Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 8.1.djvu/19

Cette page n’a pas encore été corrigée

23

[S II.. Il ll RE - AL THENTICITÉ

pour le fond et pour la forme. Le stvle y est beaucoup plus simple, moins brillant et moins abondant ; la note pratique y domine. Au peuple qui se plaint des retarda du salut, le prophète répond que les crimes de chacun

en sont la cause, que l’observation des lois, divines est la condition de l’intervention libératrice de Jahvé. Le premier morceau, î.vi, 1-8, règle les conditions moyennant lesquelles les eunuques et les étrangers seront agréées au peuple de Jahvé. Le second, i.m. 9-L.vn, est essentiellement polémique ; il est terrible et menaçant. Il s’adresse d’abord aux différentes catégories de coupables, et se termine par un appel aux humbles et aux pieux à qui l’on promet les consolations et la paix. Le troisième morceau, î.vni, est une attaque contre le formalisme juif, dans le genre d’Isale, i. et île Jérémie, vu. Le chapitre UX nous présente un tableau analogue, l.e chapitre i.xiii. 1-0 décrit le jour de la vengeance de Jahvé, et la belle prière de lxiii. 7-i.xiv est un appel à la miséricorde de Dieu en faveur d’Israël. Les chapitres i.xv-i.xvi, cpii servent de péroraison à cette troisième section, n’offrent pas un développement très logique. Les morceaux qui les composent sont assez mêles. Les deux idées principales sont : le châtiment des impies et le bonheur des fidèles. Le chapitre final présente des analogies frappantes avec le discours d’ouverture : il clôt dignement le livre d’Isale.

Telle est donc l’analyse sommaire du livre d’Isaïe. Les différents groupes et les éléments qui les composent ne sont pas disposés d’après leur succession chronologique. Quelques oracles sont dates, d’autres ne portent aucune Indication de temps. Parmi ces derniers, les uns trahissent leur époque par des allusions à des événements connus, d’autres ne peuvent être situés avec certitude. Il serait même possible que quelques-uns, ayant été retouchés par [sale lui-même, soient achevai ur deux époques. Un certain souci d’unité a cependant présidé à la formation des différents recueils. Dans la première partie, on a réuni les oracles relatifs à Juda, les prédictions concernant les nations, les prophéties eschatologiques, et dans la seconde partie, les tableaux de restauration. Y a-t-il aussi un plan d’ensemble ? De multiples tentatives ont ete faites pour le découvrir et le développer d’une façon logique à travers l*œuvre entière. Aucune n’apparaît satisfaisante. Saint Thomas a bien rendu l’idée dominante des deux grandes parties du livre d’Isaie en appelant la première, le livre des jugements divins et la seconde, le livre des consolations. 3° Authenticité.

Le travail d’analyse littéraire auquel on a soumis l’œuvre d’Isale lui un acheminement vers la négation de l’authenticité d’une grande partie du livre. En reconnaissant la diversil é de sujet, de but, de forme et de langage, on fui amené à révoquer eu

doute l’unité d’auteur. L’authenticité avait ete admise

sans contestation par la tradition Juiveet chrétienne

jusqu’au niov en âge, Pour la première lois, Ahcii-I’sra, mort en 1167, émit quelques doutes sur l’origine isaienne « les chapitres xl-lxvi. Du jene siècle à la fin du

xvim’, la question a sommeille. Mais depuis lois, (Ile a

éti très nettement poséeel très vivement discutée, on

a fait remarquer spirituellement que le livre avait eu a

subir, tout comme son auteur, le supplice de la scie, voir

même d’une scie de bois. Aujourd’hui, aux veux de

l’Immense majorité des critiques non catholiques, la

question de l’authenticité des chapitres xi i xvi ne.se

pose même plus. De même on écarte généralement de la première partie les oracles contre Babylone, xiii xiv, 23, xxi. 1 m ; les morceaux eschatologiques, xxiv xxvii ; xxxiv v ; les ehapit les hisl niques, xxwi xxxix. bref, les deux tiers du livre d’is.ue. Quelques

auteurs, plus radicaux, ne conservent guère à [sale que l.l il i lue pal I le de si s oracles, l’otir I llllllll et ses

partisan, ce n’est pas du livre d’Isale qu’il faut parler, mais plut" d’une bibliothèque Isalenne s’échelonnant

depuis le prophète du viue siècle jusqu’aux Asmonéens, et la rédaction définitive du recueil serait à placer dans les premières décades du dernier siècle avant notre ère.

Les exégètes catholiques reconnaissent volontiers, avec le cardinal Meignan, Les Prophètes d’Israël et le Messie, p. 259, qu’il n’est pas de foi que le fds d’Amos sait l’auteur de la deuxième partie d’Isaïe, et qu’on pourrait soutenir la thèse contraire sans encourir aucun reproche d’hétérodoxie, mais ils défendent encore, pour la plupart l’authenticité et l’unité d’auteur du livre d’Isaïe. Cependant, dans les dernières années, les solutions dites critiques avaient recruté un certain nombre d’adeptes parmi les catholiques. En 1908, la commission pontificale pour les études bibliques a rendu un décret favorable à l’authenticité et à l’unité d’auteur du livre d’Isaïe.

Il ne peut être question de discuter ici les diverses théories proposées par les critiques pour expliquer l’origine du livre d’Isaïe. Nous ne parlerons que des discussions qui présentent un certain caractère de sérieux ou de vraisemblance, et notre examen se bornera aux passages suivants : ii, 2-4 ; iv, 2-6 ; xi, 11-16 ; xii ; xm-xiv, 23 ; xv-xvi, 12 ; xix, 16-25 ; xx11 10 ; xxiii ; xxiv-xxvii ; xxxiii ; xxxiv-xxxv ; xxxvi, xxxixjxl-i.xvi. Nous étudierons sous deux rubriques différentes : 1. Les passages contestés de la première partie ; 2. La seconde partie du livre.

1. Passages contestés de la première partie.

a) ii, 24. — Dans cette brève prophétie messianique, le prophète annonce qu’aux derniers temps, le temple de Jahvé sera visible de loin, comme s’il était élevé sur une haute montagne. Toutes les nations se convertiront au culte du vrai Dieu. Jahvé leur dictera ses lois et les peuples ne se feront plus la guerre. De semblables perspectives se font jour en plusieurs autres passages d’Isaïe d’une authenticité incontestée, xi, 10 ; xviii, 7, etc. ; c’est bien à tort qu’on les déclarerait inauthentiques sous le prétexte gratuit que la conversion des nations n’apparaît chez les prophètes qu’après l’exil de Babylone. Mais ces versets d’Isaïe se retrouvent presque textuellement dans Michée IV, 1-5. La comparaison s’impose pour les versets 2-5 d’Isaïe et non seulement, comme on le dit d’ordinaire, pour 2-4 ; le ꝟ. 5 : « Maison de Jacob, venez, nous marcherons dans la lumière de Jahvé » fait pendant au f t 3 : « Les peuples diront : Venez, montons sur la montagne de Jahvé, vers la maison du Dieu de Jacob et il nous instruira dans ses voies et nous marcherons dans ses sentiers. » Il a aussi son correspondant dans Michée iv, 5 : « Et nous, nous marcherons au nom de Jahvé notre Dieu, toujours et à jamais. » On a fait remarquer que ces promesses messianiques étaient sans lien avec le contexte dans Isaïe, qu’elles occupaient une place plus satisfaisante dans Michée, que leur texte était en meilleur état dans Michée que dans Isaïe, que leur teneur était pluscomplète. Michée a un vers en plus qui appartient manifestement a ce morceau dans sa forme primitive : « Chacun habitera sous sa vigne et son figuier, sans qu’il y ait personne pour le troubler, car la bouche de Jahvé des armées a parle. » Plusieurs hypothèses ont été avancées pour expliquer la présence de cette prophétie dans Laie et dans Michée. La supposition d’un emprunt d’Isaïe a Miellée présente des difficultés chronologiques, (.elle d’un emprunt de Miellée à Isaïe paraît exclue par le fait que la teneur primitive du texte semble bien se rencontrer chez Michée. Nous avons déjà dit qu’il n’y avait aucun motif d’admettre une Interpolation postexilienne dans [sale et dans Michée. Le P. Condamin, Le livre (P/soie. p. 21. se rallie à l’hypothèse autrefois bien reçue : Lan et Michée ont adopté cet oracle existant déjà de leur temps, peut-être fragment d’une prophétie plus considérable. Pour faire disparaître l’incohérence du contexte dans Isaïe, il transpose ii, 2-5 après