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IRÉNÉE (SAINT)


l’homme opérée par le Christ. Mais un passage qui se rapporte bien à l’union hypostatique est celui, t. IV,

0. xxxiii, n. l, col. 1080, où Irénéedil que les prophètes, annonçant la naissance d’Emmanuel d’une Vierge, manifestaient tïjv ëvcoaiv toO Aôyou toû ©eoû repôç t6 7TXàcr(i, a aÙToû. Cf. Théodoret, Eranisles, Dialogus 11, Inconfusus, P. G., t. Lxxxiii, col. 172. Le même mot,

t. III, c. xviii, n. 7, col. 937 : Hierere ilaque fecit et iidunivit, î^vwæv, hominem Deo, s’entend de l’union de l’homme à Dieu par la grâce. Bref, Irénée ne nous donne pas la formule de l’union hypostatique ; mais il nous en donne la doctrine.

Irénée est étranger au kénotisme que G. Thomasius, Chrisd Persan und Werk, 2e édit., Erlangen, 1857, et d’autres théologiens protestants ont cru découvrir dans saint Paul et les anciens Pères. Il dit, t. III, c. XIX, n. 3, *col. 941, que le Christ fut homme pour être tenté, Verbe pour être glorifié, requiescente (YjCRixâî^ovT’oç) quidem Verbo ut possel tentari, et inhonorari, et crucifigi et mori. Si le Verbe » se repose », ce n’est pas qu’en devenant vrai homme il ait cessé d'être ce qu’il était ou qu’il ait abdiqué de façon temporaire ses attributs divins ; c’est qu’il a pris une nature humaine véritable, donc capable de souffrance et de tentation, invisibilis uisibilis factus, et incomprehensihilis factus comprehensibilis, et impassibilis passibilis, et Verbumhomo. L. III, c. xvi, n. 6, col. 925-926. C’est f[u’il s’accommode à notre faiblesse et cache sa gloire que nous ne pourrions supporter. L. IV, c. xxviii, n. 1-2, col. 1105-1107. Cf. Loofs, art. Kenosis, dans la Realencyklopadie, 3^ édit., Leipzig, 1901, t. x, p. 252.

2' Le Verbe rédempteur. — Les gnostiques ont formé un rêve de rédemption. Ils avaient l’idée « qu’il y a dans le cosmos, notamment chez certains hommes, un principe divin. Cette étincelle divine est comme une étrangère ici-bas. Elle s’est égarée dans un monde de ténèbres. Le problème est de savoir comment elle pourra remonter aux régions supérieures d’où elle est venue. La rédemption consistera dans le retour à Dieu, » retour non pas simplement individuel, mais aussi cosmique. E. de Paye, Gnostiques et gnosticisme, p. 433-434 ; cf. p. 45-46, 62, 67-78, 106, 139-146, 163164, 217-218, 239-240. Irénée relève la théorie rédemptrice du gnosticisme. L. I, c. vi, n. 1-2 ; c. xiii, n. 6 ; c. XXI, col. 504-508, 588-589, 657-669. A la conception du gnosticisme il oppose la conception orthodoxe. Il y a donc à tenir compte de ses préoccupations de combat et du contraste qu’il vise à faire éclater entre le rédempteur des orthodoxes et celui des hérétiques pour comprendre la sotériologie d' Irénée. Cf. P. Galtier, La rédemption et les droits du démon dans saint Irénée, dans les Recherchts de science religieuse, Paris, 1911, t. II, p. 5sq. : J. YMy’ièTe, La doctrine de saint I renée sur le rôle du démon dans la rédemption, dans le Bulletin (l’ancienne littérature et d’archéologie chrétiennes, Paris, 1911, t. I, p. 178, 188. Mais la pensée de l'évêque de Lyon déborde cette polémique. Nulle part peut-être clic n’est si riche et si originale que dans cette question. Pour la saisir tout entière, voyons comment il envisage la rédemption du côté du Christ, du côté de l’homme, du côté de Dieu, du côté du démon.

1. Du côté du Christ.

La théologie de la rédemption s’est développée selon deux directions maîtresses. Les uns, surtout quelques Pères grecs, s’inspirant particulièrement de saint Jean, laissent la mort du Christ au second plan, insistent sur le mystère de l’incarnation et expliquent par la vertu du contact du Verbe divin avec la nature humaine la résurrection du genre humain ; sur ce fondement s'élève la théorie dite physique ou mystique de la rédemption. D’autres, surtout parmi les Latins, s’inspirant davantage de saint Paul, mettent l’accent plutôt sur la mort rédemptrice et sur le grand effort d’amour par lequel le Fils de Dieu s’est

livré pour nous et s’est acquis d’infinis mérites qu’il déverse sur le genre humain : d’où la théorie dite morale ou réaliste de la rédemption. Ces appellations ne sont pas également heureuses Peut-être serait-Il préférable de ne garder que l'épithète " mystique » pour la première, et « réaliste » pour la seconde théories. Les deux tendances coexistent dans Irénée. C’est à tort qu’A. RitschI, Die I.ehre von der Tiechtlertigung und Versôhnung, 3e édit., Bon-i, 1889, l. i, p. 7, a prétendu qu' Irénée, d’accord avec ses prédécesseurs, ne voit dans le Christ que son rôle de docl eur et l’exemple qu’il donne. Parmi ceux qui ont adhéré aux idées de RitschI, P. Beuzart, Essai sur la théologie d' f renée, p. 93, 102, 104, 148, opposant l’incarnation à la rédemption, comme si la première n'était pas pour la seconde, dit qu' Irénée n’emploie pas souvent les mots rcdemplio et redimere et qu’ils sont loin de sa pensée, qu’il « n’attache pas indissolublement à la personne de Jésus-Christ la notion de salut ou de rédemption. »

a) La théorie mystique de la rédemption. — Pourquoi le Verbe de Dieu s’est-il incarné? Les réponses d' Irénée se ramènent à quatre formules. — a. Il s’est incarné pournous, pour l’homme, pour les hommes. L. I, c. ix, n. 3 ; t. III, t. XVII, n. 4 ; c. xix, n. 1 ; t. IV, c. xxii, n. 2, col. 541, 544, 931, 939, 1047 ; Dem. c. xxxi, p. 683. —

b. Il s’est incarné pour nous unir à Dieu, factus est quod sumus nos uti nos perficerct esse quod est ipse, I. V, prief., col. 1120 ; ad hoc utethomo fieret plias Dei, I. III,

c. X, n. 2, col. 873 ; ut et homo fieret particeps Dei, I. IV, c. xxviii, n. 1, col. 1062 ; quomodo homo transiet in Deum si non Deus in hominem ? t. IV, c. xxxiii, n. 4, col. 1074 ; ut adoptionem percipiamus, I. III, c. xvi, n. 3 ; c. xviii, n. 7 ; c. xix, n. l, col. 922, 937, 939, etc. ; ut quod perdideramus in Adam, id est secundum imaginem et similitudincm esse Dei, hoc in Christo Jesu reciperemus, t. III, c. xviii, n. l, col. 932, etc. ; Dem., c. XXII, xcvii, p. 676, 729 ; pour offrir à son P-^re eum hominem qui fuerat inventus, primitias resurrectionis hominis in semetipso faciens, l. Ill.c. xix, n. 3, col. 941 ; in adunitionem et communionem Dei et hominis, l. V, c. I, n. 1, col. 1121 ; ut nos colligeret in sinum Patris, t. V, c. II, n. 1, col. 1124 ; nobis donans eam quæ est ad factorcm nostrum convcrsationcm et subjectionem, I. V, c. XVII, n. 1, col. 1169 ; ut finem conjungerct principio, id est hominem Deo, I. IV, c. xx, n. 2, col. 1033 ; omnibus restituens eam quæ est ad Deum communionem, t. III, c. xviii, n. 7, col. 937 ; Dem., c. vi, xxxi, xl, xcvii, p. 664, 683, 689, 729 ; pour enlever à l’homme son ignorance et lui donner la connaissance de ce qui est de Dieu, t. III, c. xvi, n. 4 ; t. IV, c. vi, n. 5-7 ; c. viiix ; t. V, c. i, n. 1, col. 923, 989-998, 1119-1121 ; ut assuesceret hominem percipere Deum et assuesceret Deum habilare in homine, t. III, c. xx, n. 2, col. 944 ; hominibus quidem ostendens Deum, Deo autem exhibens hominem, . IV, c. xx, n. 7, col. 1037 ; pour nous rendre l’ami ié de Dieu, oportuerat enim mediatorem Dei et hominum, per suam ad utrosque domesticitalem, in amicitiam et concordiam utrosque reducere, et facere ut et Deus assumerct hominem et homo se dederet Deo, t. iii, c. xviii, n. 7, col. 937 ; pour nous réconcilier avec Dieu, t. V, c. xiv, n. 3, col. 1162-1163 ; ukpretiosus homo fiât Patri, I. V, c. xvi, n. 2, col. 1167 ; pour notre ascension quæ est ad Dominum, t. III, c. xix, n. 1, col. 939 ; pour nous donner la vie, nous montrer la vie, la vie éternelle, l’incorruptibilité, l’immortalité, t. III, c. XIX, n. 1 ; c. xxiii, n. 1, 7 ; t. IV, c. x, n. 2, c. xx, n. 2, 5 ; 1. V. c. i, n. 1, col. 938, 939, 960, 964-965, 1001, 1033, 1035, 1121 ; Dem., c. xxxi, xl, p. 683, 689 ; pour nous donner l’héritage, t. IV, c. xxi, n. 3 ; c. xxii, n. 1 ; c. XXVI, n. 1, col. 1046, 1053 ; pour nous donner la vision béatiflque, t. IV, c. xx, n. 4-11, col. 1034-1041 ; pour que, apponens semetipsum caput Ecclesiæ, uni-