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JANSÉNISME, LE FORMULAIRE D’ALEXANDRE VII


n’ont rien eu de sincère et qu’elles ont été, en elïet, désavouées et par leurs discours et par leurs écrits qu’ils ont incessamment publiés. Recueil de bulks, p. 208-219.

Arnauld protesta encore par un Mémoire ou Remarque sur la Déclaration du Roi (mai 16C4). Œuvres, t. xxii, p. 525-543.

Afin d’apaiser les polémiques dans le diocèse de Paris, le nouvel archevêque, Hardouin de Péréflxe, successeur de Marca, publia le 7 juin un mandement pour la signature du formulaire : il déclare i qu’à moins d’être malicieux ou ignorant, on ne peut prendre sujet des constitutions des papes et du formulaire, de dire qu’ils désirent une soumission de foi divine pour ce qui regarde le fait, exigeant seulement pour ce regard une foi humaine et ecclésiastique qui oblige à soumit tic avec sincérité son jugement à celui des supérieurs légitimes. »

Ce fut l’occasion de nouvelles discussions. Nicole répondit à l’archevêque de Paris, par ses Lettres sur l’hérésie imaginaire.. Les trois premières (24 janvier, 1 er mars, 15 avril), étaient dirigées contre le P. Ferrier : mais la quatrième (15 juin), visait directement le mandement de Péréfixe et les six dernières Imaginaires (3 février, 25 juin, 12 juillet, 12 septembre, 25 septembre et 20 novembre 1605), faisaient de fréquentes allusions à ce mandement et à celui que le même prélat publiai t le 13 mai 1665. Nicole attaquait le mandement, d’une manière plus systématique, dans le Traité de la toi humaine, qui parut le 20 août 1664. Gerberon, op. cit., t. iii, p. 119-121. De son côté, Arnauld composa la Jugement équitable sur les contestations présentes pour éviter les jugements téméraires et criminels, tiré de saint Augustin (novembre 1664). Œuvres, t. xxii, p. 511-571.

La tactique des jansénistes rendait vain et illusoire le jugement de l’Église : les évêques de France, en obligeant tous les ecclésiastiques a signer un formulaire, avaient cru trouver le moyen de tout arrêter ; mais, comme le pape n’avait jamais fait allusion à cette signature, les jansénistes en conclurent que le pape désapprouvait les exigences des prélats français. Pour couper court à de semblables subterfuges, le roi, à la demande des évêques, écrivit au pape pour lui suggérer d’imposer la signature d’un formulaire. La bulle Regiminis apostolici du 15 février 1665 répondit à ce vœu ; elle édictait un formulaire, sensiblen. ut analogue à celui qu’avait imposé l’Assemblée du clergé de 1657. Toutefois, la dernière partie du formulaire de 1657 avait disparu, et l’on n’était plus tenu de jurer que « celle doctrine (de Jansénius) n’est point celle de saint Augustin, que Jansénius a mal expliquée contre le vrai sens de ce saint docteur. » I.e formulaire devait être signé dans les trois mois ; ce délai passé, des procès canoniques seraient intentés aux récalcitrants. Arnauld prolesta aussitôt contre cette bulle par trois Mémoires, où il défend les libertés de l’Église gallicane : après avoir fait sur la bulle elle-même 24 remarques (deux premiers Mémoires, Œuvres, t. xxii, p. 572-578), il. s’indigne cou Ire la défense d’expliquer ou de modifier la bulle d’Alexandre Il (mars 1665), Œuvres, t. xxii, p. 579-583, et comme cette bulle exigeait la signature avec serment, il publia le 1 er juillet 1665, la Lettre d’un docteur contre ce serment, ibid., p. 584-594.

Mais le roi fit enregistrer la bulle au Parlement le 29 avril 1665 : il défend de garder le livre de Jansénius et interdit à tous ses sujets « d’écrire, de composer, imprimer, vendre ou débiter directement ou indirectement, sous quelque nom ou litre que ce puisse èlre, aucun ouvrage, lettre ou écrits tendant à favoriser soutenir ou renouveler, en quelque manière que ce soit, la doctrine condamnée de.lanséiiius ou a con tredire ledit formulaire. » On devait signer « purement et simplement, sans user d’aucune distinction, interprétation ou restriction. »

Les jansénistes se divisèrent. Les rigides, convaincus que la souscription pure et simple entraînait le consentement interne et la condamnation de YAugustinus lui-même, affirmaient que le formulaire ne pouvait être signé sans mensonge et parjure par ceux qui n’étaient pas persuadés que la doctrine de Jansénius avait été condamnée ; ceux-ci devaient refuser de souscrire sans distinction du fait et du droit. Les autres, moins rigides, s’efforçaient de trouver un moyen de conserver à la fois leur conscience et leur tranquillité ; ils inventèrent divers systèmes qui, en réalité, difïèrent peu. Dans l’affaire présente, le droit et le fait sont essentiellement distincts, car l’Église pouvant se tromper dans la question de fait, elle n’avait pas le droit d’exiger une soumission interne au fait. Dès lors, la signature pure et simple du formulaire, sans distinction du fait et du droit, exigée par l’Église, ne peut en soi comprendre qu’une soumission interne relativement au dogme et au droit et seulement un respect externe pour le fait. Cela, disent-ils, vient, de l’aveu de tous, de la nature même du formulaire, en sorte que personne ne peut se tromper sur l’étendue et le caractère de la soumission accordée par ceux qui signent le formulaire. D’autres disent : la souscription du formulaire n’est que le témoignage du jugement porté par les papes et non point le signe d’un consentement donné à ce jugement qui peut être erroné en partie : celui qui signe reconnaît et témoigne extérieurement que les cinq propositions ont été condamnées par l’Église comme étant de Jansénius et renfermant le sens de Jansénius, mais il n’adhère point à ce jugement, en tant qu’il touche le fait de Jansénius. Il fait à peu près ce que fait le président d’un tribunal, lorsqu’il signe une sentence, qui, contre son avis personnel, a été portée par la majorité des suffrages : cette signature est le signe de la sentence portée par le tribunal, mais non point du consentement du président ou de la vérité de la sentence portée. D’autres enfin vont plus loin ; celui qui souscrit le formulaire déclare seulement que les cinq propositions ont été condamnées, non dans leur sens authentique et vrai, mais dans le sens supposé et estimé par les papes, qui, par une erreur de l’ait, ont cru les trouver dans le livre de Jansénius. Au témoignage d’Arnauld, Apologie pour les religieuses de Port-Royal, IVe partie, Préface, p. 1-4, le plus grand nombre des jansénistes s’appuie sur l’un ou l’autre de ces motifs : « c’est, dit-il, maintenant une opinion commune parmi les plus savantes communautés de l’Église et plusieurs autres théologiens que celle qui veut qu’on puisse ligner les faits sans les croire, i Mais les jansénistes austères s’indignent eont rc

une telle opinion qui leur paraît nettement entachée

de parjure.

Dans cette opposition à Rome et aux évêques, les religieuses de I’ort-Hoyal, dès le début, jouèrent un rôle de premier plan ; tout d’abord, elles gardèrent le silence, mais lorsqu’après l’assemblée de 1651, les évêques de France voulurent exiger une soumission absolue même au fait de Jansénius, il y eut des divisions parmi les jansénistes et ces divisions eurent u) écho à Port-Royal, tandis qu’Arnauld, Martin de Barcos et Nicole discutaient sur le fail de Jansénius et sur l’accord de l’evèquc d’Ypres avec saint Augustin et saint Thomas. Arnauld, Œuvres, t. xxii, p. 667-726.

Les mandements des vicaires généraux de Paris et les bulles d’Alexandre VU pour la soumission et la signature du formulaire provoquèrent de nouvelles divisions au sein du parti ; des écrits nombreux qui ne furent publiés que plus tard, en 1696, par Quesnel (Germain), dans la tradition de l’Église romaine sur