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il né simplement à l’ombre de son vieux château, sis entre Bazas et Langon de Roquetaillade ? Fodéré vante la noblesse et la puissance de sa parenté ; niais que vaut son témoignage ? Il le veut profès du couvent de Villefranche-en-Beaujolais, auquel il aurait fait don de sa seigneurie, quand lui-même disait être du couvent d’Aurillac en la custodie de Rodez, province d’Aquitaine Il a écrit, dans son traité de la Quintessence, qu’avant d’entrer chez les mineurs, il avait perdu plus de cinq ans « au désir et envie de philosophie mondaine en la très renommée étude de Toulouse, » et il ajoute qu’après sa profession, il en perdit encore plus en disputations vaincs, grand bruit de paroles, louanges, lectures de divers ailleurs. » C’est probablement quand il renonça a ces vanités qu’il reçut du ciel ce don d’interpréter les prophéties, qui lui valut la réputation de prophète. Prophète, il se défend bien de l’être, mais néanmoins il parle souvent de ses révélations et, pour confirmer ses pronostics, il rappelle que plusieurs se sont déjà réalisés. On lui rendait d’ailleurs ce témoignage et Froissart, son contemporain, le fait remarquer dans ses chroniques. Prophète ou non, Roquetaillade prétendait bien lire dans l’avenir et n’hésitait pas à annoncer, même à jour fixe, des événements futurs. Il se trompa souvent, ajoutons-le, par exemple quand il annonçait que, le 15 juillet 1362, les cardinaux s’enfuiraient d’Avignon. C’est que l’objet le plus fréquent de ses prophéties était les châtiments réservés à la cour romaine en punition des abus qui s’y commettaient. Il était venu à Avignon en 1349, « ad ilenunciandum et dicendum », aussi Clément VI l’avait jeté en prison. Déjà pareil désagrément lui était arrivé, quand il était encore dans sa province ; en 1345, écrit-il, Guillaume Farinier, son provincial et futur général de l’ordre, l’avait fait enfermer au couvent de Figeac. Il subit encore la même peine sous le pontificat d’Innocent VI (1352-1362). Duplessis-Mornay affirme, mais sans preuves, que ce prophète de malheur périt sur le bûcher. Fodéré le dit mort et enseveli dans le même couvent de Villefranche et Sbaraglia donne la date de 1362, sous le pontificat d’Urbain V, élu le 27 septembre, tandis que Torres Amat. après l’avoir envoyé comme missionnaire à Moscou, le fait revenir en Catalogne pour y mourir nonagénaire.

Roquetaillade occupait les loisirs de sa prison à écrire ses visions et ses révélations et aussi à étudier le Grand œuvre, dans le but, disait-il, de se rendre utile à l’Église romaine, quand elle aurait été dépouillée de ses biens. Il y composait aussi, toujours d’après des révélations, son traité sur les vertus et propriétés de la quintessence de toutes choses, afin d’apprendre aux pauvres du Christ et aux hommes évangéliques les moyens de se soigner à peu de frais et de prolonger leur existence. Faut-il dire que la première quintessence dont il préconise l’emploi, est celle qu’il nomme l’eau ardente, âme ou esprit du viii, ou eau-de-vie ? On trouve dans ce traité les remèdes les plus étranges, même contre les possessions, et ils n’ont rien de commun avec les exorcismes, qu’il mentionne cependant, si les autres ne réussissent pas.

On a de Roquetaillade, Visiones et revelationes, publiées, dit Sbaraglia, par Jean Ergon, ermite augustin, dans ses Compilationes valiciniorum. Une lettre à Guillaume de Curte, cardinal des Quatre-Saints-Couronnés, éditée par Edouard Brown dans l’Appendice au Fasciculus rerum expetendarum et /ugiendarum d’Orduin Græs, Londres, 1690, avec le Librunculus diclus Vade mecum in tribulaiione, composé en 1356, dans lequel il annonçait les événements qui devaient suivre Jusqu’en 1362. Dans cet ouvrage il fait mention de quelques-uns de ses autres écrits prophétiques, I.ibri quatuor de speculis temporum ; De resendionibus arcanorum Scriplurie sacrée ; Oslensor quod adesse jes DICT. !). llll’.ol.. CMIIOL.

| linanl tempora, et il qualifie ce dernier volumen | magnum ; il y indique aussi un Libellus quem intitulant : Ut non crubescanl detractoribus laudatorcs, adressé à son neveu maître Anselme. La Bibliothèque nationale de Paris possède en outre un Commentarium super propheliam Cyrilli eremitæ presbijleri de statu Jùrlesiæ. Le Liber lucis et le traité I~)c confectione veri lapidis philosophorum, qui se complètent l’un l’autre, furent souvent édités dans les recueils d’alchimie. Opus de consideratione quintx cssentiie omnium rerum, Bâle, 1561, 1597, traduit par Antoine du Moulin, La vertu et propriété de la Quinte Essence de toutes choses, Lyon, 1549, 1581. On lui attribue encore un commentaire inYI libros Sententiarum et un traité De famulatu philosophiæ ad theologiam seu Evangelium.

Froissart, Histoire et chronique, Paris, 1574, t. I, c. ccxj, t. III, c. xxiv ; Wadding, Annales minorum, ann. 1357, xvi-xxi ; Fodéré, Narration historique des convens de l’ordre de S. François, Lyon, 1619 ; Baluze, Vitm paparum Avenionensium, Paris, 1693 ; Bayle, Dictionnaire historique, Amsterdam, 1734 ; Tanner, Bibliotheca britannico-hibernica, Londres, 1748 ; Sbaraglia, Supplernentum ad scriptores ordinis minimum, Rome, 1806 ; Torres Amat, Mcmnrias… de los escritores Catalanes, Barcelone, 1836 ; Fabricius, Bibliotlieca latina mediæ et infimæ eetatis, Hambourg, 1735, t. VI, p. 366 ; Hurler, Momenclator, 3e éd., t. ii, col. 627.

P. Edouard d’Alençon.

66. JEAN DE RUSSIE, polémiste et canoniste grec de la fin du xie siècle. Originaire de Constantinople, il fut envoyé en Russie, en 1079, pour y recueillir la succession de Georges, métropolitain de Kiev, qui avait dû quitter le pays à la suite d’une révolution intérieure. Il mourut en 1089. Son œuvre littéraire, sans être considérable, ne manque pas d’intérêt. On a d’abord de lui, conservée en un grand nombre de copies, une Lettre à Clément pape de Rome. Il s’agit de l’antipape Clément III, Guibert (1080-1110), que l’empereur Henri IV avait opposé à Grégoire VII et qui avait essayé, pour augmenter son intluence, de nouer des relations avec les Églises d’Orient. Le métropolitain de Kiev répondit à ces ouvertures par une lettre où il reproduit, souvent dans les mêmes termes, les griefs de Photius, et surtout de Michel Cérulaire, contre les latins, chose d’autant plus aisée pour lui qu’il avait dû assister aux débats de 1053, qui avaient amené la consommation du schisme. Composé en grec, ce document fut traduit de bonne heure en vieux russe, et c’est en cette langue qu’il fut d’abord publié par K. Kalaïdovitch dans Monuments de la littérature au XIIe siècle (en russe), Moscou, 1821, p. 205-218, puis, avec l’orginal grec, par V. J. Grigorovitch, dans Mémoires scientifiques de l’Académie impériale des sciences (id.), S. Pélersbourg, 1854, t. i, 3e partie, p. 1-20, et par S. A. Pavlov dans sa recension du livre de A. Popov, Esquisse historiée-littéraire des anciens ouvrages polémiques contre les latins (id.), Moscou, 1875, parue dans Rapport sur la dix-neuvième adjudication du prix du comte Ouvarov, S. l’étersbourg, 1878, p. 355-373, et en tirage à part sous le titre : Essai critique sur l’histoire de l’ancienne polémique grécorusse contre les latins, ibid., p. 168-186. Il existe aussi une édi ion en grec seulement faite à l’aide de deux manuscrits dePatmospar Sophocle C. Œconomos, Toû ôolou rcxTpè ; ^(Lcôv’Icoâvvo’j [M)rpo7CoX(Tou’Pojac’aç èmaroX-J) 7vp6 ; KXT)(ievva r.y-.y.-i o>irc. Athènes, 1808, in-8°, xvi-18 p., avec une introduction qui sue par tous les pores la haine de l’Église catholique. Sigismond de Herberstcin a donné de la lettre une traduction peu fidèle dans ses Rerum Moskovilarum commentarii, Vienne, 1549, Bâle, 1551, Comentari délia Moscovia, Venise, 1550, fol. 19-21, et on en trouve un résumé, emprunté, sans le dire, à l’historien russe Macaire, dans le pasteur protestant L. Boissard, L’Église de Russie, Paris, 1867, t. n. p. 217 -220.

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