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IMPOSITION DES MAINS


spirituelles. Dom de Puniet explique par cette tendance l’introduction de l’onction dans la consécration des évêques. Art. Consécration épiscopale, du Diclionnaire d’archéologie chrétienne, L. ni, col. 2.597-2598. On sait que l’onction des mains fut introduite à la même époque dans l’ordination des prêtres ; et telle était l’importance attribuée au nouveau rite que, en cas de réordination des simoniaques, il était le seul qu’on n’osât point renouveler. Cf. Saltet, Les réordinalions, p. 233. Dans l’administration de la confirmation, il n’y avait pas à introduire l’onction ; elle existait. C’est elle qui frappait le plus les yeux et qui exprimait le plus vivement l’effet à produire. Depuis longtemps, en effet, le baptême n’était plus suivi de la collation du Saint-Esprit. Cf. Bède, Vita S. Cutberli, 29, P. L., t. xciv, col. 769 ; lettre du pape Grégoire III à saint Boniface en 729, Jaffé, n. 2251 ; P. L., t. lxxxix, col. 584 ; concile de 796 sur les bords du Danube pour la région des Avares, Monumenta Germaniæ, Leges, sect. iii, Conc, t. ii, p. 172-176 ; conciles de Chalonsur-Saône en 813, can. 27, Mansi, Sacrorum Conciliorum nova et ampUssima collectio, Venise, 1757, t. XIV, col. 99 ; de Paris en 829, can. 27, 33, Mansi, op. cit. t. col. XIV, 556, 560. Alcuin dit que le moment le plus convenable pour la confirmation des baptisés de Pâques est le dimanche in Albis, Epist., lxxx, P. L-, t. c, col. 261 ; dans la province de Reims on la donnait le lundi de Pâques (note marginale d’un ms. de saint Zenon de Vérone publiée par Ballerini, P. L., t. XI, col. 492, note 1) ; c’est le Jour qu’indique aussi l’auteur de la Vie de saint Ulncli, évêque d’Augsbourg, Vita S. Udalrici, dans les Acta sanctorum ordinis S. Benedicti de Mabillon, ssec. v, p. 427. Magne, évêque de Sens, dit que la confirmation était conférée peractis omnibus baptismatis sacrameniis. De mysteriis baptisniiy P. L., t. eu, col. 984 ; Leidrade de Lyon, dit de même : poslea… post baptismum, De sacramento baplismi, 7, P. L., t. xax, col. 864 ; et Jonas, évêque d’Orléans, se plaint que, si certains nobles s’empressent de la recevoir, d’autres, au contraire, attendent longtemps ; quant à la masse des ignobiles, ils y attachent si peu d’importance qu’ils renvoient jusqu’à un âge avancé pour y songer. De inslitutione laicali, , l, P. L., t. cvi, col. 133. Lors donc que l’évêque procédait à la collation du Saint-Esprit, la cérémonie ne comportait plus que l’imposition des mains avec son oraison traditionnelle et l’onction individuelle du front. Il serait étrange que cette onction n’eût paru qu’un accessoire. Les formules bibliques patristiques, liturgiques étaient présentes à la mémoire, qui faisaient de l’onction visible le symbole de l’onction invisible du Saint-Esprit. On se répétait le chrismatis sacramentum de saint Augustin ; on se souvenait que saint Isidore nomme le saint chrême, comme type de sacramentum ; nous avons rappelé la solennité avec laquelle s’en faisait la consécration et la vénération dont il était l’objet, voir col. 1360 ; le pouvoir de le consacrer avait toujours été absolument réservé aux évêques ; comment l’onction faite avec ce chrême, et qui ne pouvait être faite que par l’évêque dans un sacrement réservé lui aussi à l’évêque, aurait-elle pu n’avoir qu’un rôle secondaire ? Avec la tradition on attribuait un effet spirituel à l’onction du chrême faite par le simple prêtre après le baptême. Voir, par exemple, Jessé d’Amiens : per unctionem sanctificatio Spiritus ad/i(6e/ur ; l’emprunt est fait à saint Isidore, Êp/s/o/a de baplismo, P. L., t. cv, col. 790 ; Leidrade de Lyon répète la même phrase de saint Isidore et, bloquant dans un même chapitre des textes de ïertullien, de saint Isidore, la lettre du pape saint Innocent et un sermon de saint Augustin, il termine ses longues explications sur les diverses manières dont se donne le Saint-Esprit : non soluni in baptismo, sed eliam post

baptismum… poslea, par un extrait de saint Augustin, Serm., ccxxvii, voir col. 1359, où le docteur d’Hippone ne vise que la chrismation postbaptismale. De sacramento baptismi, vii, P. L., t. xcix, col. 864-865. Théodulphe d’Orléans dit, au sujet de la chrismation et de sa signification traditionnelle : Hoc regnum et sacerdotium. et visibili chrismatis unguento per ministerium sacerdotum, et invisibili Spiritus Sancti gratia a Domino linitur. De ordine baptismi, 14, P. L., t. cv, col. 234. Raban Maur : Bene quidem baptismo continuatur chrismatis unctio, quia Spiritus Sanctus… per illud chrisma piee virtutis admistione sancti fical aredentés. De clericorum institutione, i, 28, P. L., t. cvii, col. 313. L’onction faite par le ministre propre et exclusif de la collation du Saint-Esprit pouvait-elle avoir moins d’importance et moins d’efïicacité ? Venant après l’imposition des mains, durant laquelle on demandait à Dieu d’envoyer le Saint-Esprit, elle devait être considérée comme en étant le symbole vrai et la cause réelle : Unctio chrismatis expressius signât rem sacramenti quam impositio manuum sine unctione, fait dire Schanz, Die Lehre von den heiligen Sacramenten. II, 2, § 24, p. 297, note 5, à Alexandre de Halès, texte que je n’ai pu retrouver dans les écrits de cet initiateur des grands docteurs scolastiques ; mais il exprime très certainement la pensée commune à tout le moyen âge : l’onction est le rite par excellence de la tradition du Saint-Esprit.

Mais alors, la donne-t-on deux fois aux baptisés ? Des deux onctions du prêtre et de l’évêque l’une ou l’autre fait double emploi. On voit bien la conséquence : tel s’en est fait une aime contre la hiérarchie ecclésiastique. L’auteur de VExegesis in psalmorum librum, attribuée à tort à Bède le Vénérable (sur l’auteur et la date de cet ouvrage, voir dom Morin dans la Revue bénédictine de 1894, p. 290 ; de 1908, p. 94, note 1, et de 1911, p. 330-340), en commentant le ps. xxvi, n’hésite pas à déclarer superflue celle cjui, dans la confirmation, accompagne l’imposition des mains ; le privilège qui la réserve aux évêques n’est qu’un trait de plus de leur arrogance : Scicndum autem quod illa unctio quæ per manuum impositionem ab episropis, quasi alia a duabus prædiclis (celle d’avant et celle d’après le baptême) et vulgo conflrmatio dicitur, eadem est cum secunda, propter arrogantiam tamen non concessa est singulis sacerdolibus, sicut et mulia alia. P. L., t. xciii, col. 614. Bède cependant, dans ses œuvres authentiques, avait retenu et reproduit l’explication de saint Augustin : il y a des elTusions multiples du Saint-Esprit, une en particulier qui correspond à la fois à l’incarnation du Fils de Dieu et à l’onction baptismale du chrétien, et une autre, dont saint Augustin avait dit ciu’elle est le perfectum donum Spiritus Sancti. Serm., lxxi, 12, 19, P. L., t. xxxviii, col. 455, que Bède appelle amplior ejusdem Spiritus Sancti gratia, et qui correspond, pour le Christ à la descente de la colombe au Jourdain, pour le chrétien à la cérémonie où preecipuc baptizati accipiunt Spiritum Sanctum. In Marci Evang. expositio, i, 1 ; In Lucas Evang. expositio, i, 3, P. L., t. xcii, col. 138, 359. Cf. S. Augustin, De Trinitate, xv, 26, 46. Leidrade de Lyon sait bien lui aussi que mullis modis datur Spiritus Sanctus. L’énumération qu’il en fait lui sert à répondre à ceux qui se demandent cur necesse sit poslea fieri impositionem manuum, alors que déjà le Saint-Esprit a pu seul sanctifier les eaux du baptême et assurer la rémission des péchés. De sacramento baptismi, ii, P. L., t. xcix, col. 864-865. Ainsi expliquet-il que le Saint-Esprit soit donné non solurn in baptismo sed etiam post baptisnmm. Mais il bloque si bien, encore une fois, dans ses explications, les textes de Tertullien, d’Innocent I", de saint Augustin concernant les uns la chrismation postbaptismale, les autres