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doclriiie assez parliciilière, qu’il semble tenir île saiuL Augustin ; les âmes, comme tout l’ensemble de la création, ont été créées tontes ensemljle et dés le commencement thi monde. Dcus omnia sinml et stmel per materiam fecil, poslniodiim aiitem universd per speciem (listinxit. Ab initia igitur anitnie sunt creatte in invisibili maferia, (onnantur ciiilem quolidie per spccii-m et mitlnntur in corporum cfjUjicm. JCIiicidarium, /-". L., t. CLXxii, col. 1111. La preuve de l’immortalité de l'àme est simpliste : nous dierchons à faire vivre le plus lonf^temps possible notre souvenir dans la postérité. Cognilio vilse, c. v, P. L., t. xl, col. 1010. I, a théorie de la connaissance est à peine ébauchée chez Honorius, et le problème est loin d'être serré comme il le sera par les scolastiques du xiiie siècle ; au contraire, la question de la volonté, du libre arbitre, de SCS rapports avec l’action et la prescience divine, l’a grandement préoccupé. A trois reprises il y revient. L’Elucidariunt. qui à diverses fois reproduit les doctrines anselmiennes, se trouve, sur la question présente, entièrement indépendant de l’abbé du Rec. Honorius définit le libre arbitre la liberté. de choisir le bien et le mal. Ce libre arbitre, l’homme le possédait au paradis terrestre, mais à présent il est captif, car il ne veut plus le bien à moins que la grâce de Dieu ne le pré ienne, et il ne peut agir à moins que cette même grâce ne le soutienne. P. L., t. clxxii, col. 1135. Cette théorie par trop simpliste a été revisée dans la seconde édition de V Incvilabilc. Bien qu’il accentue fortement l’influence de la volonté divine sur l’activité humaine, Honorius en vient à une délinition du libre arbitre qui se rapproche complètement de celle d’Anselme. « Le libre arbitre, dit-il, est le pouvoir de garder la rectitude de la volonté, à cause de cette rectitude même. « Liberlas arbitrii est potestns servandi reclitudinem uolaniatis proplcr ipsam recliindinem. P. L., t. CLXXII, col. 1200. Déjà le traité De libero arbitrio avait insisté sur le caractère moral de la liberté. Ibid., col. 1224.

On voit par tout ce qui précède le nombre considérable de questions philosophiques soulevées par Honorius. Nul, à son époque, si ce n’est peut-être Abélard, n’en a autant posé. C’est au xiiie siècle qu’il appartiendra de donner à tant de problèmes une solution approchée.

Principales doctrines tlxéologiqucs.

La théologie

d’Honorius demeure tout aussi fragmentaire que sa philosophie. Beaucoup de points traités, mais sans ordre ni méthode ; l’auteur en est encore aux questions isolées de ses contemporains. L’cfîort qu’il fait pour établir une synthèse, dans V Elucidurium par exemple, n’aboutit pas encore à une construction systématique. Nous nous contenterons de rcleer les traits parLiculiers par lesquels sa théologie se distingue de celle de ses contemporains ou de ses successeurs.

Deux questions principales se posaient depuis un demi-siècle à la spéculation théologique. La première était relative à la création de l’homme et à la chute des anges. Une opinion tendait à prévaloir qui mettait un rapport étroit entre ces deux faits. Guillaume de Chtimpeaux, en particulier, avait soutenu que les hommes avaient été créés pour combler les vides produits dans le ciel et dans l'œuvre divine par la défection des mauvais anges. Saint Anselme s’ctidt élevé contre cette idée ; il avait fait remarquer que toute créature, si humble qu’elle puisse être, a une valeur en soi, parce qu’elle occupe la place qni lui est assignée dans la nature par le plan originel de Dieu. Faire de l’homme un remplaçant des anges, créé après coup pour réparer une déchirure arrivée au plan divin, c’est le rendre inférieur en dignité au dernier des vermisseaux. Honorius a fait sienne la pensée d’Anselme dans le Liber Xll quæstioniim : Homo non est pru iin (ji’lo, scd pro SI-Ipso crentus, utioquin majoris dignitatia lurmis esset, qui proprium habet, qiiam homo qui proprio loco careret. P. L., t. clxxii, col. 1180.

Mais sur un autre point Honorius se sépare nettement d’une solution cpi’Anselme avait popularisée dans le Cur Drus homo ? Personne, dans le christianisme, ne conteste qu’il y ait en fait une relation étroite entre l’incarnation du Fils de Dieu et la rédemption de l’humanité. Dans le haut moyen âge néaiunoins les théologiens dilléiaient d’avis sur un des asjjects, théoriques, si l’on peut dire, <lu m’stère de l’incarnation. Si l’homme n’avait pas péché, le Verbe se serait-il incarné'? Non évidemment, disaient ceux qui voyaient surtout dans l’incarnation le prélude de la rédemption et c'était toute l’idée du Cur Deus liomo ? X quoi d’autres répondaient que dans ces conditions l’on faisait du péché lui-même la cause de l’incarnation, ce qui n’est point admissible. Ils voyaient dans la divinisation de la nature humaine le but de l’apparition du P’ils de Dieu dans la chair. Même dans l’hypothèse oii l’homme n’eût pas péché. Dieu serait venu sur la terre pour élever l’homme plus complètement jusqu'à lui. La faute originelle a seulement changé les conditions de cette venue du Sauveur parmi nous. C’est tout à fait l’idée d’Honorijs, Liber viii quæslionum, c. ii, P. L., t. clxxii, col. 1187, et sur ce point encore il se montre le disciple fidèle de Scot Ériugêne.

Celle même inlhience explique l’attitude prise par Honorius dans certaines questions christologiques, où il s'écarte fortement de la doctrine classique, et dans son eschatologie, qui est dominée tout entière par les théories chères au philosophe de l'école palatine. Ce dernier avait fortement accentué le caractère spirituel du ciel et de l’enfer. Comment expliquer dès lors les passages du symbole oii il est question de la descente du Christ aux enfers, de son ascension corporelle dans le ciel ? Honorius s’est posé avec beaucoup de précision le problème, dans des textes publiés pour la première fois par Endres, Honorius Augustodunensis, p. 150154. La réponse relative à la descente du Christ aux enfers est curieuse seulement en ce qu’elle marque avec force le caractère exclusivement spirituel des sanctions d’outre-tombe. Mais la donnée traditionnelle de l’ascension du Christ soulevait une bien autre difficulté. Honorius n’hésite pas à dire que le corps glorifié du Christ s’est pour ainsi dire évanoui et résolu en la divinité, en sorte qu’il est, à présent, en dehors du temps et du lieu. Sicut ergo divinitas ubique est illocalitcr, ita et humanitas Ctiristi ubique est illocaliter. A morte quidem rcsurgens mortale corpus in spirilale, spiritale vero in deilatem sic convertit, ul aer in lucem convertitur, manente iamen propria substantia… Ascendens autem non aliquam partem aeris vel mtheris, vel ullo Ijujus corporci mundi loco rcsedit unde verUurus sit, sed in sublilitatemspirilualis corporis abiit, quod omnem locum et tempus excedil, p. 152. On reconnaît ici cette espèce de résolution cosmique dans le sein du grand tout qui est l’aboutissant du De diuisione natarse de Scot Êriug'-ne. Et ce même principe domine toute l’eschatologie d’Honorius. Ce qui fut vi’ai du corjis de Jésus après sa résurrection se réalisera un jour pour tous les hommes. Post ultimam namque rcsurrcctionem omnium hominum siue bonoriun, siue malorum corporu erunt spiritualia et nihil poslea corporale erit, cum Deus omnia in omnibus erit, ut lux in acre, ut ferrum in igné. Ibid., p. 152. Cf. Cognitio vilx, P. L., t. xl, col. 10291030. A côté de ces hardiesses les affirmations d’Honorius sur la spiritualité absolue des peines de l’enfer paraîtront de peu d’importance.

C’est probablement en fonction de cette théorie sur l’ubiquité du corps de Jésus ressuscité qu’il faut interpréter un passage curieux de V Eucharistion. Il s’agit