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INSPIRATION DE L’ECRITURE


niques que les Écritures reçues, approuvées et conservées par l'Église catholique, ; savoir, tous les livres des deux Testaments. Mais, en raison d’une décrétale du pape Gélase, il se demande si les quatre grands conciles approuvés par l'Église et les opuscules des saints, que l'Église reçoit comme authentiques et approuve, ne doivent pas être joints à l'Écriture. Il répondparcette distinction : l'Églisereçoitet approuve les Écritures comme authentiques et comme divines et révélées par l’inspiration divine, tandis qu’elle n’accepte les autres Écritures que comme des œuvres d’invention humaine ; elle accorde plus d’autorité aux, premières qu’aux secondes. Ibid., c. iv, p. 41-43. Dans cet écrit de jeunesse, Pierre d’Ailly confondait donc encore l’inspiration de l'Écriture avec la révélation directe faite par Dieu.

Comme son maître, Pierre d’Ailly, Gerson déclare que le sens littéral de l'Écriture est le sens qu’a affirmé son auteur, le Saint-Esprit. Scriplura sacra in sni primaria expositione habuit homines erudilos non solum humana ratiocinatione vel studio, sed divina revelatione vel inspiratione Spiritus Sancti. Gerson le prouve par les textes déjà cités du Nouveau Testament. Contra heeresim de communione laiconim sub ulraqiie spccic. Traitant des vérités qu’il faut croire de nécessité de moyen, il les trouve dans l'Écriture. Constat autem qiiod canon Bibliæ lex est Dei per rcvelalionem habita, ciiJLis assertiones littérales inniluntur huic iinico litterali principio : omne revelatuin a Deo est verum, et qiiod Scriptura sacra divinitus est a Deo revelata, sic quod in omni sua parte est verbum Dei, quod transire non potest. Seul, le sens littéral de l'Écriture peut fournir un argument : Est enim sensus litteralis vere et proprie dictas illc, qucm Spiritus Sanctus principaliter intendebat. Declaratio verilatum, quæ credendx sunt de nccessitate salutis. La sixième règle, fixée par Gerson pour déterminer le sens littéral de l'Écriture, prend pour point de départ la révélation qui en fut faite par le Christ et les apôtres. De sensu litterali sacrx Scripturæ. L’inspiration est donc, pour lui encore, une révélation divine.

Un juif converti, Paul, devenu évêque de Burgos, déclare aussi qu’il faut interpréter l'Écriture dans le sens littéral, c’est-à-dire dans le sens voulu par son auteur qui est Dieu. Le sens littéral de n’importe quel écrit est le sens que l’auteur a voulu exprimer. Additio super prol. letll Lj/ran ;. Ailleurs, il expose deux prééminences des apôtres sur les prophètes de l’Ancien Testament. La première est que les prophètes n’ont eu le don de prophétie qu’en acte, et non en habitude. Pour chacune de leurs prophéties leurs intelligences avaient besoin d’une nouvelle révélation. Ils n’avaient donc pas Vhabitus de la pr phétie, car il est de la nature de Vhabitus d’en pouv. ir user quand on veut. Il semble, au contraire, que le don de prophétie fut conféré aux apôtres habitualitcr. En efl’et, ils n’avaient pas besoin, en chaque cas particulier, d’une nouvelle effusion du Saint-Esprit, parce que dans l’abondante effusion, du jour de la Pentecôte, ils avaient été instruits d’un seul coup de tout ce qui concernait la doctrine surnaturelle. Ils avaient comme une illumination habituelle per modum formie permanentis, dont ils usaient quand ils voulaient. I^a seconde prééminence de la prophétie des apôtres sur celle des prophètes de l’Ancien Testament est que le don prophétique de ces derniers ne fut qu’une grâce gratis data, tandis que le don prophétique des apôtres fut une grâce gratum faciens, ou une grâce qui dérivait toujours de la grâce sanctifiante. On pense, en elTet, communément, qu’après avoir été confirmés en grâce, les apôtres ont conservé tous les dons charismatiques, donc le don de prophétie. Additio 2' in prologum Lyrani super Psallerium.

Ludolphe le Chartreux pensait aussi que les apôtres étaient inspirés dans toutes leurs paroles, qui ne procédaient pas de leur génie seulement, mais de la grâce du Saint-Esprit, car l’Esprit du Père parlait en eux, et, de même que des instruments de musique rendent les mélodies que veut celui qui les touche, ainsi le bien que le prédicateur de l'Évangile énonçait, était selon la volonté du Père qui l’inspirait. De la sorte Dieu a donné la dignité de prophète aux apôtres qui parlaient par l’Esprit de Dieu. Vita Christi, part. I, c. lu. Les prophéties sont des grâces gratuites, accordées principalement pour l’utilité commune de l'Église et rarement pour l’utilité d’un particulier. Par suite, Dieu a pu nous les donner parfois par des impies et des méchants. Ibid., part. I, c. xl.

Le carme Michel Aiguan admet deux causes efficientes du Psautier : l’une principale, qui est Dieu luimême, et l’autre instrumentale, qui fut David ou les autres psalmistes. Or David est le plus excellent des prophètes, parce que sa prophétie lui fut révélée par Dieu de la manière la plus excellente. Les prophètes ont reçu la révélation de cinq manières différentes : par des actes, par des paroles, par vision, en songe et par la seule inspiration du Saint-Esprit, sans aucun moyen extérieur d’acte, de parole, de vision ou de songe. L’exégète donne des exemples de ces cinq modes de révélation. Dans le cinquième mode, le Saint-Esprit lui-même illumine le cœur et révèle les choses obscures. C’est de cette manière que le psautier a été révélé à David, à savoir par l’instinct de l’Esprit Saint, sans aucun aide extérieur. Comment, in psalmos Dauidicos, prolog. Au sujet du ps. xliv, le commentateur dit que le cœur du prophète, rempli de l’esprit prophétique, a prononcé ce discours que le Saint-Esprit lui avait appris intérieurement. L’Esprit est donc la cause efficiente principale de ce psaume. Or, de même que le calame est l’instrument du scribe et est mû par sa main, ainsi la langue des prophètes était un instrument mû par le Saint-Esprit. Celui-ci est donc le scribe, et le prophète son instrument. Et ce scribe écrit rapidement, parce que, pour écrire dans le cœur de quelqu’un, c’est-à-dire pour l’instruire, le Saint-Esprit n’a pas besoin de temps, mais il illumine rapidement et subitement les intelligences qu’il touche. In ps. XLI V.

L’exi gète théologien, Alphonse Tostat, parle fréquemment de finspiration de l'Écriture et il a exposé en divers passages de ses commentaires, une doctrine complète du sujet. Toutes les Écritures des deux Testaments sont de Dieu. In Matth. Elles sont fœuvre des prophètes, même celles du Nouveau Testament, parce que les évangélistes et les apôtres, en recevant l’Esprit Saint, ont reçu le don de prophétie. In I Reg., c. xviii, q. XXVI. Elles ont donc toutes la même certitude et la même vérité. In lib. Regum, præf., q. vu. Le livre des Juges, bien que n'étant qu’un livre historique, doit être mis au nombre des Écritures, parce qu’il a été écrit par un prophète In lib. Jud., prfef., ^ q. II. Or, les prophètes ont dit ce que l’Esprit leur dictait. In Mutlh. Le Saint-Esprit seul aurait pu ajouter quelque chose aux Livres saints, qui ont été écrits sous sa dictée. In prol. I S. Hieroinjmi circa Evungelium Mutthœi, q. vu. Toute fautorité des Livres saints provient de ce que nous croyons fermement que leurs auteurs n’ont rien écrit de leur propre génie ; ils ont écrit seulement ce que le Saint-Esprit leur dictait ; ils ont été inspirés par Dieu pour écrire tout ce qu’ils ont écrit. Toute l'Écriture, que saint Pierre nomme prophétique, a donc été écrite par révélation du Saint-Esprit, c’est-à-dire par un concours spécial qu’il a eu avec chaque écrivain pour qu’il ne puisse errer. In Mutlh., pnef., q. ii. Dieu est donc le seul auteur de l'Écriture ; lui-même, en elïet, a révélé tout ce qu’elle