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INSPIRATION DE L’ECRITURE


Sa phrase n’est pas une transition ; c’est une recommandation, p. 7-18. Cette recommandation a des points d’attache dans la tradition ecclésiastique. Les Pères, il est vrai ont affirmé unanimement et sans aucune hésitation que la Bible ne contenait aucune erreur, mais ils ne la considéraient pas comme livre d’histoire ; ils la considéraient comme livre inspiré, qui contenait un enseignement divin. Ils n’admettaient pas qu’une erreur fût imputal^le à l’écrivain sacré et à Dieu ; mais ils ne se souciaient pas au même degré d’établir la réalité des faits scientifiques ou historiques, énoncés par les auteurs sacrés sous les apparences extérieures, pourvu que l’écart entre les faits et leur expression put être justifié. Plusieurs recouraient à l’allégoiisme. Le principe libérateur fut posé par saint.Jérôme. Le problème en ilTet, est celui-ci : Élant donnée la véracité de l’Écriture, comment faut-il expliquer certains phénomènes bibliques ? S’il n’y a pas d’erreur formelle, y a-t-il erreur matérielle ? S’il y a erreur matérielle, quelle explication peut-on en donner ? Saint Jérôme a déclaré que certains faits étaient racontés seciindum opinionem multorum vulgi illius temporis, il a dit qu’en rapportant l’opinion d’autrui, on n’en fait pas nécessairement son opinion personnelle ; c’est la loi de l’histoire. La chronologie est-elle inspirée. Liltera occidil. dit saint Jérôme. Les chiffres n’ont pas une exactitude diplomatique. Parfois un nom a été mis pour un autre, etc., p. 12-GO. Au sujet de l’histoire antérieure à Abraham, le P. Lagrange affirmait l’inerraiice de la Bible, non celle des écrivains sacrés. Il ne lui importait pas de savoir ce que ces écrivains croyaient en leur particulier, il importe seulement de constater ce qu’ils enseignent, ce qu’ils affirment. Très souvent, le iilus souvent, la réalité des faits énoncés sert de base à l’histoire religieuse. Mais le contraire peut être vrai, dans les paraboles et les allégories, par exemple. D’autres fois, le rapport des faits avec l’enseignement peut être très éloigné et très général. Il faudra voir si l’auteur a attaché une importance décisive à la réalité des faits. Comment juger de son intention ? Nous le croirons quand il voudra être cru, mais ne supposons pas toujours qu’il veut être cru. Nous jugerons qu’il veut être cru, lorsqu’il raconte un fait qui va directement à son thème, un fait dont la réalité sert de base à son enseignement, un fait grave dont on savait qu’il avait pu être attesté, transmis, surtout s’il s’agit d’un fait révélé, car ce sont ces faits que l’écrivain a à cœur. Il ne veut pas être cru sur les faits, quand il expose une parabole, raconte une histoire édifiante ou prophétique. Il laisse au lecteur ù juger, quand il s’agit de faits, dont tout le monde sait qu’ils se perdent dans la nuit des temps, ou qu’il emprunte à l’opinion commune sans la garantir autrement. Ce canon objectif adopté, nous n’avons pas à sonder le plus ou moins de crédulité naturelle de l’auteur. Encore une fois, ce qui importe ce n’est pas ce qu’il a cru, mais ce qu’il a voulu que nous crussions. Il peut arriver cependant par suite de certaines façons de son style, que nous constations clairement qu’il était, pour son compte, dans l’erreur, mais dans une erreur, que, grâce à l’inspiration, il ne nous a pas enseignée formellement. Cela paraît tout à fait élémentaire, p. 68-70. L’exégète peut donc constater, dans la Bible, des erreurs purement matérielles, que les écrivains sacrés ont laissées sans les corriger, mais qu’ils n’ont pas enseignées. Dom Sanders, de son côté, répondit au P. Delattre, nous l’avons déjà constaté, col. 22 18, que saint Jérôme tout en reconnaissant que les auteurs inspirés parlaient parfois, ordinairement même, selon les opinions du temps, pensait qu’ils n’avaient cependant jamais commis d’erreur. Revue biblique, 190.5, p. 284-287. Le saint docteur n’a donc pas partagé le sentiment

de quelques exégètes modernes. Il leur a seulement fourni « le principe libérateur. » Reconnaître dans la Bible l’erreur matérielle mais non formelle, c’est affaire d’interprétation. L’interprétation nouvelle est-elle légitime, et le critère objectif, proposé par le P. Lagrange, est-il fondé ? Toute la question est là.

Dans un compte rendu de l’ouvrage du P. Fonck, le P. Lagrange est revenu encore, sur le sujet de l’inerrance biblique. Les Pères et Léon XIII dans son encyclique ont affirmé la vérité ou la véracité de l’Écriture comme une conséquence de l’in-spiration. Cette affirmation doctrinale s’impose à tous et pour sa part, le P. Lagrange se refuse à distinguer théoriquement entre les dogmes et les faits. Il ne restreint donc pas l’inspiration ni le champ de la véracité qui est la conséquence logique de l’inspiration. « Plus la véracité de l’Écriture est entière dans le sens de l’étendue, plus il importe de préciser les cas où il peut vraiment être question de vérité ou de véracité, c’est-à-dire où Dieu par l’écrivain sacré nous enseigne quelque chose. Et cet enseignement doit toujours être jugé d’après le caractère même de l’ouvrage qu’il s’agit d’interpréter. Car, si l’on parle spéculativement et dogmatiquement de la véracité de l’Écriture, il ne peut être question d’une vérité particulière y contenue sans qu’on entre nécessairement dans la sphère de l’interprétation. » C’est sur ce principe que se sont appuyés les prétendus novateurs. Il est sans doute conditionné aux genres littéraires par exemple, légendes ou traditions populaires rapportées. Or, la tradition des Pères n’est pas à invoquer pour l’interprétation de l’Écriture. Il faut donc toujours distinguer entre l’affirination traditionnelle de la véracité de l’Écriture et l’interprétation de celle-ci. « La décision pontificale n’empêche pas plus de rcconnaitre en fait une tradition populaire non enseignée qu’un énoncé scientifique ne correspondant pas à la réalité des faits. » La vérité entière de l’Écriture, c’est la vérité formelle. Il est permis, en respectant cette vérité, de se demander si tout ce qui paraît être de l’histoire est bien de l’histoire. Sur ce point l’interprétation des Pères, même unanime, ne s’impose pas, à moins qu’un dogme ne soit en jeu. Revue biblique, 190(5, p. 151-153. Puisque sur les faits historiques, les écrivains sacrés n’ont pas reçu de révélation, ils ont donc été réduits aux traditions hébraïques ; celles-ci, peuvent-elles prétendre à représenter exactement les faits depuis.Adam pour le fond et pour les détails ? P. 156. Il est difficile de le pensc-r. L’erreur peut donc se rencontrer en elles, mais elle n’est que matérielle ; elle n’est pas formelle, puisqu’en les rapportant les écrivains sacrés n’ont rien voulu enseigner. Si liberté est laissée aux exégètes catholiques de choisir entre les interprétations des Pères et même d’en proposer une nouvelle, si l’histoire biblique n’est pas complète ni parfaite, est-il loisible de l’interpréter de façon à laisser place à des erreurs, même purement matérielles, dans les textes authentiques de la Bible ?

M. J. Gôtsberger, professeur à Munich, dit son sentiment sur la polémique dans un article intitulé en français : « Autour de la question biblique », quoiqu’il fut rédigé en allemand dans la Biblische Zeitsclirift, Fribourg-en-Brisgau, 1905, t. iii, p. 225-250. Il traita de l’inerrance biblique en matière scientifique et historique. Pour donner aux hommes son enseignement. Dieu s’est accommodé aux idées du temps auquel il s’adressait. Depuis l’encyclique Providentissinius Deus, on ne peut plus contester que les écrivains sacrés ont décrit les phénomènes naturels d’après les apparences extérieures de sorte que leurs paroles ne seraient pas seulement justes relativement, mais qu’elles ne seraient pas justes au point de vue objectivement scientifique. Les exégète ; progrès-