonde

qu’elle ne saurait expliquer. C’est alors la réalisation

de la parole de saint Jean : Non necesse habeiis ut

aliquis doceai vos, sed sicui unclio ejus docet rus… Ibid.

Miiue particularité de la doctrine de Jean de

Saint-Thomas, il faut noter encore qu’il place le constitutif formel de la déité dans l’intellection actuelle de Dieu par lui-même, In 1, q. xiv, 1. 1, disp. XV I, a. 2 ; mais cette opinion est communément rejetée par les thomistes.

Le style de Jean de Saint-Thomas est clair et simple. quoique souvent dilTus ; dans ses questions quodlibétales, on retrouve les défauts littéraires du temps.

En somme, on peut s’en tenir au jugement de.Maître Cabcro, O. Cist. : Angelicam doctrinam exhaurire videtur Cursu isto. Censura lomi secundi. Aussi Jean de Saint-Thomas exerça-t-il une grande influence sur les théologiens thomistes postérieurs, Diaz, Guérivois, Goudin, Billuart, les Salmanticenses, Gonet, et Contenson, qui dit de lui : Angelicse doctrines sancti Thomse callentia et penetralione nulli seeundus. Theol. mentis, t. VII, diss. V, c. 1.

Didacus Ramirez, O. P., Vita Reverendissimi P. Joannis a S. Thoma, O. P., (preemissa t. i. Cursus theologici) ; Hechtermans, O. P., Ad Lectorem, dans la version latine du catéchisme : Echard, O. 1’., Synopsis oitm R. P. i’r. Joannis d.S. Thoma, en tête du t. vin du Curs. theol., édition de Paris, 1667 ; Quétif-Echard, Scriptores Urdinis Pradieatorum, t. il, p. 538-539 ; Touron, O. P., Histoire des hommes illustres de l’ordre de Saint-Dominique, Paris, 1743, t. v, p. 218-258 ; tiraveson, O.P., Historia ecclesiastica, Venise, 1760, t. viii, p. 197 ; N. Antonio. Bibliothcea Hispana nova, Madrid, 1783, t. i, p. 785 ; Biografia eclesiastica compléta, Madrid, 1857, t. xi, p. 472-477 ; Martlnez Vigil, O. P., La Orden de Predieiuiorcs, III part. : ensayo de una biblioleca de dominicos espafioles, Madrid, 1881, p. 377 ; Menendez y Pelayo, Historia de lus ideas esteticas en Espatla, Madrid, 1884, t. ii, p. 193-202 ; La Ciencia Espatiola, Madrid, 1888, 3° édit., t. ni : Inventario bibliografico de la ciencia espaiiola, p. 153, 193 ; Trapiello, T. O. 1°., Juan </<’.S’miln Tomâs g sus obras, Oviedo, 1889 ; Année dominicaine, juin 1893, p. 358365 ; I lui ter, .Xornenclalor, 3’édit., t. iii, col. 915 ; Bel Iran de Heredia, O.P., La enseflanza de santo Tomâs en la l’niversidad de Alcalâ, dans Ciencia Tomista, t. xiv, p. 267 sq. ; Getino, o. P., Dominicos espafioles con/esores de lièges, Ibid.,

p. 1.11-153.

J. M. Ramirez.

69. JEAN DE SALISBURY. auteur ecclé

siastique et évêque de Chartres, (xiie siècle) I Vie.

— Jean de Salisbury, en latin Joannes de Saresberia ou Sarcsberiensis, est quelquefois désigné aussi sous le nom de Jean le Petit, conformément à ce qu’il écrivait en parlant de lui-même : parvum nominc. facultate minorent, minimum meriio. (Episl., car, P. /… l. exax, col. 221). Q naquit à Salisbury (OUI Siirum) ou dans le voisinage de cette cité, probablement entre les années 1115 et ll’id. Il raconte lui-même, Polycralicus, ii, 28, P. L., ibid col. 471, qu’il fut cou lié, étant enfant, a un prêtre qui devait lui apprendre les psaumes, que ce prêtre pratiquait la magie et voulut l’employer comme instrument de certaines expériences, mais qu’il fut trouvé inapte a cet office : ce dont Jean remerciait plus lard le Seigneur. C’est le seul détail que nous ayons sur sa première enfance. Il était bien jeune encore quand il commença ses études a Paris en 1130 : tout d’abord il suivit les leçons d’Abélard, le péripatéticien palatin, connue il le désigne. Metàlogtcus, n, 10, P. L., ibid., col. 867. Un an plus tard le maître ayant quitté sa chaire, Jean passa du noininalisme au réalisme exagéré sous Allicric île Porta Yeneris : c’est ainsi qu’il désigne son nouveau maître, on pense cpi’il l du futur archidiacre de Reims. Episl., e.xi.m, P. L., ibid., coi. 121, puis sous Robert de Melun, réaliste mitigé, promu plus tard à l’évêché de Hereford. Ce cours de dialectique pour Jean dura environ deux ans, de 1136 à 1138. Ensuite notre jeune étudiant prend les leçons de Guillaume de Couches, grammairien et philosophe renommé, à Chartres si nous en croyons c. Schaarschmidt, Johannes Saresberiensis naoh Leben und Sludien, Schriflen und Philosophie, Leipzig, 18C2, p. 24 ; il a encore pour autre maître Richard l’Evêque,